
riques de la fcience, une fimple anecdote que
quelques auteurs modernes oht relevée comme
une des bâfes fur lefquelles ils ont fait porter les
premiers points de T hiftoire des gaz. Quelque
degré de confiance qu’ôh lui attribue , il peut
être utile de le recueillir dans cet article , & il
eft néceflaire de le placer ici, relativement à
l’ordre chronologique. Monconys rapporte , dans
fon voyage d’Angleterre, qu’en allant, le 2' juin
1663 j rendre vifite au do&eur Keiffer , gendre du
fameux Drébel, chimifte très-connu par plufieurs
découvertes importantes , & qui habitoit la ville
de Stratforbon, à quatre milles de Londres, il y
avoir appris que Drebel avoit trouvé le fècret
de conferver l’air dans toute fa pureté, & de le
rendre toujours propre à la refpiration ; qu’il
croyoit que l’air contenoit une certaine quintef-
fence qui eft la feule propre à entretenir la
vie , fert à la refpiration, s’épuife dans un air
non renouvelle , & produit aimi la mort des animaux
qui refpirent trop long-temps le même air s
qu’il avoit enfin découvert le moyen de remédier
à cet épuifement de l’air par une liqueur qu'il
nommôit qhintejfence d 'a ir , & dont une goutte
répandue dans de l'air renfermé, gâté par la ref- \
piration, le rendoif'très-propre à être refpiré de '
nouveau , & fufceptible de faire éprouver la
fenfation agréable & vivifiante qu’on éprouve
lorsqu'on le tran (porte fur une belle colline. 11 faut convenir que cette a (Terri on de Monconys
pourroit faire croire que Drébel connôiffoit la
compofition de T air atmofphérique, qu'il l’avoit
analyfé prefque comme on l’a fait dans les temps
modernes, qu’il avoit apprécié affez exactement
fon influence dans la refpiration, & qu’il avoit
même découvert Tair vital, dont la quinteffence
d’air préfente une des principales propriétés. Il
eft vrai que cette quinteflfence étoit un liquide,
& qu’une goutte de cette liqueur précieufe fuf-
fifoit pour purifier & renouveller un grand volume
d’air gâté/ II faudroit croire , fi ce fait
étoit avéré , que Drébel avoit trouvé le moyen
de condenfer l’air vital dans un 'liquide qui le
laiflbit enfuite dégager promptement, & dans un
grand état de pureté par le feul contaCl de l’air.
Mais ce feroit aller beaucoup trop loin que de
fuppofer Texiftence d’une découverte fupérieure
même à celles qui exiftent aujourd’hui, dans un
temps où ni la méthode, ni les inftrumens h’exif-
toient point encore en phyfique 6c en chimie.
Il faut feulement voir dans le récit de Monconys
un énoncé allez clair, des idées alfez nettes & allez
exactes fur TaCtion de l’air dans la refpiration 5 mais
il n’offre vraiment aucune nouvelle découverte,
rien qui puiffe être rapporté aux expériences
modernes, au moins fous,le point de vue de l’art
expérimental, dont le perfectionnement, comme j
on le verra plus bas, de voit nécèffairement pré- I
céder & amener la création de la doCtrine nou- j
velle. On voit donc qu’entre Vanhelmont, Jean !
key & Boyle, dont nous allons parler, c#eft-à-
dire, dans une période d’environ cinquante ans ,
il n’y' a rien eu., de nouveau fur l’air & les
gaz.
Boyle eft un des hommes qui marque le plus
dans l’hiftoire des fciences ^ un des créateurs de
la phyfique expérimentale, & auteur d’une foule
d’expériences ingénieufes ; il a joint à ce premier
mérite celui de fe livrer aux recherches chimiques
, & de fe diftinguer par un affez grand nombre
de découvertes. Il ne doit être* queftion dans
cet article que des connoiffances qu’il avoit fur
les gaz , & qu’il a répandues dans fes ouvrages.
Le perfectionnement de quelques machines propres
à faire connoître les propriétés de l’air,
& particulièrement celle de la machine du vuide ,
inventée d’abord, par Otto de Gericke, ainfi
que d’une machine de comprefïion, lui donna
l’occafion de faire un grand nombre de rev
cherches & d’expériences fur ce fluide. Aufli.
publia-t-il un grand nombre d’ouvrages fur Tair >
les principaux qui ont trait à cet objet font :
i°. Ses expériences fur la pefanteur & Télafti-
cité de Tair, Expérimenta nova phyfico - mechanica.
de gravitate & elatere aeris. Anglice Oxonii , 1660,
in-8 °\ On y trouve une defeription exaCte de la
machine de Gericke perfectionnée par lui, des
recherches très-belles fur Télafticité & la conden-
fabilité de l’air, des remarques fur la refpiration.
C’eft d’après ce premier ouvrage que les phyfi-
cien^fe font fervis long-temps de Texpreflion de
vuide de Boyle , Vacuum Boyleanum , pour définir
la machine pneumatique.
2°. La défenfe de fa doCtrine fur la pefanteur
& Télafticité de Tair, contre les objections qu’on
y avoit faites ; à Londres, en 1663, in-8°.
30. La continuation de fés nouvelles expériences
fur le même objet 3 en anglois, à Oxone,
en 16 (3 9 , in -4 0 . Il décrit dans celui - ci cinquante
expériences nouvelles & confirmatives des
premières, fur le poids de Tatmofphère, contre
l'opinion de l’horreur du vuide, Src.
4 ° . Sur la raréfaCtion admirable & la conden-
fation de Tair ; en 1671, à Londres. L’air, fui-
vant l’auteur, peut fe dilater de forte qu’il occupe
13,769 fois Tefpace qu’il remplit ordinairement
3 il prouve que l’air, dans Tatmofphère, eft
toujours comprimé.
30. Nouvelles expériences fur le rapport de
Tair & de la flamme , Expérimenta nova de relatione
inter fiammam & aerem y Londres, 1672 , in- 8 °»
11 y fait voir qu’on ne peut ni produire, ni entretenir
la flamme fans air, que les animaux ne
peuvent vivre fans lui.
•é°. Sur la fubtilité & la nature comparée des
émanations diverfes ; de mirâ fubtilitate & ejficaciâ
Æuviorum & eorum determinatâ naturâ. L on d in i,
1673, On croiroit , en lifant cé titre,
qu'il doit traiter d’une grande partie des fluides
élaftiques, & contenir, fur-tout d’après ce que
nous avons vu de Vanhelmont, les apperçus au
moins de toutes les vérités qu’on a découvertes
depuis. On feroit cependant bien trompé. Cet
ouvrage contient beaucoup d’obfervations fur les
odeurs, fur la divifîbilité des corps 3 il y annonce
que chaque corps a fon effluve particulier, 8f en
eft entouré comme d’une atmofphère 5 on y
trouve cependant, répétée avec force, Taffertion
de l’augmentation de poids de prefque tous les,
métauk par le feu.
70. Doutes fur quelques qualités occultes de
Tair. Su/piciones circ'a occultas aeris qualitaies y
Oxon. ] 674, in -8 ° . Voici encore un ouvrage qui
fatisfait beaucoup moins que fon titre piquant
femble le promertre. Cependant il mérite d’être
lu avec attention 3 l’auteur foupçonne qu’outre
la pefanteur, Télafticité, la fluidité, il exifte dans
Tair quelques propriétés cachées & finguüères
pour entretenir la flamme des corps combuftibles
& la vie des animaux. C’eft en effet par ces deux
qualités caraétérïftiques que les phyfîciens les plus
modernes & les plus éclairés diftinguent Tair de
tous les autres fluides élaftiques. Il foutient aufli
que Tair eft la caufe de tous les changemens des
corps, mais cette affertion générale n’eft point
affez étayée de l’expérience. '
8°. Continuation de fes expériences phyfico-
mécaniques ftw Tair 3 Londres 4, 1681, i n - 8°.
11 y décrit de nouvelles recherchesfur la compref-
fion de Tair , qu’il parvint à pouffer plus loin
qu’il ne l’avoit fait encore avec la machine de
Papin 5 il le réduit au vingtième de fon volume;
il annonce que les animaux périffent dans le vide,
mais plus vite encore dans l‘air factice produit
par les corps en fermentation ou en putréra&ion 3,
il prouve qu’il ne s’établit ni putréfaction , ni
fermentation dans le vide, mais que ces deux
altérations font accélérées dans Tair comprimé.
Cet ouvrage eft un de ceux qui contiennent le
plus de faits & de vues fur l ’objet qui nous
occupe.
9°. Hiftoire générale de Tair. Londres, 1692,
*n~4°* C’eft un expofé dé toutes les propriétés
de Tair , diftribuées méthodiquement en chapitres^
& où il décrit avec foin fes propres
expériences & celles des autres phyficiens qu’il
a foigneufement recueillies 5 c’eft: un effai d’une
hiftoire naturelle de l’air, comme Bacon Tavoit
conçue ; il y-traite aufli de Tair faCtice 3 on y
trouve plufieurs titres vuides & des lacunes que
les découvertes modernes ont convenablement
remplies.
De tous les ouvrages de Boyle qui ont trait aux
propriétés des gaz , de toutes les expériences
qui y font décrites & des vues qui y font contenues
, on peut tirer les inductions fuivantes
fur ce qui tient à l'hiilorique de la fcience de
l'air. Boyle a reconnu comme Vanhelmont que
prefque tous, les végétaux plongés dans l’eau ,
laiffent échapper en fermentant beaucoup de
gaz qu’il nomme air artificiel : que cet air fe
dégage plus facilement dans le vuide que dans
l’air comprimé, que tout ce qui arrête la fermentation
j arrête aufli-le développement & le
dégagement de L’ air fa c iic e , que le vuide par-,
fait, comme l’efprit-de-vin, a cette propriété. Il
mit les corps en fermentation dans fon air artificiel
r & il trouva que dans quelques cas, cet
air favorifoit & augmentoit la fermentation ,
tandis que dans d’autres il la retardait ; il reconnut
comme l’avoit déjà fait Vanhelmont près -,
de quarante ans avant lui, que fi l’air de l’at-
mofphète étoit néceflaire à l'entretien de la vie
des animaux , ton air faétice la détruifoit avec
une grande activité. Il remarqua que l'air artificiel
n’étoit pas le même dans toutes les cir-
conftances de fa production, qu’il différait fui-
vant les corps divers d’où il fortoit, qu ainfi,
par exemple, celui qui fe dégage, de la poudre
à canon pendant fon inflammation préfente des
propriétés particulières. Ainfi , il n’étoit pas
éloigné de reconnoître les differentes efpéces
de gaz, de faifir ces qualités qui les diftinguent,
& de s'élever jufqu’à décrire leurs propriétés
caraCtériftiques. II. femble qu’il ait touché de
très-près la découverte de plufieurs des gaz reconnus
cent ans après fes p remiers effais , qu’il
ne lui ait manqué que des appareils convenables
8c une méthode d’opérer plus précife; on dirait
même qu’il eft fur le point de faifir la difpo-
fitien de ces appareils , à voir les reffources
que fes machines nouvelles lui ont préfentées :
& cependant , avèc la finefle de fon efprit *
la pertinacité de fon travail, la multiplicité de
fes expériences, la nouveauté ic la fupériorité
de fes machines fur celles qu’on avoit employées
avant lui, malgré les premières données que
Vanhelmont avoit offertes dans fes ouvrages, &
les idées neuves qu’elles avoient dû naturellement
infpirer à un phyficien aufli ingénieux que
Boyle & muni d’inftrumens aufli précieux on
eft étonné qu’il n’ait véritablement rien produit
d’aufli nouveau & d’auflî important qu’on
devoit s’y attendre. On peut même dire que
le plus grand nombre des découvertes qu’on a
l'habitude d’attribuer à Boyle appartiennent plutôt
à Vanhelmont, que le phyficien flamand a
pouffé beaucoup plus loin la théorie de l’air &
des gaz que le phyficien anglois. A la vérité,