
chimie, d’cù nous les emprunterons pour les
frire pafler dans cette hiftoire.
Après avoir donné une idée fommaire de Fart
.de faire les liqueurs vineufes , des conditions
& des phénomènes^ de la fermentation qui les
forme , après avoir fpécialement infifté fur le
dégagement du gaz acide carbonique , & fur la
difparition du fucre lorfque la fermentation eft
corr.plette , Lavoifier 3 en obfervant que cette
opération eil une des plus frap;»ancès 8c des plus
extraordinaires de toutes cê'iles que la chimie
préfente 3 annonce qu’il doit examiner djoù vient
le gaz acide carbonique qui fe dégage 3 ainfi
Que la liqueur volatile & inflammable qui (e
forme ^ & comment un corps doux & fucré,
un oxide végétal, peut fe transformer ainfi en
deux fubftances fi différentes , l’une combuf-
tible, & l’autre éminemment incombuftible. Pour
arriver a la folution de ces deux queflions, il
obferve qu’il falloit d’abord bien connoître l’a-
nalyfe & la nature du corps fufceptible de fermenter
* & les produits de la fermentation j
car , dit-il, rien ne fe crée , ni dans les opérations
des arts , ni dans celles de la nature,
& l’on peut pofer en principes , que, dans toute
operation il y a une égale quantité de matière
avant & après l’opération, que la qualité & la
quantité des principes eft la même, & qu’il n’y a
que des, changemens,, des modifications $ c’ eft-
à-dire qu’ils s’unifient entrèux dans un autre
ordre que celui où ils étoient d’abord combinés.
-
Suivant cet illuftre chimifte , tout l’art de bien
faire des expériences en chimie eft fondé fur
ce principe $ il faut admettre dans toutes une
véritable, égalité, ou équation entre les principes
du corps .qu’on, examine & ceux qu’on en re-
tire. par 1 analyfe. .’C ’efl. donc une conféquence:
néceflaire de dire que g puifque le moût de rai-
fin donne du gaz acide carbonique de l'alcool
par la fermentation: vineufe , le moût de
raifîn ZI acide carbonique alcool. D’après
cela il y a deux maniérés de déterminer ce qui
fè paffe dans ce mouvement naturel } la première
.-conififte, à bien connoître' la nature. dü'
cprps fermantefcible ; la fécondé g à bien appré- ,
ci<r les produits.de laifermemation j il eft clair 1
qi-e lçs,connoiftance$ acquifes fur l’un doivent
conduire à dès connoiffances certaines fur les
autres;, & . réciproquement.
: Pour parvenir à ce. but j Lavoifier a choifi le
fucre, comme le: plus fimple: des corps fermeté
tp f c ib le s& J6, feul fufceptible de former de
1 alcool, ay lieu de' prendre, des fucs de fruits
extrêmement compliqués dans leur compofirion ,
& qui ne doivent qu’a !a matière. fucrée qu'ils
contiennent *a propriété de, le convertir en vins.
D’une longue fuite d’expériences répétées un
grand nombre de fois , & à l’aide de plufieurs
méthodes analytiques qu’il ne décrit pas, ii con*
ciud que le fucre, efpèce d’oxide végétal à
deux bâfls dont l'équilibre de compofition peut
être rompu par une force très-légère , contient
à-peu-près fur i oo parties 8 d’hydrogène, 28 de
carbone & 64 d’oxigène.
|-e fucre, avec quatre parties d’eau , lie fermente
jamais feul} un peu de levure eft nécef-
. faire pour exciter le premier mouvement; une
fois^ donné , celui-ci continue fpontanéjnent :
10 livres de levure fuffifent pour faire ferménter
100 livres de fucre. Lavoifier donne ici trois
tableaux ; le premier défigne Amplement la quantité
des trois matières, eau , fucre & levure,
employées pour former,la liqueur fermentef-
cible qu’il a mife en expérience ; le fécond ex-
pofe les principes conftituans de chacun des
matériaux de la fermentation, 8 c le troifieme
préfente une récapitulation de ces principes* au
nombre de quatre, rapportés à chacune des ma-
tierés compofées auxquelles ils appartiennent,
avec la proportion fuivant laquelle chacun d’eux
concourt à leur compofition. La réda&ion de
ces tableaux, deftinée à faire bien concevoir ce
qui fe paffe dans la fermentation 3 va donner
une notion exaéte de Ja précifion & de la netteté
des idées de leur auteur.
Ier TABLEAU. Matériaux de la fermentation pour
un quintal de fucre.
Iîv-, o n , gros gr.
Eau . . . . . . . . . . . . ^ . 400 . . . .
Sucre..................................... , 100 , . .
Levure de bière en 7 eau 7 3 6 44
pâte , compofée de ƒ levure feche 2 12 1Y.28
Total y 10 ’ . .
ile TABLEAU. Détails des principes conjlituans
des matériaux de la fermentation.
Hv, onces gros g ra in s . liv . o n . gr> g ain4
407 3 6 44 7 hydrogène 61 1 2 71,4a
d’ eau compofée, de j oxigène 346 2 3 44,60
100 . .
de fucre cômpoféde
11 1 28
de levure feche *
compofée d e .
rhydrogène 8 . . .
[ dfcigène 64 . . .
Learbone 28 . ,. .
'‘ carbone . 12 4 j p , p 0,
( azote j . ; . y
k hydrogène . 4 y 9*3°'
^oxigèiie, 1 ,;io .2 28^76
Total y 10 |
IIIe TABLEAU. Récapitulation des principes conjlituans des matériaux de la
fermentation.
liv. once
( de l’eau
\de l’eau de
34O
oxigène J la levure 6 2
J du fucre
F de la levure
6 4
i 10
( de l*eau . . .
\de l’eau de
6 0
hydrogène ,/ la levure
1 du fucre. . .
r de la levure
18
.1
4
carbone ■< f
du fucre
^ de la levure
28
12
azote. . . . 4e la levure
Une fois les principes des matériaux de la
fermentation bien connus & bien appréciés ,
Lavoifier n’avoit plus qu’à examiner quels en
feroient les produits. Pour cela il a renfermé
lés 5 jq livrés de liqueur fermentefciblé dans un
appareil difpofé 4e maniéré qu’il pouvoit fne^'
furer le ' gaz à méfure qu’il le dégageoit* 3 en
connoître la quantité , là nature , & pefer chacun
des produits féparémênt , à telle époque
u’il le jugeoit à propos , & fans rien perdre
es matériaux mis en expérience. Cet appareil
confiftoit en un grand matras de verre , terminé
à fon col par une virole de cuivre foîidenjent
maftiquée , dans laquelle fe viffoit un tuyau
coudé, garni d’un robinet. A ce tuyau s’adap-
toit un récipient de verre à trois tubulures ,
dont l’inférieure communiquoit , à l’aide d'un
tube de verre muni de cfeux robinets , à un
flacon, lequel fervoit à arrêter & recueillir
l'ecume liquide qui montoit du matras. Le récipient
étoit fuivi d’un tube de verre malliqué
à fes deux extrémités dans des viroles de cuivre
, & afiez courbé dans fon milieu pour retenir
un fel très-déliquefeent, tel (fige du muriàte
calcaire defieché , dèftiné à abforber l’humidité
entraînée par le gaz., à defîecher & à' déterminer
ainfi la quantité d’eau élevée en vapeur
avec le fluide élaftique j enfin , ce tub>é
aboutiflbit à deux bouteilles aux deux tiers remplies
de lefiive alcaline cauftique, dont l’ufage
devoir être de condenfer 8 c abforber le. gaz
acide carbonique, de maniéré à en faire apprécier
exactement la quantité. De la fécondé bouteille
partoit un dernier tube , dont l’extrémité
reçue dans une cuve pneumato - chimique ;s’qu-
vroit fous une cloche pleine d’eau. Toutes les
portions de cet appareil étoient réunies les unes
aux autres par des vis & des éçrous:i;lçs points
de contaél entre elles étoient garnis de cuir gras
gros grains. liv.
'j
onces gros grains.
5 44,60)>411 12 6 i , ) 6
2 2 8 ,7 6 . |
2 71.40;, 6 9 6 8 ,7 0
s 9. 5° }
4 79.o o Ih 8 11 4 . J 9 jOo
5 i »94
Total 5-10
qui bouchoit tout paflage à l’àir j chaque pièce
étoit armée de deux robinets , de maniéré qu’on
pouvoit la fermer à fes deux extrémités , 8 c
pefer chacune féparémênt à toutes, les époques
ide l’ex-périence.
Quelques heures après que le mélange a été
mis dans l’appareil, la température du lieu étant
,'de iy degrés , les premiers lignes de la fermen-
• tatibn fe font maiiifeftés j la liqueur s’eft troublée
8 c couverte d’écume s il s’en eft dégagé des
bulles qui ont été en augmentant j l'écum,e
de la furface étoit mahifeftenrient d e . la levure
qui fe féparoit j ces phénomènes ont.dujré quelques
jours -avec la même force , ils fe font ensuite
appaifés y fans que le mouvement inteftin
celfât entièrement, & çé n’a été qu’après un
temps afiez long que la fermentation a été
achevée.
L’acide carbonique fec;obtenu dans cette expérience
a été d e .3y livres, y onces, 4 gros,
19 grains. Il a entraîné avec lui 13 livres , 14
onces, y gros d’eau j il eft relié dans le matras
une liqueur vineufeilégérômeut acide, d’abord
trouble, mais qui s’eft bientôt éclaircie d’elle-
même , en laifiant dépofer une portion de levure
î - elle pefoit 46Q liv. 1 r onc. 6 gros yy gr.
L/analyfe de cette dernière, qui étoit le produit
de la fermentation * eft ce qui a donné le plus
de peine à Lavoifier j elle.étoit compofée d’eau,
d’alcool , d’acide acéteux , d’une portion de
fucre non décompofé & de levure. I.es réful-
tats de l’analyfe. & des proportions des principes
de chacun d.e. ces corps font préfentés
dans deux- tableaux que nous; allons tranferire ,
8c qui., comparés, .auxipiiécécjens , offriront au
leéleur des rapprochemens intérelïans*