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On s’apperçut prefque fur le champ dans les
.cours de l'extrême facilité que cette nomenclature
répand oit dans l’ecude, 8c de la (ingulière
-différence qui ailoic fe manifefter dans f.s progrès.
En effet, avant 1\ fage de ces dénomination*
méthodiques ,s un étudiant pafî'oit p’u-
fieuis années à des cours , & ne faifiiToit les
.premières vérités chimiques , ne retenoit fur-
tout les principales combinaifons qu’ii avoit be-
foin de bien connaître , foit pour fart de guérir;,
Toit pour les -travaux des manufactures , qii'après
avoir reffaffé un grand nombre de fois les mêmes
■ faits, qu’après avoir plié avec effort fon efprit
à retenir les * noms bizarres & fouvent barbares
qui en exprimojent les réfultats. Dès qu’on
eut offert à leur intelligence le tableau de la nouvelle
nomenclature , l’intelligence vint au recours
de la mémoire j leur efprit, frappé par
la jufteiTe & la lignification exaéte des nouveaux
?nonrs, ainfi que par leur rapport 8c leur, difpo-
fition analytique , vit tout-à-coup difparoitre
les nuages qui /’avoient offufqué, & fe livra -,
avec plus d’ardeur à une étude qui, au lieu de
l’incohérence 8c de l’inexaétitude , ne lui offroit
plus q’une étroite liaifon entre tous les faits,
6 une peinture fidelle des phénomènes. Auffi
une expériencé prompte 8c décifive apprit-elle
aux profeffeurs & aux élèves, dès 1787, que
ce changement de nomenclature rendoit l’étude
fi (impie 8c fi facile, que quelques mois fuffi-
foient pour concevoir les bâfes de la fcience ,
■ 8c pour en retenir les principaux faits , tandis
qu’auparavant il falloir des années entières
pour acquérir quelques idées inexactes & inoom-
plettes de la chimie. On doit croire qu’une, pareille
circonftance n’influa pas peu fur le fort
de la nouvelle nomenclature, & qu’elle l’eut
bientôt décidé pour tous les hommes fans préjugés,
& dont le feul defir étoit de s’inftruire.
One fuite namrdie de l’adoption 8c du fuccès
de la nomenclature , fut que la théorie dont
•elle repréfentoit l’enfemble dans un cadre méthodique
, fut auffi beaucoup plus connue 8c
beaucoup mieux appréciée qu’elle ne l’avoît été
jufque-là. Le nombre de lies partifans augmen-
toit toujours, 8c celui de fes détracteurs 8c de
fes antagoniftes diminuoit j en forte que la mafife
des travaux chimiques entrepris depuis cette
époque , n’a plus fait qu’aggrjndit fon domaine,
.comme on va le voir dans la période qui fuit.
H U I T I E M E P É R I O D E .
Confirmation & confolidation de la Doftrine Pneumatique
par les découvertes faites depuis Vétabliffement
de la nomenclature méthodique jufquétn
1793.
Après l’heureux accord dont les chimiftes fran-
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çois vendent de donner l’exemple, en 1787
après les fuccès rapides que la nomenclature méthodique
avoit eus dans prefqueNtoutes les parties
de l’Europe , tous les obfticles dt.voient être
levés,, tous les efforts des chimiftes 8r des phy-
.ficiens dévoient former un concours de travaux
propres à leculer promptement les bornes delà
fcience, 8c à confolider-les nouveaux principes
fur lefquels la théorie pneumatique venoit d’être
établie. Quoique le nombre de fes adverfaires
ne fut peut-être pas diminué , quoique l’éclat
auquel elle étoit parvenue fut une nouvelle fource
où l’envie , l’ignorance, les préjugés , le pyrrho-
nifme, le doute philofophiqve même, pouvoient
chacun aller puifer des argumens contre elle,
leur force au moins étoit réellement très diminuée
, 8c leurs attaques beaucoup moins à craindre
, en raifon de l’extrême clarté des réponfes
que fes partifans avoient fur le champ à faire
aux objeaions. Auffi le fort de cette fcience toute
nouvelle continua-t-il d’être ce qu’il avoit été juf-
que-là j elle trouva fans ceffe, dans les difficultés
même qu’onjui oppofoit,des armes pour les détruire
8c pour rendre encore fes explications plus pré-
cifes 8c fes phénomènes plus connus. Auffi la marche
de Fefprir humain ne préfente-t-eile, dans aucune
autre portion de fon domaine, une accélération
auffi rapide 8c une progreflîon auflî remarquable.
En quelques années après 1786, une
foule de découvertes fe fuçcédèrentavec une incroyable
activité $ de nouveaux faits accumulés
de jour en jour vinrent fè joindre aux anciens,
8c confirmer toutes les bâfes dé h dodtrine pneumatique
, en les étendant fans ceffe. Entreprendre
de les décrire toutes dans cette période, qui
pourroit être étendue jufqu’au moment même ou
j’écris ceci, ( fruâidor , an IV delà République
Françaifeou feptembre 1796. ) ce feroit fe jeter
dans un Océan fans rivages , 8c enlever d’ailleurs
à chaque article de cet ouvrage lhiftorique particulier
qui doit faire partie des details deftinés
à chaque corps. H fera donc fuffifant d’expofer
fommairement ici une courte notice des principales
découvertes récentes, qui depuis l’etablif-
fement de la nomenclature méthodique en 1787
fe fontfiiccédées prefque fans interruption, 8c de
l’influence qu’elles ont eue fur l’aggrandiffement
comme fur la confolidation de la do&rine pneumatique
j on ne pouffera même cette notice que
jufquen 1793 , foit parce que les travaux faits
depuis cette dernière époque font très - connus
de tous les chimiftes 5 foit parce' que le plus
grand nombre des derniers ou des plus récens
n'a point encore re^çu cet affentiment que le tems
feul de quelques années néceffaires à leur répétition
, donne aux découvertes ; foit parce que
les circonftances de la guerre formidable que la
France a foutenue contre de nombreux 8c puif-
fans ennemis, ont interrompu nos communications
avec les nations qui cultivent la fcience
c h r
chimique» foit enfin parce que le-grand mouvement
8c le-grand intérêt excité par cette guerre
qui doit avoir tant d’influence fur le fort des
peuples de l'Europe , ont détourné l’attention
des hommes , 8c rallenti pour quelque temps
les progrès de la chimie.
Pour préfenter avec plus de rapidité 8c d ailleurs
avec plus de méthode une efquiffe des
accroiffemens de Ta chimie depuis 1787 jufqu’en
1793 , on ne fuivra pas exactement ici la marche
des temps- 8c un ordre chronologique exaét ; car
dans le court efpace de cinq à fix ans il fau-
droit alors pouffer I’exaétitude jufqu’à indiquer
les jours 8c pre'que les heures , puifque plaideurs
des mémoires, des difl’ertations, des ouvrages
même qui ont été pub iés dans le cours
dè cette époque, datent dés mêmes mois 8c
quelquefois des mêmes jours , comme cela a lieu
par exemple pour les. journaux qui paroiffent
chaque mois. Il n’y a que des- renfeignemens
donnés par chaque auteur qui pourroient faire
parvenir à ce genre d’exaétitude chronologiques,
& lorfque les circonftances heurewfes de J apaix
rendue à l ’Europe me le permettront, j’effayerai
ar une aétive correfpondance avec tous les
ommes qui cultivent l'a phyfique 8c la chimie ,
de me procurer les lumières néceffaires pour remplir
cette tâche utile. Mais en ce moment,,ou
le bruit des armes retentit encore , ou de grands
intérêts occupent les hommes 8c les féparent
encore les uns des autres, je ne puis offrir
qu’une ébauche très-incomplette , qu’un aperçu
général des travaux qui ont fuivi l’époque de la
nomenclature méthodique. Pour rendre les traits
de ce tableau plus faillans , j’ai cru qu’il falloit
prendre pour bâfe des détails qui lui appartiennent,
8c pour cadre qui les renferme , une çlaf-
fifiçation des phénomènes généraux de la chimie,.
te1 le que je l’ai offerte à l'articleAxiomes
de ce diélionnaire. Cet article , qui a été publié
a part, fous le titre de Pkilofophie chimique, eft
afîez répandu d’aiîleurs-parmr les amateurs de la
chimie , 8c affez connu de tous ceux qui la cultivant
.pour qu’il foit avantageux defuivre, dans \
l’efquiiie qui va m’occuper ic i, l’ordre fous lequel
j’y ai rangé tous les principaux faits de la
rcience. A la vérité,. |dNufieurs des-titres que renferme
la philofophie chimique femblent appartenir
moins à l’enfemble 3c alniftoire de la do&rine
pneumatique , qu’aux progrès* généraux de la
chimie 8c aux faits des combinaifons générales,
indépendantes ,des-phénomènes 8c des propriétés
des fluides éiâftiques. Mais, outre les rapports
plus ou. moins néceffaires qui exiftent entre cette
théorie 8c préfque tous .les faits de chimie, je
dois faire remarquer que fi ceux des autres titres
de la philofophie chimique, qui dépendent immédiatement
de la théorie pneumatique , admet-
tent exactement tous les détails qui appartien-
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tient aux découvertes les plus récentêsj, 8c fervent
à les offrir dans un ordre méthodique autant
que précis , le but que nous cherchons à
atteindre fera rempli , 8c les titres qui feront
comme étrangers à cette branche de l’hiftoire de
la fcience, pourront n’être qu’indiqués comme
faifant partie de la férié ordonnée des phénomènes
chimiques, fans exiger de détails qui nous
écarteroient trop de l ’objet qui nous occupe.
Cette manière de confidérer les derniers progrès
de la chimie pneumatique, fans les rapporter
à leur date exaCte ,, fans les expofer fui-
vant l’ordre févère au moins ou rigoureux de
. leur époque, fera marquée par un avantage important
c.u’on chercheroit en vain dans la méthode
chronologique. Au lieu de nous occuper
de l’art difficile dé fixer exactement les dates des
découvertes récentes, au lieu d’entrer dans les
difeuffions néceffaires pour acquérir' cette con-
. noiflance très-exaéle, difeuffions qui rallentiroiént
finguliérement notre, marche , 8c qui d’ailleurs
n’auroient pas tout le fuccès qu’on pourroit en ef~
pérer , parce que dans l’état où fe trouve la
fcience , les mêmes idées , les mêmes expériences
peuvent 8c doivent naturellement conduire
piufieurs phyficiens ou plu fleurs chimiftes*
en même tems à la même découverte j l’ordre
que nous adoptons fera difparoître les répétitions
8c les redites perpétuelles que la méthode
chronologique auroit exigées , 8c repréfentera
dans l’efprit des lecteurs avec plus de force 8c
de clarté -les progrès véritables de la fcience 8c
le point de perfectionnement où elle eft parvenue.
On y verra fur-tout, à l’aidé de l ’ordre
adopté, qu’aucune expérience , qu’aucune découverte
n’a porté atteinte à la doCtrine pneumatique
, 8c que celles même que leurs auteurs
n’ont faites que dans cette intention , 8c qu’ils
ont produites comme les plus propres à faire chanceler
quelques-unes des bâfes principales fur
lefquelles elle eft fondée, font plutôt capables
de leur, donner une.plus grande folidité 8c une
fiabilité plus „forte que celles qu’elles avoient
d’abord.
Quoique la plus grande partie de cette der*
nière efquiffe fur Thiftoire de la révolution chimique
moderne 8c de i’étabîiffement delà doctrine
pneumatique qui en a été le réfultat , ne
s’étende que jufqu’èn 1793 , parce que depuis
cette époque l’interruption dés communications
nous a peu [aillé de moyens en France pour
bien connoître les travaux'des Allemands 8c des
Anglois , nous ne nous interdifons pas tellement
de. porter nos regards fur les trois dernières
années de çette époque, 1794, 95 8c 96, que nous-
ne puiflîons en iainr les principaux traits , 8c
nous efpérons même qu’ils fuffiront, malgré la
précifiort qui devient une loi pour nous , à ceux
qui auront bien étudié les: périodes précéden