
détourner en quelque forte de la route que l'expérience
lui traçoit. C'eft airtfi qu'il attribue aux
vapeurs acides entraînées en même-temps que
l'air fixe les effets produits dans les expériences
de Macbride j c'eft ainfi que les diffolutions
d'alcalis chargés d'air fixe , verfées dans l'eau de
chaux, lui paroiffent ne rien prouver pour ks
effets de l'air fixe, puifqu'on ne voit pas là d'air j
tandis que Black & Macbride avoient déjà fi bien,
-expliqué depuis plufieurs années la théorie fimple
de cette opération. On ne peut rien trouver de
plus pofitif que fa neuvième expérience, dans laquelle
il donne à l'efprit alcali volatil la propriété^
de faire effervefcence, & il trouble l'eau de chaux,
en les mettant & les agitant dans un marras qui
avoit reçu la vapeur dégagée pendant le mélange
d’efprit de vitriol & d’huile de tartre 5 & l'on, ne
conçoit pas comment il fe fert de cette expérience
même pour nier l'adtion de l ’air fixe, &
pour attribuer fes effets à la vapeur de l'efprit de
vitriol entraîné dans l'air ? comment cela le conduit
jufqu'à nier que l'air fixe fort introduit &
abforbë par les différens corps qu’on expofe à
fort Contaél. On ne pariera.point ici de l'opinion
de Machy fur l'abforption de l'air par la combuf-
tion du foufre, qu’il regarde comme une conver-
fion de l'air en eau, non plus que de celle.fur
les fluides éhftiques donnés par les corps mis en
diltillarion-qu'il croit provenir de l’eau contenue
dans ces corps ; opinion qu'il a cherché.à prouver.
par diverfes expériences faites fur l’éolipile. On
• voit bien de la vapeur, mais point d'air dans ces
expériences, qui d’ailleurs n'ont pas été faites
avec des précautions luffifantes pour s'aflurer de
li production d'air , <k auxquelles une foule de
decouvertes faites depuis répondent fufnfam-
ment.
Nous ne parlerons point ici de toutes les opinions
contraires à la doctrine de Black, Macbride;
& Jacquin, expofées dans un grand nombre d'ou-
Aràges, de mémoires & de differtations phyfiques
& chimiques , publiées depuis 1766 jufqu en
1772. Nous nous contenterons de remarquer,
i°. que l’ouvrage de Jacquin fit affez de fenfa-
tion pour que tous les antagonistes de la dcêtrine
qu’il défendoit, le comptaflfent parmi les auteurs^
de cette doétrinç qu'il s’étoit en effet rendue'
propre par la clarté & la méthode qu’il avoit
mi lé à l'expofer 5.2-. que tous ces auteurs n’ayant
point fait, ni .produit d’expériences, ni de faits-
véritablement contradictoires à ceux qui avoient
été trouvés- par ces trois célèbres, phyiîciens,
leurs objections fe, réduifcient toujours à la difficulté
qu'lis avoient à concevoir l'air privé de fcn
élafticité, fixé & folidifié. dans les corps ; 30. que;;
ceux qui adniettoient bien.âyec Eoyle,, Haies-,;
••;Ë.oerhaav.re , l'a«r,comb:né , & qui, d’après,cela,
jcoucevoient fon _ dégagement dans les anaiyfes ,
les co'.nbinaifons & les fermentations , comme la
fimpîe-reflitution de fon élafticité & de fon premier
volume, expliquoient les propriétés nouvelles
& différentes 'de > celles de ratmofphère
que l’on découvroit dans l’air fixe, par l’additio
& la fufpenfion de-quelqué.s corps étrangers, de
quelques matières en vapeur dan s "l’air , à.mefure
de fon dégagement. C ’eft ainfi que prefque tous
les chimiftes du temps indiqué, qui n'ont point
fenti l’avantage que" promettoit à la fcience la
découverte de l'air fixe, & qui n’ont point fait
d'expériences fur ce nouveau produit, ou qui
n’en ont fait qu'avec les préjugés de fon analogie
avec l’air, ont rendu compte, même dans les
ouvrages élémentaires & dans lès cours, des propriétés
& de la nature de l'air fixe ; l'on ne doit
pas ignorer que c'a été d'abord le plus grand
nombre des chitniftesv -
Tel étoit l’état des çhofes, lorfque deux fa-
vans phyficiens entreprirent fur l ’air fixe & fes
combinaifons une grande fuite d’expériences, qui
ranimèrent l’attention des favans, qui les engagèrent
à eonfidér.er cet objet avec le foin qu’il
exigeoit, & qui les1 déterminèrent prefque tous
à regarder l'air fixe comme une matière.réellement
diftinCte de l’air , ainfi qu’à admettre di-
verfés efpèces de fluides élaftiques auffi différens
’es uns des autres qu’ils le font de l’air atmof-
’ 3lie j à confidérer enfin, en généralifant
idées , la fluidité élaftique la forme de
air comme une formé générale qui pouvoit être
prife par un grand'nombre de Corpà , & qui n’é-
coit qu’un de leurs états. Gn verra: bientôt que,
ce grand pas une fois fait , la c h im ie a dû bientôt
changer de face.
La dilfortatidn de M. Smeth parut à Utrecht
en' oélobre 1772 ( fous format i n - t f de 10,1 pages.;) .
M. Prieflleÿ avoit déjà lu, depuis quelques mois,
à la fociétë royale de Londres les premières expériences
qu’il a faites fur ce qu’il nomma lès
différentes efpèces d'air. Ainfi l’on doit conferver
fur plufieurs points la priorité au phyficien an-
glois ; mais nous parlerons d’abord des '..recherches
de M. Smeth , parce qu’elles fuivenc
mieux l’ordre de chofes relativement au genre de
découvertes & à la nature des travaux, que celles
de M. Prieflleÿ qui 'ayant beaucoup- plus étendu
ce fujet, ouvre y pour ainfi dire , un nouvel ordre
de chofes, & aggrandit fingulièrement la carrière
pour ceux qui veulent y entrer.
M. Smeth, après avoir prouvé dans fa differ-
tation que l'air commun îi'eff connu que parquel-
ques. effets phyfiques, qu’on ignore entièrement
fa nature intime , fa compofition , en conclût
qu’on a mal raifonné , mal, philofophé jufques-
là., en affirmant qu'une fubflance eft de l’air ,
parce qu’ejle a quelques propriétés apparentes
communes avec lui 5' que c’eft une erreur cdmraife
mife par tous ceux qui ont parlé du fluide diadique
dégagé , foit par l’effervefcence, foit par
la fermentation , lorfqu’ils n’ont confidéré que fa
fubtilité , fon élafticité, fa pefanteur ; que l'on
devroit, d’après cela, donner aufli le nom d’air
au fluide éle&rique, & à une foule de vapeurs
incoercibles, ainfi qu'à l'eau. Cette idée très-
exaCte & très - propre à avancer la fcience,
n'a cependant germé parmi les phyficiens que
long-temps après ; ils ôïit continué plus de dix
ans encore après les découvertes de Prieflleÿ, qui
maîheureufement a lui- même employé l'expref
fion d1 efpèces d'air, à confondre fous le même
nom des matières très-différentes , & confé-
quénïment à les rapprocher réellement par leur
sature, quoiqu’ elles s'éloignent réellement beau
coup les unes des autres par leurs propriétés &
par leur compofition intime.
M. Smeth fait voir enfuite que l ’air eft un 1
véritable dilfolvant, qu’on y trouve en diffolu-
tion de l'eau & des vapeurs différentes, comme
les fels le font dans l'eau 3 il paffe de - là à
prouver que beaucoup de corps augmentent de
poids à l'air. Déjà M. Szalhmar avoit prouvé que
fe pyrophore augmentoit de poids en brûlant j
M. Smeth conjointement avec M. Lane a examiné
les circonftances de ce phénomène. 272 grains
de pyrophore, expofés à l'air dans une balance
exacte , augmentèrent de 20 grains en une demi-
heure, de 21 grains le lendemain, & de 15 grains
pendant les fept jours fuivans 5 l’augmentation
totale de poids étoit alors, d'à-peu-près un cinquième
; ce pyrophore s’ étoit enflammé 5 un
autre pyrophore, qui ne s’enflammoit plus, acquit
en trois jours trois dixièmes de poids. La chaux
vive a augmenté de poids pendant le premier
mois de fon expofition à l'air 3 après treize mois
elle avoit acquis un quart d'augmentation , elle
étoit réduite en poudre fine, & dégageoit l'alcali
volatil du fel ammoniac fous forme concrète.
Cette chaux calcinée enfuite à grand feu , n'a pas-
perdu tout ce qu'elle avoir acquis , n'a pas donné
tout l ’air fixe qu'elle auroit du fournir fui vaut les
expériences de Black 3 le premier de ces faits ,
e’eft-à-dire la confervation d'une partie de la
matière attirée par la chaux , malgré la très-forte
chaleur qu’on lui avoit appliquée, avoit déjà été
obfervéen 1747 par Duhamel. Quant au fécond,
ou à la non - abforption de la quantité d’air fixe
néceffaire à !a fattiration par la diaux expolee
sèche à l'air, il a été bien reconnu depuis les expériences
de Smeth, qu'elle n'a lieu que par l'addition
de l'eau , & fpëcialement pai l’eau de
chaux ; auffi Smeth avança-1-il que la chaux
folîde n'abforboit que de l’eau de l’atmofphère 3
mais il fe trompa en appliquant la même conclu-
fipn à iVug nentation de poids du pyrophore par
le eontaél de l’air. M. Smeth s'eft encore trompé
fur les alcalis, en eflhyant de prouver que l'air
Cm m s . J orné Ul.
11'eft pas la caufe de leur effervefcence ; & on ns
peut s'empêcher d'être étonné qu’après avoir
paru diftinguer avec foin lés fluides élaftiques de
l'air commun , il confonde ici l’air fixe avec 1 air
atmofphérique > & qu’il en tire fes objeébions
contre la doctrine de Black. Smeth a répété les
expériences, ae Macbride en fubiiituant, comme
Machy l'avoit déjà fait à Paris fix ans auparavant,
une cucurbite de verre , dans laquelle il mettoit
les mélanges effervefeens ou fermentans î il atta-
choit au bec du chapiteau une fiole contenant
les matières qu'il vouloit expofer au conta£1 de
l'air fixe. Il vérifia tous les réfultats de Macbride
avec cet appareil ; il obtint fur - tout la cryftalli-
fation de l'alcali volatil èxpofé fluide & caufiique
à ce gaz. Il vit la vapeur de falcali volatil fe rapprocher
en nuage de celle de l’air fixe, les çryf-
taux de ca fei faturé d'air fixe fe fécher à l'air, S c
perdre prefqu'entièrement leur odeur pénétrante ;
le fluide élaitique, dégagé des chairs pourries, a
offert la même aétion fur les alcalis.
Smeth infifte particulièrement fur la différence
des émanations élafliques dégagées des effër-
vc fcences &c des fermentations , d’avec l’air de
l'atmofphère ; d’où il fuit qu’en faifant voir que
l’air atmofphérique n’ a pas la propriété de rendre
les alcalis caufliques doux & effervefeens , comme
il l’a fait dans le commencement de fon ouvrage ,
il ne cherchoit qu’à prouver la différence du
fluide, caufe dereffervefcence, d’avec l’air proprement
d it, & à rendre plus exa&e la doélrine de
Black & Macbride, qui, quoiqu'ils aient connu
cette différence 4 ne l’ont point affez fpécifiée ,
& ont femblé les confondre par les noms mêm«
dont ils fe font fervis. Voici fur ce point très-
important & très-bien traité pat Smeth, les faits
& les obfervations principales qu'il a préfentés.
i Q. L'air atmofphérique ne rend point les alcalis
caufliques effervefeens & cryftallifables , tandis
que l’émanation des effervefcencës & des fermentations
produit ce phénomène j 20. l'air atmo-.
fphérique entretient la flamme & y eft néceffaire
l’émanation dont il s'agit l'éteint toujours *, 30. l’air
ordinaire eft néceffaire à la vie des animaux , l'émanation
eft un poifon fubtil pour eux , comme
le prouvent les accidens qui font arrivés trop
fouvent au-deffus des cuves en fermentation;
40. l'air de l'atmofphère favori fe la putréfaction ;
elle eft arrêtée , retardée & même corrigée par
le fluide élaftique dégagé des efferveicences &
des fermentations ; y°. ce dernier fluide varie
fingulièrement dans fon élafticité, fui vaut les dif-
férer.s temps dè fon dégagement, comme la vapeur
de l’eau , qui tantôt eft extrêmement dilatée
& tantôt fe rapproche de l’état liquide :
•on voit bien qu'ici Smeth a vo'üla parler de la
propriété qu'a le fluide élaftique des effervef-
cences de fe condenfer facilement, de perdre !a
forme élaftique, tandis que cette propriété ne
B b b‘