I 4 DE S C R I P T I ON GÉNÉ RA L E DE MEMPHIS
collection d ’antiques, formant les trente dernières planches du cinquième volume-
ces objets sont disséminés dans la collection; je vais les rapprocher avec un peu
plus d’ordre, en les divisant en bas-reliefs, statues et figures d’homme ou d’animal
momies humaines ou momies d’animaux, figurines, scarabées et amulettes, lampes
et vases.
I . ” B A S - R E L I E F S , S T A T U E S O U F R A G M E N S .
L es fragmens de bas-reliefs que nous avons trouvés à Saqqârah, ont été, selon
toute vraisemblance, transportés de Memphis; et ils donneroient une idée du style
adoptédans cette ville, ouplutôt de l’exécution des artistes, si l’on pouvoit toujours
reconnoître l’époque de ces ouvrages : mais il n’est pas facile de distinguer les
diverses époques de l’art sous la domination Egyptienne. Il n’en est pas de même
de l’époque des Grecs et des Romains : alors on introduisit dans le culte et parmi
les symboles Égyptiens, des particularités et des formes nouvelles; on associa des
images disparates d’une manière plus étrange que n’avoient fait les Égyptiens,
peut-être sans autre motif que le caprice du dessinateur, sans autre guide qu’une
imagination déréglée. Du moins peut-on affirmer que, s’il est difficile de pénétrer
le sens des symboles Égyptiens, il est à peu près impossible d’espérer qu’on
devine jamais le sens de ces chimères compliquées et monstrueuses qui signalent
l’époque où les Grecs et les Romains, adoptant le culte Isiaque, renchérirent sur
le caractère énigmatique des objets de ce culte, et finirent par en dénaturer les
symboles. Ce simple aperçu, qui, on le sent bien, ne peut recev oir ici aucun développement,
suffit pour classer, à peu près suivant l’ordre des temps, les compositions
emblématiques du style Égyptien, pur ou mélangé.
L ’espèce d’autel trouvé près des pyramides de Saqqârah, et figuré avec deux ser-
pens à tête humaine dans la planche 69 du V .' volume d’antiquités (fig. 11J, peut
être cité comme un exemple de ces associations bizarres que les anciens Égyptiens
paroissent n’avoir jamais tentées. En effet, on chercheroit vainement dans I
les monumens d’Égypte, même dans les tombeaux des rois, où les sujets sont si I
extraordinaires, une tête barbue qui termine brusquement le corps d’un serpent, I
ou une tête de femme, richement parée, posée sur un autre serpent, qui s’élargit de I
manière à représenter une poitrine de femme; image plus barbare que celle dont I
se moquoit Horace dans ce vers souvent cité :
Desinit in piscem mulier formosa superne.
La première de ces deux figures, couronnée d’une sorte de boisseau, paroît I
se rapprocher de Sérapis plutôt que d’aucun autre personnage mythologique; I
mais je me garderai de hasarder une conjecture sur le personnage féminin, I
quelque rapport qu’on puisse lui trouver avec la déesse Isis. Quoi qu’il en soit, I
le dieu est évidemment Grec ou Romain, par le style de la tête, de la chevelure I
et de la barbe, et tout annonce qu’il s’agit du culte de Sérapis, tel que sous les I
Ptolémées on le pratiquoit à Alexandrie. Les deux serpens à tête humaine rem- I
plissent une sorte de cadre, en forme de portique, d’un genre mêlé. Le chapi- ]
teau répond, mais imparfaitement, au calice du lotus, et le tout est recouvert
d’une sorte de fronton arqué. On voit, par cet exemple, quelles modifications
es Grecs et les Romains firent subir au style antique pour l’accommoder à leur
•goût et aux besoins d’un culte hétérogène.
Je citerai deux fragmens de bas-reliefs qui proviennent aussi des environs dés
pyramides de Saqqârah, mais qui appartiennent à la haute antiquité. L ’un consiste
seulement en deux colonnes d’écriture hiéroglyphique (1); l’autre est le reste d’une
scène où plusieurs rangs de figures étoient l’un au-dessus de l’autre : dans le rang
inférieur, des femmes assises sur des sièges à pied de lion; dans le supérieur, des
figures debout et plus petites (2). Le pied d’une petite statue en grès rouge,
trouvé à Saqqârah (3), est un ouvrage digne d’être cité. Ce fragment seul prou-
veroit que les Égyptiens ont souvent suivi de près la nature même, dans l’imitation
de la figure humaine; au reste, dans la ronde-bosse, ils s’en sont toujours
écartés moins que dans le bas-relief. C ’est une remarque que j’ai faite plusieurs fois,
et je ne dois pas y insister : mais ne peut-on pas ajouter qu’en violant dans le bas-
relief les lois de la perspective, ils n’ont pas cependant altéré les formes par-'
tielles, comme lont fait dautres peuples chez qui l’art est resté dans l’enfance,
malgré les efforts quils ont faits pour faire sentir la perspective linéaire; ignorant,
1.° que celle-ci produit peu d’effet sans la perspective aérienne, 2 ° qu’il est des
moyens interdits à la sculpture et que le peintre a seul à son usage ! A ussi,
malgré toutes leurs imperfections, je ne balance pas à préférer les figures Égyp-'
tiennes, à la vérité, de style convenu et sans raccourci, mais dans lesquelles les’
profils, lés membres, les extrémités, ont leurs proportions vraies, leur galbe pur
et même quelquefois assez correct, à ces essais de tableaux où les raccourcis ont été
observés plus ou moins bien, mais où les formes sont sans grâce, sans contours,
les tetes sans beauté, et souvent les proportions violées. Mais, si l’on ne sait pas
se prêter à cette sorte de convention qui servoit de guide aux artistes Égyptiens,
on ne sera jamais sensible au talent particulier qui les caractérise; et j’avoue que ce
11 est guère que par une longue observation de leurs plus beaux bas-reliefs, examinés
et comparés sur place ou dans des dessins fidèles, qu’on peut se faire une idée
positive du genre de mérite auquel ils se sont élevés.
Je reviens aux figures de ronde-bosse. Personne ne conteste le soin avec lequel
les Égyptiens ont imité les animaux, et le caractère grandiose qu’ils savoient imprimer
a leur imitation. En voici un nouvel exemple dans cette tête de boeuf provenant
des catacombes de Saqqârah, représentée planche 89 (fig. ly j. La matière
est une pierre calcaire : entre les cornes, est un disque orné de 1 ’agathodoemon ;
cest, sans doute, une image du boeuf Apis. La proportion de la figure entière
clevoit être de près de deux pieds. L ’imitation est à grands traits ; et le travail
est exempt de cette recherche minutieuse qui est poussée si loin chez certains
peuples de 1 Orient (4), au préjudice du caractère distinctif de l’espèce. C ’est à
(I) Voyez pl. 84, A . vol. V, fig. j e . (3) Voyez pl. 4 7 , A . vol. II.
(a) Voyez pl. S cf., A . vol. V, fig. y Ce sujet a subi, (4) On sait que les Chinois manquent rarement-d’ex-
la 6ravure, une réduction trop forte pour être saisi primer en d é ta il les cils et les cheveux.
neitenient.