
dont Haies s*étoit fervi > il paroït que c’eft entre
les années 1750 & 1770 qu’il adopta la
correction dont nous allons parler. Au récipient
pyriforme plongé dans l’eau & pofé obliquement
a la cornue que Haies a voit employée, Rouelle
fubftitua un matras ou récipient à long cou , au
ventre ou à la fphère duquel il fit pratiquer par
les verriers un fécond cou ou un fécond tube
élargi difpofé obliquement , 8c montant vers le
bec de la Cornue ou de l’allonge qu’il étoit
deftiné à recevoir. Il plaçoit ce récipient fur
un chaffis de cuivre jaune, de manière que fon
long cou s’élevoit perpendiculairement 8c que
fa tubulure latérale oblique recevoit le bec de la
cornue ou de l’allonge auquel ou le lütoit. Cette
difpofition étoit faite pour recueillir 8c arrêter
les liquides condenfables dans la panfe du matras
, & donner par le cou allongé & droit de
ce vafe un écoulement facile à l’air qu’on re-
tenoit & qu’on msfuroit de la manière fuivante.
Le chaffis dans le centre duquel le matras étoit
placé & folidement fixé par des pattes de cuivre
qui pofoient fur la voûte de fa panfe , étoit formé
de quatre tiges de cuivre droites , retenues par
deux cercles horifontaux du même métal plus larges
que le matras. A l’intérieur du cercle qui ter-
minoit le haut de ce chaffis régno'it un rebord
Taillant de trois lignes, furlequel étoit portée une
cloche de verre qui s’éîevoit à quelques lignes
au-deiTus de l'extrémité ouverte du cou du matras
, de manière qu’elle rècôuvroit & rehfer-
moit entièrement le cou de ce vaifleau. Tout
cet appareil compofé du chaffis de cuivre , du
récipient ou matras qui y étoit renfermé & de
la cloche qui le furmontoit, étoit placé dans
une terrine de grès ou dans une grande jarre
de verre pleine d’eau , de forte qu’il y plongeoir
jufqu’à quelques pouces du bas de la cloche.
Tout étant ainfi difpofé, lorfqu’on vouloit
faire une diftiîlation & calculer la quantité d’air
q Telle devoir fournir, à l’aide d’un fyphôn paifé
fous l.i cloché à travers l’eau, ou quelquefois par
la fuccion faite vers le haut de la cloche à laquelle
on faifoit un trou vers fa voûte 8c près
de fon bouton , on ék voit l’eau de la jarre , on
pion geo it cette cloche jufqu’à quelques lignes
au-d-ffiis de l’extrémité fupéricure du cou du
matras , & l’on marquoit-avec une petite bande
de papier collé le lieu de cette élévation. Il
eft prefque inutile de dire ici qu’il falloit que la
jarre où plongeoir le récipient & le bas de la
cloche fût aflfez grande pour contenir l’eau fuffi-
fante à la capacité de la cloche , & y mettre affez
d’eau pour qu’en l’élevant.dans ce dernier vaiffeau
il en rèftât dans la jarre une quantité telle
qu’elle fût toujours au-deffus du bord inférieur
de la .cloche, 8: pût conféquemment foutenir par
la preffion dé l’air l’eau élevée dans la cloche au-
deffus de fon niveau extérieur. Il eft encore prefque
fuperflu d’ajouter que Rouelle plaçoit une
allonge entre la cornue 8c le matras récipient
dans les cas où l’opération qu’il devoir faire exigeant
un grand feu, il étoit néceffaire d’éloigner
le fourneau de l’appareil fervant à* recueillir les
produits liquides oc élaftiques. Lorfque cet appareil
étoit bien établi, on chauffoit la cornue j
les produits liquides condenfés par i’eau froide
du bain où plongeoit le récipient, fe raffem-
bloient dans ce vafe, l’air où les fluides diadiques
qui nepouvoient pas fe condenfer arrivoient
dans la cloche placée fur le matras, faiioient bail*
fer i’eau & donnoient, par la capacité qu’ils rem-
pliffoient, le moyen de les mefurer. On laifToit
refroidir tout l’appareil, condenfer & defeen-
dre à la température extérieure le fluide élafti-
que contenu dans la cloche ; on en défalquoit
ce qui pouvoit appartenir à l’air des vaifleaux,
8c on eftimoit ainfi la proportion d’air fournie
dans chaque analyfe. Cette defeription de i’ap-
; pareil de Rouelle fait voir qu’il n’avoit fait que
! donner plus de commodité & de facilité à celui
5 de Haies, mais qu’il n’avoit rien ajouté pour
■ l’exaécitude de l’analyfe & pour la connoinance
du produit aériforme.
Ce moyen, nouveau 8c fi utile d’analyfe, cé
; nouvel inftrument chimique rendu plus familier
; 8c prefque domeftique par R.ouel!e , étoit connu
: de tous les chimiftes français * & cependant il
n’eft jamais devenu J ainfi qu’on auroit pu i’ef-
pérer, un meuble commun de laboratoire. On
ne l’a vu que dans ceux qui étaient deftinésaux
démonftrations aux cours de chimie, & on ne
l’y employoit même que dans celles des leçons
: où en s’occupant de la décomposition des corps
parle feu, on pnrioit.de l’air qu’ils donnoient
; ..lors 8c du réfultat des expériences de Haies.
Macbride imagina , en 1763", les deux bouteilles
communicantes par un tube, pour expofer
commodément les corps au contaét & à l’action
de l’air fixe 5 & c’eft ainfi qu’il fit fes expériences
fur la putréfaction 8c lur la propriété
antifeptique de ce fluide élaftique ; mais, quoique
Bucquet ait cherché , quelques années après*
à rendre cet appareil plus précis & plus utile
en coupant l’un des flacons en deux , en y ajoutant
des robinets pour pouvoir le viffer fur la
machine pneumatique & y faire le vide , aucuns
phyficiens, aucuns chimiftes nJadoptèrent
cette efpèce d’inftrument, qui refla comme un
modèle fans utilité & fans avantages.
Il eft vrai qu’à-peu-près à l’époque où Mac-
bride faifoit fes recherches. & propofoit fes flacons
communicans , il fe préparoit, dans les laboratoires
anglois, un changement. Il s’établif-
foit, dans les procédés diftiilatoires, une amélioration
qui devoit renouvelier en quelque forte
la plupart des produits, ouvrir aux analyfes une
carrière d’un nouveau genre , corriger l’erreur,
fi commune 8c fi générale, de la perte d’une
grande partie des produits, 8c reéhfier conféquemment
prefque toutes les opérations de chimie
Je veux parler ici" de l’invention des appareils
de Woulfe. Ce chimifte très-habile,, plus
travailleur que théoricien „ occupé fans relâche
d’additions 8c de.perfcêfionnemens dans les machines
& dans les procédés, 8c qui a plus travaillé
qu’écrit, conçut une de ces idées mères
qui dévoient changer la face de la fcience, &
fur-tout de fa partie expérimentale ou pratique.
Infpiré fans cloute par fes nouvelles recherches
fur l’air fixe 8c fur les propriétés que Caven-
dish venoit de découvrir à l’acide muriatique
de prendre la forme & l’expanfibilité élaftique
de l’air, il imagina d’empêcher les vapeurs per
dues jufque-là pour les chimiftes par les tubulures
qu’ils entretenoient ouvettes, de fe répandre
dans l’ atmofphère, de fupprimer les ouvertures
qu’on pratiquoit aux ballons , de forcer
les vapeurs de palier à travers l’eau 8c de s’y
diflbudre ou au moins de s’y laver de manière
à y dépofer ce qu’elles pourroient contenir de
diffoluble , enfin de détruire ainfi 8c les erreurs
que les pertes des émanations élaftiques faiioient
naître & les inconvéniens que les chimiftes en
éprouvoient fans .ceflfe , foit par l’extrême attention
qu’exigeoit d’eux le foin des tubulures,
foit par leur aélion dangereufe fur les poumons
des opérations , foit par les altérations continuelles
qu’elles faiioient naître dans les uftenfiles
métalliques des laboratoires. Les veffies vides
qu’on avoit depuis Venel 8c Black fubftituees dans
quelques laboratoires aux tubulures ouvertes , ne
parurent point à M. Woulfe remplir ces divers
avantages. Comme il vouloit porter les vapeurs
dans l’eau , il imagina d’ajouter à ces tubulures,
à ces trous des ballons, à ces iflues
fi incommodes des tubes de verre recourbés,
des fyphons plongeant par une de leurs extrémités.
dans des bouteilles pleines- d’eau 8c y con-
duifant les vapeurs, puis de dtfpqfer ces bouteilles
de forte à les rendre lufceptibles de communiquer
par de pareils tubes les unes ,avec les
autres, & de pouvoir les multiplier affez pour
arrêter abfolument les vapeurs 8c les empêcher
de porter leurs produits & leur influence dans
l’atmofphère. Il paroït qu’il commença par fe
fervir d’abord d’un alembic de verre d’une feule
pièce, dont le bec étoit reçu dans la tubulure j
fupérieure d’un fécond alembic , & plongeoit par ■
fon extrémité dans l’eau dont ce fécond aiem-
bic étoit à moitié rempli. En les plaçant ainfi
fur des fupports fucceffivement plus" bas & par
étages, il employoit jufqu’à trois ou quatre de
ces alembics communiquant les uns avec les
autres , & il les doubloit encore en les difpo-
fant de chaque côté d’un premier flaçon ou d’une
première bouteille munie de trois goulots ou de
trois tubulures ; l’une moyenne pour communiquer
par un premier tube recourbé avec le ballon
de l’appareil, et deux latérales pour être
jointes par de pareils tubes avec les alembics
placés latéralement. Cet ingénieux appareil fur
décrit pour la première fois à Paris par Bucquet
dans le fécond volume de Ton Introduction
■ à ï'étude des corps naturels tirés du. régne végétait,
publiée en 1773 ; il annonça, l’avoir tiré des leçons
de Roux qui avoit publié dans fon cours
aux écoles de médecine de Paris un procédé
de M. Woulfe pour faire fur-le-champ & fans
danger l’éther nitreux. Ce procède conffloit à
employer un ballon de huit pintes , terminé par
un col de huit pieds de long , recouvert d’un
chapiteau bouché au cryftal dont le bec étoit
. adapté à un tube de verre de fept a huit pieds,
& réuni à un ballon à deux pointes percé en-
deflous d’une tubulure, fous laquelle on plaçoit
un flacon de crvftal deftiné à recevoir 1 éther.
A la pointe du ballon oppofée à celle qui recevoit
le tube lutté au bec du chapiteau, 011
adaptoit un tuyau de verre recourbe dont l’autre
extrémité plongeoit dans le premier alembic dont
il a été queftion plus haut. A ceiui-ci on en
joignoit trois ou quatre autres placés fucceilïve-
ment au-deffous les uns des autres, comme il a
été dit, le grand ballon étant place fur un trépied
affez élevé pour pouvoir mettre deffous un
petit réchaud. Quoique cet appareil fut deftiné a
donner beaucoup de place aux vapeurs abondantes
qui fe dégageoient dans la préparation
de l'éther nitreux , quoiqu'on annonçât qu’elle
pouvoit alors être faite fans danger, j'ai vu
deux fois fauter cet appareil en l’air avec un
fracas épouvantable , une fois au cours de Roux ,
un autre fois à celui de Bucquet. Je me rappelle
même à cette occafion que l’explofion qui eut
lieu au premier de ces cours,, dans l’amphithéâtre
des écoles de médecine , rue de la Bu-
cherie ( je crois en 1773 ) , fur telle que le cha- •
piteau enlevé jufqu’au, haut du dôme dé cet amphithéâtre
fut bnfi en mille pièces & retomba
en très-petits fragùiens: Il paroït que dès-lors
l’appareil de-Woulfe , quoique n’étant encore
publié dans aucun ouvrage trançois, étoit déjà
connu dans les laboratoires de Paris , & déjà
varié fuivant les opérations auxquelles on s’ap-
pliquoit ; car en décrivant la préparation de
l'éther nitreux fuivant le procédé du chimifte
de Londres, Bucquet annonçoit qu’011 pouvoit, au
défaut d’alambics anglois , employer de grands
flacons à moitié pleins d’eau, & les faire communiquer
entre eux & avec le ballon par le
moyen de tubes recourbés , comme cela f i pra-
tique , d i t - i l , dans La diftiîlation des acides nitreux
& marins à la maniéré du même M . Uroulfe. Il eft
vrai que dès l’année 1771 on employoit dans les
laboratoires de Rouelle , Bucquet & de plufieurs
autres chimiftes , les flacons & tubes deftinés à F" f f