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& comme dans celle-ci, non-plus que dans aucune j
autre de la même importance, on ne peut jamais j
annoncer avec précifion , quel en fera la confé-
quence, il ne faut jamais l’entreprendre lorfque
?qn peut fe flatter de réuffir en employant
des moyens plus doux, & moins dangereux.
Mais lorfque'ces moyens nous manquent, & que
la vie du malade efi en danger, il faut fans
héfiter recourir à l’opération, comme au feul
moyen qui relie dé la 1 i çonferver. >
Tout ce quç nous venons de dire fur 1 opération
de l’Aneurifme, fe rapporte à la fécondé
efpèce de cette maladie que nous avons, nommée
Aneurifme par épanchement; parce que les
cas d’Aneurifme vrai ou enkyfié fur lefquels on
peut opérer, font beaucoup moins fréquens,
& que d’ailleurs l’opération efl à-peu-près la
même *, il. faut également divifer les tégu-
mens, ouvrir la tumeur, & en ôter fes caillots
& le fan g qui ne circule plus. Enfuite au
lieu de lier l’artère au-deffus & au-deffous de
l ’ouverture par où elle laiffe .échaper le fang,
on place les ligatures au-deffus & au-delfous
du fac ÀnenrifmaL— Mais il y a une circonllance
qui rend ici- l'opération plus dangereufe, 4 &
qui a nuit plus d une fois à fon fuccès, c eft
que très-fou vent l’artère fe trouve viciée au-
delà de la dilatation ; & que fi l’on ne place
pas la ligature,fur un endroit fain du vaiffeau,
la portion liée tombe, ou fe trouve bientôt
coupée par la ligature, avant que fes parties
aient pu fe réunir, & le malade périt par
l'hémorrhagie qui furvient en conféquençe. C tft
par cette raifon particulièrement que l’opération
a été fouvent fans fuccès', dans 1 Aneurifme de
l'artère poplitée, & quelle a été condamnée,
même par des Chirurgiens du premier rang.
Nouvelle méthode défaire V opération de VAneurifme
par une /impie ligature.
Les artères fémorales & 'poplitées, font des
branches qui partent du même tronc * elles fe
dift ri huent fur différent côtés de la cuiffe, &
on les découvre facilement dans chacune de ces
fi tu a tions -, mais, dans l'endroit où l’artère paffe
d’un côté à l’autre, elle efl plus-enfoncée fous
les parties qui l'environnent, & ne peut être
mife à nud fans quelques difficultés. Quand on
pratique l’opération l’Aneurifme de l’artère
poplitée, particulièrement lorfque la tumeur a
beaucoup de volume, on fait ordinairement
la ligature à l’endroit où l’artère fort des mufcles;
mais il y a trop peu de place en cet endroit,
jî l’artère fe trouve malade un peu plus haut
que la tumeur, fi elle vient à être coupée
par Fa ligature ; car alors il/ ne refie pas allez
de longueur du vaiffeau., pour permettre de
s’en affurer encore une fois fous le jarret.
M. Humer, ayant vu plufieurs fois l'artère
çéder ainfi, a propofé , en pratiquant cette opé-
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ration, de faifir le vaiffeau à quelque dîftancé
au-deffus de Ij» partie malade, de manière à
diminuer le rifque de.l’hémorrhagie, & à pouvoir
faire plus promptement fa ligature, dans le
cas qù cet accident arriveroit. M. Hunter
penfoit que fi l’on parvenoit- de cette manière
à détruire. dans le fac Aneurifmal,, la force
de la circulation, on enleveroir. en même-tems
la caufe de la maladie; & félon lui, il étoit
vraifemblable que fi les parties ëcoient livrées
à elles-mêmes, le fac avec Te fang coagulé
qui y étoit contenu, pourrait être abforbé &
toute la tumeur ainfi enlevée par l’aètion de
l’économie animale, ce qui rendroit inutile toute
incifion dans le fac.
L ’opération conçue de cette manière, fut
pratiquée pour la première fois à Londres, à
l’Hôpital Saint Georges, en l’année 1785 : le réful-
tat-abrégé que nous allons en rapporter doit mettre
en crédit la théorie de M. Hunter ; & autant
qu’un feul fait peut fervir à établir une pratique
générale, cette obfervation paroît être L’époque
d’ un progrès de la plus grande importance dans
la Chirurgie.
Un homme de quarante-cinq ans fut reçu à
l’Hôpital de Saint-Georges, en Décembre 1785.
Il avoit un Aneurifme de l’artère poplitée ,
dont il s’étoit apperçu depuis trois ans. &
qu’il avoit vu augmenter graduellement pendant
tout ce tems. La tumeur étoit affez volumineufe
pour écarter les deux -tendons qui font placés
aux deux côtés du jarret, & pour faire une
faillie confidérable entr’eux. La pulfation étoit
très-diflinéle &. pouvoit être fentie à chaque
endroit de la tumeur. La jambe & le pied
de ce côté étoient beaucoup plus gros que de
l’autre, & a voient une couleur mêlée de brun;
le gonflement n’étoit point de nature oedéma-
teufe, mais ferme & charnu ; il étoit une fuite
de l’extravafation de. la lymphe coagulée, & la
jambe confervoit fa forme naturelle.
M. Humer s’étant déterminé ,à faire l’opération,
appliqua préalablement-un tourniquet
fans le ferrer, afin de laiffer les parties, autant
qu’il feroh poffible, dans leur fituation naturelle.
Il commença par faite une incifion fur la
partie antérieure & interne de la cuiffe, un peu
au-deffus du milieu de cette partie. Cette incifion
fut prolongé? obliquement à travers le
; bord inférieur du mufcle couturier, & fut
; faite affez grande pour donner pleine liberté
de faire dans le cours de l’opération tout
■ ce qui pourroit être néceffaire. Le fajcia qui
■ couvre l’artère fut alors mis à découvert dans
, la longueur d’environ trois. pouces, &.-les pnl-
fations de ce vaiffeau fe raifant fenrir alors
d’une manière très-manifefle, il fit au travers
du fafeia une légère incifion d’environ un
! pouce , le long de fon bord, &v l’çxpofa
! ainfi à la vue. Après • avoir dégagé l’artère
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■ de .fes attaches latérales., par le moyen du
bi flou ri, & des parties qui la touchent pof-
térietirement avec le bout d’une fpatule mince,
il paffa derrière ce vaiffeau une double ligature
au moyen d’une fonde à oe il, & lia
l’artère en deux endroits, mais affez légèrement,
pour appliquer feulement fes parois les unes
contre les autres ; il fit de la même manière
.deux autres ligatures un peu plus bas. Ce
qui le détermina à faire ces quatre ligatures,
fut que chacune d’elles étant peu ferrée,
ne fuffifoit pas pour intercepter entièrement le
paffage du fang, ce que raifoient fes quatre
enlemble ; & . M. Hunter aitnoit mieux comprimer
une grande étendue de l’artère que
de faire une forte preffion fur un feul de
fes points. Les bouts des ligatures furent
portés hors de la plaie, dont les lèvres furent
auffi-tôt rapprochées l’une de l’autre, & retenues
par un emplâtre adbéfif & une bande, pour
.en procurer la réunion.
Quelques heures après l’opération, non-
feulement le membre avoit confervé fa "chaleur
naturelle, mais même il étoit plus chaud
que l’autre jambe. Le fec'ond jour, après
l ’opération, la confiflance charnue de la jambe
étoit devenue fouple, fon volume étoit beaucoup
diminué, & la tumeur Aneuriimaie parut avoir
perdu plus du tiers de fa groffeur,.
Le quatrième jour, à la levée de l’appareil,
on trouva les bords de la plaie unis dans
toute leur longueur, excepté aux endroits où
les ligatures y mettoient obflacle ; il n’y avoit
dans la partie ni douleur, ni tuméfaélion',
mais la tumeur Aneurifmal e étoit prefque dans
le même état qu’au fécond jour.
Le neuvième jour, il s'ëtoit fait un écoulement
confidérable de fang. dans l’endroit où
les ligatures fortoient de la plaie; c’efi pourquoi
on appliqua un tourniquet un peu au-delïus,
pour s’oppofer à cet écoulement. Peu d’heures
après, on ôta le tourniquet & le fang ne couloir
pas; cependant on plaça fur la plaie, dans
la direction de l'artère, un rouleau de bande,
& par-deffus on mit le tourniquet, que l’on
ne ferra qu’autant qu’il étoit néceffaire pour
détruire i’impétuofité du fang, dans cette portion
de l’artère.
Le dix-feptième jou r, la tumeur étoit diminuée,
& les parties qui i ’environnoient étoient
plus affaifîees & plus fouples, de manière qu'elle
paroiffoir plus diftindie.
Vers les derniers jours de Janvier, fix
femaines après l’opération, le malade fortit de
1 Hôpital. A cette époque la tumeur étoit encore
diminuée, & plus ferme au toucher. On recommanda
au malade de venir à l’Hôpital une fois
1# femaine, & dans l’intervalle, d’exercer quel-
C'hirurgie. Tome I / re Partie.
A g
que degré de compreffion fur la tumeur, su
moyen d’une compreffe. & d’un bandage, afin
d’aider l’aélion des vaiffeanx abforbans.
Au mois de Mars la plaie fe rouvrit, &
jufques au mois de Juillet, .divers accidens
inflammatoires de la cuiffe, retinrent !e malade
à l’Hôpital. Ces accidens étoient occafionnés par
divers fragmens des ligatures qui étoient demeurés
fous la cicatrice; mais enfin, à l'époque dont
nous parlons, le gonflement de la cuiffe s’af-
faiffa entièrement, & le malade fortit de l’Hôpital,
n’ayant en apparence -plus de tumeur fous le
jarret, & bien portant à tous égards.
Le fuccès de cette opération confirma pleinement
l’opinion qu’en avoit formé d’avance
M. Hunter, favoir, qu’il fuffit de détruire la
force de la circulation dans l’artère affeélée
pour opérer la cure de la maladie, ou du moins
pour mettre obfiacle à fes progrès, & pour
laiflbr les parties dans un état dont l’aélion
de l’économie animale peut les retirer, en les
rendant à leur état naturel.
Cette manière de faire l’opération étant en
elle-même évidemment plus fimple, & à tous
égards moins dangereufe que la méthode que
l’on emploie ordinairement, & que nous avons
décrite ci-defftis, nous ne nous étendrons pas
fur les raifons pour lefquelles elle paroît devoir
mériter la préférence. Nous ajouterons feulement
que M. Hunter blâme maintenant, plutôt qu’il
n’approuve, la méthode qu'il a fuivie d'appliquer
un grand nombre de ligatures, parce quelles
ne peuvent fortir fans produire de l’ulcération
à J a partie de l’artère. qu'elles renferment,
ce qui exige beaucoup de tems lorfque la ligature
n’eft pas bien ferrée ; & que probablement
s’il faifoit de nouveau cette opération, il ne
chercheroit pas à cicatrifer la plaie par le rappro-
I cbement immédiat de fes bords, mais qu’il
préféreroit de ne pas la fermer fîtôt, afin de
pouvoir vifiter l'artère quand cela feroit néeek
faire.
Il paroît par un mot, qui fe trouve dans
le volume lx x du journal de Médecine , à
la page 471, que M. de Sault avoit déjà pratiqué
la même opération quelques mois avant M. Hunter
avec un entier fuccès ; mais il n'en a publié
encore aucun détail.
Elle a.été exécutée depuis fur un Aneurifme
très - confidérable . de la partie fupérieure de
l ’artère fémorale. Le malade mourut an quatorzième
jour ; il paroît que ce défaut de fuccès
doit être attribué à ce que la maladie étoit
trop avancée, & à ce qu'elle avoit fon fiège dans
une portion trop élevée de l’artère.— Voyez
un mémoire fur l’Aneurifme de l’artère poplitée,
dans le journal de Médecine volume l x x ,
; P* 453*