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5<s8 GEN
die fe termine favorablement. Souvent on leur
voit prendre une apparence cancereufe qui effraie
'le Chirurgien, & le détourne de les attaquer
par aucune opération } mais, pour l’ordinaire,
ces craintes font mal fondées, fur-tout lorsque
le mal n’affeéïe que la Gencive. Lorfqu'il
tient à une affeètion de l'os, on voit fréquemment
renaître la tumeur , qu’on ne peut détruire
efficacement qu’en l’attaquant avec le cautère
aéluel. On trouve, dans les Auteurs, beaucoup
d’exemples des bons'effets de cette pratique
| nous nous contenterons d’en rapporter un }
ç’efl une Obfervation .de M. Brouillard, Membre
de l’Académie de Chirurgie. (,i )
ci Pendant que ce Praticien exerçoit à Avignon
, on lui amena d’Apt, en Provence, en
1753, une jeiine demoifelle de dix-fepî à dix-huit
ans, d’un tempérament délicat, anciennement
rachitique, qui avoit une exeroiffance charnue,
laquelle,'de la face interne de la partie gauche
du corps de la mâchoire inférieure, où elle pre-
noit racine, au-defTons de la première & de
la fécondé dent molaire, s’étendoit jufques vers
la face interne de la-partie droite. Cette tumeur,
en occupant prefque tout l’intervalle du
ceintre intérieur de la/mâchoire, en avoit déplacé
la langue, & la tenoit appliquée contre
le palais } de façon que la malade ne parloit ,
ne màngeoir, & n’avaloit qu’avec beaucoup de
difficulté. La furface fupérieure de çettefongo-
fité, afl’ez reffemblante à un gros marron d’Inde
applati, étoit emr’ôuverte par une crévaffe irrégulière
& profonde, d’où fortoit une fanie fan-
guinolente. Le pédicule de cette tumeur,n’avoit
pas plus, d’étendue qu’une pièce de vingt-quatre
fols* *v mais il étoit moins rond, & un peu
alongi en ovale. Sa maffe étoit ül?re & flottante
dans la bouche -, des douleurs lancinantes
prefque continuelles, fe faifoiem fentir, |j| elles
augmentaient fouvent pendant la nuit; l’intérieur
de l’osfembîoit alors en être le'liège principal.
M. Brouillard jugea que la tumeur^ était
cancereufe, & qu’il falloit abfolument l’extirper.
Son pronoftic fut avantageux *, la forme de la
iumeur étoit des plus favorable, & fa caufe
ne pouvoit rien faire préfumer de fâcheux ; on
en rappprtoit l’originé au déchirement que les
Gencives avoient fouffert par un fragment de
coquille de noix, écrafée entre les dents, trois
ans auparavant. IL étoit furvenu un fopgus dont
les progrès Tqccefljfs formoiem la tumeur qu’il
convenoit d’emporter. M» Brouillard auroit pu
facilement en faire la ligature ; mais, après avoir
préparé la malade par les remèdes généraux, &
arraché les deux premières, dents- molaires fort
vacillantes, il crût devoir préférer le biftouri.
jjn morceau de bois én forme de coin, mis
{ 1 ) Mémoires de l’Académie Royale $le-Chifurçic.
*Tomç y .
GEN
entre les dents, empêcha la malade de fermer
la bouche. La tumeur faifie par le pouce & le
doigt index de la main gauche , fut emportée
avec l’inftrument tranchant, conduit par la main
droite; cette feétion eut l’avantage de pouvoir
laiffer couler une certaine quantité de fang ,
que les afiringens ordinaires, aidés de la corn-,
prelfion, arrêtèrent fans peine,
c< La malade dormit peu pendant la nuit
qui fuivit l’opération; il y eut encore quelques
douleurs lancinantes à la plaie. Le lendemain ,
fa furface parut dure , inégale, & un peu protubérante.
M. Brouillard y .appliqua la pierre
infernale très-fortement, après avoir garni les
environs avec de la charpie, pour les garantir
de l’impreffion de ce cauflique. Immédiatement
après l’application de la pierre, on garni (Toit la
furface de la plaie avec de la charpie fèche ,
qu’on changeoit, dès qu’elle étoit imbibée de
faiive. Six heures après l’application du caufii-
que, on touchoit l’efearré de'tems à autre avec
de l’huile de myrrhe, mêlée de miel rofat. Qn
répéta, pendant huit jours, l’application de ce
cauflique, & les deux derniers jours, il fut
appliqué matin & fbir; l’état de la plaie cependant
n’éprouvoit aucun changement favorable }
il fe faifoit une repullulation li fubite , qu’on ne
s’appercevoit pas au foir que le cauflique appliqué
le matin eût en rien diminué l’élévation
des chairsj elles étoient toujours dures, dou-
loureufes, inégales. & faignames au moindre at-
touchemenr. M. Brouillard ne vit plus de ref-
fource contre un mal fi rébelle, que dans le
cautère aéluel > il en fit en conféquence confifuire
un d’argent, dont la plaque étoit de la figure
& de la grandeur de la plaie, avec une fur*
face légèrement convexe. >3
c i On préferva la langue, en l’enveloppant
d’un linge double trempé dans de-l’eau froide ,
& en la'tenant éloignée avec une cuiller à café.
On mit de pareils défenfifs fur les parties voi-
fines, & M. Brouillard attendit, pour appliquer
le cautère , qu’il ne fût plus rouge. Il
J’appuya affez fort pendant deux ou trois fécondés,
on ne put -pas le laiffer plus long”-teins,
parce que là malade incommodée' par la fumée
, fit le figne dont elle étoit ' convenue avec
l’opérateur, pour l’avertir de fe retirer. Un mélange
d’eau froide & de lait, tenu fréquemment
dans la bouche, calma les accidens de la cautérisation'}
ils confiftoient en quelques douleurs
qui fe faifoiem fentir jufques dans l’oreille, &
affez vivement. Un peu de tenfion & d inflam*
mation déterminèrent à faigner la malade le foir.
On continua les ablutions émollientes jufqu’à la
chute de l’efcarre, qui eut lieu le huitième
jour. Elle fit voir une furface creufe, fans végétation
renaiffante, comme auparavant} cependant
l’afpeél de la plaie n’étoit pas encore fa-*
fisfaifanîj
lisfaifant, le fond étoit dur & faignatît ; âe petits
élancement s’y faifoiem reffentir, & la repullulation
fongueufe paroiffoit prête à fe former.
La malade ne refufa point une fécondé application
du cautère, qui lui fut propofée} elle
devenoit d’autant plus néceffaire, qu’il étoit viable
que les racines du mal étoient implantées
dans l’os, & qu’il falloir le cautérifer & attendre
l’exfoliation de fa furface, pour être afluré de
fa guérifon. »3
ci Cette fécondé application faite avec les mêmes
précautions que la première, eut les mêmes
effets } on faigna la malade pour les gonfiemens
accidentels*, l'efearre ne tomba que le douzième
jour, mais le vice local fe trouva totalement
détruit} la plaie fournit des chairs louables ,
l’eifpliation de l’os fe fit prefqu’infenfiblemenr,
& la guérifon fut parfaite deux mois après la
fécondé application du feu. >3 On peut voir,
fur l’énergie de ce moyen, les Mémoires que
l’Académie de Chirurgie couronna, en 1755.
Il nous refle à parler d’une maladie des Gencives
, qu’on rencontre affez fréquemment, à laquelle,
pour l’ordinaire, les malades n’attachent
pas beaucoup d'importance ; quoique, lorfqa’elle
eft trop négligée, elle puiffe avoir les confé-
quences les plus funeftes.
Elle fe manifefte par un gonflement des Gencives,
qui deviennent molles & faignantes au
moindre attouchement. Comme ces fymptôroes
reffemblent à ce que l’on obferve dans ces organes,
chez les malades attaqués du feorbut de
mer, on a nommé cette affeélion, feorbut des
Gencives, quoique, dans fon principe, ellefoit
une maladie purement locale} tandis que dans
le vrai feorbut, le gonflement des Gencives
n’efl qu’un fymptôme de la maladie générale du
fyftême.
Les premiers fymptômes de cette maladie fe
mànifeftent fur le bord des Gencives, qui, en
quelques endroits ; s’épaüfit & devient rude. La
Gencive fe gonfle fur les intervalles des dents,
& s’élève en formant des fongofités confidéra-
bles, dont la furface eft extrêmement facile à
excorier. L’inflammation , qui furvient alors, va
fouvent au point d’occafionner une ulcération
telle, que les racines des dents font mifes à découvert.
Souvent le mal n’affeéle qu’une petite
portion des Gencives} d’autres fois , il s’étend
fur toutes les Gencives de l’une ou de l’autre
mâchoire, & quelquefois de toutes deux. Dans
Çe dernier cas, pour l’ordinaire, les alvéoles
participent à la maladie, & fe détruifent peur
à-peu } il fe forme alors une fuppuration en-
tr’eux & les Çencives, & il fe fait un écoulement
considérable d’un pus fétide le long des
dents.
A mefure que les Gencives s’ulcèrent dans
quelqu endroit, on les voit fouyent s’enfler &
devenir fpongieufes dans un autre , où jufques- |
Chirurgie„ Tome I . er H . e Parçiç,
là, elles étoient demeurées faines ; on voit aulfi
cette enflure gagner peu-à-peu différentes portions
des Gencives , quoiqu’il n’y ait encore d'ulcération
nulle part.
Le traitement ordinaire pour la guérifon de cei
fortes de gonfiemens, confifte à retrancher avec
le biflouri, ou avec les cifeaux, toutes les portions
des Gencives qui fe trouvent au-deffus de
leur niveau naturel. Çette pratique réuflit} mais
on obtiendroit en général les mêmes effets de
fcarifications nombreufes & profondes} car le
bat effentiel qu'on doit fe propofer, ne peut
être que de dégorger fes vaiffeaux des parries
affeélées, dont le gonflement ne tient qu'à une
accumulation exceflive de fang, fans aucune
exeroiffance contre nature des parties Loi ides.
Quoique cette maladie fe rencontre fouvent
chez des perfonnes, d’ailleurs parfaitement faines,
fouvent aufli l’on a lieu de foupçonner
quelque vice particulier, dans la conftitution de
celles qui en font atteintes} il faut , en pareil
cas, aider le traitement local, par les moyen«
propres à combattre l’affeélion générale. Ainfi,
lorfqu’on a lieu de préfumer l’exifience d’un
principe * de feorbut, il faut avoir recours aux
antifeorbutiques} s’il y a des marques d une dif-
pofirion fcrophuleufe, il faut employer les anti-,
Icrophuleux, qui ne font pas contre indiqués
par les circonftances particulières du cas, &c.
Cette maladie, lorfqu’elle eft portée à fon plus
haut degré de malignité, eft fouvent accompagnée
de gangrène , dont les progrès rapides af-
fedent routes les parties voifines, & qui ne tari
dent pas à faire périr les malades, s’ils ne font
pas à portée de recevoir promptement les fe-
cours les plus efficaces C eft particulièrement
chez les enfans des pauvres gens, négligés $ç
tenus dans un mauvais air , qu'on obferve cette
affection qu’on a nommée gangrène fcorbutiquo
des Gencives} & c’eft dans les Hôpitaux où un
grand nombre d’enfans fe trouvent raffemblés ,
quelle exerce le plus fes^ ravages. Nous joindrons
ici la defeription d’une autre efpèce de
gangrène feorbutique des Gencives, que donne
M. Van-Sxviéten , qui paroît la confondre avec
celle dont nous venons de parler} nous expo-
ferons auffi la rpèthodç qu’il preferit pour 1«
traitement. i .
et 11 naît d’abord, dit ce célèbrp Praticien,
(2) dans la partie intérieure de la bouche,
aux Gencives, aux lèvres, à la langue ,
aux amygdales, &c?, une légère rougeur, peu
doulouieufe, & une chaleur aftez çoufidérable.
Peu après, l’pn voit au milieu de la pariie
( I ) Voyez, dans le cinquième volume des Mémoires
de l’Academie de Chirurgie , une Obfervation de M. Ber*
the fur un cgs de cette nature. ■ ,
(2 ) Commentant in H. Boerhaavu JAphorilmpsj,
" m çc c ç