
même jufqu'à ce que les parties gangrenées (oient
féparées des parties faines.
Ceux qui veulent qu'on fe hâte de faire l’Amputation
> prétendent quen coupant au-deffus des
parties affeélées , on peut prévenir les progrès
ultérieurs de la Gangrène, & fauver ainfi la vie
du malade. Quelque" fpécieux que foit cet argument
, il eft très-mal fondé -, 1'expérienGè a démontré
que cette pratique eft extrêmement dan-
gereufe , & qu’on ne fauroit trop s'en défier.
Car quelque attention qu’on puifle apporter à
cette opération pour ne couper que dans, une
partie faine , on ne fera pas toujours fûr d’y
réulBr , & lè plus habile praticien peut y être
trompé. La peau peut paroître parfaitement faine.,
& abfolument exempte d'inflammation & d’enflure
, quoique les mufcles qu’elle recouvre & les.
autres parties voifines de l’os foient dans un état
de Gangrène. C’eft ce dont les praticiens expérimentés
doivent fouvent avoir vu des exemples.
Mais lors même qu’après avoir fait l ’inçifion, au
travers des parties molles, on le? trouve parfaitement
faines, fi l’on n’a pas attendu pouf opérer
que les progrès de la Gangrène fuffent arrêtés,
la maladie ne manque prefque jamais d’attaquer
le moignon. Les Chirurgiens qui fe trouvent placés
de manière à voir fréquemment de ces plaies
où l'on obferve le plus de difpolition à fe terminer
par la Gangrène , font généralement de la
même opinion j c’étoiT celle du célèbre Pott, qui
dit qu'il a vu piufieurs fois tenter l’expérience
d'amputer un membre où la Gangrène avoit commencé
à fe manifefter , mais qu’il ne l’a jamais
vu réuftir , & qu'elle n’a jamais manqué de
hâter la perre du malade. Nous ne faurions trop
infifter fur ces faits & fur ces autorités, à caufe
des efforts qu’on a faits , il n'y a pas encore
bien long-tems , pour introduire une méthode
contraire à celle que nous recommandons ; méthode
qui une fois admifé, ne manqueroit pas de
feire le plus grand mal. 14 eft vrai que lorfqu’une
expérience plus générale a ut oit démontré fon peu
de fuccès il y a tout lieu de croire qu’eîle ne
tarderoit pas à être abandonnée, même par ceux
qui en font aujourd’hui lés plus ardens défen-
feurs.
Nous ne préfumons pas cependant qu’il faille
renvoyer fopération auffi long-tems que le recommandent
quelques praticiens,, & particulièrement
M. Sharp ,'qui prefçrit de .ne jamais l’entreprendre
jufqu’a ce que la féparaiipn naturelle
des parties gangrenées foit conlidérablement avancée.
M. Sharp éroir un. Chirurgien très-expéri-
meuté, & dont l’autorité a le.plus grand poids ;
mais peut-être a^t-il un- peu. outré le principe
qu’il a cherché à établir , par, oppoftlion, à une
pratique dont il avoit bien, vu tout le danger.
L ’expérience journalière fait-voir ^ que pourvu
que l’on foit bien ajfuré que la- mortification
ne fait plus de- progrès., il n’y a aucune nécefiité
d’attendre plus long-tems. Car de eette manière on
obtient également tous les avantages de la méthode
dont nous avons montré la néceffité j & fi à cette
époque on fépare les parties mortes, ori préviendra
fabforption des matières putrides qu’une maffe
gangrenée doit néceffairement fournir, & qui nui-
roient certainement au fyftême , fi elles étoient
portées dans la circulation. Ce danger cependant
leroit moindre que celui qui réfultèroit d’une
opération trop précipitée \ & il vaut mieux encore
rifquer de la différer un peu plus qu’il n’eft firic-
tement néçeffaire, que de s’expofer à la faire avant
d’être aflùré que les parties de celles qui ont
fonffert font revenues à leur état naturel, & que
le principe vital y a repris toute fon énergie.
Quelle que foit la caufe qui a qcçafiqnné la
Gangrène, cela ne change rien à. la doélrine que
nous venons d’expofer -, & la pratique doit toujours
être la même/, car quoique l’on ait cru
devoir faire une diftinélion entre les cas -où la
Gangrène était l’effet d’une caufe interne, & ceux
où elle étoit la conséquence d’une caufe externe,
on ne fauroit en retirer aucun avantage. Dans
aucun cas, il ne faut fajre l’opération avant l’époque
ci-deffus défignée , & dans tous on peut
l’entreprendre auffitôt qu’on a des indices certains
. de l’abfolue ceffation des progrès du mal. Voyq
l’article Gangrène.
§ Y . Des cas de tumeurs blanches.
La maladie nommée par les Anglois tumeur
blanche; eft une de celles qui rendent fouvent
l’Amputation d’nn membre abfolument indifpen-
fable,) q’eft une affeclion des articulations qui en
attaque les ligamens & les o s , dont la fubftance
fe gonfle, s’étend & enfin fe carie. F o yq T umeur
blanche.
Ceux qui ont été à portée de voir fouvent cette
maladie, favent que tous les efforts de la Médecine
de la Chirurgie , tous les médicamens internes
& externes , font fouvent abfolument inutiles
$ non-feulement pour la guérir , mais même
pour en retarder les progrès •, & que quand elle
attaque une jointure d’une certaine façon , & avec
un certain degré d’intenfité, on ne peut fauver
le malade que par l'Amputation.
Il fuffit de fe faire une idée jufte de l’état où
elle met les parties qui en font le fiège , pour
comprendre qu’il n'y a plus à balancer fur le
parti qui refte à prendre lorfqu’elle a fait de grands
progrès. Le mal commence ordinairement dans ,1a
fubftance des os qui forment les grandes articulations
, telles que la hanche > le genou, la cheville
du pied & le coude j les qs ainfi affeélés
s’étendent par degrés j leur volume augmente
confidérablemçnt & ils fe carient. quelquefois
ces. fymptômes font accompagnés de beaucoup de
douleur & de fièvre , quelquefois il n’y a que
très-peu de l’une & de l’autre > fur-tout quand
le mal n’eft pas très-avancé. Lés cartilages qui
couvrent les extrémités des os , & qui font defti-
nés à favorifer le jeu des articulations fe détrui-
fenr ; les épiphyfes dans les jeunes fujêts fe réparent
des os j les ligamens fe gonflent & fe
dénaturent au point qu’ils perdent leur forme
naturelle, & deviennent tout-à-fàir inutiles pour
les fonctions auxquelles ils font deftinêsy $ lés
parties qui fervent à la fécrétion de la fynovie
le vicient de même } toutes enfemble fourniffent
une grande quantité de matière fanieüfe d’une
odeur infeéle, qui eft déchargée, ou par des ouvertures
artificielles faites pour lui donner iffue,
ou par celles quelle fe pratique naturellement
en corrodant les parties. Ces ouvertures condui-
fent ordinairement aux o s , qui font cariés dans
toute leur fubftance » & , à cette époque, la douleur
& l’irritation du poifon réabforbé de toutes
ces parties dans la maffe des humeurs produifent
une fièvre lente , fuîvie de tous les fymptômes
qui peuvent la rendre le plus formidable.
Il n’y a aucun moyen connu qui puiffe remédier
à de pareils maux, on ne peut pas même
fe flatter de faire jamais une femblable découverte.
Le malade, qui eft dans cet état, marche à grands
pas vers fa deftruâîon : l’Amputation eft le feul
moyen qui refte pour le fauver , & il ne faut
pas héfiter à y recourir fans perdre de tems.
C ’eft une vérité inconteflable que le malade
périra fi l’on ne prend pas ce parti ; il efi également
vrai qu’un grand nombre de perfonnes dans
lés rtiêmeâ eircoriftances ; ont en fe foumettant à
l'opération ^repris une famé ferme & vigoureufe.
Et malgré l’état de foibleffe & d’épuifement où
fetrouve le fujet, le Chirurgienne doit pas balancer
à lui donner cette chance de fauver fa
vie ; car e’eft un fait que dans les cas de cette
nature, l’Amputation réuffit plus fréquemment,
c ®fi*^“dire , qu’on voit un plus grand nombre
dindividus fe rétablir après y avoir eu recours,
lorfqu elle a été faite tard , & dans une époque
ou les forces étoient conftdérablement réduites
par la maladie , que lorfqu’on l’a entreprife de
bonne heure & avant que le mal eût fait de grands
progrès. G’eft par la même raifon probablement,
que dans les cas de fraèiure compliquée , lorfqu
on n’a pas coupé le membre dans les premiers inf-
tans , il vaut mieux attendre pour le fairê que
I état de fuppuration foit très-avancé. Cette cir-
êonftance eft d’autant plus heureufe, qu’elle donne
fé rems d employer les remèdes qui laiffent quelque
efpoir d arrêter les progrès du mal.
VI. Des cas d’ExojlùJe.
Nous avons mis l’Exdftofe au nombre des caufes
qui peuvent requérir l’Amputation. Nous nous
contenterons ici de l’avoir indiquée, en renvoyant
? i 5UMnôus *VGns à dire ^ur ce fuîet à r° n ar‘
ttete. Nous dirons feulement que lorfqu il ' neft
' P?* poftible d’enlever une portion d os de la n\à-
y Fopoferops, la rumeur devenait
nuifible à la fanté, ou infupportable par fon
volume où par d’autres cirçonftances, il faut avoir
recours à 1 Amputation du membre , comme au
féul remède dont on puiffé attendre une gué-
rifôn.. b
S* VII. Des cas de carie, avee ulcérations dam
les parties molles.
Une carie très-étendue accompagnée d’ulcères
des parties molles qui font dans le voilinage de
1 os afFeété , eft encore une caufe qui exige l’Am-
pùtàtibri. Nous verrons à l’article Ca r ie , quels
font les différeris moyens que l'on emploie pour
la guérir , c'eft-à-dire , pour hâter l’exfoliation
des parties malades d’un os. Mais fi la carie affeéle
toute la fubftance de l’o s, ou des os qui forment
un membre , il ne peiit plus y avoir d’exfoliation ,
car ce terme fuppofe une partie faine de laquellè
la partie malade fe fépare. Les os par conféquent
ne peuvent alors fé régénérer-, l'ulàge du fcalpel
& de tous les inftrumëhs pour enlever leur fur-
face corrompue j le trépan à couronne pour
percer dans l’intérieur de leur fubfiance -, toutes
les applications qu on a coutume d’employer pour
déterminer 1 exfoliation , font alors parfaitement
inutiles, quelque judicieux que fok l'emploi qu’on
en fait j & fi l’os entier n’eft pas féparé du corps,
^q^alâdé périt. Cés.cas cependant où la carie feule
obligé à couper un membre , demandent beaucoup
de circônfpeflion de la part du Chirurgien 5
Car oh à vu dès caries très-étendues fe guérir,
des portions d’os très-confidérabfes fe détacher
dès parties fàiriés, & une nouvel le fubftance ofleufe
éh remplir là placé & les fondions.
Mais, lorfqu’à la carie des os f& joignent dans
le$ parties moHës des ulcères profonds & très-
étendus , d’afiez maüvàife nature pour faire
craindre quon ne puifle pas les guérir * même
en ôtant lés portions malades de l’os -, l’Ampur
tàtiori devient indifpènfah'le • car alors, indépen^.
dammem de la difficulté de guérir les ulcères'
lâ régénération d’une portion d'os confidérable
feroit très-incertaine, & l’on ne doit pas en
faire courir lé rifque au malade.
S- Y I II . Des cas de cancer & d’ulcères invétérésl
Le cancer lorfqu'il attaque ‘quelqu’une dçs
extrémités , exige quelqiiefois l’Amputation du
membre affeélé 5 il en eft de même de certains
ulcères invétérés & de mauvaife nature.
En traitant du Cancer. , nous ferons voir
quon ne doit donner que, peu ou point de çon-
nanée aux remèdes internes , ,ni à aucune efpèce
de topique dans le' traitement, de cette maladie ;
& , qu’il n’y a que la réparation totale de la partie
affrétée fur laquelle on puifle compter pour la
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