
Les expérièrices publiées la même aneée 1779
par Scheèle , fur la décompofiti’cn des Tels neutres
par la chaux vive & par le fer furent faites
a 1 occafion d'une obfervation que le hazard lui
prefenta. 11 vit des effiorefcences- de fel de foude
fous des cercles de fer qui environnoient un vaif-
feau de bois, dans lequel on avoit confervé
des falaifons. Ayant trempé une lame' de fer
nette dans une diffolution fàturée de fel com-
Kiun , en 14 jours la lame fut .couverte d'alcali
minéral} la même chofe eut leu fur d'au*res
lames de fer frottées de diffo utions faturées de fel
de glauber & de nitrecubique. Le plomb, l’étain,
le cuivre & l’argent, ne produifirent point cet
effet. Un mélange de chaux vive avec une diffo-
lution de fel marin purifié , laiifé dans une cave
humide , donna en 15 jours une croûte de fel de
foude a fa fur face qui fe renouvela après avoir
été enlevée; la liqueur formée au-deffous , donna
un précipité par le même fel. 11 eh fut de même
avec le vitriol & le nitre de foude mêlé avec
la chaux vive , mais non avec la magnéfie
pure ou meléè à l’air fixe ainlï qu’avec la
craie.
Schèele ne donne point d’explication fatisfai-
fante de ces finguiières-experiences, auxquelles
il manque de Texaétitude, puifqu'ii ne fait aucune
mention des quantités :dé Tels à bâfe de
‘foude dëcompofés b c de foude èffleurie. Il les
atiribue à l’état fec des acides & à l'acide méphitique
abondant.
Cohaufen avoit annoncé en 1717 une femblabfe
décompolîtion du fel commun par la chaux. Guy-
ton a vu en 1781 les diffolutions de vitriol &
de muriate de potaffe éclaircir l’eau de chaux
précipitée par l’acide méphitique , empêcher la :
précipitation de cette liqueur par cet acide &
les m; langes contenant enfuite de l’alcali à nud, J
quoique Scheèle ait dit affez pofitivement que j
les fels à bâfe de potalfe n’étoient point décom-
pofés par la chaux comme ceux à bâfe de foude.
Cet objet n’eft point encore fuffifamment éclairci
au moment où j’écris ceci ( enjùin 1796).
Les aétes de l’académie de Stockholm pour
1780 contiennent trois mémoires de Scheèle.
L’un, dont nous avons déjà rendu compte ,
contient , fous lé kitre de R em a r q u e s f u r le fp a l c h
f l u o r , Une réponfe péremptoire aux obj^dions
de Boullanger & de Monnet fur l'acide fluorique. !
Les deux autres comprennent dés découvertes
Tnrles principes du lait. Le premier de ces deux
eft intitulé : M ém o ir e f u r U l a i t & f u r fo r t a c id e . Il
eft en effet comme divifé en deux parties; la,
première , compofée de fix paragraphes , a pour
objet le lait enrier & les propriétés du fromage I
fi[ui y eft contenu ; la 2e. en trois paragraphes, J
't*aite^de l ’extra&ion & des propriétés deTaclde '
1 du lait aigri. Voici lès faits découverts parSchetfe
Sl,r iT-Un & ^autre de ces fujets. La coagulation
j du l'ait par les acides n’eft complélte que par
la chaleur qui rapproche les parties caféeufes;
un fef neutre quelconque, terreux , alcalin ou
métallique , ùn corps muqueux, rr.is à la quantité
que le lait bouillant peut en diffoudre /en
répare le fromage les alcalis cauftiques difîbl-
vent le fromage à l’ aide de la chaleur ; les acides
le précipitent de cette diffolution 5 ce n’eft
cependant point à| la faveur d’ un alcali que |a
matière cafeeufe refte diffoute dans le Lai* puif.
S}16.,061116 liqueur coagu ée par l’acide nitreux
filtrée & évaporée, n’a pas fourni de nitre ;
cette expérience de Scheèle contredit un des
faits avancés par Baumé , qui adméttoit de la
potalfe à nu dans le ;la it, comme Rouelle le
jeune le lui avoit déjà réproché' en 1774. Le
fromage frais , non féché , délayé dans huit par-
ties d’eau acidulée^ avec un acide minéral , s’y
difiout par l’ébullition ; la même chofe n’ayant
pas lieu avec les acides végétaux ou l’acide du
lait y on voit pourquoi on fépare moins de fromage,
& moins promptement par les acides mi-
: néraux ; dix parties d’eau mêlées avec une de
. la it, l’empêchent de donner du ‘fromage. Le
; fromage dilfous par l’alcali cauftique, répand une
odeur hépatique très défagréable lorfcjuTl en eft
■ ^précipité par le vinaigre ; les Tels & la gomme
parodient féparer le fromage du lait en s’emparant
de l’eau. C’eft ainfi que Scheèle explique
la coagulation des émulfions dans lefquellesit
admet, comme dans tous les fucs de plantes , la
préfencè d’une matière femblable au fromage,
par la décoétion de quinquina , q u i, comme tous
les aftringens , fépare la partie çaféeufe du lait;
la nature intime du fromage eft inconnue ; fa
terre, très-difficile à obtenir bien pure & réparée
du charbon , eft compofée d’acide phof-
phorique & de chaux en excès } le blanc d’oeuf
cuit a la plus grande analogie ayec le fromage ;
comme lui il fe diffout dans les alcalis & >dans
un acide minéral délayé ; il répand , lorfqu'on
le précipite de fa diffolution alcaline , une forte
I odeur hépatique ; la câufe de la coagulation par
la chaleur lui paroît due à une’ combinaifon intime
avec la matière calorifique. Scheèle explique
de la même manière la coagulation par
la litharge, & par l’addition d’un acide à l’alcali
cauftique mêlé auparavant avec le blanc
d’oeuf ; dix parties d’eau diffolVent le blanc
d’oeuf de manière à ce qu’il ne fe coagule plus
par la chaleur.
En 14 ou 15 jours de tenis le lait aigri fpon-
tanément a acquis la plus grande force d’acidité;
filtré & évaporé, il s’en fépare un peu de fromage
; on y trouve par l'évaporation & Iff
réaétifs du fucre de lait, du fel'fébrifuge , ée
h tferie,’àbifffâle'3 un peu de mucilage, diffous
dans l’acide formé par la fermentation. Peur
féparer & obtenir'cet acide pur , la diftillation,
Lui ne dégage qu’un peu de vinaigre^ foible, ne
futfit pas. Voici le procédé qui a réuffi à Scheèle:
Il a évaporé le petit lait bien acide au huitième ;
Itout le fromage s’en fçpara ; il a filtré la li-
Jqueur, il en a faturé l’acide par L’eau de chaux
Iqui a précipité la terreânimale, puis il a pré-
Icipité à fon tour la chaux par l’acide faccharin
fajouté avec précaution, & jufqu’à ce qu’il ne
Ifît plus de précipité ; alors l’acide filtré étant
Jévaporé jufqu’en çonfiftance de miel, fut redif-
Ifous dans de l’efprit-de-vin qui ne toucha ni au
Ifucre de lait, ni aux autres matières étrangères
là l’acide ; celui-ci , uni à l’efprit-de-vin & dé-
Ilayédans un peu d’eau, refta feul après que l’ef-
Iprit-de-vin fut enlevé par la diftiliation. Cet
■ acide ainfi préparé lui prefenta les propriétés
Iftlivantes : il ne donna point de criftaux par l’éva-
jporation; pouffé au feu , il fournit un phlegme
Jacide comme l‘efprit-de-tartre , une huile empy-
Ireumatique, de l’air fixe & de l ’air inflamma-
Jbie; il refta un peu de charbon au fond de la
I cornue; avec la potaffe &: la foude il donna des
I fels déliquefcens,' incryftallifables , diffolubles 1 dans l’efprit-de-vin ; avec l’ammoniac|ue, un fel
I déliquescent qui* perd facilement fa bafe au feu ;
avec la chaux, la baryte & l’alumine, des fels
1 également déliquefcens ; avec U magnéfie, un
I fel cryftallifable ; il n’a aucune aélion fur fo r ,
I fargent, l’étain , le mercure , l’antimoine, le
I cobalt & le bifmuth ; il diffout le zinc & le fer
1 avec effervefcence & dégagement d’air inflam-
I mable ; il calcine le cuivre au vert, il diffout le
plomb , ne cryftallife point avec lu i, mais forme
I un fel doux & acerbe qui donne quelques tra-
I ces de précipité de vitriol de plomb. Scheèle
I conclut de ces expériences que l’acide du lait
aigri eft d’une natürè particulière , qu’il a quel-
u’analogie avec lé vinaigre qu’il chaffe cepen-
ant de. la terre foliée , mais qu’il peut devenir l.
de véritable vinaigre ; ce qu’on obtient Lorf-
qu’on laiffe fermenter le lait, après y avoir mis
deux cuillerées de bon efprit-de-vin par pinte.
Un mois après, fi on filtre la liqueur aigrie ,
on a un bon vinaigre qu’on peut employer aux
ufages économiques.
Le mémoire fur l’acide du fucre de lait qui
eft inféré dans le même volume que le précédent
pour 1,’année 1780, eft une fuite des découvertes
de Scheèle fur les produits de ce liquide
animal ; c’eft en traitant le fucre de lait
par l’acide nitreux qu’il a trouvé l’acide dont il
eft queftiofi. Avant d’obtenir les cryftaux d’acide
faccharin, il s’eft féparé de la liqueur une quantité
a fiez confid érable d’une poudre blanche ,
difiolublé dans 60parties d’eau bouillante, cryf-
tall,ifable , rougiffant les couleurs bleues, décom-
pofable par le feu , formant avec les trois alcalis
des felis cryftallifables , avec les terres &
les chaux métalliques des Tels indiffolubles 8c
pulvérulens , décompofant les inuria^es 8c les
nitrates terreux & métalliques , fans faire éprouver
aucuhe; èfpëce d’altération aux vitriols formés
des mêmes bâfes. Cette efpèce d’acide d’apparence
terretife', très peu diffoluble , fait un
peu moins du quart du poids du fucre de lait
employé pour l'obtenir ; il eft remarquable non-
feulement par fa forme & fes affinités , mais
encore par la manière dont il fe comporte ait
feu. Lorfqu’on le chauffe dans une cornue, il
fe fond , fe bourfouffle finguliérement, femble
fe réduire en écume, fe fublime en partie en
un fel brun, d’une odeur pareille s celle d’un
mélange de benjoin & de fuccin ; il lâiffe onze
grains de charbon par demi - once.^ Lorfqu’on
jette cet acide dans un creufet rougi , il brûle
comme une huile , & laiffe à peine que ques
traces de cendre. Scheèle penfoit que cet acide
j étoit tout formé dans le fucre de lait, & que
l’acide nitreux ne faifoit que le féparer. Depuis
que la théorie moderne , appliquée avec tant
de fuccès aux découvertes des Suédois , a
; prouvé que l’acide faccharin n’eft pas tout contenu
dans le fucre , & que l’acide nitreux, à
l’aide duquel on le prépare , contribue à le former
par le charbon qu’ il en dégage , ou par
l’oxigène qu’il y porte, on penfe avec raifon
qu’il en eft de même de l’acide fachla&ique,
qu'iî n’exifte pas dans Ife fucre de la it, que l’acide
du nitre fert à le former comme l’acide
; oxalique.
En 1781 , Schèele publia un mémoire fur leq
parties conftituantes de la tungftène ou pierre
péfante. Avant lui , les chimiftes avoient regardé,
cette pierre les uns comme une mine de fer ,
d’autres comme une mine d’étain. Elle portoit
même dans la plupart des cabinets le nom de
! mine d’étain blancne. En raifon de fa pefanteur,
; Bergman y avoit cherché la préfence de la terre
; pefante ou baryte , mais inutilement. L’incer-
[ titude où l’ on étoit de la nature de cette pierre 7
! engagea Schèele à la traiter avec foin. Après
i l’avoir réduite en poudre, il la traita fur-tout
par deux procédés différens qui lui donnèrent;
une connoiffance exa&e de (a nature ; l’un de
ces proçédës confiftoit dans le traitement par 1 un alcali, & l’autre dans un traitement par un
acide. D’abord il la fit fondre avec de l’alcali
fixe , & après avoir diffous la maffe fondue dans
l’eau bonifiante , il traita encore le réfidu avec
| l’alcali fixe, & le jetta dans l’eau; les diffen
f lutions furent faturées avec de l’acide nitreux,
j qui forma un précipité abondant ; enfuite l’acide
j nitreux, fut faturé d’alcati fixe qui y forma nn
? fécond précipité ; le premier précipité étoit un
j acide fec & pulvérulent peu diffoluble dans l’eau ;
Ç le fécond étoit de la terre calcaire; ainfi la tungftène
£ Xxx z