
Le carbone décompofe facilement & prompte- i
ment les acides aiuenique, run{tique & molyb-
dicuë , en leur enlevant Toxigène pour lequel il
a plus d’affinité que n'ènonti artenic, le tunftène ,
& le molybdène. Dans ces décompofitions les
acides métalliques patient d’abord à Tétât d’oxides,
&z de-là à l’état de métaux. Le même phénomène
a lieu avec tous les oxides métalliques qui
çédent l’oxigène au carbone à des températures
plus ou moins élevées. C'eft pour ceia qu’on emploie
le charbon à la réduction des métaux, dans
les eflais dochnaftiques & dans tous lesattelieys
où Ton travaille quelques-unes de ces fubftances.
C'eft auflï en examinant avec foin les phénomènes
qui ont lieu dans la réduction des oxides métalliques
par le carbone , que la théorie de la formation
de l’acide cârbonique a été confirmée , que '
celle du pkiogiJUque de itahl a été ienverfée;&
enfin que la doéüine de la combuftion, del'oxi-
dation & en général des attractions de Toxigène a
été affife fur des bâtes folides.t Un fiinple coup
d’oeil fur l’influence de cette expérience dans la
marche générale deladoêtrine chimique moderne,
fuffira pour faire concevoir comment cette expérience
a contribué à Taftèrmiffement de la phi-
îoibphie de la fcience. Lorfqu'on eut découvert
que plufieurs oxides métalliques, & en particulier
ceux de mercure , d’argent, &c. te rédui-
foient feuls par Taétioa du feu dans des vaiffeaux ’
bien fermés , & qu’en repayant ainfi par l’addition
du calorique & de la lumière à l’état de métaux
, ibs’en dégageait une quantité plus ou moins
grande d’air vitai ou de gaz oxigène dont la bâte
avoit été enlevée à l’air ou.à d’autres corj s pendant
la combuftion , ou comme on diioic autre-:
fois la calcination des même métaux, on reconnut
par cela même que l’opération dans laquelle on
calcinait - les métaux , n’étoit qu’une véritable
combuftion , & qu’elle confiftoit dans la précipitation
de la bâfe de l’air vital ou de Toxigène qui
s’uniflbit aux matières métalliques. Mais le plus
grand nombre des oxides métalliques ne fe réduifant
pas ainfi par la feule aétion du calorique & delà lumière,
K’ exigeant pour repaffer à l’état de métaux
qu’on les traite par le charbon s on a fenti qu’en
appliquant ce corps aux oxides qui fe réduifent
feuls, on trouverait dans la différence des phénomènes
i’a&ion du carbone, & on pourrait la
déterminer avec éxa&itudè > & en effet en chauffant
de Toxide rouge de mercure avec du charbon
, au lieu d’avoir de l’air vital comme quand
on le traite feiïl, on obtint du gaz acide carbonique
; & les poids pris avec précifion, prouvent
que le carbone qui a été employé , s eft uni à
Toxigène d e j ’oxidè de mercure, & Ta converti
en acide carbonique; eftforte que Ton reconnoit
dans les oxides métalliques qui ne font pas réductibles
fpontaném^nt, la néceffité de; l’emploi du
carbone pour leur enlever Toxigène ; & qu’il eft
#ès*exattement prouvé par là que ce n’eft pas
en ajoutant un principe aux métaux bridés ou
oxides que le charbon les reproche de l’état métallique
ou les réduit, comme on le croyoit dans
la théorie du phlogiftsque , mais- au contraire en
leur enlevant La bâte de l’air , ou Toxigène qu’ils
avoient pris eux-mêmes, foit dans l’air , foit
dans l’eau ^foit dans les acides. La précilïon des
expériences faites lur Ce^point eft fi grande qu oi»
peut eftimer très-exactement ce qu’il faut de charbon
pour réduire chaque oxide métallique , lorf-
qu’on connaît avec exa&itude la proportion ,dJo-
xigène contenue dans Toxide qu’il s’agit de réduire
, & la quaatité de carbone contenue dans
Tefpèce de charbon qu’on emploie ; on obtient
Tune de ces données en tenant une no té de Taug-
mentation de poids que le métal a acquife en
Toxiuantj & en connoiiTànt là quantité d’acide
carbonique que donne avec une quantité déterminée
d’air vital le charbon dont oc fe fert. On
voit encore que ces déterminationsLont fondées
fur le premier fait bien connu , que l'acide carbonique
contient fur 100 parties à très-peu de
chofes près 28 parties de carbone, & 72 parties
d’oxigène. Quoiqu’ il foit vrai en général quç le
carbone a plus d’ affinité avec Toxigène que n’en
ont les fubftances métalliques , quoique ce foit
fur ce principe qu’eft fondée une des plus
certaines & des plus frequentes opérations de
ladocimafie & de la métallurgie, il y a cepen-*-
dant quelques cas dans le (quels cette réduction
ne réuffit pas facilement ou completttmerit. Les
oxides d’antimoine, de zinc & d’étain fort avancés
dans leur ox:dation , & contenant non-feulé-*'
ment beaucoup d’oxigène, mais encore Toxi-gène
très-folide..-, tels qu’ils font après avoir été brûlés
a une très-haute température ou par l’acide nitrique
, ne femblent plus fûiceptibles d’être decom-
pofes par le carbone , 8z de repalter à l’état métal
!iqii: 5 Toxigène y eft fi intimement combiné
bz i adhérent,qu’il eft prefqu’impoffible de le leur
enlever , au moins on a beau les chauffer fortement
§§ long-temps avec du carbone , on ne parvient
à. les réduire ou à les ramener à leur état de
métaux, qu’en partie & encore avec la plus grande
difficulté. Les chimiftes ont depuis long-temps
reconnucette vérité par rapporta l’étain, ils ont vu
que Toxide de ce métal fait par l’acide nitrique ,
ne peut pas être réduit par le charbon. On dirait
que dans ce point d’oxidation Toxigène a plus
d’affinité pour le métal que pour le carbone , ou
au moins que l’affinité eft égale entre ces trois
corps. Mais malgré la fîngularité de ce phénomène,
on- ne peut y voir qu’une très-légère exception
à la loi generale , qui montre plus d'affinité
entre le carbone & Toxigène, qu’entre l’oxi-'
gène & les métaux. 0
Quoique cette différence d’affinité foit bien
affurée, elle n’eft pas Cependant afiez grande pour
I que le carbçne puifle decompofer les oxides métalliques
taîliques-unis aux acides liquides 8z à, toutes les. ]
.températures j les fels métalliques cryftaljifés eu !
fées chauffés avec du.charbon , font bien décomp
te s & les métaux qu’ils contiennent plus 0.11
moins ,, promptement réduit:;} mais cette opé-:
radon qui n’a lieu qu’avec une élévation de
température plus ou moins grapde, M qui eft
commencée par l ’aétion même du calorique
les fels ^métalliques, ne réuffit pointa froid,
ni dans l’état liquide des . diffolutions métalliques
} & cela eft d’autant plus digne de remarque
, que le phofphore mis dans les diffolutions.
en décompofe- à. froid les oxides fj| les fiépare fous
forme métallique'. Ce phénomène dépend de
ce que 1 attraction du carbone pour Toxigène n’a
lieu qu’à une température' très - élevée, tandis
que celle du phofphore pour Toxigène ,a lieu à I
toutes les températures. Cependant il. n’eft pas i
encore décidé que toutes les difîblutions métalliques
font également indecompofables par le 1
charbon à froid, & dans leur éfat liquide } on
n’a point fait aflfez d’expériences fur cet objet
pour en acquérir une entière certitude, & il ,
n’eft pas inv-raifemblabie de penier qu’on pourra
réuffir à décompofer les nitrates & des muriates
oxigenes métalliques, parce que les acides qui -les
conftituem. font fufcèptibïes de faire brûlerie charbon.
Jeneconnois pas encore de travaux chimiques
entrepris fous .ce point de vue, Ék je crois être ■
le feul, qui quelque temps après les expériences
de Buliion , fur la réduction des difîblutions5
métalliques par le phofphore à froid , , ait tenté
de les décompofer de même par le charbon , mais
jufqu’ici fans fuccès.
Tout ce qui a été expofé précédemment
prouve non-feulement que le carbone eft un corps
éminemment combtiftibie, mais encore 'que fon
attraction pour To.xigène eft la plus forte pofli-
ble||puifqu’il l’enlève' à l’hydrogène,, à l’azote,
au feufre, au phofphore, aux métaux, en décomposant
à différentes températures, l’eau, l’acide
nitrique, l’acide fulfurique, l’acide phof-
phorique, ainfi que les oxides & tes acides mé-
'talliquès. Mais outre cette attraction du carbone
pour Toxigène, plus forte que celle .qui exijîe
- entré les divers corps combuftibles & ce-principe
de la combuftion, il en exifte une. moins connue,
Sc cependant auffi importante à connoitre entre
/ h carbone & les diverfes matières^ inflammables.
Ges matières confidérées dans le.'règne minéral
font des êtres indécompolés jufqu’à prêtent &
qui fe comportent ci^n.s les analyfes,, comme fi
elles etoient fîmples} le loufre, le phofphore ,
les^métàux n’ont point été .âna.lyfés } tout ,Ce
ou On a fait fur eux n’en a tiré aucun principe 5
i|s font a cet egard cô'mme .le,è-arbone 'lui-rn^mè,
ils ne fe font prêtés julqu içi à-aucune efpèçe de
decompofuion. C ’eft de IVittraélion réciproque
& commune de tous ces corps avec le carbone
Çuijgi s, Tpme III.
qu’il doit: être queftion aêluellcment. Quoique
le raifonnement fonde fur une analogie frappante,
entre toutes, les propriétés de. ccs matières
conduite à, les regarder toutes comme très-
fufceptibles de s’unir les unes avec les autres,
l'expérience n’a cependant encore donné que
très-peu de i;éfultats favorables à cette opinion.
On n’a point encore trouvé dans la nature des
cqmbinaifons de carbone avec le foufre ni avec,
le phofphore $ l’art ne parvient pas davantage
à combiner ces corps les uns avec tes autres.
L’hydrogène fe rencontre uni au carbone dans
toutes lès fubftances végétales } c’eft çette combinai
fon naturelle qui confirme les huiles; c’eft
elle qui avec diverfes proportions d’oxigène ,
forme les acides végétaux} c’eft encore cette
même Cümpofitiqn qui fait la bâfe de l’alcool,
de l’éther,, dti corps ligneux, & même de tous
les principes immédiats des végétaux. Outre çette
union , folidé-ou fous forme fdli.de, le cûrbonc
fe diffout- facilement da -s le gaz hydrogène, bc
cette diftblution en refterrant les molécules de
! ce gaz les unes fur les autres je rend beaucoup
| plus lourd qu’il ne T eft naturellement. Toutes
les fois qu'il fe. dégage, du gaz hydrogène d’une
matière très - compofée qui contient en même
temps du carbone diyifé', il entraîne toujours avec
lui une portion plus eu moins grande de ce car.-r
bone. è^i djfiblution gazeufe ou aêriforrne. Tel
eft Je j|az inflammable que donnent rouies les
fubftançes végétales en diftillation à un grand
feu ; tel -tft-aufti celui que l’on retire d’un grand
nombre de qratières animales en décqmpeficiqn
par la chaleur, ou meme "dans leur dé tempo fî-
tion, fpontan.éer, ou leur putréfaction. IL patcÏE
que la prétence du carbone di Abu s dans* le gaz
hydrogène eft là caufe de l ’odeur fétide que prend
ce gaz dans, tous les cas où il i’entiaine. Quant
à la combinaison folide de ces deux corps combuftibfés,
le. carbonç & j’hyiirogène ,, déjà amnonçée
ci-deffus, il efi fans dou te b,iie ry remarquable
que malgré la tendant;e qu’ont ies rninéraux
pour contraéler des unie»i l fortes Sz cohérentes,
on ne trouve nulle p-art dans le, p | | de
la cei;re: un compofé de cette nature, & que ce
foit.au'tiifu organique des végétaux & aux forces
proprës de- la végétation qu’appartienne ex-
clufiye.meijit la propriété d’enîever l’hydrogène
& 1 q_ carbone à des cqmbinaifons liquides ou
'fluides élaftiqu.es, telles que l’eau <k l’acide carbonique
pour les unir, folidement Tun à l’autre,
à l’aide d’une proportion diverte d’oxigène,
&..leur donner la forma nouvelle d’un corripofé
ternaire plus ou moins dente, & fufceptibîe
même de conferver long-temps fa denfité fans
altération, comme-le fait le boii. Ce .phénomène
eft un des beaux problèmes que la chimie
moderne foit parvenue àréfoudre; on n’avoit autrefois
nulle idée de la combinai fon & de la nature
intime des matières .végétales } il fai oit
II