et du devant des cuisses. Il a une draperie jetée sur les épaules, et cette draperie
est dans le goût Romain. La sculpture est grossière et très-peu détaillée, comm e
si l’on eût voulu seulement la dégrossir pour l'achever ailleurs. Il n’est pas dou.
teux que cet ouvrage ne soit étranger aux Égyptiens. La hauteur du colosse assis,
compris le socle, est de 2”,7, sans compter la tête; la proportion seroit de 3">7
s il étoit debout. Les Turcs ont essayé d’exploiter ce morceau pour le débiter à’
leur usage ; on voit, au bas du dos de la figure, cinq cavités qui ont été pratiquées
pour y insérer des coins et faire éclater les fragmens.
La géographie comparée ne permet pas d’assigner avec certitude l’ancienne
position qui a existé dans cet endroit. Ptoiémée indique une position de Passé,!
au-dessus d Antæopolis ; mais l’Itinéraire d’Antonin place au-dessous la ville de
PesLi, dont le nom a beaucoup d’analogie avec Passdus, ainsi que l’a remarqué
d An ville. Il en est de mcme de Peseta, qui se trouve' dans la Notice de l’Empire,
D un autre côté, l’Itinéraire présente une position de Siïinon au-dessus d’Antæopolis
et-avant Panopolis; on peut donc hésiter entre les noms de Selinon et de PassahA
Mais ce qui ne présente aucune,incertitude, c’est l’existence-des carrières qui
ont été exploitées en cet endroit par les anciens Égyptiens. Il est permis dtl
croire que les pierres du grand temple d’Antæopolis ont été puisées, en partiel
dans les carrières de Çheykh el-Harydy ; j’en juge par la ressembjanpe qu’il y a|
entre leur nature et celle de la pierre dure du colosse que j’ai trouvé dans cel
dernier endroit (1). La montagne est composée de pierre calcaire en grandel
partie semblable à I espèce que j’ai décrite plus haut; on y trouve quelques pari
ties quanzeuses, mais principalement, et à chaque pas, de gros cristaux de spath!
calcaire rhomboidal très-beau, non par filons ou par couches, mais par -masse
séparées et saillantes à la surface du rocher,: il y en a de considérables et qui ont!
de deux à trois pieds de grosseur ; d’autres tapissent des sortes de puits naturels (2],
Le nom de la montagne est Gebel Cheykh el-Hutydy, du nom du petit village!
qui se trouve au pied. Cet endroit est connu pour recéier une multitude de!
voleurs qui rôdent sur le Nil ; ce qui rend ces parages très-dangereux pour les!
voyageurs qui ne sont pas sur leurs gardes (3).
C e s t près de ce petit village, bâti de roseaux, que se trouve le tombeau
de cheykh el-Harydy, prétendue résidence du serpent que la crédulité de-
voyageurs a rendu si fameux. Curieux d’éclaircir ce fait, qui a donné lieu i l
beaucoup de conjectures, nous appelâmes des villageois qui étoient assemblés sutl
la rive, et nous leur annonçâmes que notre intention étoit de visiter le tombeau dul
chà^ L T la DeSCnp,Ion d’A n tæ o p o lis , H . D . m a is , dans tous les fragm ens , on retro u ve toujours la forait I
e \ f > . pr im itive rhomboïdale. O n a v o it pris à to rt ces cr is tau il
(2) C e r ta in e s masses son t cristallisées con fu sém en t, e t p o u r d e l'ad u la ir e , e t aussi pou r du spath, pesant.
blan,C 7 t " m” e î a ne i®e * d’autres enfin sont co lo - (3) C e s voleu rs son t s ingulièrement hardis : conw
rees par d e 1 o x td e d e fe r ja u n e , e t o ffrent des a ccid ens nous partions d e C h e y k h e l-H a r y d y , [a n u i t , par u s I
cu r ieu x . L e s lu s inférieurs sont h o r izo n tau x , et formés beau c la ir d e lu n e , un homme se glissa sur nanti
successivement d e couches d ’o x id e -p u r e t d e couche s d e b a r q u e ; i l osa v o le r un turban sur la tê te du pila»;
spath. P a rm i les .cristau x-bien fo rm és , il y en a d e par- pen d an t q u 'il tenoit le g o u v e rn a il, et se je ta aussitôt|
»alternent be au x et d e la plus g rand e transparence : qu e l- à l'e au : o n lu i tira un cou p d e pistolet ; mais il plongn, I
ques-uns sont en a ig u ille s , comme le cristal d e ro c h e ; e t ne rele va la tê te qu 'à une grand e d is tan c e , où il se I
d autres affec ten t un e forme alon g ée com me le g yp se : trou v o it hors d e la portée.
cheykh. Quelques-uns d’entre eux portèrent cet avis dans la montagne ; bientôt
nous vîmes descendre plusieurs hommes portant des drapeaux rouges et blancs,
et nous faisant des démonstrations d’amitié : nous nous rendîmes au milieu d’eux
avec notre escorte. Dans cet endroit, la montagne est ouverte et forme une gorge
étroite qui fait plusieurs détours sinueux. Cet aspect, si rare en Egypte, semble
propre à inspirer des sentimens religieux. Nous arrivâmes, après avoir marché
une demi-heure depuis le bord du Nil, et en montant toujours, sur une sorte
d’esplanade à mi-coté, où est le tombeau de cheykh el-Harydy. C ’est une petite
mosquée Arabe, assez mal construite; rien n’annonce dans ce lieu d’anciennes
constructions s à côté est un escalier taillé dans le ro c , et composé d’une douzaine
de marches (1).
On nous dit qu’un grand nombre de Musulmans, habitans des villages voisins,
venoient annuellement prier sur ce tombeau, et. qu’on attribuoit à cet acte de
piété des effets merveilleux et des guérisons presque certaines. Nous avions appris
que, pour entretenir cette pratique,-à laquelle les dévots joignoient toujours des
offrandes, on montroit au peuple un serpent qui passoit pour être immortel et
pour être animé de l’esprit du cheykh : nous pressâmes vivement'celui qui nous
avoit introduits, de satisfaire notre curiosité en nous montrant le serpent. Il nous
répéta plusieurs fois, et en faisant tous les sermens que nous exigeâmes, que ce
serpent n’existoit point, et que le récit des voyageurs étoit faux à cet égard. Le
peuple accouroit en foule, disoit-il, pour prier sur le tombeau du cheykh,
selon l’usage des Musulmans ; et ceux qui desservoient cette espèce d’oratoire,
recevoient des présens peu considérables, qui suffisoient pour leur nourriture.
Il ajouta qu’à la vérité, lorsque le nombre des assistans étoit considérable, un des
desservans avoit coutume de jouer avec des serpens pour divertir l’assemblée ;
qu’il prenoit ces serpens dans la montagne, et les laissoit échapper ensuite. Nous
demandâmes qu’ils nous fissent jouir de ce spectacle. Aussitôt un d’eux s’éloigna,
et en fort peu de temps il rapporta un serpent qu’il manioit avec beaucoup de
confiance et d’adresse : il nous le fit toucher aussi; et, après avoir agité plusieurs
fois les drapeaux sur notre tête, et récité des prières dans lesquelles il invoquoit le
cheykh, il nous passa plusieurs fois le serpent autour du cou, et ajouta que, s’il
plaisoit à Dieu, nous serions exempts de maladies et d’accidens. Nous le remerciâmes
d un aussi bon augure. Notre présent, qui étoit assez modique, parut
considérable et excita une vive reconnoissance. Nous vîmes, à l’entrée delà grotte,
quantité de pierres noircies où l’on avoit fait du feu, et nous remarquâmes que la
terre etoit teinte de sang. On nous dit que plusieurs des fidèles qui visitoient le
tombeau, avoient coutume d’immoler des moutons; et des buffles, et que la chair
étoit offerte aux desservans. Avant de quitter ce lieu, nous voulûmes nous procurer,
à prix d’argent, le serpent qu’ils nous avoient montré, et nous en donnâmes
cent médins. Son espèce est petite, sa couleur grise, et il est tache de roux. Ce
même d’une très-grande excavation qu’il dit être tout au
sommet de la montagne, et où l’on se rend par un chemin
très-escarpé.
(1) Selon un des voyageurs modernes, cet escalier
communique mystérieusement avec l’intérieur de la
mosquée; nous n’avons pu vérifier ce fait: il en est de
A. D.