serpent n’ayant point encore été décrit par les naturalistes, M. Geoffroy le joignit
a sa collection de reptiles. Au reste, il n’aura pas été difficile de le remplacerait
tombeau de cheykh el-Harydy ; toute la montagne renferme un grand nombre de
ces mêmes serpens (i).
On a attribué une origine absurde à l’usage où sont aujourd’hui les Égyptiens
de visiter le tombeau et le serpent de Cheykh el-Harydy; on a cru aussi que cettj
coutume dérivoit de l’ancien culte des serpens. Ces idées appartiennent aux Eul
ropéens ; mais on sera peut-être curieux de connoître quelle est l’opinion des|
gens du pays. Selon une tradition qu’un des derniers voyageurs a recueillie sutl
les lieux, ¡1 a existé dans cet endroit, il y a plusieurs siècles, un cheykh fameux parsa|
sainteté; après sa mort, on remarqua un serpent près de sa maison, et quelqu'un!
répandit que l’ame du cheykh étoit passée dans le serpent. Bientôt celui-ci eut|J
réputation de guérir les maladies invétérées et de donner la fécondité aux femme!
stériles (2). Des pèlerinages annuels furent établis à lepoque de l’inondation;|
beaucoup de malades se crurent soulagés ; des femmes, stériles jusque-là, del
vinrent fécondes, et les merveilles attribuées à ce serpent, exagérées encore pal
la renommée, trompèrent des voyageurs trop crédules.
Il nous seroit facile de rapporter ici de plus grands détails sur cette superstition!
mais, comme nous ne croyons pas qu’elle ait aucun rapport avec les pratiques dtl
l’antiquité Égyptienne, ce ne seroit pas ici le lieu d’en parler. D ’ailleurs, de pareil
récits nous semblent mériter peu d’intérêt de la part des lecteurs judicieux ; si ctl
n est peut-être sous le rapport de l’art des Égyptiens modernes, où l’on retrouvj
les traces de cette industrie qui a rendu célèbres les anciens Psylles. Strabonj
Élien, et d’autres auteurs, nous ont raconté, sur les Psylles, des faits curieux qui!
le deviennent encore davantage par le rapprochement qu on peut en faire avetl
ce qui se passe de nos jours. Mais c’est aux naturalistes à traiter cette question!
sous le rapport des habitudes et de l’éducation des animaux. A l’égard de la su!
perstition du serpent de Cheykh el-Harydy, je me bornerai à ajouter que, dans uil
article très-piquant du Courrier de l ’Égypte (3), feu M. Lancret a relevé les conte!
absurdes que des voyageurs modernes avoient voulu accréditer en Europe.
(1) Les faits contenus dans ce dernier alinéa sont, table carrée couverte d’un tapis, sur laquelle, lui dit-on,!
pour la plupart, extraits du Journal de voyage de le serpent venoil se placer; et là, il se laissoit t o t i c j
M. Fourier, avec lequel j’ai remonté dans la haute par les malades et les dévots. La salle renfermoit encJ
Egypte. le modèle d’une barque et des cornes de bouc, suspends
(2) Le meme voyageur dont je viens de parler, rap- à une traverse de boisrs*
porte qu’il vit, dans l’intérieur de la mosquée, une petite (3) Journal imprimé au Kaire, n." 83. ■ *
DESCRIPTION
DES ANT IQUITÉS D ’ANTÆOPOL IS ;
P a r E. JO M A R D .
C H A P I T R E XI I .
S. I ." *
Observations générales.
Q uand on remonte le Nil pour visiter les monumens de* la Thébaïde, le premier-
que 1 on rencontre sur les rives du fleuve et qui donne une haute idée du style et
de la majesté des ouvrages de lÉgypte ancienne, est celui que l’on trouve au
village de Qaou. Tous les voyageurs seront frappés, comme nous l’avons été nous-
mêmes, en apercevant de leurs barques'ces belles, colonnes et ces chapiteaux à
feuilles de dattier, à travers des groupes de palmiers de même grandeur, et, pour
ainsi dire, confondus avec ces arbres eux-mêmes, dont ils retracent la fidèle image.
Si un altiste Égyptien, revenu au milieu de nous,.vouloit nous révéler le secret
de cette architecture, nous rendre palpables l’origine de l’art et le type naturel qui a
servi à limitation, certes, il ne pourroit imaginer rien de plus favorable à son dessein
que 1 état actuel du portique de Qâou, qui, par un hasard heureux, est comme
entrelacé aujourd’hui avec de superbes dattiers, couronnés, comme les colonnes,
pai des .têtes élégantes. Je n entreprendrai point d’exprimer le sentiment de surprise
que nous avons éprouvé en abordant à Qâou : il est des impressions qu’on
ne sauroit transmettre; et le charme que produit.sur l’esprit, les sens et l’imagination,
une chose absolument neuve, se refuse à toute description. Le palmier
d Égypte est par-tout, sans doute, noble et imposant par l’élégance et la simplicité'
de sa tige, par la richesse et la symétrie de son feuillage; mais nulle part, comme
ici, on n est frappé de ces caractères, si éminemment propres à l’imitation, peut-
être parce que c est la première fois qu’on vient à considérer le .palmier sous le
rapport de lart. Père nourricier de toutes les classes d’habitans, appliqué à mille
usages, source d abondance et de richesse pour tous, cet arbre est en Égypte
comme une seconde providence, et ce n’est que par les services qu’il rend qu’on
est habitué à le juger. Sans en recueillir moins de fruits,,les anciens Égyptiens en
avoient tiré encore un autre parti. Le port droit et cylindrique de sa tige leur
onna la première idee du fût dune colonne, et ses feuilles ramassées en tête,