
guérifon. Cette maladie ne fe manifefle pas fréquemment
fur les extrémités j cependant tout
Chirurgien qui a une pratique un peu étendue
doit en avoir vu des exemples ; & lorfqu’elle
fe rencontre on ne peut la guérir qu’en emportant
la partie malade j foüveflt Cela peut fe faire
fans couper tout le membre *, mais quand le mal
a fait aflez de progrès pour attaquer les ligamens
ou les os , & fur-tout quand il s’étend beaucoup
, il n’y a que l’Amputation du membre 1
faite au-deffus de la partie affeéïée , à laquelle
on puifle avoir recours avec quelque efpérance
de fuccès *, toute tentative pour le iauver eft parfaitement
inutile. Quelquefois même on ne guérit j
pas, malgré l’Amputation , lorfqu’on la fait trop
tard, cependant elle a réuflî dans des cas où
le mal a voit reparu après avoir été guéri en apparence
, par l’cxcifion des parties qui en étoient le
liège.
Outre le cancer, il y a d’autres ulcères qui
peuvent mettre dans le cas de faire des Amputations.
A in fi, lorfqu’un grand ulcère , indépendant
d’aucune affeélion générale du fyftême, nuit
évidemment à la fanté d’un malade ; lorsqu’au
lieu de céder aux remèdes qu’on emploie pour le
combattre, il devient toujours plus confidérable
& plus invétéré -, comme il pourroit enfin mettre
la vie en danger, il faut, plutôt que de courir
ce rifque, confeiller l’Amputation. Les ulcères
qu’on nomme phagédéniques, fuirent quelquefois
cette marche} cela arrive plus fouvent aux ulcères
fiftuleux, tels que ceux qui font la confé-
quence d’abcès profonds , lorfque le pus s’eft in-
finué dans les interftices des mufcles, & lorfque
malgré tous les efforts de l’ art, pour en procurer
la guérifon , la fuppuration demeure aflez abondante
pour mettre en danger la vie du malade.
5« 5). Des tumeurs qui rendent l'Amputation
nccejfaire.
Nous avons rangé fous le neuvième Chef des
caufes qui requièrent l’Amputation , diverfes ef-
=pèces de tumeurs.
Il eft rare que des tumeurs enkyftées rendent
cette opération néceflaire -, quelquefois cependant
lorfqu’elles font très-profondes, comme lorfqu’elles
tiennent à quelque affeélion du période, fi on
les biffe fubfifter jufqu’à ce qu’elles aient acquis
«m grand volume elles «nuifient enfin téllemunt
aux parties voifines qu’il n’y a plus que l’ampu-
: tation qui puifle en prévenir efficacement les con-
féqùences. Quelquefois la prelfion long-tems continuée
qu’elles exercent fur les os, non-feulement
y produit la carie, mais même les diflout cortf-
pletttmenr. Le tiffu cellulaire & les mufcles qui
le trouvent dans fon voifinage en font auffi tellement
altérés, qu’il n’eft pas poflible de fe flatter
de conferver le membte.
Il y a un cas que l’on rencontre quelquefois,
où line portion d'un membre confidérablement
tuméfiée préfente une dureté uniforme dans une
partie de fon étendue, tandis que dans une autre
partie on obferve un dégré (de ramoUiffement
qui fcmble indiquer la préfènee de quelque fluide.
Cette maladie attaque particulièrement les jambes,
& lorfque l’on peut en fuivre les progrès on voit
qu’elle occupe d’abord le milieu des mollets, 8c
qu’elle a fon fiège fous les mufcles gaftroenémiens
& folaire*, elle commence par une tumeur petite,
dure & profondément fituée, quelquefois très-
douloureufe , quelquefois fort peu, & empêchant
feulement l’exercice ordinaire} la couleur naturelle
de la peau n’efl pas altérée dans les com-
mencemens, mais vers la fin elle devient livide-,
la tumeur s’étend .par degrés, elle ne devient
pas molle en s’étendant, au contraire elle refle très-
dure dans fa plus grande étendue*, cependant
lorfqu’elle a acquis un certain volume , elle fe
ramollit dans quelque partie , & femble contenir
un fluide. A cetteépoque elle eft très-douloureufe,
& elle donne au malade la fenfation d’un poids
ex ceffi veinent fatiguant. Pour l’ordinaire;, le mal
prend naifî’ance fans aucune, caufe occafionnelie
dont on ait pu s’appercevoir-, & fouvent chez-des
perfonnes d’ailleurs bien conftituées;.
Comme cette maladie heureufement n’eft pa9
fréquente , elle eft auffi très-peu connue, &. quelquefois
on l’a prife pour un fi.mple oedème ou
un anafarque} elle tient effeélivement de b nature
de. celle-ci en ce qu’elle eft produite par un
épanchement dans le tiffu cellulaire \ mais le
fluide épanché eft ici d’une nature bien différente
de celui qui forme l’anafarque. Si l’on fait une
ouverrure pour lui donner iflue, elle doit être
profonde & pafler par une maffe fingulièrement
viciée.Ce fluide efl généralement en petite quantité,
& contient une matière fanieufe très-âcre, mêlée
plus ou moins à un fang grumeleux $ cette évacuation
n’occafionne qu’une bien perite diminution de
la tumeur > l’opération d'ailleurs fait beaucoup, de
mal f elfe donne lieu à la formation d’un ulcère
de la plus mauvaile qualité & à l’augmentation delà
tumeur -, il furviem des fymptômes d'inflammation
& de violente irritation , qui avançant rapidement
, & en caufam la plus vive douleur >
enlèvent le malade en très-peu de tems, foit par la
fièvre qui eft continuelle & violente, foit par la
mortification entière du membre affeélé.
Si l’amputation n’a pas été faite, & que le
malade meure , en ouvrant la tumeur-on ne peut
l’examiner avec fatisfaèlion à caufe de l’état putride
& gan^réné cfes parties. Quand on coupe
la jambe ainfi affrétée avant que le mal foit arrivé
à fon dernier période, & fans avoir fait aucune
incifion auparavant, on'trouve les mufcles con-
t'ertis en une maffe fingulièrement altérée, la partie
poftérieuredù tibia & du péroné plus ou moins
cariée, & l’artère tibiale ; élargie, viciée & rompue
y circonflauce d’après laquelle M. Pott penche
à croire que c’eft une affeélion de fartère qui eft
Je premier principe du mafêp. ;!?*•
La Chirurgie n’a encore trouvé aucun moyen
de °uérir, ni même de retarder les prbgrèsde cette
maladie j l’Amputation efl lafeule reffourcequelle
offre pour en prévenir les funefles conféquences ;
il faut y avoir recours dès que la tumeur a fait
aflez de progrès pour incommoder à un cettain
point*, & autant qu’il eft poflible , avant que d’y
avoir fait aucune ouverture. Il ne paroît pas que
lorfque l’amputation a été faite à propos, & dans
une partie laine, la maladie ait jamais eu de
retour (i).
L ’aneürifme dans bien des cas doit être mis au
rang des caufes qui rendent l’amputation indif-
penfable-, &des Praticiens, même delà plus grande
réputation, ont condamné à perdre la jambe, tous
les malades qui avoient un anenrifme de l’artère
crurale ou de la poplitée. Ce qui a particulièrement
fondé leur opinion à cet égard, c’eft le
peu de fuccès qu’a eu dans bien des occafions
l’opération de l’aneurifme tentée fur ces artères*,
tandis que l’Amputation du membre en pareil cas
fauvôit ordinairement la vie du malade. Lorfqu’un
aneurifme-placé fous le; jarret , ou fur la cuifle y
eft devenu tr-èsr-confidérable“} lorfqu’jl eft affez-an-
cien pour avoir endommagé le tiflli dès parties
voifines, il n’y a pas de doute qu’il ne faille quelquefois
préférer l’Amputation du membre , fi elle eft
praticable, à toute efpèce de tentative faite dans la
vue de le conferver. Mais alors ce n’eft pas à caufe de
la maladie de l’artère qu’il faut faire cette opération
, c’eff à caufe de l’état auquel cette maladie
a réduit tous lés organes voifins, pour avoir été
trop long-,tems négligée. Lorfqu’un aneurifme de
1 artère fémorale, bu poplitée, commence àfe former
, & même pendant un aflez long-tem's encore,
il faut bien fe garder de recommander l’Amputation
y car il y a beaucoup d’exemples des heureux
fuccès de l’opération pour l’aneurifme, même
dans des cas où Je mal fe trouvoit à la partie
fupérieure de la cuifle, comme nous le verrons
à L’article An e u r ism e } mais lorfqu’il y a une
enflure oedémareufe très-confidérable fur tbute la
partie inféreure du membre ; lorfque des organes
paroi fient avoir tellement fouffert qu’on ne peut
plus.efpérer de les;voir reprendre leurs fonctions,
dans le cas même où l'opération de l’aneurifme
n y détruiroit pas toute circulation , le malade
fouvent n aplusdereffpur.ee que dans l’Amputation
du membre affeélé. • i
L efpèce d aneurifme dont nous parlons i c i ,
eft celle qui a commencé par une dilatation de
lartere, dont les membranes étant venues à fe
rompre,. le fang s’eft épanché dans le tiffu çellu-
(i). Voyez Remarques fur la paràlyfie , & l’Amputé
fion de M. P ott , p. j>i. Voyez-auffi le l« . vol. des Eflais
d« -Médecine d’Rdimbourg, ait. XXII*
Jaire, accident qui a lieu pour l’ordinaire avant
que le malade ait demandé aucun fecours. Le tiffu
cellulaire rempli de ce fang extravafé, fe gonfle
plus ou moins rapidement -, & la partie inférieure
du membre, foit en conféquence de la preflion
qui eft l’effet de cet épanchemént, foit à caufe
de la gêne qn’éprouve la circulation par l’artère
malade, s’enfle confidérablement & devient généralement
très-douloureufe & incapable de mou-,
vèment.
C’eft dans cet état qu’on voit le plus fouvent
cette maladie, fur-teur parmi les pauvres gens ,
qui en général la négligent jufqu’à ce qu’ils foient
incapables de vaquer à leprs occupations. A cett®
époque, la pulfation forte qui au commencement
fe manifefle dans la tumeur ne s’apperçoir pref-
quç plus, b. caufe du gonflemenr extrême des
parties ; & fi lbn n’y apporte toute l’attention né-
ceffaire,on pourra quelquefois;fe tromper fur la
nature du mal. C’eft ce qui n’arrivera pas cependant
quand on aura foin de prendre des infot-
mations. exaéïes fur l’hiftoire de la maladie. .
§• ,10. De 'VAmputation des membres contrefaits.
Le dernière caufed’Àmpuumon-dont nous avons
fait mention ., eft la diftorfion excefÈve des membres.
Lorfqu’à d’autres égards un membre eft parfaitement
fain, il eft bien rare qu’on regarde une
diftorfion quelconque comme une raifon, fu'ffifante
dé le couper. Cependant il peut arriverique, dans
le cours d’une pratique très-étendue,on rencontre^
chez quelques individus, des membres tellement
tordus & mal configurés, que ces perfonnes aiment
mieux fe foumettre à une opération pour
s,.en ^^a*re » flue d’en fupporter plus long-tems
1 incommodité j lors donc qu’en pareil cas on ne
peut, par aucun moyen, diminuer cetre défeéluo-
fité, il faut farisfaire à la volonté des malades.
Telles font les caufes qui peuvent mettre le
Chirurgien dans le cas de faire l’Amputation d’uiî
membre. Comme elles font nombreuses & variées,
& comme la perte d’un membre eft toujours pour
un malade un objet de la plus grande importance,
elles méritent, dans tous les cas , {’attention la
plus fcrupuleofe de la part du Praticien. Et nous
croyons devoir faire obferver ici, que cette partie
de la pratique eft fi: délicate-, qu’il eft fi difficile
de fixèr avec précifion les cas où l’on doit recommander
l’Amputation, & les époques d’üne maladie
où il'convient le mieux de la faire -, qu’on
eft tellement venclin dans le public à blâmer Te
Chirurgien qui l’entreprend,. Iorfqu il peut refier*
le plus Ié^er doUre fur fa convenance, que tout
Prâticïén devrbit . g’imp'ofér la règle de ne jamais
prêridlé fur 'lui de la faire", fans avoir pris en
éonfultktion l’avià d’un ou de plufieurs dé fies
confrères quand cela fe peur.-- Nous allons prêt