
six cent trente-cinq millièmes. D ’après ces dimensions, le bloc entier du monolithe,
tel qu’il a été détaché des rochers granitiques de Syène, étoit de trois cent
quarante-quatre mètres cubes et demi ( i ), pesant neuf cent quatorze mille huit
cent trente-deux kilogrammes (2); et si l’on en déduit le vide, qui est de cent
soixante-cinq mètres et vingt centièmes (3), il restera pour la masse effectivement
transportée à Sais cent soixante-dix-neuf mètres trente centièmes cubes (4 ). pesant
quatre cent soixante-seize mille soixante-seize kilogrammes ( 5 ) : car on ne peut
douter que l’évidement du monolithe n’ait été fait sur la carrière même.
Mais que sont devenus tous ces monumens, dont on n’aperçoit sur les lieux
aucune trace apparente! Il est probable que, si l’on faisoit des fouilles dans les
énormes monceaux de décombres que renferme la grande enceinte de Sâ el-Haggâr,
on en retrouveroit des débris. Il est même très-vraisemblable que la chapelle
monolithe y est enfouie toute entière, et encore intacte : une masse pareille ne
pouvoit être ni aisément transportée, ni facilement détruite. Il est à croire aussi
que les débris des monumens de Sais ont servi à l’embellissement de villes plus
modernes, parmi lesquelles il faut particulièrement compter Alexandrie. Quoique
l’ancienne métropole du Delta soit presque entièrement ruinée, les dévastations
qu’elle a éprouvées sont cependant bien moins considérables encore que celles qui
ont fait disparoître Memphis, cette seconde capitale de l’Egypte, dont le bouleversement
a été tel, que pendant long-temps on a été indécis sur son emplacement.
A un certain jour de l’année, lorsqu’on devoit, pendant la nuit, offrir des
sacrifices, chaque habitant de Sais allumoit, en plein a ir , des lampes autour de sa
maison. Cette fête s’appeloit la fête des Lampes ardentes (6). Les Egyptiens qui
ne pouvoient se trouver à Sais, observoient tous la nuit du sacrifice, et allumoient
des lampes au-devant de leurs habitations, en sorte que toute l’Egypte se trouvoit
en même temps illuminée. On apportoit une raison sainte de ces illuminations;
mais Hérodote ne la donne point. Il est très-probable que cette cérémonie se faisoit
en l’honneur de la substance pure et lumineuse dont la divinité adorée à Stûs
sous le nom de Neit/i étoit l’image.
Si l'on croit les historiens Grecs, Cécrops seroit originaire de la ville de Sais,
et Athènes auroit été fondée par une colonie de Saïtes. Ainsi le souvenir de
Sais mérite d’être conservé , non-seulement parce qu’elle a été une des cités
les plus florissantes du Delta et les plus remarquables par la somptuosité de ses
grands monumens, mais encore parce qu’elle a donné naissance à une ville Grecque
dont le nom sera à jamais célèbre dans les fastes des arts et de la civilisation.
(1) 10047,6 pieds cubes.
(2) 1 86S 853 livres, à raison de 186 livres par Chaque
pied cube.
(3) 4818,85 pieds cubes.
(4) 5228,75 pieds cubes,
( s ) 9 7 2 147, S l iv r e s .
(6) Herod. Hist. lib. J i, cap. 62.
P a r M. S A IN T - G E N I S ,
I n g é n i e u r e n c h e f d e s P o n t s e t C h a u s s é e s .
C H A P I T R E X X V I .
OBSERVATIONS PRÉLIMINAIRES. *
A l e x a n d r i e est, de toutes les villes remarquables de l’ancienne Egypte, celle
dont il reste à-Ia-fois le plus grand nombre de souvenirs historiques ou dé descriptions
géographiques, et une très-petite quantité de ruines reconnoissables. Ces
deux circonstances, dont le rapprochement nous frappe au premier aspect, sont
dues a une même cause, je veux dire l’importance que cette ville et la situation
de ses ports ont toujours présentée aux maîtres de l’Egypte et au reste du monde
civilisé. Alexandrie est devenue par cette raison le siège d’un puissant empire,
a une epoque où les rapports de commerce, d’amitié, ou de rivalité d’ambition’
se multiplièrent entre les peuples voisins de la Méditerranée, de la Grèce et dé
I Italie. La culture des sciences, de la philosophie et des lettres, fit alors des progrès
rapides, et ces belles connoissances brillèrent ensuite d’un éclat particulier
dans la fameuse école d’Alexandrie. L ’histoire, qui, dès ce premier moment (i),
est parvenue presque sans interruption jusqu’à nous, cessa d’être incomplète ou
fabuleuse. Elle nous a donc conservé des traditions multipliées sur cette ville
célébré; mais les événemens qu’elle nous apprend, et ces mêmes considérations
générales que je viens d’indiquer et qu’elle nous retrace, amenèrent en même
temps de fréquentes révolutions dans l’existence politique d’Alexandrie. Cette
belle proie fut presque toujours l’objet de l’avide ambition des conquérans, et
devint, avec la basse Egypte, qui se trouvoit comme elle plus à portée des armées
de terre et de mer que la Thébaïde, le théâtre de ravages bien plus fi équens, plus '
longs et plus déplorables que ceux qu’éprouva l’Egypte supérieure. De là ces ruines
confuses, ces restés si rares de monumens, et ce bouleversement général du sol,
qui semble avoir été agité et retourné dans tous les sens, tandis que nous en retrouvons,
pour ainsi dire, les plans géométriques détaillés dans les auteurs anciens.
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r r A n” nd'° [ ] re'’ VO,e" t Chiffm 2 ? P ' - <!’- siècle après la conqnêre de
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