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périeure dans les divers mouvemens dont elles
font fufceptibles. Ces os, qui nefe trouvent que
chez l’homme & chez quelques animaux dont
la flruclure approche de la tienne , font à raifon
de leur ufage , fujets à des déplacemens ou des
fractures d où s’enfuit une gêne dans les mouvemens
qu’ils doivent favorifer. Confidérons chacune
de ces affe#ions en parriculier.
De la frachire de la Clavicule•
La poli tien de la Clavicule , fon peu de
volume 3 fes courbures , la manière dont elle
eft foutenue par fes deux extrémités , qui fait que
fon milieu porte à faux } les grands efforts qu’elle
eft obligée de foutenir, loxfqu’en tombant on
porte les mains en avant, &plufieurs autres considérations
qu’anatomiques tant accidentel les qu’un
homme inftruit conçoit aifément, expliquent pourquoi
la fra#ure de cet os eft fi fréquente & beaucoup
plus que fa luxation. La Clavicule fe rompt
plus fréquemment dans fon milieu que par-tout
ailleurs, elle efi plus fouvent avec déplacement
à raifon de la pefameur du bras & de l’a#ion
des mufcles peéloraux qui déterminent toujours
le chevauchement des pièces. La portion humérale
fe porte alors fous la flernale j ce qui arrive
d’autant plus aifément que cette dernière portion
ne fe dérange jamais.
La difformité de la confoîidation a toujours
été pour cette efpèce de fra#ure un inconvénient
qu’on a regardé comme infurmontable depuis
Hippocrate jufqu’à nos jours , quoique tout récemment
on ait cherché tous les moyens d’y
remédier. Peut-être que fi l’on fe fût étayé, dans
le choix des moyens curatifs, des notions qu’une
méchanique fondée fur une anatomie fcrupulenfe
fuggéroit > l’on eût mieux réuffi.
Là fra#ure de la Clavicule peut être comme
toutes les autres , fimple ou compliquée. Elle
fera fimple, quand la folution ne fera qu a un feul
endroit,& que les extrémités rompues feront encore
en conta#. Ce dernier cas efi très-rare , le poids
du bras qui n’eft plus foutenu & l’acïion des
mufcles qui font fixés fur cet os , donnant lieu
lieu à un déplacement qu’on obferve plus fréquemment
dans les fra#»res obliques que dans
le s tranfverfales.
La fracture de la Claviculeseft une de celles
qui en elle-même efi plus facile de diftinguer, même
au premier afpe# , fur-tout quand il y a déplacement
, qu’il n’eft furvenu aucun gonflement
& que les fujets ne font point trop gras.
L ’omoplate efi plus déprimée, elle efi moins
difiante du fternum , & efi tellement appliquée
au thorax qu’il n’y a aucun intervalle entre les deux.
L e bras efi difficilement porté en haut, en avant
ou appliqué fur les côtés. Quand la fraéhire efi
fimple , que les extrémités de l’os rompu font
encore en conta#, ou quelles ne font point
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ffop éloignées \ les douleurs ne font pas bien'
grandes, elles font même fouvent nulles*, mais pour
peu qu’on tente de faire quelques mouvemens
avec le bras , elles recommencent , elles font
aigues & ceffent du moment qu’on a fait la ré-
du#ion. Lorfque la fra#ure efi avec déplacement
, la portion qui répond à l’omoplate en-
traînée par le poids de cet os, par celui du bras
& par l’a#ion du deltoïde, fe cache fous celle qui
tient au fiernum, & le déplacement devient alors
d’autant plus grand que les mufcles fe contrac-
plus fortement j la douleur augmente fi l’on porte
le bras en avant ou fortement fur le côté.
En quelque région que la Clavicule foit fracturée
, fi la fra#ure efi fimple & tranverfe , &
que les pièces fe répondent encore mutuellement,
ce qui efi rare, on ne peut qu’annoncer des fuites
heureufes. Il n’en efi pas de même quand elle
efi oblique, quand les vaiffeaux & les nerfs font
bleffés par les efquilles, quand celles-ci font nom-
breufes , & quelles chevauchent les unes fur les
autres, car en pareil cas la rédu#ion & la conformation
font toujours difficiles , & ce qu’on
appelle la matière du cal en efi toujours difforme j
cette difformité, a-t-on dit , vient de ce qu’on
ne peut porter les jets de bandes alentour de
l ’os pour en maintenir les extrémités comme dans
les autres efpèces de fra#ures. Mais cette opinion
me paroît fingulièrement fauffe ; il ne faut que
pofTeder les notions les plus ordinaires de l’Anatomie
pour en fentir tout le ridicule. Le plus
grand obfiacle qu’on ait à vaincre i c i , efi le poids
du bras qui n’étant plus foutenu tend à augmenter
le déplacement pour peu qu’il ait commencé ;
c’eft donc vers lui qu’il faut diriger fes vues fi
l ’on veut réuffir. Du temps d’Hippocrate on fai-
foit des tentatives qui n’étoient nullement rai-
fonnées. On appuyoit fur la portion flernale qui
à raifon de la plus grande faillie paroiffoir fuf-
ceptible d’une plus grande a#ion , & en portant
tous fes effors fur elle , on la déprimoit vers
celle qui répondoit à l’épaule & on cherchoit
à les maintenir en conta# par des tours de bandes
comme on le faifoit encore il y a une vingtaine
d’années. Ce procédé , quelque fuivi qu’il
fût , parut dès-lors à Hippocrate peu conforme
aux indications. Quin etiam fane 3 dit-il dans
fon livre De Articulis , hic modus jugulo fraclo
non efi accommodatus, ne que enim quod eminet effatu
memorabilem aliquam depreffionem kabere p o t efi.
Il continue plus loin ; Hcec inexperto quideni
propè ad id quod fecundum naturam efi, accedere
videntur,vcrkmfiquis ad ufum accomodet, inutilia com•
periet. En confidérant l’avis qu’il donne , on ne
peut s’empêcher d’admirer la fagacité & le jugement
de ce divin vieillard, ce n’eft pas, dit-il
la portion qui s’élève qu’il faut déprimer , mais
au contraire celle qui efi déprimée qu’il faut
élever. Ver'um inferiorem partem ad fuperiorem
adducendam ejfe cùm ta motionçm habçat fy à
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iiatarali fede reeejferit. En pefant ces paroles,
on ne peut s’empêcher d’admirer le jugement de ce
fublime Auteur. Il confeille de diriger toutes-
fes vues vers la portion humérale 3 & de la rapprocher
vers la flernale qui efi immobile , & telle
efi en peu de mots la méthode qu’il fuivoir. Il
élevoit le bras en haut , en même - tèms qu’il
lappliquoit fur le côté avec la main gauche >
il portoit de l’autre la tête l’humérus en arrière.
Il faifoit coucher le malade fur le dos ayant foin
de placer un corps dur entre fes épaules afin de
déjetter celles-ci en arrière, enfuire il portoit des
jets de bandes alternativement de l’épaule malade
à l’autre jufqu’à ce que les extrémités des os
fuffent bien maintenues , puis il tenoit le bras
en écharpe. Suivons cette doèlrine d’Hippocrate
avec les notions que fournit la ftru#ure des
parties. Quand il élevoit le bras , l’omoplate
revénoit à fa pofition naturelle j en l’amenant
fur le côté, le grand pe#oral & le grand dorfal
étoient mis dans le plus grand relâchement. Le
corps dur ou efpèce de couffin fur lequel le
malade étoit couché, ne fervoit qu’à faciliter le
r^ôur des épaules qui n’auroit pu fe faire, s’il
êût été couché fur un plan uni fur lequel les
épaules euffent porté. En pouflam la tête de
l ’humérus en arrière il éloignoit l’une de l’autre
les pièces chevauchées*, pour peu que ce mouvement
fût exécuté d’une manière plus étendue ,
la bafe de l’omoplate, retenue fermement parle
grand dentelé, s’éloigne du thorax par fon bord
antérieur > fe rétablit de plus en plus dans fa pofition
naturelle. Mais le bandage qu’il employoit
en appliquant l’omoplate fur le thorax nuifoit
à la véritable indication *, auffi Hippocrate dit-
il qu’il refte toujours un vice dans la coalition
& qu’il efi plus confidérable quand la fra#ure
efi oblique , & moindre quand elle efi tranf-
verfale , ce qui efi vrai. Celfe, qui a écrit depuis
lu i, ne propofe aucun moyen particulier
pour la fra#ure de la Clavicule. Quand elle efi
lans déplacement elle fe réunit d’elle-même, dit-il,
fans l’application d’aucun bandage & par le fimple
repos, ce qui efi plus que prouvé par différentes
obfervations de Gafparetti & de Brown
dont il efi parlé dans la Bibliothèque de Chirurgie
d’Haller , & par celle de M. Flajani inférée !
dans un ouvrage qui a pour titre ; Nuovo Metho-
do di trattar alcune malattie cirurglcali, imprimé
il y a quelques années à Rome. Paul q u i, dans
la plupart des matières qu’il nous a laiffée^ fur
fur la Chirurgie , a répandu des lumières dont on :
fe feroit encore honneur aujourd’h u i, s’efi beau- j
coup plus étendu que Celfe fur les moyens de j
rédu#ion & de conformation en traitant de la ■
fra#ure de la Clavicule- S i , dit-il, cet os efi i
fra#uré dans toute fon épaiffeur de quelque manière
que ce foit , deux aides dont l’un faifira
le bras qui répond à la fra#ure en le portant en
Brême-temps en-dehors & en haut, pendant,
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que Pautrfe tiendra celui qui efi à l’oppofé, feront
une extenfion en fens contraire. L ’Opérateur
ajuftera alors avec fes doigts les parties frac*
turées, en repofant celles qui font les plus fail-
lantes & attirant celles qui feront les plus enfoncées.
Si une plus grande extenfion efi né-
ceffaire§ on porte fous l’aiffelle un tampon affez
gros, fait de morceaux d’étoffes de laine ou autre
fubfiance approchante , & l’on amènera la jointure
du coude vers les côtes, & l’on fe comportera
du refte comme nous l ’avons dit. Albucafis,
Lanfranc & Gui de Chauliac fuivirent exa#ement
ce procédé de Paul avec cette différence cependant
qu’Albucafis mettoit un oreiller entre le bras
& la poirrine pour les féparer l’un de l’autre.
Leurs fucceffeurs, le Clerc & autres employèrent
un bandage croifé qui efi l’étoilé. Il fe fait
en conduifant un bande d’une épaule à l’autre
parderrière , de manière à lui faire décrire en
quelque forte un huit de chiffre dont les cercles
embraffent les épaules, le croifé étant entre
les omoplates. Les épaules, par ce bandage,
étoient retenues en arrière , & ainfi les vues
qu’Hippocratte avoit eu le premier, étoient remplies.
Ils firent plus ; ils remplirent le deffus
& le deffous des Clavicules avec des tampons
de charpie ou d’étoupes trempées dans un dé-
fenfif , & par-deffus ils appliquèrent des com-»-
preffes longuettes qu’ils affujétirent avec le fpica
defeendant- J . L. P etit, quoiqu’ayant porté de
grandes lumières dans tout ce qui a rapport aux
maladies des os, efi tombé ici dans l’erreur commune
en attribuant la difformité du cal à la difficulté
de porter dès jets de bandes alentour
des parties fra#urées. Mais les moyens qu’il
donne pour la prévenir ne font pas plus efficaces
que ceux qui étoient déjà connus , Scia
compreffe qu’il confeille de mettre en travers
fous l’endroit où fe croifent les jets de bandes*
efi abfolument fans effet. La croix de fer d’Heif-
ter n’eft pas plus efficace , & nous croyons
en devoir dire autant du corcelet imaginé par
M. Brafdor & dont on trouve la defeription dans
le cinquième volume des Mémoires de l ’Académie
de Chirurgie.
Les difficultés de maintenir les bouts fra#urés par
les méthodes dont nous venons de faire mention ,
déterminèrent les Praticiens à de nouveaux efforts.
M. de Sault, qui pratique la Chirurgie avec autant
de zèle que de difiin#ion dans * le plus
grand des hôpitaux de Paris, a perfe#ionné U
procédé de Paul, d’après les connoiffances que
la difpofition des parties pouvoit fuggérer. L e
malade étant affis , un aide placé par-derrière,
tire à lui le fommet des épaules & les retient fermement
dans cette pofition. Pendant ce teins,
le Chirurgien porte fortement en haut le bras
& l’épaule du côté malade au moyen d’une
mairi appliquée fous l’aiffelle & dirigée en-dehors ,
pendant que l’autre main placée fur la partie ex?