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fet , & par le feu , ne remportant fou vêtit p lur
prix de leurs fouffrances qu’une guérifon imparfaite
, qui les laifloit en proie à de fàcheufes
incommodités. C’eft ce qu’on verra par le court
expofé que nous allons faire de l’hiftoire de
l’art dans le traitement de cette maladie.
Hippocr ate , qui a décrit la fiftule à l’Anus,
la traitoit tantôt par des palliatifs, & tantôt par
une méthode radicale. Dans la méthode pallia*
tiv e , il intrtfduifoit dans le finus une tente hu-
meâée du jys de tithymale & faupoudrée de
verd de, gris , & l’y maintenoit pendant fept
jours j il employoit enfuite l'alun, la myrrhe, &c.
pour deffécher & cicatrifer l’ulcère. Il eft à
préfumer qu’il guériffoit rarement fes malades
par de pareils moyens. Son traitement, pour la
guérifon radicale, confiftoit à introduire dans
la fiftule, au moyen d’une fonde d’étain , un
lien compofé de cinq fils de lin.crud, entourés
d’un crin de cheval. Enfuite portant l’index de
la main gauche dans l ’Anus, il recourboit l’extrémité
de la fonde, & la retiroit au-dehors •, puis
il faifoit avec les deux extrémités du fil un noeud
bien fe.rré. II ferroit tons les jours la ligature
à mefure qu’elle fe relâchoit, & en introduifoit
une autre > fi la première venoit à fe rompre. Il
panfoit la plaie avec de petits morceaux d’éponge
enduits de miel, & recouverts de verd de
gris. Le même panfement étoit continué jnfqu’à
1 1 fin de la cure, &- il ne laifloit point fermer
rulcère , s’il y avoir d’autres fiftules, qu’elles ne
fuflênt parfaitement guéries. De nos jours, on a
reno’ivellé cette méthode , en fubftituant aux
fils de lin , un fil de plomb, comme nous le
verrons ci - après.
Celse a auffi recommandé l’ufage de la ligature
, mais fans l’étendre autant qu’Hippo-
crate j il paroît ne s’en être fervi , que pour
ouvrir des fiftules qui n’intéreffoient pas. l’inteftin
, car il dit qu’on doit introduire une fonde
dans la fiftule , & quand elle eu a atteint le fond,
fiaire fur fon extrémité une petite incifion par
où elle puiffe pafler, armée à l’autre bout d’un
fil de lin crud en trois doubles. Le fil paffé,
il faifoit avec les deux chefs un noeud , de
façon à contenir lâchement la peau de deffus la
fiftule. On délioit ce.fil deux fois par jour» &
on le retiroit, de façon que ce qui étoit dehors
entroir dans la fiftule. Tous les trois jours, on
attachoit un nouveau fil au bout de l’ancien, qui
ne fervoit plus qu’à faire paffer le dernier fil. Par
ce moyen, la ligature coupoit peu-à-peu la peau
de deffus la fiftule. Tandis que l’endroit fur
lequel portoit le fil fe rongeoi.t, celui fur lequel
il ne portoit plus fe guériffoit, & la plaie fe
fermoit ainfi par degrés,
Mais Celfe ne s’en tenoit pas à cette méthode ,
qu’il avoue être fort longue, quoique très-peu dou-
loureufe. Lorfque la fiftule s’ouvre en - dedans.,
ou quelle a plttfieurs finus, il veut qu’on fe
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ferve de l’inflrument tranchant. Alors,après avoir
introduit une fonde dans la fiftule, il faifoit
deux incifions parallèles, l’une près de l’autre 5
enfuite il emportoit la petite aiguillette qui les
féparoit, afin que les bords ne fe réunifient pas
fi-tôt, & qu’il y eût un intervalle pour mettre
un peu de charpie. Si d’une ouverture fiftuleufe,
partoient plufieurs finus, on CQmmençoirpar
incifer la fiftule dans toute fa longueur , &
l’on faifoit une ligature à chacun des finus qui
fe rencontroient latéralement. S’il en étoit quelqu’un
plus profond , qu’il fût dangereux d’attaquer
par l’inftrument, ôn y introduifoit un collyre
fiftulaire, nom qu’on donnoit à des tentes
plus minces d’ un bout que de l’autre, fie
enduites de quelque doux efearotique.
Du tems de G alien on ouvroit les plaies fif-
tuleufes par l’incifion , pour les guérir*, mais,
quoique cet Auteur parle des fiftules en général,
nous ne voyons pas qu’il ait appliqué cette méthode
au traitement de la fiftule à l’Anus. Il
connoiffoit les fiftules du périnée, caufées par
des tubercules dans le canal de l’urètre} &
Paul d’EGiNE, qui enfuite a traité de cette
efpèce d’ulcère , des fiftules d’un autre genre,
& particulièrement dè celles de l’Anus, dans un
même chapitre, a mis-de l’obfcurité dans ce fujer,
fii jetté les premières ft-mences dé la confufion
dans laquelle il a demeuré fi long-tems , &
dont les Modernes ont eu tant de peine à le
débarraffer.
• Ce Compilateur diflingue les fiftules, dont le
pus fort par l’Anus, en perçant l’inteftin, de celles
qui ne pénétrent pas dans fa cavité. Il parle
auffi des fiftules tortueufes , & dit que , dans
prefque toutes ces êfpèces, on trouve des cal-
lofités à leur orifice. Il regarde comme incurables
celles qui percent le col de la veflie, qui
pét’ ètrent dans l’articulation- d.e la cuiffe, ou
qui s’étendent vers le gros boyau. Il dit que celles-
là font difficiles à guérir , qui n’ont pas d?orifice
extérieur , ainfi que celles qui fe terminent dans
les os *, mais que toutes les autres fe guériffent
facilement. -Son traitement confifioii à ouvrir,
par une incifion longitudinale, celles dont les
deux orifices étoient en vu e , ou au-deffous de
l’Anus. Lorfque l’un des orifices étoit intérieur,
il confeilloit d’introduire un doigt .dans le fondement
, de faire paffer de l’autre main un
biftouri, dont la pointe vînt rencontrer le doigt,
en perçant l’inteftin , s’il ne l’étoit pas déjà ,
& de joindre les deux cavités par une fimple
incifion. Il recommande d’emporter les callo-
fités, s’il s’en rencontre , en évitant de bleffer
le fphinéler. Il traitoit de timides les Chirurgiens,
qui, à l’exemple d’Hippocrate, employoient
,la ligature. Sa méthode fut fuiviepar L eonlde,
& A etius j & il paroît quelle étoit affez généralement
admife parmi les Grecs, quoique
quelques Praticiens adoptaffent celles des cauf-
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tiques*, ce qu’Aëtius attribuoir à la crainte qu’ils1
avoient de faire des opérations. ,
Albucasis cependant renchérir fur cette mau-
vaife & douloureufe pratique , en donnant la
préférence au cautère aéluel qu’il introduifoit à
plufieurs reprifes dans les fiftules qui ne pénétr oient |
pas dans l’inteflin , jufqu’à ce qu’il eût confirmé j
toutes les parties malades j il achevoit enfuite la
cure avec des onguens propres à féparer les parties
mortes, & à cicatrifer l’ulcère•, & il regarfioi.t
comme incurables, les fiftules qu’il ne parvenait
pas à guérir de cette manière. 11 portoit le m'me
jugement de celles qui pénétroient dans l’inteftin-,
mais il traitoit celles qui étoient fuperficielles, |
par la ligature, ou par i ’indfion au moyen d’un
biftouri courbé.
Avicenne, qui parle de la néceffité d’employer
l’infirument tranchant, ou le cautère aèluel dans
lp traitement des anciennes fiftules en d’autres
parties du corps, n’employoit ni l’ un ni l ’autre
de ces moyens dans celles qui ont lieu auprès
de l’Anus \ car lorfque celles-ci n’attaquoient
pas Tinteflin, il les traitoit avec des médicamens \
quand le reélum étoit percé, il employoit la
ligature.
GuiDO,qui introduifit en Europe, la Chirurgie
des Arabes , a fort embrouillé cette matière. .
Il dit qu’il y a des fiftules auprès de l’Anus
qui percent l’inteftin, les unes pénétrant jufqu’à
la diftance de trois travers de doigt du bord
de l’Anus, tandis que d’autres fe terminent
beaucoup plus près de l’extérieur. Selon lu i,
il y a des fiftules qui n’aftèélent point l’inreftin ,
mais qui s’étendent vers d’autres parties, comme
vers Jes mufcles de la hanche, vers les os du
bàffin, vers le coccyx, la veflie & la racine
de la verge. Il parle des caufes qui déterminent
chacun de ces cas- particuliers, & des caractères
qui les diflinguenr. 11 adopte le fentiment
d’Albucafis fur les fiftules, que cet Auteur regarde
comme incurables ^ il tient pour impofïïble
d’atteindre jufqu’au fond de celles qui font
profondes &• tortueufes-, & il dit : que tous les
Praticiens font d’accord fur ce qu’une fiftule qui
pénètre au-delà du milieu du fphinCter, ne peut
fe guérir qu’au prix d’une maladie pire que celle-là,
favoir ,une impoflïbilité de retenir les excrémens.
Quant aux fiftules peu profondes & qui ne
pénètrent pas dans l’inreftin, il confeille de. les
dilater au moyen d’un morceau de gentiane ou
du biftouri, & decautérifer enfuite la partie avec
le cautère aélue! -, mais lorfque l’inteftineft percé,
il recommande la méthode d’Hippocrate, ou bien,
après qu’on a placé la ligature dans la fiftule de
la tirer-auffi bas quepoflible, & de divifer avec
le kiftoui i les parties qu’elle embraffe -, il parle
même d’employer un biftouri rougi au feu, pour
faire cette opération. Il ,nous a tranfmis ainfi la J
méthode cruelle des caufiiques; qui n’a eu que
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trop fouvent, parmi nous, la préférence fur les
moyens plus doux employés anciennement chez
les Grecs.
V igo, qui vivoit cent foixante ans après, défap-
prouva la méthode de la ligature, & celle des
caufiiques, & recommanda celle de l’incifion.
Il panfoit la plaie avec un digefiif, compofé,
de térébenthine’, d’un jaune d’oeuf & de fafran -,
ruais s’il y avoit des callofités., il recommandoir
de les.attaqueravec l’onguent égyptiaque, ou avec
un caufiique mercuriel.
Paré , qui vivoit peu de tems après Y ig o ,
préféroit la ligature à l’inftrument tranchant,
pour ne pas caufer d’hémorrhagie. S’il n’y avoit
pas d’ouverture à l’inrefiin , il le perçoit ainfi
que Paul avoit recommandé de le faire, employant
pour cela une ‘aiguille très-pointue,
qu’il avoir inventée à cette; intention. Il eft le
premier Auteur, depuis Paul, qui ne parle pas
du danger de couper le fphinéïer, dont apparemment
il avoir appris à ne point s’inquiéter.
Fabricius, contemporain de Paré, recommande
la méthode de Tincifion, comme étant
plus expéditive & moins douloureufe que toute
autre. Son expérience lui avoit appris, que ce
n’étoit qu’en perçant & en divifant l’inteflin,
qu’on pouvoir procurer aux malades une guérifon
complette \ cependant il ne croyoit pas que cela
fe f ît abfolument fans danger-, il avoir connu
un homme , qui s’étoit bleffé le reélum
avqc un bâton pointu, dont il fe fervoit pour
faire fortir des excrémens durcis, & qui en
étoit mort ; & la crainte que lui avoit infpiré
cet accident, le rendoit particulièrement cir-
confpeél.
Marchettis n’eut pas les mêmes craintes que
Fabricius, enfuivantla même méthode-, mais il
crut devoir toujours laiffer une partie du fphinéler
en fon entier. 11 donne un autre confeil dont
les conféquences euftent été bien plus heureufesj
fi l’on y eût fait attention \ c’e fl, relativement
à l’ufage des efearotiques, qu’il regarde comme
inutiles pour détruire les callofités , fur lefquelles,
après l’incifion, il n’appliquoit qu’un fimple
digtftif.
V auguion il eft v rai, qui, au commencement
de notre fiècle, fuivit la méthode de Paul &
de V ig o , parut adopter, à cet égard, le précepte
de Marchettis-, il n’appliquoit, après l’incifton,
que des digeftifs doux pour détruire les. callo-
lités, & ne recourait aux cauffiqqès, que dans
les cas où ces moyens n’étoient pas fuftifans pour
les détruire. Il le fervoit aufli de ces derniers
pour ouvrir le fond de la fiftule, lorfqu’il fe
trouvoit trop loin de l’Anus. D ’ailleurs fa méthode
ne différoit en rien de celle de Paul,
que nous avons décrite, fi ce n’eft qu’iLemployoit,
pour faire fon incifion , un biftouri
courbe & délié,.terminé par une fonde don^t