
méthode fuivante, qui eft celle que nous adoptons.
Auparavant de procéder à l’opération, on y
préparera le malade de la môme manière que pour
la méthode de l’abaiffement ; on le placera de
même, & on fuivra en tout les mêmes règles
que nous avons établies précédemment. Tout étant
convenablement difpofé,il s’agit de fixer l’oeil ;
cette attention eft plus néce(Taire ici que dans
la méthode par l’abaiffement. On y parvient en
employant différens inftrumens auxquels on donne
lenom de Jpeculutns. On peut voir dans nos Planches,
dans les Ouvrages de Chirurgie,_& notamment
dans celui de Bell, les différentes formes
de f e s inftrumens ; nous en avons fait graver
quelques-uns; mais en général nous avouerons
que quelque bien imaginé qu’ils paroiffent être,
leur application fatigue toujours l’oeil , tk
ii bien adaptés qu’on les fuppofe, fouvent ils
n’empêchçnt point les mouvemens du globe ; aufti
quelques Praticiens les ont-ils abfolument rejet-
tés , le contentant de faire fixer cet organe par
l’index & le medius^d’un aide inftruir, appliqués
fur la paupière fupérieure relevée, & dont la
force eft dirigée de haut en bas, & en-dedans
de manière à déprimer l’oeil pendant que l’Opérateur
comprime lui-même de bas en haut avec
les mêmes doigts de la main qui n’opère point,
& dont l’effort alors eft dirigé fur la paupière & la
partie inférieure du globe d’une manière inverfe.Ces
preflions fixent convenablement l’oeil ; cependant
nous ne pouvons difeonvenir qu’elles font très-
douloureufes, quelles fatiguent l’organe, donnent
fouvent lieu à l’effufion de l’humeur vitrée,
ou à la divifion de l’iris, & par-là nuifent plus
que l’opération qu’on fe propofe de faire, qui
par elle-même eft de peu de conféquence. Tous
ces inconvéniens déterminèrent M. Demours,
Médecin de la Faculté, qui marche fi glorieu-
fement dans la carrière que lui a tracée M. fon
Père; à perfectionner le doigtier de Rumpelr,
& en faire un infiniment qui put être tenu fort
près du point où il doir agir, & qui n’empêchât
pas d’àbaiffer la paupière inférieure avec l'extrémité
de l’indicateur de la main qui le dirigerait.
Cet infiniment eft fabriqué d’une feule pièce en
acier, comme on peut le voir dans une de nos
Planches. Pour le décrire, on peut le fuppofer
divifé en deux parties ; l’une embraffe latéralement
la troifième & la moitié de la fécondé phalange
de l’indicateur, l’autre eft une petite tige
pointue de cinq lignes de long, & courbée en
différens fens. La première peut être confidérée
comme formée de deux branches longues de dix-
huit lignes, & légèrement concaves pour s’accommoder,
aux convexités des parties latérales
du doigt. Elles font plus larges à leur extrémité
B qui correfpondent au milieu de la fécondé
phalange, qu’à l’endroit A où elles fe confondent
en fe courbant, pour s’acco namoder à la
convexité de l’extrémité du doigt. L’endroit où
elles font continues, jouit d’une certaine élafti-
cité, afin que le doigt foit faifi entre les faces
communes des branches ; il n’a que deux tiers
dè" lignes de diamètre. La largeur de chaque
brancke va enfuite en augmentant jufqu’à fon
extrémité, où elle eft de cinq lignes. A l’endroit
de l’union de ces deux branches , s’élève
une tige pointue CD longue de cinq lignes, &
ayant la groffeur ordinaire. Cette tige,.vers la
moitié de fa longueur, eft courbée à angle droit
à gauche ou à droite, fuivant l’oeil auquel l’inf-
trument eft deftiné. Son extrémité a deux tiers de
lignes de la pointe, eft fléchie du côté de l’oeil,
& en même-temps un peu de bas en haut, en
fuppofant l’inftrument dans la pofition où il doit
être lorfqu’on eft prêt à s’en lervir. L’inflexion
qui approche de l’oeil la pointe de la tige, facilite
la for ne du biftouri qui a traverfé la chambre
antérieure de l’humeur aqueufe. Celle qui
dirige cette extrémité un peu de bas en haut, D
fournit un point d’appui en. ce fens, lorfqu’on
achevé la feétion de la cornée. Au moyen de la
difpofition de cette partie de l’inftrument qui embraffe
latéralement l’indicateur, l’extrémité de ce
doigt peut abaifler la paupière inférieure, & en
même - tems diriger la tige dont la pointe doit
piquer la cornée dans un. des points de fon
diamètre horizontal, à la diftance d’une ligne
ou environ de la felérotique, afin que la pointe
du biftouri puifle fortir entre cette membrané &
la pointe F de l’infirument. La pointe de cet inf-
trument qu’on pourroit appeller Ophtalmoftat,
ne pénètre jamais trop avant, à peine s’enfonce-
t-elle jufqu’à la moitié de la cornée : cette pi-
quure n’occafionne aucune douleur, & n’eft par
elle-même jamais fuivie d’accidens. On comprend
aifément qu’il faut un de ces inftrumens pour chaque
oeil, & que celui qui eft deftiné pour l’oeil
gauche doit être dirigé par l’indicateur de la
main gauche, & celui qui eft diftiné à l’oeil droit,
par l’indicateur de la main droite.
L’oeil fixé de la manière que nous venons de
le dire , l’Opérateur prendra le manche du biftouri,
tel qu’il eft repréfenté dans une des Planches
au moment où l’opération fe fait, la lance
en eft un peu convexe fur un de fes plans ; il
le tiendra entre le pouce, l’index & le doigt
du milieu de la main droite, en fuppofant qu’il
opère fur l’oeil gauche , en en laiffant environ
un pouce dépaffer l’extrémité du doigt du milieu.
La pointe étant en contaél avec la cornée tranf-
parente , & la furface plane en devant, il la plongera
dans cette tunique à la diftance de la fixième
partie d’un pouce tn deçà de l’iris, dans une
ligne qui parcourrait du côté externe de l’oeil
directement au centre de la pupile, comme il eft
repréfenté dans nos Planches. La furface convexe
du biftouri regardant toujours l’iris, on continue
de le pouffer dans la première dire&ion, jufqu’à
de que la pointe foit arrivée vers la pupille (i)-:
on plonge fa pointe dans cette ouverriire , pour
incifer la membrane capfulaire, par une feélion
affez femblable à celle de la cornée, puis on
la,dégage, & l’on continue de lui faire parcourir
la chambre antérieure jufqu’à ce quelle foiparvenue
au côté de l’oeil ôppofé à l’endroit où il eft
d’abord entré; on ira jufqu’à ce que la pointe de
l’inftrumem foit à-peu,-près un quart de pouce
hors de la cornée. Alors l’Opérateur formera,
d’une manière graduée, une feérion fem.'-Uinaire
à la partie inférieure de la cornée, en dirigeant
doucement le tranchant de l’infirument en en-bas,
en forte que tonte la portion de la . cornée gui
efi entre le point où il eft entré, & celle où il
eft forti, puiffe être divifée à égale diftance de
F iris ; en opérant ainfi , on fait une ouverture
fuffifanre pour le paffage de la Cararaéle. Il y a
des cas où , dans cette première incifion , il ne
faut point divifer la membrane criftalline, comme
quand les pupilles font naturellement très-reffer-
rées, quand les mufcles du globe & des paupières
entrent facilement en convulfion à l’approche des
inflrumens, quand on juge que la chambre pofté-
rïéure.^ eft trop fpacieufe ; alors on fe contente
d ouvrir d’abord la cornée , puis on incife enfuite
la membrane criftalline avec un cyflitorne.
Aufli-rôt que l’incilipn eft faite, l’humeur
aqueufe fort, on ôte l’ophtaltnoftat, on laiffe à
elles les paupières, & par une prellion bien ménagée
fur la partie inférieure du globe de bas en
haut, ôn parvient à forcer le criftallin de fa cap-
fule, & à le faire fortir au dehors, quand il ne
paroit point de lui-même. Pour peu qu’on éprouve
de là réfiftance, on peut être sûr qu’on n’a point
affez incifé la membrane capfulaire ; pour lors
on porte la pointe d’un cyflitorne, par l’ouverture
qu on a faite jufqu’à la capfule du criftallin,
en paffant par la pupille, on incife cette capfule
en faifant jouer le reffort de l’inftrument, & on
réitère la prefîion qui détermine toujours la for-
tie du criftallin. Mais fouvent aufti la difficulté
que cette lentille éprouve à paroître, vient de ce
que 1 incifion de la cornée eft trop petite. On répété
trop fréquemment les preflions en pareils cas,.
* fouvent fansaucun ménagement, en forte qu’il
arrive que non-feulement le criftallin fort forcé- '
ment, mais encore l’humeur vitrée, ce qui eft de;
la plus grandè conféquence. Pour prévenir cet
accident , il faut agrandir l’ouverture avec la (i)
(i) Il .arrive quelquefois que l’iris embrafle allez fortement
la lame de l’mftrument, quand fa pointe approche
de la pupille, ce qui l’expoie à être bletïée. Quand
cela arrive, le D. Wcnzel recommande de faire de légères
fri étions fur la cornée avec le doigt index, tandis
?jlC Ms ‘fojê1 du milieu tient la paupière inférieure abaif-
*“e » P.lds de continuer l’opération comme auparavant.
On voit, dit-il, fur-le»champ, l’iris fe contufter 8c ainfi
quitter l’inftrument.
[pointe d’une paire de cifeaux courbes, pareils à
ceux dont Daviel fe fervoit. L’opération faite,
on fe comporte à l’égard du panfement, comme
nous avons dit qu’on devoir le faire dans le cas
où l’on auroif préféré la méthode par l’abaiffe-
ment. Le régime fera également le même ; &
pour peu que le fujet foit pléthorique, on lui
tirera du fang en plus ou moins grande quantité,
félon les circonftances. On aura foin que i’oeil foie
toujours fermé & point trop comprimé > crainte
de donner lieu à un ftaphylome. Quand tout fe
paffe aux fouhaits de l’Opérateur, (a plaie de la
cornée eft ordinairement fermée en huit, douze ou
quinze jours, quelquefois cependant elle refle
ouverte plufieurs femaines. S’il furvenoit un petit
ftaphylome, il ne faut point s’en inquiéter, le.
reffort de l’iris le ferait rentrer ; s’il étoir plus
volumineux, on le poufferait au-delà de la cornée
avec une petite curette..
S’il falloit opérer fur l’oeil droit, le Chirurgien
doit fe fervir alors de fa main gauche , & Cuivre
le même procédé que nous venons de décrire,
en employant les mêmes inftrumens. Mais, comme
peu de perfonnes (e fervent aufti librement de
cette main qwe de la droite, on peut alors employer
un biftouri courbé près de fa lame, tel
xque celui que nous avons fait repréfenter dans
une des Planches relatives à cet article. Le procédé
diffère de celui qu’on fuit en opérant fur
l’oeil gauche, en ce que la pointe de l’infirument,
au lieu d’entrer par le petit angle de l’oeil, pénètre
par fon grapd/angl.e, ainli que nous lavons
fait repréfentef.
En parlant des preflions exercées fur l’oeil pour
déterminer la fortie du criftallin, nous avons dit
quelles occafionnoient quelquefois l’expreflion de
l’humeur vitrée , ce qu’on regardoit communément
comme un accident d’autant plus fâcheux,
que l’oeil s’affaiffanr, la perte de la vue s’en fui-
voit néceffairemenr. ce Mais , dit M. Bell , quoiqu’on
doive tout faire pour prévenir cette expulsion
, néanmoins elle n’empêche pas toujours le
fuccès de l’opération. J’ai connu, continue-t-il
des perfonnes chez qui la vue ne revint point
après cet. accident ; mais, le plus fouvent, le
globe fe remplit de nouveau , au point qu’en
deux ou trois femaines il a acquis fon volume
ordinaire. Je ne prétends point dire fi cette ré-
plétion provient de la régénération de. l’humeur
vitrée, ou de l’humeur aqueufe qui rempliffoit
lçs chambres ; cette dernière opinion eft plus fuivie
: mais pourquoi l’humeur vitrée ne feroit-
ellc point réparée comme l’aqueufe? Je fuis
d’autant plus porté à croire à la réparation de
cette humeur que j’ai obfervé bien des fois
la vue revenir dans des. cas où l’humeur
, vitrée : s’étoit échappée aufti bien que dans
ceux où elle n’étoit point fortie. J’en ai un
exemple chez une femme qui fut opérée fur les
deux yeux ; chaque oeil étoic aufti beau qu’il pou