Le granit noir forme ia plus grande partie des ruines de Bahbeyt ; on y voit
cependant du granit rouge, dont Je poli est extrêmement beau. Quelquefois le
même bloc est composé de ces deux espèces de matières.
Les ruines de Bahbeyt présentent un tel désordre et une telle confusion,
qu’il est impossible d’en reconnoître le plan primitif. Leur aspect est muet pour
celui qui n’a point vu d’édifices semblables à celui dont elles offrent les débris'
mais le voyageur qui a parcouru les monumens de la haute Égypte, réédific
facilement par la pensée le temple de Bahbeyt: Il replace les uns sur les autres
ces tronçons de colonne épars , ces chapiteaux à tête d’Isis et leurs dés renversés :
il se les représente surmontés de leurs architraves richement décorées, de leurs
corniches elegantes, et tout-a-coup apparoît devant lui un temple magnifique. Il
entre sous le portique, qui présente six colonnes de front sur quatre de profondeur ;
il s avance ensuite dans la salle hypostyle ou le second portique ; e t , après avoir
traversé plusieurs pièces, il pénètre jusque dans le sanctuaire où les dieux ren-
doient leurs oracles. Ce lieu révéré est entouré de salles mystérieuses consacrées
aux principales divinités de 1 Égypte, et où l’on découvre des traces de conduits
secrets. De ce côté, les prêtres, se dérobant à tous les regards, s’introduisoient
dans les souterrains ; de cet autre s’échappoit la voix redoutable qui faisoit entendre
la volonté du dieu adoré dans le temple. Sort-on du sanctuaire ; on trouve un
escalier qui conduit sur la terrasse de l’cdifice, dont on aperçoit encore mieux
alors la construction. On est frappé des dimensions considérables des pierres qui
forment les plafonds ; et tous ces matériaux, couverts de sculptures d’un fini précieux,
sont dun granit dont les carrières ne se retrouvent qu’àSyène, à plus de
cent myriamètres (i) de Bahbeyt, en remontant le fleuve.
Telles sont les importantes ruines que nous avions à décrire, et où l’on doit
voir, ainsi que nous lavons établi ailleurs (2), les restes de la splendeur de la
ville d Isis, dont il est fait mention dans Pline et dans Étienne de Byzance.
§. I f i
Antiquités de Mehallet el-Kebyr.
Mehallet el-Kebyr (3) est située à trois heures de marche de Semennoud.
C est la capitale de la province de Gharbyeh. Quoique ses édifices soient modernes,
elle renferme cependant des monumens qui méritent de fixer l’attention , soit
que ces antiquités proviennent d’une ville Égyptienne sur les débris de laquelle
Mehallet el-Kebyr seroit bâtie, soit qu’elles aient été transportées des ruines de
la ville dlsis ou de Sebennytus aux endroits où on les voit maintenant. Ces
antiquités consistent en un assez grand nombre de fragmens de granit de différentes
couleurs, en des blocs de grès siliceux, semblable à celui qu’on extrait de la montagne
rouge aux environs du Kaire, et en quelques pierres cubiques de grès brèche,
(1) Deux cent vingt-cinq lieues de vingt-cinq au degré. (3) Voyr^ ce que nous rapportons de cette ville dans
(2) Voyage dan* l’intérieur du Delta, E. M. tom. I I , notre Voyage dans le Delta.
pareil a celui des statues colossales de la plaine de Thèbes. Ces morceaux épars
dans les rues, ou employés dans la construction des édifices modernes sont pour
la p upar sculptes et représentent plusieurs figures en action, espèces d l i a u x
Les mosquées de Mehallet el-Kebyr sont remplies, comme celles du Kaire
de petites colonnes de granit rouge qui ne nous ont nullement paru porter le
caractère Égyptien. Dans la cour de l’une d’elles, il y a un sarcophage de même
matière ( Sa longueur est de deux mètres soixante centimètre^; e fsaha“
dun metre cinquante-deux centimètre, On a sculpté sur ses f a c e s Ë 9
guirlandes suspendues à deux anneaux et séparées par un carré saillant sur “
fond : au milieu de chacune d’elles on voit une étoile à six branche, Sur les L e s
antérieure et postérieure il n’y a qu’une seule guirlande sans , étoile. Ce sarco
phage annonce assez, par sa forme et ses ornemens, un ouvrage Grec qui n’est
qu ébauché. On s en sert aujourd’hui pour contenir une partie de l’eau nécessaire
dans la mosquee aux usages religieux. Auprès de la cour où il est placé et dans
une chambre dépendante d’une fontaine publique plus particulièrement employé
aux ablutions on trouve un autre sarcophage en pierre calcaire (z). Celui-ci
est encastre dans le sol ,usqua la partie supérieure. Sa longueur es d’un mètre
quatre-vingt-seize centimètre, II a exactement la forme d’une momie : sa par e
supérieure offre, en effet, le contour de la tête d’une momie, ainsi que |Ê
gissement des épaulés ; et sa partie inférieure, le rapprochement des pieds Une
rainure qui fu t tout le tour de cette tombe, étoit destinée à recevoir un couvercle
: car tous les sarcophages étoient fermés ; et s’il est rare de retrouver leurs
couvercles, c est que, par une bizarrerie singulière, ces sarcophages, dont l’objet
etoit de garder les dépouillés des morts, sont devenus presque par-tout des baignoires
ou des fontaines employées à conserver la santé des vivans Par cette
nouvelle destinauon| Jes couvercJes devenus inutiles ont sans doute été détruits
Cetoit dail eurs, lors de la violation des tombeaux, la partie la plus exposée à
etre bnsee, * nous a ete impossible de vérifier si le sarcophage qui nous occupe
est decore d hiéroglyphes a I extérieur ; mais nous pouvons assurer qu’il n’en con-
tient point dans I intérieur.
Les marches des escaliers de la mosquée qui renferme les différens objets
antiques que nous venons de décrire, sont en granit et couvertes d’hiéroglyphes
La partie inférieure du minaret d’une autre mosquée de Mehallet el-Kebyr
«t formée de fragmens antiques en granit rouge. Enfin dans une troisième
mosquee on voit un monolithe en granit noir (3 ) , semblable à ceux' qui
existent encore dans les temples de Pluloe , où l’on sait qu’ils servoient à
“ ;pervier a H l au W Ê * 1 p ù ^ J y K destiné
ux.ablutions, ce monolithe est renversé de manière à pouvoir contenir l’eau nécessaire
aux usages religieux. Il a un mètre soixante-dix-huit centimètres de hauteur
totale, et sa base est un carré de quatre-vingt-douze, centimètres Dans ia
(1) Voyez la planche 2 9 , fig. 13 « 14, A . vol. V .
(2 ) K o jv ç la m cm c planche, fig. 1 1 et 12.
(3) ia même pl anche, fig. 10.