
on fent le bord qui touche en quelque forté le
pédicule de la tumeur, qui en eft plus ou moins
étranglé.Ce figne > quand on peut l’obtenir, réuni
à une certaine dureté & rénitence , & quelquefois
à la facilité de la réduction, forme un figne
pathognomonique qui ne peut tromper. En réunifiant
tous ces lignes, & apportant dans leur
comparaifon & dans l’examen de tout ce qui a
précédé, l’efprit de combinaifon, fi néceflaire dans
les cas épineux , l’on diftinguera ainli les tumeurs
fongueufes de la Dure-mère , des hernies du
cerveau,des lipomes , abfcès, exoftofes & autres
affeétions qui en impofent pour elles à la première
-vue.
Les tumeurs fongeufes de la Dure-mère font,
généralement parlant, très-fâcheufes, tant à raifon
de leur natnre, qu’à raifon de la difficulté d’y remédier
d’unemanière certaine,St du défor dre intérieur
&. extérieur qu’elles ont pu occafionner. Celles
qui font à pédicule ,8t dont la bafe eft peu étendue,
qui ont une texture denfe, fans une grande défor-
ganifation de l’os à l’entour, qui font mobiles,
peu douloûreufes, St qui paroi fient chez des
fujets afiez fains d’ailleurs, font en général réputées
les moins fâcheufes, ce font celles qu’on
peut attaquer, & même avec efpérance de fuccès,
quoique le cas fo.it toujours douteux. On en
peut d’autant mieux augurer, qu’elles feront fituées
fur un endroit où il y a peu de vaifieaux impor-
lans, recouverts par des mufcles peu volumineux ,
& où les moyens de gnérifon peuvent avoir accès
facilement. Si le contraire de tout ce. que nous
venons d’annoncer a lieu , que la maladie date de
fort long-tems, que Ie;cerveau foit déjà affedlé,
il n'y a rien de bon à efpérer.
La compreffion eft le moyen curatif le plus
fini pie , & celui qui s’eft comme fpontanément
préfenté à ceux qui ont pris la tumeur pour ané-
vrifmale, ou pour une hernie du cerveau. On
s’eft d’autant plus mépris fur l’efficacité de. ce
moyen, que, quand la tumeur n étoit point vo-'
lumineufe, on la faifoit rentrer en partie , ou
même en totalité , fans qu’il s'enfui vît aucun accident
,• ce qui ne çontribuoit pas peu à dédevoir
fur le véritable caraélère de la maladie. Mais
cette réduction,- comme on le conçoit, n’ayant
qu’un fuccès momentané, & ne portant aucune
atteinte à la caufe première du mal > les accidens
xevenoient, & la tumeur rèfiortoit du moment où
on la* ceffoif. On trouve, dans une obfervation
inférée dans le Mémoire de M. Louis, un fait qui
pourroit convaincre des bons effets que pourroit
quelquefois avoir la compreffion bien ménagée.
C’eft celui d’urte femme , mife à deux doigts de
la mort par les.accidens qu’entraînoit la tumeur.
Ayant refté quelque tems la tête appuyée fur le
côté oppofé à la tumeur, elle en éprouva fans
accidens la rentrée fi fubire, qu’elle fecrut guérie
pomme par miracle. Urje compreffion anifiemçnt
faite au moyen d’une plaque d’étain, coufue
à fon bonnet, prévint le retour de la tumeur;
'mais néanmoins la compreffion, n’étant pas toujours
exaéle , les accidens revenoient de tems à
autre, tomes les fois que la tumeur difparoiffoit;
& ils ceffoient par une pofition convenable quelle
prenoit auffi-tôr. Sans »doute qu’ils étoient oeça-
fionnés par les picottemens que la tumeur éprou-
voit en paffant par les inégalités qui 'bordoient
la circonférence du trou par où elle fortoir. La
malade fe foutint ainfi pendant neuf ans, au
milieu des tranfes qui l’aflai 11 oient de tems à autre,
il périt au milieu d’une, qui fut accompagnée de
hoquets & de vomifiemens.
Comme on ne peut compter fur la compreffion,
il convient de tenter la méthode fnivante., qui
eft la plus fûre. File.confifie à découvrir la tumeur
au moyen deTinftrumcnt tranchant, qui,
fans contredit, eft préférable aux cauftiqiies dont
f effet ne peut jamais être borné comme l’on de-
fire, ni s’étendre là où l’on voudroir. Quand il y
-a fiucluation , on vuide la tumeur en plongeant
dedans la pointe du biftouri, & l’on prolonge
crucialement les incifions afiez loin, pour qu’en
relevant & coupant les angles, tout le contour
de l’os foit à découvert. Alors on appliquera des
couronnes de trépan à l’entour, & on les réitérera
autant qu’il fera néceflaire pour enlever toute la
portion émincée de l’os ; on les difpofera de
manière qu’avec le fecours de l’élévatoire, de la
feie, des tenailles incifives, de la rugine & autres
inftrumens covenables, on puifle enlever
tout le contour. Il faut, dans ce procédé, aller
fort doucement, & faifir tous les moyens qui
peuvent fe préfenter pour détacher & enlever le
cercle de l’os de la bafe de la tumeur , & mettre
celle-ci à découvert, afin que fa nature bien
connue, on puifle la détruire par les remèdes
qui conviennent le plus, & procurer enfuite
l’exfoliation delà Dure mère qui lui fert de bafe.
,Quand la tumeur répond au finus longitudinal,
il faut ménager les applications de couronnes du
trépan, crainte d’intéreffer le finus. qui. efi au-
deuous de l’os *, mais il n’en faut pas moins attaquer
la tumeur par le fer, fi elle eft de nature
à le demander ; l’on fait que l’ouverture de
.ce genre de vaifieaux n’eft point auffi redou?
table qu’on l’a cru; & les Observations que
M, Laffus a raflemblées dans fon Mémoire fur les
plaies du finus longitudinal, indiquent que l’on
peut efpérer beaucoup des reffoiirces 3e l’Art
en pareil cas. En général, ceux qui ont écrit fur
les tumeurs fongeufes de la dure-mère, ne difent
rien fur la complication qu’amène dans lecaradlère
de la maladie, leur fituation fur les finus.
La tumeur, ainfi dégagée de toutes parts, fi
elle paroît fongeufe, on coupe avec le Scalpel
ce qui. excède au-dehors, & on applique en pre«
miçr appareil l'onguent brun, auquel on a mêlé
«n peu de précipité rouge. La fuppuration qui
furvient, détache des lambeaux, tl-fe fait une
fonte putride qui les entraîne au dehors*, il faut,
en pareil cas > fâvorifer leur chute, au moyen de
lotions faites avec la décodtion d’abfymhe,& ai-
guifées d’eau-de-vie camphrée & de fel ammoniac.
Si la fonte eft trop abondante, & qu’il y
air beaucoup d’tchorofité, ôn les abforbe avec
les poudre de kinkina & de colophone, qu’on
•répand de côté & d’autre. Si la tumeur eft far-
eomaïeufe, que fon pédicule foit p etit, étroit,
comme cela arrive quelquefois, il ne faut point
héfiter de le couper, foit avec le biftouri ou le
cifeau ; on abforbe le fang qui en fort avec de
l’agaric & des poudres ficcativés. Cette méthode
eft préférable à la ligature , qu’on ne peut faire
fans tirailler, froncer & irriter la Dure-mère>
ce qui occafionne toujours des accident» plus ou
moins fâcheux ; elle i’eft également à l’ineifion,
ou ouverture, laquelle pourroit faire prendre à
la tumeur un caraélère cancéreux; elle I’eft encore
à la méthode des cauftiques, qui occafionne
toujours beaucoup de douleurs, & Souvent même
des mouvemens convulfifs. Il faur, dans cette
extirpation, emporter toute l’étendue de la rumeur
, & tontes les racines, s’il eft poffible ;
quand même elle s’étendrok jufqu’à la lame interne
de la Dure-mère. L ’on ne fauroit trop fe
hâter de prendre ce parti; car, pour vouloir trop
différer, la maladie prend des accroiffemens iniques
fur le. cerveau , & devient‘non-feulement
incurable,.mais même mortelle, par les tentatives
qu’on fait pour la combattre. C’eft à une réfolu-
tion auffi eourageufe que l’on doit rapporter le
fuccès du traitement de l’Efpagnol Avalos, dont
Marc-Aurèle Severin fait mention. Ce Seigneur
fouffroit à 1a tête de.s douleurs infupportables,
qu’aucun remède quelconque n’avoit pu fôulager.
On lui parla de fe faire ruginer le crâne, il s’y
fournit. Cette opération fit découvrir fous l’os une
excroiffance fongeufe dont la deftruélion le pré-
ferva pour toujours dès. violentes douleurs dont
elle étoit la caufe. il n’eft point dit dans cette
obfervation fi la lame interne de la Dut er-mère
étoit faine ou non; mais il y a tout à préfumer
que, fi l’on s’y prenoit toujours de bonne heure
dans le trairetnent de ces'fortes de tumeurs, &
qu’on fe déterminât à un parti violent, comme
dans le fujet de lobfervarion que nous venons
de cifer.jJ.’on réuffiroit dans^eaucoup de cas-,
& la raifon le perfuade afiez. En effet, l’on ne
feroit* point forcé à détruire -une auffi grande
étendue d'os, l’on mextroit une bien moins grande
partie du. cerveau à découvert, & l’on courroit
moins de rifqiie des fuites de la fuppuration..
Des fungofites de la Dure-mère.
Ces fortes d’excroifiances, au lieu de précéder
férôfion ou deftrudtion du crâne, font tpujours
confécufives à celles-ci. Elles tiennent du caraélère
inflammatoire*, auffi font-elles plus ou moins
accompagnées de fuppuration, elles font beaucoup
plus douloureufes que les autres, & paroifient
fouvent après l’opération du trépan , où l’on en
a enlevé une portion afiez étendue. Les fongofités
dé la Dure-mère font quelquefois portées fur un
pédicule, & d’autres fois elles repofent fur la
Dure-mère par une bafe afiez la rgecomme les-
tumeurs fongeufes dont nous venons de parler..
De La Morte fait ainfi mention d’une chair fon-
geùfe q£i rempliffoit le trou du trépan, & fe
porroit à un demi-travers de doigt au-delà de-
l’ouverture du crâne qui la laiffoit paffer. Mais
le plus communément elles s’élèvent de la Dure-
mère, comme les hyperfarcofés ou chairs baveufes,.
pullulent de toute la furface d’un ulcère, & en
offrent les mêmes ' car a 61ères ; . obfervation qut
avoir déjà été faite par Langius. Ces fongofités*
font afiez fouvent pâles, molles, flafques, ne
fourniffent qu’un pus, féreux, ichoreux, qui ,.
, par fon acrimonie , entretient l’inflammation tout
à l’entour ; d’autres fois elles font d’ un riflu plus
plus ferme, plus denfesy mais en même-ceins,,
elles font d un blanc pâle,.blafard , faignent peu ,
& ont afiez l’apparence d’un chou-fleur. Fabrice-
de Hilden fait mention d’un pareilfungus, qui,en
vingt- quatre heures-, s’éleva de la Dure-mère à la:
groffeur d'ina oeuf de poule chez u n enfant de-
quatorze ans r à la fuite d’une plaie avec perte de
fubftance au crâne. Cette fing.ulière converfiorr
des lames de la Dure-mère, toute furprenante
quelle foit, n’a rien qui étonne ceux qui con-
noifîent la faculté qu’a la peau fur le gland, le
nez, l’intérieur des grandes l.èvres, le contour
de l’anusr de bourgeonner ainfi , & de former ces
fortes de tumeurs qu’an nomme choufleitrs
condylomes, &c.
Il eft afiez difficile de dire quelles font pré-
cifémenr les caufes qui font naître les fongofités
de la Dure-mère dans certaines circonftances
& point dans d’autres. L’on a vu de larges plaies-
• du crâne, où la Dure-mère étoit découverte dans
une très-grande étendue de fa fup.erfkie,, & néanmoins
guérir fans cette complication, pendant
que d’autres très-petites fournirent fucceffivément
ces fortes de végétations , malgré tous les remèdes
qu’on leur oppofe. Il eft dans la Pathologie Chirurgicale,
comme dans la Médicale, des faits fur
lefquels. l’imagination des hommes s’exercera long-
tems, & tel eft celui dont il s’agir ici ; auffi tarifons-
nous à ceux qui ont tout le loifir néceflaire um
auffi beau, champ que celui que nous leur offrons-
à préfenr. Il paroîi cependant que la comprefliom
des parties environnantes du crâne fur les vaif-
feaux de la Dure-mère plus ou moins engorgés,,
& dans un état du plus grand éréthiftne, entre,
pour beaucoup dans la. formation de ces fortes-
de tumeurs; car il eft rare qu’elles paroiffenr,,
* quand on a fait fur' la furface découverte une;