
zontale de 109 mètres [336 pieds]; au reste, c’est une expérience que l’on répète
souvent. A ’bd el-Latyf raconte qu’un archer qui étoit en sa compagnie quand il
visita les pyramides, tira une flèche dans la direction de la hauteur et dans celle
de son épaisseur (vers la base), et qué la flèche tomba à peu près à la moitié de
cet espace ( 1 ).
Du haut de l'édifice, on aperçoit au pied des pyramides une quantité presque
infinie de constructions rectangulaires et très-oblongues, parfaitement égales et
bien alignées par les extrémités, du sud au nord et du levant au couchant. J’en ai
compté quatorze rangs dans les deux sens, tant à l’est qu’à l’ouest de la grande
pyramide ; ce qui fait près de quatre cents : sous le sable qui en recouvre un grand
nombre la forme se distingue très-bien. J’ai vu sur les pierres de la plate-forme
une foule de noms gravés par les voyageurs, sur-tout beaucoup de noms Anglais,
parmi lesquels celui de Greaves; j’ai distingué aussi sur la pyramide le nom de
Niebuhr, quoiqu’assez mal écrit, ainsi que des noms Latins et Italiens, entre autres
un avec l’année 15J5 écrite de cette manière, 15 Jjb 55; enfin, auprès de l’ouverture,
on lit une multitude de noms remarquables. Les Français ont couvert le
monument du millésime 1798.
J’avois ouï dire qu’il étoit plus malaisé, plus fatigant, de descendre du sommet
que d’y monter; c’est ce qui me fit venir une idée dont l’exécution devoit, je
pensois, diminuer la difficulté de cette descente, tout en en profitant pour faire
quelque chose d’utile; c’étoit de mesurer toutes les assises une aune : l’opération
devoit être fort longue, et exiger une patience à toute épreuve. Je m’associai un
autre voyageur pour obtenir plus d’exactitude ; nous fermâmes les yeux sur les
difficultés de l’entreprise, et nous nous mîmes à l’ouvrage : j’ai rapporté plus haut
le résultat de ce travail (2).
C ’est en faisant cette longue opération que je pris encore une grande idée de
la pyramide. Après avoir travaillé avec ardeur pendant une heure, déjà bien las
et notre courage étant à bout, nous nous croyions très-avancés', et en regardant
sous nos pieds, nous apercevions qu’il restoit encore à fàire un ouvrage immense.
Peut-être que les efforts qu’exige la descente de chacun de ces degrés la plupart
quatre, cinq et six fois plus hauts qu’une marche ordinaire, l’action d’un soleil
brûlant, la posture pénible qu’exigeoit l’opération, ajoutoient à la difficulté du
travail. Une autre impression plus forte que je ressentis, c’est lorsqu’étant au
milieu de l’arête le long de laquelle je mesurois, je m’avisai de regarder l’autre. Il
me sembla voir une ligne dont la longueur n’avoit pas de limite, qui se prolongeoit
jusqu’à la voûte céleste, et passoit au-dessous du sol. Dans ce moment, j’éprouvai
un certain saisissement de surprise, ou de crainte, ou d’admiration, ou plutôt
tous ces sentimens à-la-fois, et machinalement je me cramponnai aux pierres.
Notre caravane n’ayant plus rien qui la retînt, la retraite fut ordonnée, et la
trompette sonna ; nous n’étions encore qu’aux trois quarts de l’opération ; cependant
nous vînmes à bout de la compléter entièrement ; nous arrivâmes à la
( 1) A ’bd el-Latyf, Relation de l'Egypte, traduction de M. Silvestre de Sacy, pag. 174.
(2) Voyez ci-dessus, page 64.
dernière marche, harassés de fatigue et de chaleur, et nous n’eûmes que le temps
de sauter sur nos montures pour rejoindre la caravane déjà descendue dans la
plaine.
Il y a trois manières de descendre de la pyramide : la plus commode, celle du
moins qui prévient l’étourdissement auquel exposent les autres, consiste à des-
cendre en arrière, c’est-à-dire en regardant la pyramide, parce qu’on n’a sous
les yeux que les degrés mêmes que l’on touche. Si l’on descend en avant,
on peut glisser, la marche étant étroite relativement à la hauteur de la contremarche.
Enfin, si l’on saute de degrés en degrés, il y a encore plus de fatigue
et de danger.
I N T É R I E U R D E J, A P R E M I E R E P Y R A M I D E .
En descendant de la pyramide, il faut se reposer un moment avant de parcourir
les galeries intérieures, et l’on doit observer la précaution inverse avec
encore plus d’attention. L ’entrée ou le bord actuel (et l’origine) du canal descendant
est aujourd’hui à la treizième assise ( i) ou à i z m,6 4 , c’est-à-dire, au
treizième de la hauteur de la pyramide tronquée actuelle, au-dessus du roc.’ Le
plan vertical nord et sud passant par le bord est de cette entrée est à 120 mètres
de l’angle nord-ouest, par conséquent à 6m,34 est de l’apothême,( 120 mètres,
moins la moitié de 2 27m,32) : or la largeur du canal est de im,i 1; il suit de
là que le plan vertical passant par cette galerie est bien perpendiculaire à la face
verticale du socle, dirigée est et ouest. En effet, 1.» la chambre dite du m , qui
a le même axé que celui de la pyramide, et dont les murs sont dirigés est et
ouest, et nord et sud, a iom,472 de longueur, dont la moitié fait 5“ ,236 ;
|| la distance à lapotheme 6", 34 doit être diminuée de la demi-largeur du
canal, 0” ,555; reste 5“ 790 ; la différence à 5” ,236 est seulement de om,^49.
Voilà un nouvel exemple de la précision apportée par les architectes de la
pyramide dans toutes les parties de la construction. \
On arrive aisément à l’entrée par la butte de sables et de décombres accumulés
au-dessous, formée en grande partie de débris qui tombent du sommet; ils sont
précipités dans le canal, et on les rejette par l’issue lorsqu’on vient a le déblayer.
Cette dernière opération doit être répétée chaque fois qu’il descend de nouveaux
visiteurs; on en verra le motif dans un instant.
Ayant que Je voyageur entre dans le canal, son attention est excitée fortement
par l’aspect extérieur de l’ouverture (2). Déjà très-étroite et basse, puisqu’elle n’a
que 1m, 11 de large [environ 3 dl 4 pr ] , et la même mesure en hauteur perpendiculaire
, elle paroît encore beaucoup plus petite par le contraste des énormes
assises qui 1 environnent. Une circonstance plus remarquable est la disposition
des quatre grandes pierres placées au-dessus en arc-boutant; elles ont 4 mètres
.„ ( t) Dans le Mémoire sur le système métrique on lit que de l’ancienne issue à l’élévation totale, il aurait fallu
entr e est à la i j . c assise; c est à partir de 1 esplanade, tenir compte des pierres ruinées et du revêtement,
assise du roc comptant pour deux ( voyez planche i5> (2) Voyez planche 14., fig. i , fig. 4 , et fi*. ,