
charbon commun dans leurs expériences, |les :
chimiftes ne le,prennent prefque toujours qu’en
raifon de la matière charboneufe pure qu’il contient
, 8: pour porter cette matière feulement en
vertu des attractions qu’elle exerce fur d’autres
corps auxquels ils veulent l’unir , ils dévoient j
chercher un nom qui exprimât fpécialement cette
bâfe charbonneufe , ce. principe véritable du
charbon qui produit tous les effets particuliers qui
le diftinguent. Lès alchimiftes ou même les cni-
miftes , qui ont pris la fcience pour ainfi dire des
mains de ces hommes fe feroient fervis de l’ ex-
prefüon -, 1 ‘.ame, du .charbon ,, ^ejjfinte , ou YeJ-
prit de charbon } mais en, cherchant un langage
non équivoque , aufli vrai que fimple , & répondant
à la nature ou aux propriétés des corps
que nous avions à dénommer , nous devions
bannir tout ce qui tenpit aux faux principes , aux
idées plus ou moins ridicules 8e exaltées des .alchimiftes.
Dans ïè choix du mot dont nous avions
befoin , nous avons préféré un mqde de dénomination
qui tint à celles déjà adoptées , qui en
tirât fon origine immédiate , 8e qui en énonçant
fon étymologie rappëllât en quelque forte , 8e
même fans ambiguité.la fubftance que nous voulions
défi gner. Ainfi, lé mot carboné qui a tous
ces care&ères, exprime clairement un corps
contenu dans fccharbon , fai faut la -bâte , le,
principal caractère du charbon , le confriruant
même te l, 8e fa différence d’avec le niot charbon,
dont quelques perfonnes nous ont fait un reproche
parce qu’en général elles ne nous ont pas entièrement
compris, eft un de "fes principaux avantages
, puifqu’elle eft deftinée à faire fentir qu’il
eft queftioii dans ce mot d’un corps qui a de très-
grands rapports avec le charbon proprement dit ,
8c cependant n eft pas du charbon. Ainfi, l ’on ne
pourra plus, d’après je fimple èxpofé que je viens
de faire , douter de la néceflité où nous [étions,
pour fimplifier la langue chimique '& pour donner
des idées exaéles fur la théorie des combinâlfons
chimiques , de trouver un nom qui appartient
fpécialement à la matière propre & pure du
charbon , & qui en obligeant de la confidérer,
dans le charbon entier , put conduire la penféé à'
ifoler cette matière d’avec toute la maffé du
charbon , & à la fuivrfe >dans toutes les combi-
naifons qui lui font propres.
Il eft effentiel de remarquer que le carbone ne
peut pas être confondu avec l’être idéal nommé
phlogiftique parStahl , quoique ceux des chi
miftes qui continuent à adopter la théorie dé
Stahl & à vouloir la placer aux nouvelles découvertes
,, puifient penfer qu’il eft véritablement le
même que ce principe hypothétique. Le phlo-
giftiqùe de Stahl qui n’éroit autre chofe que le
feu fixé dans,1a théorie pure de ce phyficien , défigurée
depuis par tant de modifications 3i d’explications
incohérentes , n’avoit pas plus de poids
que le feu lui-même. Le carbone eft au contraire
une matière péfante dont nous eftimons la quantité
réelle ou les proportions dans lès combi«»
naifons d’une maniéré très-ex aéte. Le phlogiftique
de Stahl fe fixoit dans les corps qu’il phlo-
gfltiguoit fuivant fon auteur , & c’étoit à fa pré- .
fencequ’étoientdues la couleur, lacombuftibilité, ■
la volatilité & fur-tout les propriétés métalliques.
Le carbone dans toutes les opérations , où Stahl
croyoit que le charbon faifoit paffer fon phlogif-
tiquc dans les corps , abandonne bien en effet le
charbon, fe porte fur les corps que Stahl db
foit fe phlogiftiguer tels que l’acide fulfuiique,
les oxides métalliques, l’acide phofphorique,, &c.
mais au lieu de s’unir à ces-corps, de s’y fixer
fans augmenter leurs poids , & de leur donner les
propriétés du foufre des. métaux 8c du phofphore
par fa fixation , par fa préfence, comme Stahl le
difoit du phlogiftique ,1©'' carhon,?e leur. enlèvô :
au contraire un principe qui s’y et oit uni pendant.
leur combuftiorr, qui les avoit convertis en
acides & oxides , qui aVoit àugmënté lé. poids,
& enfe combinant avec le principe quii leur arrache
en raifoirde favplus grande afnnité-pour lui,
il Les fépare, il les dégage .fous la forme d’un
nouveau compofé » il diminue donc leurs poids ,
& il n’entre pour rien dans leur eompofition , ,de
.forte qu’on ne peut pas attribuer à ; fa préfence
‘dans les corps la propriété combuftible ni aucune
des autres propriétés' qu’ils acquièrent eh r#pàf-
fant à l’état où iis étoient avant leur combuftion.
Enfin , le phlogiftique- de;Stahl eiv quittant le
charbon où il exïftoit fuivant lui en grande
quantité pour s’unir, à d’autres corps pouvoit
erre fépare de ceux-ci.fous forme de feu , 8c cette
idée ne peut pas être appliquée au carbone qui
jconfervè toujours fes propriétés 8e fa pâture , qui
Jne doit pas être confondu avec le feu , 8c qui
;peut toujours repaffer à l’état de charbon ,
lorfque l ’on emploie les moyens convenables pour;
le tirer de fes combinaifons les plus intimes. Les,
idées fur ^identité du phlogiftique de-Stahl avec-
nôtre cdrbonne , ne peuvent • donc ex'fter que
; dans 'les éfprits accoutumés à regarder le charbon
l comme une forte de mine ou de carrière de phio-.
| giftique , 8c tellement prévenus fur l’exiftence de
| ee principe admis par Stahl qu’ils croient piiefque
| religietifement à cette exiftence. Rièn n’eft fi fréquent
dans les livres de ces chimiftes'que le phlogiftique
du charbon j fuivant plufieurs d’entre eux,
; cent livres-de charbon contiennent prefque cent
livres de phlogiftique , aufli quand on brûle du
charbon -, on ne fait autre chofe dans leur ^théorie
que de-mettre le phlogiftique de Stahl en liberté,
aue dede développer, en feu libre y que de le convertir
en feit* mais ils ignorent compîettement ce
qui fe paffè dans'la combuftion du charbon 8c
c eft de cette ignorance que dépend leur erreur.
C ’eft cependant de la combuftion du charbon ,
& de ce qui arrive au carboné pendant cette ’
combuftion , qu’il faut être bien inftr.uk pour
concevoir toutes les propriétés de ce corps , &
pour pouvoir en fuivre les effets dans tous les
autres \ c eii donc par l’expofïtion de la théorie
très-bien connue de cette combuftion que je vais
commencer l’hiftoire du carbone , après avoi;
rappelle encore ici que le carbone étant contenu
eu très - grande quantité dans le charbon
dont il fait la bàfe’> & n’y étant mafqué
•que par un peu de terre & de f. (s plus ou
moins fixes, c’eft au mot carbone qu’il eft nature:
de faire l’hiftoire exaéte 8c complette de ce principe
naturel -, car on verra bientôt qu'il a tous les
caractères d’un principes Quand on. chauffe.du
charbon ordinaire avec le contât! de l'air , 8c
■ quand on élève fa température jufqif à le faire
rougir , ou quand au milieu de l ’air on le touch--
avec des corps fecs déjà enflammés tels que du
bois, du foufre , du .phofphore , de l ’amadou
du linge brûlant , le charbon prend feu, h
•s’allume , il. brûlé avec une flamme ou une rougeur
forcé j il- diminue de volume & d-ifpar'oit
enfin peu à peu en ne iaiflant après lui qu une
quantité de cendres allant rarement au - delà d-
quelques centièmes , 8c plus ou moins abondante
& diverfifiée. fuivant la nature du charbon que
l ’on à pris; Les différences du charbon ne pro venant
que de celles des corps d où on fa retiré ,
c ’eft à l’article du.‘charbon qu’il fera néceffaire de
les exprimer avec le detail convenable , _& ilhe
faut infifter ici que fur ce qui arrive au ; carbone
plus ou moins abondant, denfe ou raréfié qui y
eft continu , 8c cela dans des temps plus ou moins
longs-, fuivant fa denfité même, mais conftaniment
de la même manière. Si les chimiftes n’a voient
jamais-fait :cette expérience qu’à- la manière de
tous les hommes , c’eft- à-dire dans des vaiffeaux
ouverts,, dans des fourneaux plongés dans l’air ,
il eft vraifembhble qu’ils n’auroient jamais connu
ce qui fe pafle dans cette opération. Ils auroient
tout au plus arrivé comme Stahl à rpenfer que la
matière du charbon devient du feu,&.ilsfe l'eroient
arrêtés à la.théorie'du phlogiftique, qui fernble
en effet être la limite de l’intelligence.humaine en
ne confi-lérant la combuftion du charbon que dans
î ’atmofphère. En dernière analyfe, la . théorie,, de
Stahl, 8c fur-tout des chimiftes qui l’ont htivi,
fe réduit à regarder la combuftion du charbon,
comme une converfîon de cette matière en lumière
8c en chaleur , 8c comme une diflipation,
une évaporation de.ces deux principes dans l’air.
De quelque manière qu’on la retourne , cette
théorie fe réduit à cette idée , elle eft la plus
fimple que l’on puiffe , que l’on doive même fe
former en voyant le charbon difparoître 8c fe
fondre dans l’air , fe confumer totalement y fe
réduire à quelques atomes de cendres, en donnant
de la lumière 8c.de la chaleur. U étoit très-
natufel de regarder le charbon comme un com-
CaiMit, Tome IJ J,
pofé de lumière 8c de chaleur fixés, que I’in-
fiammution fépare 8c volatilife , 8c qui fe réduit
en fes priricipes par la fuite de ce phénomène. On
voit pourquoi d’après cette idée fimple qui étoit
la baie de la théorie de Stahl , la plupart des
chimiftes regârdoient le charbon comme du
phlogiftique prefque pur. C’étoit fur-tout à celui
des'huiles 8c fpécialement au noir de fumée provenant
de la combuftion des réfines liquides, que
•’on atttibuoit cette nature de phlogiftique. Voyc[
le mot PHLOGISTIQUE.
Mais depuis que les phyfi ciens ont fenti l’importance
de s’occuper de la nature de l’air, de
non influence dans la combuftion, 8c ont imaginé
d’ifoler une partie connue de ce fluide pouf y
opérer la combuftion , de manière à pouvoir apprécier
ce qui arrive, foit de la part du combuf-
tible , foit de la part de l’air ; ils'ont bientôt reconnu
que ce qu’on avoit dit jufqu alors fur l’inflammation
dû charbon , 8c fur fa converfion en
lumière 8c en chaleur ou en feu libre , n’étoit
qu’une hypothèfe inadmiflible. Iis ont vu que le
charbon ne perdoit réellement rien de, fon poids
dans la çornouftion , qu’échauffé au rouge il fe
volatilifoit 8c fe diffolvoitdans l’air, que l’on re-
rrouvoit dans celui-ci toute la quantité du charbon
qui a difparu j qu’en fe condenfant ou fe refferrant
fur lui-même à mefure que cette diffolution du
charbon avoir lieu } l’air changeoit de nature ,
devenoit, dans'Ia partie qu’on y nomme air vital, un
acide particulier qu’on avoit défigné jufque-là
feus le nom d’air fixe ou acide crayeux mais qu’pu
a bientôt nommé acide carbonique. Alors la
théorie de la combuftion du charbon eft devenue
aufli claire 8c;aufli exaéie quelle étoit jûfque là
obfcurè 8c incertaine.. Comme toute la malle du
charbon né difparoît point, & ne partage pas ia
fluidité élaftique ainfi que l’invifibilité de l ’air ,
comme.il refte un réfidu de cendres compofé de
fels terreux ou alcalins , dont la proportion varie
fuivant la nature du charbon , comme il le forme
de l’eau qui tient à la préfence de l’hydrogèrie
dans le charbon , on fent qu’il étoit néceifair«
de défiguerla matière proprement chArboneufe,
celle qui Forme l’acide carbonique par fa combi-
naifon avec l’air vital de i’atmofphère, & qui
n’étant ni de la cendre , ni du gaz - hydrogène ,
eft feulement mêlée ou même combinée avec
ces deux dernières fubftances ; c’eft l i le carbone
Ou la matière charboneufe pure.
On peut dire-que-lexara&ère principal, le
caraélère fpécifiqàe Bc particulier qui diftingue
le carbone de tous'les autres corps, confifte dans
fa combuftion, dans fon union avec l’air vital
qui le diffout en fluide élaftique, en formant la -
cide carbonique. Il forme donc feül & exclu-
fivemeht le radical , de l’ âdde carbonique. Dans
l ’hiftoire de li formation de cet -acide, donnée
G