
travail , fi heureufement entrepris , ne produire
les plus grands & les plus utiles changémens
dans l'art difficile de guérir. Mais il faut pour
.cela renoncer à toute hypothèfe, accumuler les
expériences 8c les recherches , ne pas admettre
trop vite les analogies, ne pas tirer des conclusions
trop précipitées, fe. fouvenir toujours
que la phyiîque des animaux eft la plus compliquée
& la plus difficile, que les effais y font
expofés à mille lources d’erreurs & d’iliufions,
& qu'il eft d'après cela néceffaire de multiplier,
& de varier tellement les expériences , qu'on nérï
puiiïe élever aucun doute raifonnable fur leurs
réfultats & fur les inductions qu'on doit en tirer.
Chaque humeur & chaque folide des animaux
exige plus que jamais encore un examen foigné ,
une analyfe exade 8c comparée dans les diver-
fes claffes des animaux , à différens âges, le
même animal, 8c furtout dans l’état' fain & dans
l’état de maladie. Le fang des quadrupèdes ovipares
, des ferpens , des amphibies,- des poif-
ions, doit être analyfé comparativement à celui
de l’homme, des mammaux , & des oifeaux ; il
faut fuivre ce travail dans le foetus , dans le fu-
jet attaqué d’inflammation, dans le fcorbutique,
le chlorotique , l’ idérique , le fcrophuleux , le
vénérien très prononcé , ou à des degrés confirmés
de chacune de ces maladies; il faut le pour-
fuivre jufque dans la claflfe des mçllufques 8c des
infedes , & y interroger la ligueur qui. y tient
lieu de fang. Ce beau travail eclairera fur Thé-
matofe , la relpiration, la tranfpiration 8c leurs
rapports avec les autres fondions feront bientôt
iaifis.
Le lait a déjà fait le fujet de beaucoup de recherches
; mais on n’a point encore une analyfe
fatisfaifance 8c complette du co.Joftrum , du lait j
de femme , de celui des quadrupèdes carnivores,,
comparé au lait des herbivores ou des frugivores
j on n’a pas affez exactement déterminé
l’influence réelle qu’ il reçoit des alimens, des
médicamens, des poifons , des paffions auxquelles
les médecins font jouer un fi grand rôle dans les
chàngemens qu’il éprouve ; on ne fait pas en quoi
confîfte la différence certaine qui exifte entre le
fucre de lait & le fucre proprement d it , le fucre
végétal; on ignore celle qui fe trouve entre la
matière caféeufe & l’albumine du fang 5 on ignore
auffi d’où vient la potaffe qu’on trouve fi fou-
vent dans cette liqueur, tandis que le fang contient
de la foude. Il n’eft pas moins effentiel de
déterminer fa formation , les rapports que le lait
a avec le fang , ceux qu'on n’a point allez faifis
entre ce liquide & la lymphe , & furtout les di-
verfes altérations qu’il éprouve dans les maladies
où il eft dévié , tranfporté, accumulé , coagulé ,
aigri, 8cc. dans fes couloirs ou dans des organes
éloignés de foh fiége.
| H n y a pas encore une feule analyfe, un premier
effai de la lymphe proprement dite j carie
férum du fang , i’eau amafîée dans les cloches
, des brûlures , fous les ampoules des véficatoires,
j des ventoufes , l’eau des hydropiques , tous j les autres liquides blancs qu’on a confondus avec
j la lymphe, ne font pas cette humeur , & ont
j peut-être des caractères tout différens. La lym-
! phe eft-elle comme tous ces liquides, une dif-
; folution d albumine ; eft-elle route coagulable
I Par |[e » les acides, l’alcool > n’eft-elle pas
j plutôt de la gélatine en diffolution, comme plu-
fieurs faits anatomiques & phyfiologiques me le
lont penfer j furtout l’abondance , & je dirois
prefque l’identité des vaiffeaux qui la renferment
avec les parties blanches , les lames cellulaires
, les membranes, les apouévrofes j dont
. la nature , diffoluble dans l’eau bouillante , eft
prefque_comp!ettement gélatineufe. Pour déter-
; miner ce point fi important & encore intaCt de
1 analyfe a.ûmale, il faudroit pouvoir puifer dans
les vaiffeaux lymphatiques ou a b forbans des animaux
la liqueur qui les remplit & qui s’y meut;
il faudroit en ouvrir les troncs fuperficiels , faire
des efpèces de lympkées, comme on ouvre les
veines fanguines fous-cutanées , comme on fait
des faignées.
II ne faut pas prendre pour elle le chyle qui
gonfle les vaiffeaux du méfentère quelques heures
après le repas , & qui n’eft pas certainement
de là même nature que la lymphe pure dans les
vaiffeaux abforbans. Ce liquide , premier produit
de la digeftion > conduira , lorfqu’on voudra
l’examiner avec le'foin qu’il exige, à Pana-
lyfe du fuc-gaftrique dans différens animaux j les
premiers travaux de Scopoli & de Vauquelin fur
cette humeur diffolvante, dont Spallanzar.i a déjà
prouvé les propriétés diffolvante 8c antifeptique
par des expériences fi multipliées & fi ingé-
nieufes, ne peuvent être encore regardés que
comme des effais préliminaires. II faut des recherches
bien plus exaftes , bien plus nombreu-
fes, fuivies fur le fuc gaftrique des carnivores
& des frugivores, ruminans & non ruminans,
des oifeaux & des quadrupèdes ovipares, des
poiffons & des ferpens , pour parvenir à acquérir
les connaiffances qui nous manquent encore,
& qui promettent tant d’applications utiles à la
phyfiologie & à la médecine.
La bile , confidérée dans diverfes claffes d’animaux
, où elle eft fi confiante ; la bile, qui a
fourni depuis quelques années tant de faits in-
téreffans & tant de vues nouvelles, comme on
l’a dit dans les articles précédons, doit devenir
encore la foqrce de grands travaux & d’utiles découvertes.
Il faut déterminer fa différence dans
les animaux qui relpirent & ceux qui ne refpi-
rent pas, dans ceux qui ont une véficule & cdeaunxs
ceux qui n*en ont pas j il faut connoître exactement
la nature de fa matière colorante , les altérations
dont elle eft fufceptible , fi elle paffetoute
entière & fans changement, ou. fi el e éprouve
quelque mutation en arrivant dans les divers organes
où elle s’épanche > il faut rechercher pourquoi
les concrétions biliaires humaines diffèrent
tant de celles des quadrupèdes j quelle eft la rai-
fon de la préfence de l’adipocire criftalline dans
les premières. Il faut fur-tout apprécier avec
exnéiitude ce qu’elle opère dans le duodénum
fur la maffe alimentaire déjà ramollie ou diffoute
dans l’eftomac, rechercher fi elle eft décompor
fée , fi c ’eft par un acide, fi cet> acide eft naturel
à l ’animal ou formé par fes alimens, s’il n’y
a pas alors une précipitation , une réparation du
chime, c'eft-à-dire, des alimens déjà digérés, en
deux parties , l’une liquide qui conftituele chyle
abforbé tout le long des inteftins parcourus lentement
par cette maffe, l ’autre plus ou moins
folide , floconneufe , concrefcible, colorée par
la matière huileufe de la bile , jaunie & altérée ,
deftinée toute entière à former les excrémens.
Ce travail entraînera néceffairement l’examen des
excrémens eux-mêmes , fur lefquels il n’y a pref-
que rien de fait en chimie, & qui préfenteront
dans les diverfes claffes d’animaux des réfultats
très-utiles fans doute pour la connoiffance de la
digeftion.
Il faudra auffi s’occuper en même tems des
fucs falivaire& pancréatique, dont on n’a encore
que des notions très-Cuperficielles & fort
imparfaites 5 vérifier fi , comme je l’ai annoncé,
la falive vifqueufe, de fa nature, n’eft pas principalement
deftinée à abforber & à mêler de l’air
avec les alimens mâchés , à favorifer par là leur
digeftion , fi elle ne contient pas beaucoup de
phofphate de chaux , & lï ce n’eft pas ce fel qui
fe dépofe fur les dents de l’homme pour y former
ce qu’on nomme le tartre ; fi le pancréas,
d’après la nature de l’humeur qu’il filtre , autant
que par fa ftruétur-a anatomique , n’eft pas une
véritable glande falivaire ; fi les concrétions qui
s’y forment quelquefois ne font pas comme celles
qui naiffent de b falive, du véritable phofphate
de chaux ou de la matière des os , &: effayer
de trouver quels font les ufages vrais de ces deux
liquides dans la digeftion.
La graiffe eft également un fujet important de
nouvelles expériences & de nouvelles méditations.
Il refte à trouver fur cette efpèce d’humeur
fa véritable différence , ou les nuances chimiques
qui la diftinguent dans les différentes
claffes d’animaux, furtout dans ceux qui refpi
rent & dans ceux qui refpirent peu ou point,
ou au moins chez lefouels l’organe refpiratcire
a peu d’étendue & d’energie , fa différence dans
les diverfes parties ou régions du même animal,
C h i m i e . Tome 111.
fes rapports avec la b’ie , fa diverfe fufibilité , fa
concrefcibilité, fa criftall fabilité , fa diffolubi-*
lité dans les alcalis & dans l’alcool, & déterminer
ainfi la véritable caufe de fa formation y les
ufages qu’elle remplit, fi le principal de ces ufages
n’eft pas d’abforber un excès de matière^ corn*
buftible du fang, ce qu’elle devient dans l’amai-
griffement ; fi elle fert de nourriture intérieure
aux animaux qui dorment dans l’hiver , & ce qui
lui arrive pendant leur hivernation, ainfi que ce
qui fe paffe dans le même tems chez ces animaux
par rapport à la refpiration qui paroit y
être, finon interrompue , au moins extrêmement
rallentie ou prefque nulle •, furtout en raifon du
peu d’air dont ces animaux femblent avoir befoin
en fe renfermant auffi foigneufement qu'ils le
font. Ces recherches doivent être étendues,
foit dans les animaux qù-’ on engraiffe avec des
alimens très-nourriffans & très - abondans , foie
dans les diverfes affeérions morbifiques qui attaquent
cette humeur, & fi fouvent la bile en même
tems , foie dans cet art cruel , inventé pour
les délices de la gourmandife, de faire croître le
foie des volailles, en amaigriffant d’ailleurs leur
peau & le refte de leur corps.
Les fondions des reins , des uretères, de la
veffie , la féciétion de l'urine, font encore un
des objets qui doit occuper le plus les chimif-
tes, St qui promet le plus d’applications utiles à
la phyfiqiie animale. Ces fonêtiôns jouent un
grand rôle dans l'économie* des animaux , & on
ne fait pas encore probablement jufqu’où elles
s’étendent. L’extrême promptitude avec laquelle
l’odeur des alimens & la boiffon abondante fem-
blent fe porter par la voie des urines , l'influence
fi remarquable & fi aêtive qu’y exercent les af-
pi-rrges, la térébenthine , par rapport à l’odeur
qu’elles lui communiquent, la couleur qu’y portent
plufieurs matières colorantes , & en particulier
la betterave , la garance , la rhubarbe ,
annoncent qu'il femble y avoir une communication
prefque direéfce entre l’eftomac & les
rein^ ou la veffie ; plufieurs anatomiftes ont même
penfé qu’il exiftoit des canaux immédiats entre
ces vilcères, mais jamais on n’a pu les démontrer
j la chimie pourra faire ici ce que l’anatomie
a biffé intaâ:, & trouver d’où provient ce
rapport de nature & d’aélion entre les alimens ,
les médicamens & l'urine. Une foule de recherches
8c de faits utiles fe préferttenr encore à
l’efprit du chimifte qui connoît bien l'état aétuel
de la fcience dans l’examen des urines-j après
avoir déjà tant enrichi l’art de l’analyfe , cette
liqueur promet encore de l’enrichir bien davantage.
La comparaifon dans les quadrupèdes frugivores
8c carnivores avec celle de l’homme ,
comparaifon qui a dêtà prouvé que cel e des
premiers ne contient point d’acide ni de fels
phofphoriqUvS, mais de l’acid.’ benzoïque & un