ou se cache sous les bandes d’hiéroglyphes ( i ) .■ Ne sachant ou ne pouvant
exprimer de face les seins de la figure, l’artiste a imaginé de les placer de profil,
et il en a fait autant des pieds en les écartant à 180° l’un de l’autre, comme
dans la position forcée qu’un maître de danse fait prendre à son élève. Quant
aux autres contours, à défaut de correction, ils ne manquent pas de fermeté ni
de pureté.
§. IV.
Sarcophage trouvé sur les bords du NU à Boulâq.
C e monument est encore un de ceux qui avoient été transportés du Kaire à
Alexandrie par les soins de la Commission des sciences et arts, et que les évé-
nemens ont mis au pouvoir de l’armée Anglaise, avec les vaisseaux mêmes sur
lesquels on les avoit embarqués : il a été trouvé dans le Nil, à Boulâq, près de la
rive droite du fleuve. Le petit nombre fie ses ornemens, qui consistent en une
seule bande horizontale d’hiéroglyphes, ne le distingue pas moins des autres sarcophages
que sa forme, qui est exactement semblable, en dehors comme en dedans,
à celle d’une momie. Le contour des épaules et même celui des jambes ont été
imités par le sculpteur (2). La matière est un basalte noir verdâtre, à grain très-fin;
le poli est de la plus grande finesse. Quant au travail des figures hiéroglyphiques,
il est-peut-être encore plus fini, plus parfait, que celui des petits obélisques décrits
précédemment, et je crois difficile de trouver dans toute l’Egypte les figures du
milan, du hibou, de la caille, de l’ibis, de l epervier, de l’oie et du vautour, mieux
taillées en relief dans le creux et travaillées avec plus de délicatesse que dans le sarcophage
de Boulâq. Les têtes sur-tout présentent des détails d’étude et d’imitation
bien sentis, qui font honneur à l’artiste, et qui supporteroient la comparaison avec
la nature même (3). On peut en dire autant de deux petites têtes d’homme et de
femme qui font partie de ces hiéroglyphes ; c’est le style Égyptien dans toute sa
pureté. La gravure de la planche qu’on vient de citer exprime assez bien le travail
du ciseau et le relief des parties intérieures, quoique encore loin de la touche
pleine de justesse qui brille dans l’original. En examinant avec soin le dessin des
animaux chez les artistes de l’école Égyptienne, il est impossible de refuser d’admettre
qu’ils étudioient attentivement la nature, et qu’ils savoient la rendre avec
goût : ils s’abstenoient en effet de copier, comme les Chinois, des détails trop
minutieux, et s’arrêtoient aux formes expressives et aux traits caractéristiques.
Nous avons levé des empreintes en soufre, en plâtre, en métal, de toutes les
figures de ce sarcophage; elles ont servi de modèles aux dessinateurs et aux
graveurs de l’ouvrage, et nous avons même, mon collègue M. Raffeneau-Delile
et moi, fait exécuter une copie complète et de grandeur naturelle de ce monument,
pour en faire hommage à la galerie d’architecture dépendant de l’école des
beaux-arts de Paris. La longueur totale du monument est de 2”,22 [environ 6’’
(1) Je traite de ce sujet dans les Recherches sur les (2) Voyez A. vol. V, planche zj.
mesures Égyptiennes. (3) Voy. les planches d’oiseaux, n.0' /,3^7,10,11 tt i2t
,°p-.];laplus grande largeur aux épaules, de 0-93¡ g g g celle des pieds,
deo ,69 , [2 1 ], enfin la hauteur, de £>",677 [2* if°]
Les formes des monumens de cette espèce sont très-diversifiées ; et l’on ne doit
pas en etre surpris puisqu’à sa mort toute personne opulente étoit déposée dans
un de ces cenotaphes : ainsi la matière, la proportion et la richesse des sculptures
devoient varier avec la fortune du défunt. Il n’y a pas deux sarcophages absolument
semblables parmi ceux que nous avons trouvés dans les pyramides dans
les hypogees, dans les tombeaux des rois et dans les divers lieux où se trouvent
des antiquités : c est la forme du monument, ou la matière, ou la sculpture ou le
couvercle qui difFere; au moins, dans ce genre de travail, l’art n’étoit pas tout-à-
fait enchaîné par un type invariable ( 1 ).
§• V.
Colonnes, Inscriptions et Fragmens antiques.
Il existe au Kaire, à l’est de la grande place Ezbekyeh, dans l’ancien jardin du
bey quon avoit converti en jardin Anglais au temps de l’expédition Française
un fut de colonne en brèche universelle, que je regarde comme un ouvrage dé
lantiquite Egyptienne. On sait que les Égyptiens sont les seuls qui possèdent
dans leurs carrières cette matière précieuse, et avec quel succès ils l’ont travaillée
G est de cette brèche admirable, et non moins rebelle au ciseau, qu’ils ont
fait le beau sarcophage porté ensuite à Alexandrie à une époque inconnue et
peut-etre dès Je temps d’Alexandre-le-Grand; ce qui a fait supposer gratuitement
quon 1 avoit taillé, exprès pour servir de tombe au héros Macédonien
Jai mesure gross.èrement le diamètre de la colonne dont il s’agit; je pense
qu i avoit environ 8 à 10 décimètres [2 pieds f à 3 ]. Je ne puis assurer
qurl. fut orne de sculptures; mais la matière se reconnoissoit très-bien aux
larges plaques de porphyre, de granit et de pétro-silex de toutes couleurs qui
forment la pate de la brèche universelle, la surface étant parfaitement polie et
travaillée. r
En parcourant les belles citernes du Kaire, dont j’ai parlé au long dans la description
de cette ville, comme en visitant plusieurs des principales mosquées et
églises, j ai vu une grande quantité de colonnes monolithes en granit rouge ou
non-, que ,e regarde comme provenant évidemment des anciennes villes de
i Egypte inférieure ; je ne dis pas de la Thébaide, car les ruines de la haute Égypte
ne présentent que des colonnes en grès ou en pierre calcaire, formées de plusieurs
pièces. On n a pas encore exposé d’où vient cette différence entre les monumens
e ce genre dans les deux parties du pays, et elle mériteroit d’être expliquée Én
rése^olr SarCÛ^ha^eS dans ^es moS(Iuées, servant aussi de
ce monument dans les pl. 31 à 35 du Voyage. C ’est le