sont horriblement mutilés : on reconnoît cependant une figure d’homme, platée
entre deux femmes qu’elle embrasse. Il y avoit une communication entre cette
pièce et des galeries latérales, et, au moyen d’un canal bas et étroit, on communi-
quoit aussi avec les catacombes voisines. Je pense qu’il en étoit de même dans les
autres hypogées que j’ai décrits. Ces pièces latérales conduisoient aux puits de
momies.
Entre le premier portique et la porte d’entrée, il y a un plafond taillé dans le
roc , en forme d’arc de cercle, et dirigé transversalement; l’arc est parfaitement
tracé. Dans la grande salle, on trouve au plafond trois berceaux semblables, dirigés
dans le sens de l’axe, appuyés sur les colonnes et sur les murs latéraux (il.
La porte d’entrée est très-haute; elle a sept mètres. La hauteur totale de la grande
salle est de 8m,3 jusqu’au sommet du plafond (2).
Sur les faces de cet hypogée et du premier portique , les artistes Egyptiens ont
sculpté ou peint une multitude d’hiéroglyphes et de, sujets familiers, dont la conservation
est parfaite. Les couleurs, sur-tout, sont d’une fraîcheur étonnante. Le
rouge, le bleu, le jaune, dans beaucoup d’endroits, sont encore intacts après tant
de siècles : c’est la couleur bleue qui a le plus d’éclat.
Les hiéroglyphes sont peints ou sculptés, ou bien l’un et l’autre.àJa-fois, dans
des colonnes verticales. Au-dessous des arcs, les architraves sont ornées de frises
en forme de fers de lance ou plutôt de faisceaux de plantes, comme on en voit
beaucoup dans les Catacombes de Lycopolis, Sur le mur à droite est une marche
de quatorze personnages religieux, en partie peinte et en partie sculptée, se dirigeant
vers la déesse Isis, avec des offrandes dans la main : l’un porte des lotus,
l’autre des poissons, un troisième des fleurs, &c. Toutes les figures sont disposées
avec ordre et exécutées avec soin. Au frontispice de l’hypogée, il y a une grande
inscription hiéroglyphique.
Cet hypogée, aussi bien conservé dans toutes ses parties,,a de quoi surprendre
les voyageurs, quand on songe qu’il est, pour ainsi dire, sur la rive du N il, et qu’il a
été exposé aux injures’des hommes, bien plus que ceux de la ville de Thèbes. Aussi,
sans remonter aussi loin que cette ancienne capitale, où la visite’ des hypogées
n’est pas sans péril, on peut prendre à Beny-Hasan une idée juste de la décoration
et des peintures des catacombes Egyptiennes. Mais on découvre ici un autre sujet
d’observation, bien digne d’intérêt pour l’histoire de l’art, et qui mérite toute
l’attention du lecteur.
Dans ces catacombes antiques, où les prêtres Egyptiens ont tracé une quantité
innombrable d’hiéroglyphes, dont le secret a péri avec les collèges de Thèbes,
de Memphis et d’Héliopolis, nous trouvons des colonnes semblables à celles des
plus anciens temples Grecs, des temples de Thésée et de Minerve, des temples de
Posidonia, de Coré et d’Agrigente : ce sont des colonnes cannelées(3), à seize cannelures
creuses, hautes de sept diamètres et un cinquième, diminuées d’un dixième
(1) Voyez pl. 64, fig. 4 et j . cinq -coudées ; la largeur, vingt-six; la distance dès co*
(2) On retrouve ici l’emploi des mesures Égyptiennes: Ion nés aux murs, sept; la hauteur totale, du-..uit.
la longueur de la grande salle fait à fort peu p.rès vingt- (3) Voyez pl. 64, fig. 4 , 5 , 6.
au sommet ; enfin pareilles aux colonnes de l’ordre Dorique Grec, au chapiteau
près, qui a la forme, d’un abaque ou tailloir. Ainsi voilà encore un ordre Grec,
emprunté à I architecture des bords du Nil, comme l’a été ensuite l’ordre Corinthien,
puise dans les colonnes dactyliformes de l’Égypte (i).
Ce seroit une grande erreur que de regarder l’analogie de ces colonnes avec
celles de l’ordre Dorique Grec, comme l’indicé d’un ouvrage appartenant aux
Grecs eux-mêmes. Ces colonnes font partie d’un monument couvert d’hiéroglyphes
et de peintures, dont le style est tout pareil à celui des hypogées de Thèbes de
Lycopolis et d'Elethyia, c’est-à-dire qu’elles présentent les mêmes défauts de perspective
et de dessin que les bas-reliefs Égyptiens présentent par-tout et dans tous
les temps, parce que les formes des figures humaines étoient consacrées. Les Grecs
et les Romains ont construit en Egypte, mais suivant le style de leur architecture
comme on le voit à Alexandrie, à Antinoé, Sic. Dans un autre quartier de l’Hep-
tanomide, ils ont creusé dans le rocher même, et ils ont fait un petit temple
Dorique, où l’on ne trouve pas le moindre mélange du genre Égyptien ; j’en
donnerai plus bas la description (2).
Je dois faire remarquer ici les colonnes du premier portique. Leur plan est un
octogone, et ce nombre de huit côtés est en rapport avec celui des cannelures
de l’intérieur, dont il est la moitié (.3); le chapiteau est un simple tailloir. Dans les
carrières de Saouâdeh, dont je parlerai plus loin (4), j’ai trouvé une colonne
aussi à huit pans, mais beaucoup plus large. Ce sont, avec les colonnes extrêmes
du grand palais de Karnak, les seuls exemples que je connoisse, dans les monumens
d’Egypte, de colonnes polygonales.
Les plafonds des hypogées de Beny-Hasan sont décorés de peintures comme les
parois elles-mêmes. On y a représenté des étrusques, des enroulemens et des
méandres d un dessin fort agréable. Le trait est rouge; les fonds sont symétriquement
rouge, bleu et vert. Les fleurons et les bandes sont aussi revêtus de ces couleurs
alternativement, de manière à bien se détacher les unes des autres. On a déjà
fait remarquer, dans le tome I." des Descriptions d’antiquités, que tous ces orne-
mens avoient été puisés en Egypte par les Grecs et les Romains (5); mais, s’ils lui
ont emprunté ces dessins, ils n’ont pas su dérober en même temps le secret de
leurs couleurs inaltérables. Aujourd’hui les peintures Égyptiennes ont conservé
leur vivacité première, et l’on ne trouve presque plus de vestiges des anciennes
peintures Grecques.
Je passe a la description de plusieurs sujets représentes sur les faces des catacombes
; la plupart sont des scènes familières qui rappellent celles d’Elethyia.
Dans une bande de figures qui représentent des gens de la campagne, on voit la
moisson à la faucille, suivie du battage du grain, au moyen de quatre boeufs qui
foulent Je grain aux pieds; un jeune homme rassemble, à mesure, la paille qui
nest pas battue; les travaux sont inspectés par un gardien (6). Le labourage à la
(*) Voye^ la Description d’Edfou, A . D . chap, V, (4) Pag. 39.
pag.Setip. ■*. (î) Voyez la Description de Thebes, A . D. chap. IX,
(¿) Voyeç ci-dessous, pag. 41. pag. J 2 4 , section x , description des hypogées.
(3) Voyez pl. 64, fig. 4 et y . (6) Voyez pl. 6S, fig. 2.