
pneumatique françoife étendre fes fertiles rameaux
en Italie, & porter dans toutes les branches des
connoiffances humaines qu’on y cultive avec ardeur
, cette croiflfance rapide qu’elle paroît fi
capable de leur faire-prendre.
Quoiqu’on ne puiffe pas dire que la chimie foit
répandue en Efpagne s comme dans le plus grand
nombre de pays dont il vient d’être queftion ,
cette fcience cependant y a quelques amis zé e s ,
la do&rine pneumatique plufîeurs partifans qui
en propagent les principes & en affluent le fucçès.
Depuis une vingtaine d’années le gouvernement a
établi plufieurs écoles, où la chimie eftenfeignée
avec éclat. Des laboratoires affez nombreux ont
éré établis par Tes frais à Mad id , à Cadix &
dans plufieurs autres villes de ce b.au royaume.
Us ont été abondamment pourvus dés u fi enfiles
& des machines les mieux faire;, furtout de celles
qui font deftinées aux démonfl rations des vérités
nouvelles de la chimie françoife. La plupart de
et s inftrumens précieux ont été conftrurfs à Paris,
par les artiftes même qui avaient été empoyés à
la préparation des appareils dont Lavoifier s’eft
fervi pour Tes plus ingénieufes et fes plus brillantes
expériences. Les balances les plus exactes,
L s plus .chers & les plus b?.aux gazômèttes,
confacrés à la compofition artificielle de l’eau ,
ont été fabriqués p ür le laboratoire de C adx ,
dans les atteliers du citoy n Fortin. La plupart
de ces infini mens ont été effayés en France avant
d être tranfportés en Efpagne. C ’eft avec les magnifiques
gazomètres indiqués , qu’a été faite
1‘expéri.ence exaCte de la compofition de l’eau
avec le gaz oxigène extrait du muriate suroxigèné
de potaffe , fui vie en .175)0 dans le laboratoire du
citoyen Fourcroy ; expérience qui , comme on
Fa vu ailleurs , a mis le fceau à l’appréciation
pofitive des proportions dans les principes de ce
liquide compofé. La plus grande partie des bons
livres François de chimie font rapidement traduits
& répandus en Efpagne. La nomenclature méthodique
y a été adoptée & a pâlie facilement
dans cette langue avec le rapport des terminaifons
qui en forme le cara&ère & le vrai mérite.
MM. Proufi 3 Chabaneau , Maff & Arezula y ;
profeflent à S ville , à Madrid , à Bcrqara & à |
Cadix, les élémens de cette fcience donc ils fe
font pénétrés-en quelque forte par leur féjour
& leurs études à Paris. M. Chabaneau a publié
des principes de phyfique & de chimie, où les
faits nouveaux font expofés avec n éthode &
clarté.
Plufieurs hommes zélés .& jaloux de faire participer
tous les coins du globe aux avantages que
cette fcience promet à ceux qui l’interrogent &
qui la cultivent, en ont porté l’étude , les résultats
& le goût , dans le Mexique , le Pérou &
le Bréfil. Déjà des ouvrages fur la minéralogie
& l’anaiyfe , ai- fi que la claflification chimique
des nvnéraux, ont été publiés dans cette partie
du monde où les européens ont porté leurs connoiffances
, leurs arts & leurs lumières , pour y
conloler en quelque forte l’humanité de outrages
que les premiers conquérons lui avoient laits.
MM. Angulo , Delhuyar, Delrio & Dandiàda
s’y occupent fans ceffe de la recherche ik de
i’analyfe des productions que la nature fi fertile
en ces climats fournit abondamment à leur curio-
fité & à leur lavoir.
Un fingulier contrafte avec le commencement
d’aCtivité que les fciences phyfiques commencent
à prendre chez les nations méridionales , fe préfente
à I’obfervateur lorfqu’il tranfporte tout-à-
coup fes regards fur les peuples du Nord. La
Suède, la patrie de Bergman & de Scheèle, qui
ont tant avancé la chimie , & qui ont illufiré
leur pays par de fi éclatantes découvertes , la
Suède femble ne plus pofiféder aujourd’hui d’hommes
qui s’occupent d’en accélérer les p;ogrès.
M. Gadolin efi le feul chimifte qui paroiffe s’in-
térelfer aux nouveLt s découvertes en Danne-
marck , où le 1 gs fameux d’un des plus iilufires
hiftoriens de la chimie ancienne, Olaiis Borri-
chius , fembloit deftiné à perpétuer à jamais le
goût& k.culture de cette belle fcrence. En Ruflie
il paroît qu’elle efi dans une ftagnation pref ue
complette , & quelque peine que Catherine ait
pril’e pour y naruralifer les fciences par l’appel
des Euler , des Gmélin, des Modtl, des Pallas,
quelques avantages & quelques prix qu’elle ait
offerts à leur gloire , comme à leurs talens , il
y a long-tems qu’on n’a parlé d’une découverte
chimique faite dans ce climat , dont les'longs &
terribles hivers offrent cependant au philofophe
des fujets d’expériences & de méditations auflî
propres à perfectionner les fciences phyfiques ,
que l-.s zones brûlées lui en préfentent dans leur
condition & leurs phénomènes contraires ; puif-
qu’on fait, aujourd’hui furtout, que les lois des
atrraûions chimiques varient finguliéremer.t aux
extrêmes de température. C’eft fans doute l’ifo»
lement mis entre la .France & les nations du
Nord, par le long & cruel fléau de la guerreAqui
s’eft oppofé depuis huit ans, à ce que les lumières
des fciences modernes & fpécialement les découvertes
récentes de la chimie , aient éclairé quelques
unes de ces nations , & porté, fpécialement
en Ruflie, le réfultat & en même tems le defir des
recherches qui ont illufiré, & qui doivent illuftrer
encore ceux qui s’y livrent avec l’aClivité qu’elles
infpirent.
L’Amérique feptentrionale où les travaux agricoles,
les défrichemens, les grandes exploitations
manufacturières & le commerce, femblent n’appellerque
lentement la lumière des fciences & la
culture des beaux arts , n’eft cependant pas rt-fiée
dans une indifférence totale fur les progrès & les
fuccès de la chimie pneumatique moderne. A
Bofton & à Philadelphie quelques phyficiens ont
répété une partie des expériences nouvelles; les
livres françois y parviennent & y font^ lus avec
avidité. Les atteliers y profitent peu à-peu des
perfeétionuemens que la fcience y apporte en
Europe. Les étudians furtout d: ns l’art de guérir,
en puifant à Edimbourg & à Pâtis les documens
de la chimie a&uelle , tranfportent à leur retour
en Amérique toutes les nouvelles découvertes d ;
cette fcience dans leur pays ; ils y développe rom,
tôt ou tard l'in fluence qu’elles doivent avoir fur
la marche des autres connoiffances humaines ,
fpécialement fur la médecine. Le doéteur Prieftley
qui a quitté l’Angleterre pour ce pays, où il efi
ailé fuir la perfécution de i’intoiérançe , & chercher
le doux loifir fi précieux pour un philofophe |
n’y oubliera pas fans doute les utiles travaux
dont il a enrichi la phyfique , les découvertes
immortelles qui font dues à Tes veilles. Dans- fa
retraite pa:-fible , il reprendra fans doute des recherches
trop long-tems interrompues pour le
bonheur des hommes, & confacrant une partie
de fa glorieufe carrière aux expériences qui l’ont
déjà tant illufiré , quelque oppofîtion , quelque
répugnance même qu’ il ait manifeftée pour la doctrine
des François , dont il esc pr.fque maigre lui
un des fondateurs, il naturalifera en Amérique
ce génie expérimental, cet art d’interroger la
nature fi propre à lui arracher fes feercts. Efpé
rons qu’éclairée par des nouvelles découvertes ,
cette terre de profpérité deviendra quelque jour
un des foyers de la philofophie naturelle. »;
§. VII. Etat aEluel de la Chimie y méthode d‘en accélérer
les progrès , en la. rendant immédiatement
utile._ aux autres fciences phyfiques & aux
arts.
Les longs détails contenus dans le paragraphe
précédent , & préfentés dans la divifion de hoir
périodes ou époques relatives aux principaux
traits de 1 hiftoire de la grande révolution que
la chimie a éprouvée depuis 1756 , & fur-tout
1766 & 1772. jufqu’en 178B , où Ton fort à été
en quelque forte fixé , en même tems que fa
nomenclature en a été ren uvc llée & fa théorie
générale arrêtée , ces fongs détails ont dû fa re
reffortir aux yeux du ie&eur attentif cette importante
vérité ; la chimie efi une fdence ab
folument nouvelle, très-différente de ce qu’elle
étoit avant cette mémorable révolution , fondée
fur des principes entièrement éloignés de
ceux qu’elle avoit àutrefo's. Elle a aujourd’hui
des moyens , comme . des appareils & des ini*-
trumens qui ne reffemblent plus i ceux qu’on
employoic avant cette époque ; elle efi aufïi
exaéle & au(Û certaine dans les réfultats, qu’elle
étoit vague , arbitraire, indéterminée dans fes
a-vci,ennes condufions ; elle doit donc conduire
à des données ncuvdles, comme à des conlé-
quençes inattendues , & c’eft ce qu’ont prouve
toutes les recherches auxquelles les pbyficiens
modeuies , munis de ces précieufes méthodes
actuelles , fe livrent depuis plufieurs années.
Pour répondre avec pré ci fi on à la queftion
p.ofée dans ce feptième paragraphe, pour faire
bien connoîcre l’état préfent de la chimie , il
faud.oit préfent-cr ici oans un tableau méthodique
toutes 1 s vérités., toutes les découvertes
qu’c il:* poffede , & cet objet , déjà traité par
ordre chronologique dans le --paragraphe précédent
, efi encore offert dans un ordre plus rapproché
à l’art’cle axiomes : on prendra de même
une idée affez exa&e de l’état aéluel de h fcience,
en jetant un coup d’oeil rapide fur la marche
que fui vent les chimiftes. aétuels dans leurs dé-
monfirations & dans leurs ouvrages élémentaires;
&' cette tâche a meme été allez exaéb -
ment remple à Ira fin du_ paragraphe précédent
dans l ’expofé que nous, avons donné des ouvrages
éUmenta:res de Lavoifier, de BerthclLt,
de Chap.tal & du rqrre propre. On y a vu quelle
régularité , quelle clarté régnpient dans ces
Trai-vés;,- qir font devenus des fourçes où pref-
que toutes 1 s Nations fa vantes puifent les con-
noîffances qu'ils veulent acquérir par cette étude.
Mais ces ouvrages , que le voeu public rend
recomma dalles, & qui font adoptés par la plus
grande paçtie de l ’Europe -, font-ils véritablement
ce qu’on peut faite de mieux , & contiennent
ils vraiment l’ordre Le plus méthodique,
le pl;as utile aux étudians ? N’eft-il pas permis de
• concevoir un plan plus parfait, Sç qui réponde
tnieur. encore à l’état d'avancement où fe trouve
aujourd’hui (mars 1797 ) la fcience ? Cette fiabilité
de principes à laquelle elle efi parvenue,
cette reélitude de raifonuemens qui en tire des
inductions générales , cet en haînemc-nt de eon-
noiffances qui en compofent la doCfcrine , cette
folie de faits qui la confii.tuent , ne doivent-ils
nas engager les. hommes qui fe chargent de la
lâche glorieufe & pénible d’en offrir Lenfem-
bie ou d’en profefler les élémens , à chercher
une méthode plus févère , &: qui procède mieux
encore que celles qu’on connoît, du fimple au
compofé V Efi-il vrai , comme le penfent quelques
favans , que l’ordre à fuivre dans les Elé-
mens ou dans un Cours, foit, indifférent ; 8c que
ceux qui étudient, apprennent avec ja*utaxit de
facilité , quelle que foit la marche qu’on leur
fait prendre? En un mot, ne peut-on pas trouver
une claflification des faits chimiques , qui
préfente , par la feule diff ofition des réfultats ,
le véritable état de 1? fo ienee ; & en aurok-on,
par exemple , une repréTentation fidelle ,, fl , en
fuivant l’ opinion de ceux des auteurs qui regar-
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