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trifée, on voit toujours une petite élévation qui
montre que cet endroit a été le liège d’un abcès.
Les abcès qui s’évacuent le long de la dent,
peuvent toujours fe reconnoîrre par le pus qui fort
lorfque l’on comprime la Gencive, & qui fe montre
dans l’angle formé par la dent & le bord de
la Gencive.
Ces abcès font beaucoup plus fréquens à la
mâchoire fupérieure qu’à l’inférieure , & fe trouvent
beaucoup plus fouvent auprès des dents de
devant & des petites molaires , qu’auprès des grof-
fes molaires ; on les obferve feulement fur les
Cents incifives de la mâchoire inférieure.
Comme ces affrétions des Gencives font généralement
occalionnées par la préfence de quelques
dents cariées, on les rencontre plus fouvent chez
les jeunes gens & chez les perfonnes d’un moyen
âge, que chez des perfonnes âgées -, les dents de
lait y donnent lieu plus fréquemment que les
dents permanentes , comme étant plus fujettes à
fe caçkr.
Oî^Voit quelquefois fe former à l’orifice de
ces fortes d’abcès , des tumeurs fongueufes,
produites par une difpofition trop aétive à
ta granulation des chairs dans l’intérieur de la
cavité, tandis que la peau n’a pas la liberté
de fe cicatrifcr; on obferve fouvent le même
phénomène dans les cautères, dont le fond eft
difpofé à fe remplir, mais qui ne peuvent fe fermer
à caufe du corps étranger qu on laiffe dans
leur cavité. Dans le t:as qui nous occupe, la
dent agit comme un corps étranger -, & la formation
continuelle du pus, que fa préfence détermine
, empêche la cicatrisation de l’ulcère.
Quant au traitement de cette maladie, il doit
être le même, foit quelle air été occafionnée par
une dent cariée, ou par une affeétion de l’alvéole.
Les dents, comme nous l’avons dit ailleurs,
font, par leur ftru tiare particulière, dans des
circpnfiances qui ne leur permettent point de
participer aux avantages d’une guérifon, de la
même manière que tout autre organe. Ain fi,
lorfqu’il fe forme quelque abcès autour des racines
d'unedent, il tn réfulte néceffairement qu’elle
ceflê d^être unie aux parties qui l’environnoient;
6 comme fa fubfiance n’efl pas fufcepiible de
■ granulation, il eftimpofiible qu elle contracte avec
ces parties de nouvelles adhérences; elle devient
par-ià un corps étranger, ou du moins elle agit
comme tel; elle eft même un corps étranger de
la plus fâcheufe efpèce, puifque aucune opération
naturelle de l’économie animale ne fauroit s’en
débarrafl’er, fi ce n’eft d une manière extrêmement
ltnre. Or , l’on ne voit rien de femblable
dans aucune autre partie du corps ; car, dès que
quelqu’une fe trouve privée de vie, la machine
a le pouvoir de la féparer du refie, & d'opérer
^infi une guérifon; mais,dans le cas qui nous
occupe, la partie morte ne fe fépare point, &
Ton ne peut -être Cûr de procurer au malade une
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guérifon complette qu’en arrachant la dent. Ce
doit être là néanmoins la dernière reftource, &
l’on doit renvoyer l’opération aufii long-tems que
le malade n’eft pas trop incommodé par ce délai,
en ufant d’ailleurs .des moyens les plus propres
à le lui rendre fupportable.
Lorfque l’abcès a percé la Gencive , ce qu’il
y a de mieux à faire pour prévenir une nouvelle
accumulation de pus, c’eft d’empêcher que
fon ouverture extérieure ne vienne à fe fermer.
Pour cet effet, il faut dilater cette ouverture,
& la maintenir dans cet état jufqu’à ce que toute
la furface interne de la cavité fiftuleule foit dans
un état de cicatrifation, ou du moins jufqu’à ce
que l’ouverture extérieure ait tout-à-fait perdu
la faculté de fe refermer ; car, de cette manière,
ou l’on diminuera de beaucoup la difpofition des
parties à former du pus, ou s’il s’en forme, il
trouvera toujours un paffage libre pour s’écouler
au-dehors. La racine de la dent demeurera,
il eft vrai, expofée à l’air ; mais il ne fauroit en
• réfulter plus d’inconyéniens que de la iaiffer
conflamment baignée dans le pus.
Pour cet effet, on fera fur la Gencive une
incifton cruciale, affezgrande pour mettre à découvert
toute la cavité de l’abcès^ on remplira
cette cavité de charpie trempée dans de l’eau de
chaux, ou dans une faible folution de pierre
infernale, & l’on renouvellera très-fouyent le
panfemenr, à caufe de la difficulté de contenir
la charpie dans la plaie. On pourra toucher
celle-ci avec la pierre infernale, fi cela jparoît
néceffaire* pour l’empêcher de fe fermer.
Cette opération qui réuffit fort bien pour les
dents molaires, n’eft pas trop praticable, lorfque
le mal affeéte les gencives antérieures, à
caufe de la difformité qui en réfulte. Dans ce
dernier cas, on peut fe contenter de toucher la
furface de l’abcès avec la pierre infernale, pendant
une minute, en ayant foin d’en tenir la
lèvre bien écartée pendant tout ce tems, qui fuf-
fira ppur que le cauftique pénètre au fond de
la cavité. On aura foin, avant de l’appliquer,
d’effuyer la Gencive, de manière à en ôter,
autant qu’il fera poffible, toute l’humidité, afin
qu’il nef s’étende pas plus qu’if ne faut.
On a recommandé, daB$ le cas dont nous
parlons, d^arracher la dent, d’en ôter avec la
lime, ce qui étoit carié, & de la replacer à
l’inftant; quelquefois cette pratique a réuffi; mais
le plus fouvent elle a manqué de fuccès, à caufe
du mauvais état de l’alvéole.
Nous avons fuppofé jufqu’à préfent que l’abcès
a fon fiège dans les Gencives, ou dans les
alvéoles; mais on en voit fouvent qui font
firués beaucoup plus profondément, & qui, non-
feulement caufent de très-vives douleurs , mais
expofent encore par la fuite le malade à des ^c-
cidens défagréables & fâcheux. Ces abcès, ainit
que ceux dont nous avons parlé, font occafîon- l
nés le plus fouvent par des dents cariées, & I
fur-tout par la carie des dents canines, parce j
que celles-ci pénètrent plus avant dans l’os de I
la mâchoire que les autres. Par cette même I
raifon, s’il fe forme uii abcès près de la pointe j
de leurs racines, il arrive fouvent qu’il fe fait j
jour au travers de la peau, plutôt qu’entre
la Gencive & la lèvre ; ce qui caufe une difformité,
& laiffe des marques qui peuvent être j
prifes pour des traces d’ulcères fcrophuleux ,
lorfqu’elles fe trouvent à la mâchoire infériéure.
Lorlque le mal éft à la mâehoire fupérieure ,
il en réfulte une cicatrice foi t défagréable à une
petite diflance du nez. Quelquefois l’abcès eft
litué plus profondément même que la racine de
la dent, & cela fe voit dans l’une & l’autre
mâchoire; mais plus fouvent à ia mâchoire inférieure.
Pour prévenir les accidens dont nous venonj
de parler, il faut bien fe garder defolliciter la
fuppuration par des applkaiions extérieures; il
vaut mieux fe contenter de fomenter l’intérieur
de la bouche avec des liqueurs chaudes, ou d’y
tenir quelque fubftance propre à favorifer de ce
côté la formation de l’abcès, telles que des
ligues graffes, cuites dans du lait,fies oignons
ciiits fous la cendre &c. ,Dès qu’on apperçoit le
pus à l intérieur , il faut fe hâter de lui donner
iffue par une profonde incifton ; cela eft fur-tout
néceffaire, lorfque l’abcès affeéte la mâchoire
inférieure, à caufe de la tendance qu’a toujours
le pus à s’ouvrir un paffage dans les parties les
plus déclives. Cette pratique eft d’autant plus
convenable, que, non-feulement on évite ainft
la difformité qui réfulteroit de l’ouverture qui j
pourroit fe faire naturellement au-dehors, mais i
encore parce que l’on n’a point de panfemens à
faire, & que l’ulcère fe cicatrife bien plus promptement,
même dans les cas où il y a beaucoup
de chairs à couper, & où la matière eft prête
à fe faire jour au travers des tégumens.
Pour prévenir un retour de la maladie, il fera
fouvent néceffaire d’arracher la dent qui a été
la première caufe du mal, ou qui a pu fouf-
frir.en conféquence de l’abcès, & qui, dans
l’un & l'autre cas, peut en occafionner le renouvellement.
Après l’ouverture de l’abcès, le traitement
doit être fort fimple, & confifter fur-tout à tenir
la bouche aufii propre qu’il fera poflible, à i
l’aide de fréquens gargarifmes, le malade ayant I
foin, en même-tems qu’il en fait ufage, de
comprimer extérieurement la partie affeélée,
pour en faire fortir le pus. Si l’os fe trouve
attaqué, la portion cariée s’exfoliera, & probablement
entraînera avec elle une ou plufieurs
dents. Voyei Mâchoire.
Les Gencives font fujettes à des excroiffances
de différente nature, & qui ont différons degrés
dé corififtance. Ces excroiffances font toutes à-
peu-près delà même couleur que les Gencives.,
mais quelques-unes font molles & fongueufes ,
tandis que d’autres font plus fermes ; on en voit
qui ont la dureté des verrues. Quelquefois elles
font accompagnées de douleur; le plus fouvent
cependant elles n’ont d’autre inconvénient que
de gêner la parole & la rnafti-ation. On en voit
qui ne font fixées à la Gencive que par un pédicule
étroit : mais ordinairement elles y adhèrent
par une large bâfe, & même dans toute
leur étendue.
Ces excroiffances font fouvent occafionnées
par des dents cariées, ou par la carie des alvéoles,
ou par celle de l’os même de la mâchoire;
& lorfqu’elles font considérables , elles
deviennent fouvent elles-mêmes la caufe de la
carie de cet os. C’éft pourquoi il faut les extirper
, avant qu’elles aient acquis un grand
volume, Ce qui, en général, eft une opération facile
à exécuter. Lorfqu’elles ne tiennent que par
un pédicule énoit, on les fépare aifément ail
moyen d’une ligature ferrée au point d’y arrêter
toute circulation ; mais lorfqn’eîles font
adhérentes par une grande bafe, il faut les attaquer
avec l’inftrument tranchant.
Pour procéder à cette opération, après avoir
mis le malade fnr un fiège en face du jour, &
fixé la . tête par les mains d’un aide placé' derrière
lui, on faifit la tumeur avec des pincettes
; ou avec un érigne à deux branches, & on
la fépare avec un biftouri, ou avec des cifeaux
de différentes formes, fuivant l’endroit de la
bouche?fur lequel on opère. On tâchera, autant
qu’il fera pofiible, d’emporter toute la tumeur,
en ménageant cependant les parties fur
lefquelles elle repofe, de peur de nuire aux
dents, en mettant leurs racines à découvert.
Néanmoins on eft quelquefois obligé de pénétrer
jufqu’à l’os, pour enlever toutes les parties
dénaturées par la maladie.
Après l’opération , il y a toujours plus on
moins d’hémorrhagie, qu’on doit tâcher d’arrêter
lorsqu'elle eft trop forte, comme il arrive
quelquefois, en raifon de ce que les artères qui
fe rendent à des parties gonflées contre nature,
font elles-mêmes dilatées au-delà de leur état
naturel, & privées en même-rems par la maladie,
d’une grande partie de leur force contractile.
Si les aftringens ordinaires, tels que l’ef-
prit - de-vitriol, l’efprit-de-vin , l’alun ne fuffi-
lent pas pour arrêter le fang, ©n eft quelquefois
obligé d’avoir recours à l’application du
cautère aétuel.
11 n’eft pas rare de voir ces excroiffances repulluler
très-rapidement après l’opération, &
paroître au bout de deux ou trois jours aufii
volumineuses qu’auparavant; mais, en général, lorsque
l’os fubjacént eft fain, cette nouvelle fubf-
tance s’affaiffe bientôt d’elle-même, & la mal*-