
trouve pendant plufieurs années de fuite aucun
phyficien occupé de ce genre de travaux. Un
îeul homme entreprit alors des recherches fur
cet objet, qui ne paroifibit cependant appartenir
que'd’une manière indire&e au fujet qu’il
avoit choifi pour fës expériences, & il eft permis
de croire que les aflertions de Boyle ont
fait naître en lui les idées neuves & le nouveau
procédé expérimental qu’il mit en pratique pour
obtenir le réfuhat qu’il cherchoit. C ’ eft du
célèbre Haies que je veux ici parler. Pénétré
des idées grandes 8c même neuves fur’ l’air
que l'illuftre Newton avoit données dans fon
optique, frappé fur-tout de ce qu’il dit dans
les queftions trente & trente-une de cet ouvrage,
M qu'il fort par la fermentation & . la chaleur
» du véritable air des corps dont les parties
« font jointes par une forte attsa&ion, & que
95 les chimiftes appellent fixe, qui , par cette
99 raifon, ne fe féparent 8c ne fe raréfient pas
» fans fermentation, 8cc. ».
» Que les corps denfes fe raréfient par la
» fermentation en plufieurs efpéces a air, & que
» cet air par la fermentation & quelquefois
» fans elle, fe convertit en corps denfe » ,
Haïes a fuivi la carrière expérimentale que Van-
helmont & Boyle n’avoient en quelque forre ,
fait qu’ouvrir encore; en marchant d’après eux j
8c fur leurs traces 3 il les a bientôt devancés
& laifles loin derrière lui ; il a vérifié leurs expériences,
il en a fait un grand nombre de nouvelles
, il a imaginé un appareil ingénieux,
pour mefurer le fluide élaftique, l’air qui fe déga-
geoit dans ces expériences. En lifant le fixième
chapitre de fa ftatique des végétaux , on eft
furpris qu’avec tant de recherches exaétés , fi
voifin.de faifir, la vérité, fi près de toutes les
decouvertes faites depuis, il n'ait pas trouvé
lui-même, ou plutôt-, il n'ait pas reconnu &
fpécifié par des caractères tranchans , fur-tout
défigné par des noms particuliers les fubftances
aériformes.diverfes qu’on a déterminées quarante
ans feulement après lui ; car on peut dire
avec vérité qu’il avoit obtenu, découvert 8c
renfermé même dans des, vaiflfèaux & fous fa
cloche plufieurs des gaz dont la découverte &
l’examen poftérieur de près d’un demi fîêcle,
ont fait naître la nouvelle théosie pneumatique.
Jamais, dans l’hiftoire du progrès des fciences
ôn ne trouvera d’exemple plus frappant de la
bizarrerie de la marche de l ’ efprit humain-, que
celui de Haies découvraat les ga z , 4 portée
de reconnoître facilement leur origine , leur
fource , leurs différences, les qualités caraCté-
•riftiques de plufieurs d’entr’eux, & par confé-
quent, au moins quelques traits de leur iï>
fluence dans les phénomènes de la nature , 8&
marchant dans cette carrière nouvelle avec line
circonfpeftion, une timidité même, telles qu’il
n’y voit.que de l’air ordinaire, mêlé de direrfes
fubftances étrangères, 8c qu’il ofe à peina
le fpécifier par le nom d’air fixé. Un tel événement
mérite aflurément d’être étudié & approfondi
, en examinant avec le foin convenable
les découvertes du phyficien qui en eft
l’auteur.
Haies avoit fpécialement entrepris fes expériences
pour favoir ce que devenoit l’air qu’H
avoit vu tiré ou abforbé par les végétaux , vers
les racines, ainfi qu'en plufieurs endroits du
tronc & des branches ; qu’il avoit vu auffi très-
clairèment monter en très-grandé quantité dans
le temps des pleurs de la vigne & au-defius de la
fève dans les tuyaux où elle étoit- reçue ; M fe
fentit porté , comme il nous l’apprend lui-même
au commencement de fon fixieme chapitre, à
faire des recherchés plus particulières fur la nature
de ce fluide fi néceffaire à la vie & à l’ac-
croiffement des animaux & des végétaux. 11 parok
que c’eft dans l’été de l’année 1723 qu'il fit fes
(premières expériences , fi l'on en juge par le
fimple expofé des dates -qu'il donne lui-même
dans la defcription qu'il en fait. Le titre même
• qu'il a donné à fon chapitre , prouve qu’il avoit
5 l'intention de connoître la nature de l’air & fon
influence dans la compofirion des minéraux, des
. végétaux & des animaux. Il l’intitule : % Expé-
» riences chymico-ftatiques, pour tâcher de faire
» Vanalyfe de Vair , & pour connoître au jufte la
» grande quantité d’air qui eft contenue dans les
» fubftances animales , végétales & minérales ,
» & juger de la grande liberté avec laquelle il
» reprend fon élafticité , lorfque dans la dilTo-
» lution de ces fubftances il s'en trouve féparé. •*
Buffon , fon tradu&eur, donne une très-bonne
idée de ce chapitre & des chofes neuves 8c
importantes qu'il contient dans la préface qui
précède fa traduction, publiée en 173jf , 1 vol.
in-4. ; à Paris , chez Debure l'aîné. » Le com-
■ .*> mencement de. l’analyfe de l’a ir , dit-il, eft
» le plus bel endroit de fon livre, & J’un de
» ceux qu’ il a le moins développé : j’ai tâché
» d'y fuppléer en ajoutant à la figure : tout eft
» neuf dans cette partie de fon ouvrage ; c’eft
» une idée féconde , dont découle une infinité
» de découvertes fur la nature des differens corps
» qu’il foumet à un nouveau genre d’épreuves >
» ce font des faits furprenans, qu’à peine daigne-
» t«il annoncer. Auroit-on imaginé que l’air pât
» devenir un corps folide ? Auroit-on cru qu’on
» pouvoir lui ôter 8c lui rendre fa vertu de
>» reffort ? Aurions-nous pu penfer que cer-
» tains corps, comme la pierre de la vefîie &
» le tartre, ne font, pour plus de deux tiers,
» que de l'air folide 8c métamorphofé ? M. Haies
» fait lui rendre fon premier être : il nous ap-
» prend jufqu’à quel point la flamme, la refpi-
» ration des animaux 8c la foudre détruifent le
» reffort de l ’air : il mefure la force de la ref-
» piration , 8c il en imite le mouvement
jufqu’au
» cuTau point de faire refpirer 8c vivre un chien :
M plus d'une heure après avoir coupé la trachée-
„ artère; il trouve le moyen de purifier l’air,
M Sz de le rendre propre à être refpir.é plus
m-long - temps ; il 1 démontre fe,s effets fur le
» feu , fur lès végétaux 8c fur lès animaux ; ce
33 font les échantillons de fes découvertes. » On
voit que Buffon avoit une connoiffan.ee exaCte des
travaux de Haies , 8s .que- fon expofé pourroit
fuffire pour en donner une idée ; mais elle feroit
trop vague d’une part & trop refferrée/de l'autre ,
pour faire connoître comme il convient dans
cette ébauche hiftorique , ce beau travail , qui a
précédé , & peut-être difpofé , & comme appelé
la révolution chimique^ qui fait le fujet de cet
article. Ecoutons Haies lufcmême, dans fa pré-
face. » Le fixième chapitre , dit - i l , contient
toiitès les expériences que j'ai faites fur l’air :
» l’on y verra que tous les corps contiennent
» une grande quantité ; d’air que cet air eft
» fouvent dans les .corps fous une tforme diffe-
>» rente de celle que nous cbnnoiflons , c’eft-
» à-dire dans un état de fixité y ou il attire auflî
>» puifîammept qu'il reponffe dans, fpn état or-
»» dinaire d’ élafticité : ,l’on verra que ces parti-
» cuies d’air fixe 3 qui s’attirent mutuellement ,
»font fouvent chuffées , comme l'àvoit dit
» Newton, hors des corps denfes par Ja cha-
» leur ou la fèrmi ntatjon, 8c transformés en
» d’autres particules d’air élaftique ou repouffant,
>» & que ces mêmes: particules élaftiques retour-
» nent par la fermentation , 8c quelquefois fans
» fermentation , à leur forme précédente, c’eft-
>» à I dire deviennent. dé nouveau des corps
» denfes. ,» 11'feroit impoilible , fans une Ion
gueur abfolument inutile1, de donner ici le dé-
taft de.-toutes jlesrqxpériences contenues dans le
chapitre 8c dans une partie ' de l’appendice que
Buffon a prife. de la ftatique des animaux , & qui
a un rapport direct à l’objet indique. Mais pour
en offrir au moins uneddée auflî cômplette qu’il
nous fera pofiible , nous préfenterons d’abord
ic i, relativement à cet important ouvrage , un
titre dés expériences & de leur objet pris de
la traduction de Buffon -; une indication fom-
maire des procédés que Haies a employés pour
faire fes expériences ; un tableau méthodique de
leurs réfuitats , drefle par- Lavoifier dans fes
opufcules phyfiques & chimiques publiées e'n
1774, & . un apperçu de l’enfemble des décou-
yei tes de Haies 8c des vues qu’il en a lui-même
tirées.
La traduftion de Buffon après la préface du
tradu6feu*r, l’épitre dédicatoire & la préface de
l’auteur, préfentent deux tables , l’une des chapitres
de l’ouvrage, l’autre ayant pour titre :
Tableau pour trouver chaque expérience.. Celle-ci eft
extrêmement piquante par l’intérêt qu’elle répand
fur les détails & l’enféinble dé tout l’ou-
Ch im ie , Tome 11L
vrage> Elle offre une lifte précieufe' des recherches
de Haies, & de ,1a méthode qu’il a
fuivie dans l’exécution de Ton plan; on y trouve
même , en la lifant avec attention & plufieurs
fois de fuite, une partie des réfuitats les plus neufs
de l’analyfe de. l’air dans le fens que l'auteur
[attachpit à ce mot. On voit bientôt qu’elle n’a
pu êtrefaite qu'après l’ouvrage lui-même & par
un homme, profondément pénétré des vérités
nouvelles que cet ouvrage,, - & furpout le chapitre
fixième pour lequel tous les autres fem-
; b lent hits , pouvoieht contenir. La leéture de
;cettèNtable originale, 8c qui fera dans’tous les
1 temps un objet d’étonnement 8c d’admiration
i pour tous les vrais amis de la phiiofophie natur
e l le , fuffiroit préfque feule pour prouver les
aflertions que nous nous. Tommes déjà permifes
;fur l’enfcmble des recherches de Haies, 8c pour
/faire .naître la penfëe quai nous- avons; déjà exprimée
fur la marche de l’efprit humain , qui
s’ arrête prefqué toujours au point où il n’y a
[plus qu’un feul pas à faire pour faifir dans tout
' fon jour & avec tout fon éclat, la yérité; C’eft
[ à la quarante-neuvième expérience que commence
: le travail compris dans le chapitre 6. Le travail
»s’étend jufqu’à la cent vingt - unième inclufive-
; ment. Qn y a, joint les fix premières! éxpériences
contenues dans l’appendice emprunté à la ftatique
■ des animaux par Buffon, pour donner un en-
femble plus complet, & former unTyftême plus
éntier du travail de Haies. Il faut encore être
: prévenu qu’il y a quelques numéros d’expériences
. fans titré ; cèltes-là ne font que la fuite des précédentes,,
&, elles appartiennent au même in-
: titulé. On fe fou viendra toujours que ce titre
contient l’objet 8c' non le réfiiltat des expé-
■ riences.
Extrait de la table de la ftatique des végétaux ±
j qui a pour titre Table pour trouver les ex--
péfiences.
\ Expér. XLIX. Sur l’air du fang.
L. SurTàir du fuif ou de la graille.
LI. Sur l’air des cornés de daims, ou
des os.
LII. Sur l’air du fei volatil du fei
ammoniac.
LUI. Sur l'air des écailles d’huîtres.
LIV. Sur l’air du phofphore.
LV. Sur l’air du -chêne.
1 LVI. Sur l’air du bled de Turquie.,
LV1I. Sur l’air des pois.
y y