difficile d’affirmer à quelle époque remonte la construction de ce temple ; malgré
la ressemblance du plan avec ceux des petits temples de l’Égyptc, on ne peut assurer
qu’il soit du même temps : je n’ai point vu de sculptures Égyptiennes dans les
débris. A la vérité, le monument est presque rasé, et la ville a été consumée par
un incendie; mais les petites dimensions des pierres, des briques et des colonnes
(celles-ci n’ont pas un mètre de large), annoncent une époque postérieure à la
haute antiquité. Si l’on peut s’arrêter à une conjecture, on doit penser que c’est
un monument Grec, imité du style Égyptien.
Derrière ces ruines, le rocher est percé de carrières très-vastes, qui ont fourni
des matériaux à la ville. A une grande hauteur est une excavation profonde, qu’on
appelle Dyouân (i) : elle est précédée d’une grande porte, taillée sur la face de
la muraille, qu’on a pour cela dressée avec soin ; mais je n’ai pu m’assurer s’il s’y
trouve des sculptures Égyptiennes. J’ai mesuré la hauteur d’une des cimes de la
montagne, qui n’est pas encore au point le plus élevé : elle est égale à cent quarante
six mètres ou environ quatre cent cinquante pieds.
Il n est pas difficile de reconnoître à quelle ancienne position répondent les
ruines d’el-Deyr : cette position est en effet celle de Pesla, qui, suivant l’Itinéraire
d’Antonin , étoit à vingt-quatre milles d’Antinoé. C ’est la même qui est
appelée Peseta dans la Notice de l’Empire, et où se trouvoit un poste Romain,
sous Je nom d’a/a Gennanorum (2). En effet, si l’on mesure la distance d’Antinoé
à el-Deyr, on trouve trente-cinq mille cinq cents mètres (3);. ce qui fait exactement
vingt-quatre milles Romains de quatorze cent soixante-dix-huit mètres. 11
n’y a donc aucun doute qu’el-Deyr ou Medynet el-Qeysar ne s’appelât, sous la
domination Romaine, Pesla ou Peseta; mais je n’en conclurai point que l’origine
primitive de la ville ne soit pas Égyptienne.
Depuis el-Deyr jusque très-loin vers le nord, la montagne Arabique est escarpée
à pic et baignée par le Nil. La partie inférieure est percée d’excavations. Il y en
a une au-dessus d’el-Tell, placée, pour ainsi dire, à l’extérieur et isolément de
la montagne, comme celle qui est près dlElettyia, et qui est assez grande pour
ressembler de loin à un monument bâti: Auprès du vallon appelé Ouâdy Ramkh (4),
ou Vallée du marbre, on trouve des carrières et des grottes. A Cheykh el-Ar-
bayn (y), petit santon entouré de dattiers et d’acacias sur la cime du roc, on
voit des murailles de briques antiques et des ruines couvertes «de vases brisés.
J’ai mesuré les briques d’une de ces anciennes murailles ; elles ont om,i 5 d’épaisseur.
A Cheykh A ’bd el-A’myd (6), plus au nord et auprès d’el-Haouatah, j’ai
encore vu plusieurs carrières. Il y a aussi des traces d’un mur de briques isolé, très-
ancien, que le sable enfouit tous les jours, et dont on ne devine point l’objet.
( ') (3) Voyez É . M. f l S . f i g . , . (;)
M No,ma utr. hnpmi, pag. 9o. (4) g f P S . ( 6) » jJ I »«" a d
1 v -
P s i n a u l a (aujourd’hui el-Te/l).
A p r è s avoir passé el-Haouatah, on entre dans une grande plaine sablonneuse,
entourée sur trois côtés par la montagne Arabique, et à l’ouest par le Nil., toutr
à-fait semblable au golfe où est placée Antinoé. Dans cet espace a existé une très-
grande ville Égyptienne, qui avoit échappé jusqu’à présent à tous les voyageurs.
La première fois que je l’aperçus, je fus extrêmement surpris de voir un si grand
amas de ruines , qui n’a pas moins de deux mille deux cents mètres de longueur,
et mille de large, et qui, placé près du Nil, précisément très-resserré dans
cet endroit I ne figure cependant sur aucune carte. Je m’empressai d’en faire
le plan et de recueillir les dessins des parties un peu conservées. La plupart
des constructions sont malheureusement rasées, et l’on ne voit plus guère que
les fondations. Cependant on trouve encore un très-grand nombre de maisons
en briques „ avec leurs murailles maîtresses; une grande porte et son enceinte ;
deux vastes édifices, dont le plan est distinct; la grande rue longitudinale,
large de quarante-huit mètres ; enfin les traces d’une multitude de rues de cette
ville (i).
En allant d’el-Tell vers le sud, on trouve dans cette large rue, à quatre cents
métrés des dernieres maisons du village, une enceinte qui la traverse ; au milieu
il y a une porte. Vers le quart de l’étendue des ruines, et à gauche, est un grand
édifice en briques, précédé par une porte colossale, dont l’épaisseur est à peine
croyable pour ce genre de construction ; son ouverture est de i im,2y, et son
épaisseur de ym f (2). Les murs sont inclinés comme les faces des pylônes (3) ;
quoiquils aient perdu beaucoup de leur hauteur, celle-ci est encore de 7™,33.
Les briques sont elles-mêmes d’une proportion gigantesque : en effet, elles sont
longues de trente-cinq à trente-huit centimètres, larges de treize, et hautes de
seizg à vingt. L appareil en est très-soigné ; elles sont alternativement à plat et
de champ.
Cette porte est presque aussi longue que le grand pylône du palais de Louqsor;
et lé bâtiment lui-meme est aussi long que beaucoup de grands édifices Égyptiens,
puisqu’il a 193"",6 de long sur io ym de large. La première cour a 76™,8 de
profondeur. Il y a ensuite deux autres cours où étoient sans doute des distributions;
a droite et a gauche du bâtiment, on remarque deux ruq^, larges de quarante
huit mètres comme la principale. Toutes ces dimensions rappellent les
grands édifices de Thèbes.
Il est impossible d’entrevoir la destination de cet édifice, qui s’écarte absolument
de tout ce que 1 on connoît en Égypte ; le seul auquel je pourrois le comparer, mais
qui est bâti en pierre, est celui qui est au-devant de la troisième pyramide de
Memphis.
En face de cet édifice, de 1 autre côté de la rue, en est un de la même étendue et
(■) Voyez;,/. 6. (3) Ib id .J fj.7 1 t S. (J) Ibid. f e . f .