
médecin anglois à Bombay dans l'Inde , plufieurs
medeçins de Londres donnent depuis quelque
mois (mars 1797 ) > l’acide nitrique très-étendu
d’eau dans les dérnieres maladies, & ont déjà
reconnu que ce médicament dont ils attribuent
les prompts effets au dégagement de l’oxigène ,
calmait 8c faifoit difparoître avec une extrême
promptitude les fymptômes vénériens. La même
hardieffe , ou plutôt la même affurance , porte
les chimiftes anglois à faire de promptes applications
des nouvelles découvertes dans les procédés
de leurs manufactures, 8c c’eft ainfî qu’aucun
peuple policé n'efl encore-parvenu à tirer plus
d'utilité des fciences qu’eux,pour le perfectionnement
de la raifon humaine en même tems que
pour l’amélioration des avantages que l'homme
a lieu d'attendre de la fociété bien organifée.
En Allemagne, quoique ce foit le pays où la
chimie pneumatique françoife a trouvé le plus de
contradicteurs 8c d’oppofition , quoiqu’on y ait
toujours combattu les bafes de cette théorie ,
quoique ceux même des chimiftes qui en ont reconnu
les principes vrais n’aient pas ofé renoncer
pour cela à l’hypothèfe du phlogiftique, & aient
toujours voulu en affocier la marche chancelante
autant qu’arbitraire aux pas affurés de la doCtrine
françoife, Comme on le voit dans les ouvrages
de MM. Crell, Weftrumb , & c. ainfî que dans
les théories particulières de MM. Richter ,
Goëtling, Gren, &c. il y a cependant des
hommes qui ont foutenu avec force la caufe de
l'oxigène, & renoncé aux illufions du phlogiftique,
On compte dans cette claffe MM. Her-
mbftadt, Klaproth, Girtanner, Schérer, Hilde-
brandt, Humbold 6c plufieurs autres phyficiens
& chimiftes célèbres qui ne cefl'ent de faire des
recherches ou de publier des ouvrages utiles fur
la théorie pneumatique, & d’en propager les
lumières dans différentes parties de l’A'lemagne.
L’application de cette théorie aux arts & à la
phyfique animale n’ y fait point, à la vérité,
autant de progrès qu’en Angleterre; on n’y
adopte point, à beaucoup près, aufîî promptement
& avec autant de hardieffe toutes les idées
nouvelles ; & cependant on y a déjà publié des
principes de phyfique végétale & de phyfiologie
fondées fur les découvertes modernes & fur la
connoiflance exaCte des propriétés des fluides
élaftiques; les premiers font dus à M. Humbo d ,
les féconds à M. Hildebrandt ; on connoît encore
très-peu ces ouvrages en France ; déjà même
M, Wiegleb a publié une hiftoire, à la vérité
très-concife, 8c ne contenant prefque que des
titres 8c des annonces des ouvrages & des mémoires
, des découvertes faites depuis 1750
jufqiren 1790. Quoique cette hiftoire n’ait pas
pour but de présenter la naiffance , les progrès,
les phafes & l’étonnant fuccès de la doCtrine
pneumatique , dont l’auteur n’efl: pas un des par-
t*,an? ! *"on 0U.vraÉP eft cependant un monument
e eve a la gloire de cette théorie , puifque c’eft
elle qui en fait véritablement la plus grande
partie, & qui la rend beaucoup plus étendue .
dans la fuite des dernières années qui lui appartiennent
, que ne le font les tems même deux ou
trois fois pus longs qui ont précédé fa naiffance.
On peut efperer que le nombre confidérable de
chimiftes qui font de l ’Allemagne un des lieux
du monde où la fcience de l’analyfe a été cultivée
avec Je plus de fuite & de fuccès, fera
Lire a la doctrine pneumatique lorfqu’elle fera
plus répandue , plus généralement étudiée 8c
connue quelle ne l’y eft encore , des progrès
qu une longue habitude dans la thiorie du phlogiftique
, & un refpéCt prefque religieux pour la
mémoire & les ouvrages de Stahl dont il n’eft
pas permis de m^priier la fource, ont empêché
jufqu ici d etre aulfi rapides qu’ils-l’ont été dans
un grand nombrè d’autres pays. On peut croire
que cette lutte glorieufellabiiédepuis vingt ans,
ce procès fameux qui s'inftruit encore tous les
jours çheï un des grands peuples les plus éclairés
de 1 Europe, fera reconnoître enfin de quel côté
fe cache l’erreur 8c l’illufîôn, & fur laquelle d^s
deux théories brille la lumière éclatants de la
vérité. Tout annonce qu'à mefu-e que les nou-
velles méthodes de faire des expériences de
chimie les nouveaux inftrumens d'analyfe , les
-appareils exsftsj les diverfes manières d'opérer,
-de recueillir les produits , de trouver leurs pro-
portions 1 s'introduiront dans les laboratoires des
chimiftes allemands, à mefure furtout que les
decouvertes non interrompues des chimiftes ftan-
T r J .qii1 a),eutent chi“iue i°ur u" degré de
: folidite de plus a leur théorie , parviendront en
Allemagne , enfin a raefiire que la génération
nouvelle des jeunes chimiftes, qui apprennent au-
jourd hui la fcience, fe ferapen-à-peu d barraflee
au phlogiftique , attachement
refpeflable par fon origine , mais dangereux
pour .es progrès de la raifon par fa permanence,
fa perrinacite & fa réfîftance aux idées nouvelles
a mefurequ'mftruite parles ouvrages élémentaires
modernes dans l'art de raifonner.les expériences
comme dans celui d’expérimenter avec les appareils
exaéls de la phyfique aétuelle, cette génération
nouvelle commencera à voler defespropres
ailes ,-la dodrine pneumatique françoife y prendra
enfin cet afeendant & cette force qu'elle a ac-
quife dans fon pays natal , & qui doit changer
la race de toutes les fciences phyfiquegî
La Hollande n a point oppofe la même réfif-
tance à l'introduélion de cette doétrine j brillante
encore de la gloire de Boerhaave & de Gaubius,
cette nation fi éclairée , fi induftrieufe dans les
arts , fans compter un grand nombre de chimiftes,
miftes, en offre cependant à l’Europe favante
uelques-uns qui, fe dateurs anffi éclairés qu'ar-
ens de la doétrine françoife , lui ont dé;à rendu
de grands fervices , & ont déjà laiffé dans la
carrière qu’ils ont parcourue avec éclat des mo-
numens de leur favoir, de leur habileté & de
leur fagacité. Les citoyens Van - Marum, Bortdt,
Deiman , Van-Trottwyck , & Lauvrerenburg ,
continuent leurs favantes & utiles recherches. Le
premier fi connu par fes belles expériences sur la
combuftion rapide des métaux par l’éleCtricité ,
par fes nouveaux gazomètres, &c. vient de publier
dans les Annales de Ch mie (fév. 1797 ) , .
de jolies expériences & une ingénieufe explication
de la combuftion 8c de l’inflammation du
phofphore dans l ’air raréfié. Les féconds réunis
en fociété à Amfterdam , pour travailler en commun
aux progrès de la fcience , ont déjà produit
pour réfultats communs de leurs expériences de
très-bons mémoires fur les fulfures alcalins, fur
les fulfures métalliques 8c leur rapide--inflammabilité
, fur le gaz hydrogène carboné défiant,
-mémoires dont ©n a donné un extrait détaillé
dans les articles précédens. Ces premiers réfultats
de leurs travaux doivent faire attendre des fuccès
nouveaux, 8c ceux qu’ils ont déjà obtenus doivent
les engager à continuer de recueillir les
fruits promis aux efforts & aux lumières de leur
favante affociation ; elle feryira autant les fciences
qu’elle honore leur coeur 8c leur-efprit. Ils auront
le glorieux avantage de répandre dans leur pays,
qui doit aux François la conquête de leur liberté
& le bonheur de fe donner un gouvernement
de leur choix, la lumière de la doCtrine chimique
fr-ançoife , fi propre à enrichir, par des nouveaux
procédés, les manufactures de cinnabre , de blanc
de plomb, de fublimé corrofif, de matières fa-
lines, de bleu végétal, de diverfes fubftances
colorées, & de tant d’autres produits qui conf-
tituent avec le commerce la richeffe de cette
nation. Tout annonce donc que la république
batave dont le fol 8c la profpérité font Tes plus
beaux & les plus étonnans monumensde l’induftrie
& du génie, continuera à cultiver la fcience chimique
, & que la doétrine françoife qui eft fi
heureufement introduite, par les chimiftes que
j'ai cités , y jettera de profondes racines, 8c
s’aggrandira par les foins de fes citoyens. Mes
defîrs & mes voeux appellent furtout l’attention
de leur gouvernement fur là nécefftté'de répandre
dans les écoles l’inftruCtion chimique , de multiplier
les cours de cette fcienc.e dans les divers
établiffemens publics , 8c d’en faire , autant qu’il
fera poflible, une partie de l’éducation néteffaire
aux marins, aux artilleurs, aux ingénieurs, aux
commerçans, aux manufacturiers, aux voyagéurs,
comme elle l'a été jufqu’ici trop exclusivement
aux médecins. J'adreffe les mêmes voeux aux
citoyens de cette république, illuftrée par fa
C h i m i e , Tome 1 1 1 .
fageffe comme, par fes lumières & par fes armes,
pour cju’iis appliquent foi^neufem&nt les découvertes
modernes au perfectionnement de leurs
atteliers 8c de leurs arts. Leurs premieis effais
les auront bientôt convaincus des avantages qu’ils
ont lieu d’en attendre.
L’Italie 8c le Piémont ne fe font pas moins
diftingués depuis quelques années par les découvertes
relatives à la doCtrine pneumatique, 8c
propres à en confolider les bafes. MM. Giobert ,
Bouvoifin , le chevalier St. Réal, les comtes Mo-
cozzo 8c Baibo , s’occupent à Turin de la chimie
moderne , de fon application à la fcience de la
nature, à la philofophie 8c aux arts , comme on
peut en juger par les mémoires de l’académie de
Turin, 8c par une analyfe très-bien faite des
eaux fu'fureufes de Vaudier dans la vallée de
Geffe, publiée en 1793 parM. Giobert. A Venife,
M. Dandolo, après avoir traduit l’ouvrage de
Lavoifier, a donné , il y a deux ans , un dictionnaire
de nomenclature chimique italienne,
traduite de la nomenclature françoife, avec un
expofé précis & très - bien fait des principaux
caraCteres d?s fubftances dont il expofe la fuite
par ordre alphabétique. A Florence , M. l’abbé
Fontana, qui a contribué par beaucoup de travaux
dont il à été rendu compte, aux progrès
de la chimie pneumatique, n’ a point quitté la
carrière où il s’ eft illuftré , comme on l’apprend
parle nouveau pesfedionnement qu’ il vient de
donner aux inftiumens 8c aux opérations météo-
rographiques. A Pavie furtout où toutes les lumières
des fciences font réunies dans le fameux
établiffement de l’univerfité , la nouvelle doc-
triné y a des feCtateurs célèbres 8c d’ illuftres
I propagateurs, auxquels il faut joindre M. Lorgna
à Véronne , MM. Landriani, Mofcati, Fortis ,
Venturi à Milan 8c à Modène. MM. Spallanzani,
Volta, Brugnatelli, phyficiens habiles de différentes
parties de l’Italie , travaillent fans relâche
à perfectionner la philofophie naturelle 8c à a'g-
grandir la fphère de nos connoiflances. M. Lorgna
qui a fondé la fociété italienne de Véronne,
continue fes utiles travaux. Spallanzani vient de
fe fervir avantageufement de la chimie moderne
pour analyfer les produits de l'Etna. Volta &
Brugnatelli viennent de rechercher l’identité du
phénomène éleCtrique obfervé dans les mufcles
par Galvani avec l’éleCtricité. Mofcati & plufieurs
autres médecins italiens en adoptant le fyftême
médical de Brown , quoiqu’il ne foit pas fondé
fur des bafes affez folidespour le regarder comme
une vérité acquife , prouvent au moins combien
ils font difpofés à faire fléchir leurs opinions fui-
vant les découvertes récentes , 8c à profiter de
toutes les lnmières qui fe préfentent dans la culture
des fciences phyfîques pour éclairer la phyfiologie.
On doit donc s’attendre à voir la doCtrine
J fx x x