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Ce dernier afpeft , Cous lequel on doit voir
aujourd'hui la chimie dans toute fa pui fiancé
dans la plus utile influence qu'elle puiffe avoir
fur la fciençe de ia nature, diffère 8c s'éloigne
fur tout le plus vie l'ancienne marche qu'.éljé tenoit,
lorfqu'elle n’ avoit pour but que de tir^r des
médicamens des plantes» ou déclairer les procédés
des arts qui s’occupoiex\t de leurs différentes
parties. Avant les découveites de la chimie
pneumatique., on ne pouvoit avoir abfolu.ment
aucune etpérance de voir ht chimie expliquer les
phénomènes de ia végétation , & aujourd'hui
c'eft un des points .les plus effentiels de cet-e
fcience que de déterminer ce qui le paffe dans
la germination , la foliaifon, l'a^croilfemept du
bois, la florsifon, b fruébficadon , la formation
de toutes 1; s matières diverfes qui fe fuccèdent
dans les différens organes des yëgétaux , fuivant
les faifons & l'âge des plantes, la véritable caufç
de la ceffation de végétation & du fommeil des
plantes pendant l'hiver> en un mot, tous les
changemens fucceftîfs qui ont lieu dans l'intérieur'
de ces êtres, depuis leur premier développement
jufqu'à leur mort. Ce n'eft que d'elle qu'on apprendra
d'où les, végétaux tarent leur 'nourriture,
I influence dLe&è qu’y portent le terrein , l’at-
.mofphère , l’eau , la lumière & le calorique,
l ’utilité des engrais, des amendemens , du mé- ,
large & du mouvement des terres. L'agriculture À
en tirer« , fous le dernier point de vue, les plus i
utiles fecours y fa théorie deviendra quelque
jour , une des parties les plus effentielles de
la fcience chimique , & Ion perfe&ionnemêht ne
fera plus qu'un des procédés ou qu’une fuite de
procédés tirés de fes expériences. Tous les arts qui
s ’exercent les matières végétales , fur les
moyens d’en reconnoître, d'en fëparér' 8c d'ën
purifier les produits avanceront progreflivement,
& les foins des chimiftes fe porteront fpéciale-
ment fur.lës fubffances nourriffantes » fur ia matière
fucrée , fur la fécule amylacée , 'fur les
huiles, fur ies parties colorantes. Ils s'attachèrent
encore à efiayér de créer par l'art 8c à l'aide
des.modifications qu'il fait donner aux diverfes"
matières végétales, des çonverfions des unes dans
les autres qui, augmenteront finguliéremènt leur
prix comme leur utilité 5 c’eft ainfi qu'il eft
permis d’efpérer dé changer les fucs fades en
fucs fucté.<, les huiles liquides en matières concrètes
&céraçées , les couleurs faibles, ou changeantes
en couleurs vives-, fortes & folides..
On voit donc qu'il s’ouvre à leurs travaux un
champ immenfe de découvertes , & uns efpé-
rance bien fondée de les voir récompenfés par
une piompte application au bien des hommes 5
on voit en même tems que pour réuflîr à remplir
les vues que l'état a&uel de l'analyfe chimique
permet d’avoir fur les végétaux , les travaux j
c h 1
qu’elles exigent doivent être partagés entre un
grand nombre d’hommes, placés en quelque forte
dans des circonftàncès particulières , 8c les recherches
dirigées dans un efprit relatif au point
que chacun d'eux voudr.a traiter > ca,r plusieurs
routes font Ouvertes en même tems ici aux travailleurs.
Les uns dans des ferres 8c des eonfer-
vatoires de botanique près de ces riches étabiif-
femens qui honorent les nations, comme les
grands jardins-de botanique , fuivront avec foin
les effets du développement & de l'évolution des
germes , des premières feuilles dans des terres
préparées à deiîein & bien connues d’av nce r
8c pourront ainli inrerroger la nature, dans l’ac-
croifièmenc des végétaux les plus difparates, tt lies
que les'fougères, les palmiers, les m oufles, les
lichens , les champignons, en joignant fans ceffe
à leurs dbfervations l’analyfe de ces d.verfes pro-
d= étions, & la-comparaiCon de leurs propriétés
chimiques avec d’autres' fubftanccs végétales.
Ceux-ci pourront fuivre avec moins de frais
& dans des lieux, comme -avec des procédés
plus acceffibles à leurs moyens ; la germination
des grain-.s à un feul ou à deux cotylédons
, en déterminant ce qui a rive à l’eau , à
la terre, à l’air , Bec. de Ja parc des plantules
qui y puifeht leur fuhfiftance. D’autres examineront
chimiquement les différens matériaux
'immédiats des végétaux en rechercheront la
proportion des premiers principes , compareront
par une analyfe plus-recherchée la nature'intime
de la fève , des fucs, dè l'extrait » du muqueux ,
du fucre » des acides, dés huiles flnides & concrètes
, des fécules , du gluten., du ligneux ,
des parties colorantes, du tannin , de la réfine
éhftique , des gommes réfines ; ils s'occuperont
furtout du paffage où de la converfion réciproque
de celles de cçs fubftancës qui font ru'ceptibles
de fe changer les unes dans les autres , pour
expliquer comment cette converfion a lieu dans
l'intérieur' même des végétaux , 8c jufqu'à quel
point l’ art du cultivateur peut commander en ce
genre à .la nature, ou l'art. du chimifte peut
.imiter ces util.-s transformations. Ils emploieront
avec le plus grand foin; l'action des acides fu’fu-
rique , nitrique 8c muriatique oxi.géné , ainfi que
celle des oxides métalliques, qui jette tant de
lumières fur lés altérations des matières végétales.
Le pharmacien devra furtour, muni de toutes
les connoiffances &. de toutes les reffourcesm-
génieiifes que la chiv^te fournit aujourd’hui à
Panalyfe végétale, rechercher à bien connoîtr.e
les mélanges extraétifs, les fécules colorées &
gîutinsufes , les Tels natifs, des plantes , les huiles
volatiles , les huiles, fixes ,. les corps réfineux ,
les changemens que. toutes ces matières éprouvent
par différens degrés de cemoérature , par le
conta# de l’air > 8cc. les effets comparés des
macérations, des infufions & des décoctions fur
les matières végétales fèches, les réactions réciproques
que les divers matériaux immédiats des
végétaux exercent les uns fur les 1 autres.. Le.
pharmacien n’oubliera pas, qu'occupé fans celle
des traiCemens d'un grand nombre de ffubftances
végétales 8e des diverfes préparations que fon
art lui preferit fur ces fubftanoes , il . eft pUcé
dans les circonflances les plus favorables pour
en étudier la nature , oour en bien déterminer
les propriétés comparées & les diverfes altérations,
&c que c’eft à lui qu'il appartient de faire*
faire de véritables progrès , fi g ne regardant pas
fon art comme une fimple répétition de procédés
, 8c l’éclairant fans celle du flambeau de la
chimie moderne , il y porte l'ardeur 8c l ’attention
d’un obfervateur.
Les chimiftes devront aufli vifiter fouvent les at-
teliers où l’on travaille toutes les fubftances végétales,
où on leur fait fubir des altérations quelconques,
te’s que les,raffineries de tartre, de fucre,
de Tel d’ofeilîe , de blanc êc d'acétite de plomb ,
de vert-de-gris 8c de verdet, de vert de veille ,
detournefoljd'oifeilîe, de rocou, d'indigo & autres
matières colorantes préparées en grand , les
prelîoirs à huile , les favoneries, lès brûlei ie's de
vin & d'eau-de-vie, les atteliers de diftiliareurs É
de liquoiilles , des confifeurs , les moulins a fa
rine, à bois de teinture, à rabac, les boulangeries^
les pâtifieries , les pain-d’épiceries , les amido-
neriës , les papeteries, les rotoirs de chanvre &
de lin, les toileries, les voileries, lésblari-
chifferies, les atteliers de teintures en fil , en.
cotoa , ceux de toiles peintes, ceux des vigne-
ions , des bralleurs , des vinaigriers , les magafins,
de diverfes matières végétales. Dans tous ces
lieux, l'obfervateur attentif 8c p.hiIofophe né né:
gligera’ aucun des faits qui s'offrir a à fes regards j
il notera tous les changemens , toutes les modifications
fi variées quep’roüvent les fubflanoes végétales
dans les divers traitemens auxquels on les
foumet} il aura beaucoup à profiter de la fuite
& de l'enfemble de pareilles obf:-rvat,ions ; il y
verra continuellement des phénomènes qui tiennent
pliis ou moins aux nouvelles découvertes de la
chimie', qui les éclairent 8c en reçoivent en
même tems un nouveau jour 5 il en formera
bientôt un enfemble de vues 8c de. réfultats, qui
étendront bèaucoup la chimie végétale. 11 feroit
fort à defirer pour les progrès de la fcience que
fous les hommes qui exercent des arts chimiques
quelconques fur les végétaux ou les diverfes fubl-
tances végétales , pôrtaffent dans cet exercice
affez de conriaifiances * préliminaires 8c théoriques,
pour en faire par eux-mêmës des applications
continuelles à l’avancemént dé la fcience j
celle-ci feroit alors de bèaucoup plus rapides
progrès : il faudroit pour cela que tout homme
qui fe propofe d'établir ou de diriger une manufacture
quelconque , commençât par étudier
avec foin la c h im ie & né fe livrât 'aux opérations
manufaCtarières qu’après avoir acquis une
étendue de conoiffances affez grande pour pouvoir
faifir & expliquer tous les phénomènes des
arts, ainfi que déterminer la férié 8c mêmi la
caufe de ceux qui n’ont point encore été obfer-
vés ni décrits, pour concevoir d'ailleurs le rapport
de ces faits nouveaux avec ceux qui font
déjà connus. Mais avant que ce voeu foit rempli
, c'eft aux chimiftes eux-mêmes i recueillir
toutes les obfer.vations que les arts & les manufactures
de matières végétales préfentent, & à
1?n faire voir la liaifon intime avec la théorie générale
de la formation & des altérabilités de ces
matières. C'eft encore à eux à commencer ces
utiles & importantes applica.ions des connoiffances
chimiques modernes à l'agriculture , Oe
premier des arts $ qui femble ne puifer encore
les procédés que dans une routine fouvent aveugle,
& dont les premiers principes, déjà entrevus
par Bergman & Lavo’fier, four entièrement
dépendans des forces atiraCtivcs que la nature a
établies entre tous les molécules de la matièie.
Il a été prouvé dans les paragraphes pre'cé-
dens, qu'à peine commencée fous de nouveaux
aufpices depuis une quinzaine d'années, l’analyfe
des'marères ânimales a déjà fait des progrès
remarquables, 8c conduit à des découvertes auxquelles
rien né faifôit foupço'nnèr autrefois qu’on
eût dû s’attendre. Ce régné promet encore une
.foule dé vérités inattendues, & offre aux chi-
miftès une lifte immenfe de recherches de la plus
grande importance. Il eft bien reconnu que dans
l'état où fe trouve aujourd'hui la ch;mie , la phy-
fique des animaux doit en attendre les plus puif-
fans fecours, 8c que ce n'eft même que de fts
travaux 8c de fes réfulta s qu'el e peut les attendre.
On ne doute plus qu'il ne fe paffe dins
l'économie des animaux une fuite d’effets ou
d'aétions chimiques qui en modifient condriuel-
lêment les fluides, qui changent fucceflivement
leur nature ; que les folides qui ne fe forment
que de l'épaifliffement, de la concrétion , de la
criftâffifation des matières diverfes contenues
dans ks liquides, jouiffent de propriétés caraétë-
rifées, de différences enti’eux qui ne peuvent
être appréciées que par les lumières de la chimie
j que les altérations dont les unes & les autres
font fufcéptibles dans les maladies , font également
8c uniquement du reffort de cette fcience ,
qu elle feule peut en faire connoître 8c en déterminer
exa&ement la nature, la caufe 8c les
effets 5 enfin que h plus grande partie des fonctions
exercées par le corps des animaux vivans,
foit dans l'état fain , foit dans l’état de maladie,
font dues à des aélions , à des phénomènes chimiques
, ou au moins en font naître une férié non
interrompue qu’on a'commencé à décrire & à
j expliquer. Aucun anatomifte ou phyfiologifte habile,
aucun médscin inftruit ne doute que ce