8c la détection de tous les métaux qui en font
fufceptibles5 enfin, déterminer avec le plus grand
foin le juftë degré de chaleur nécefl'aire pour la
meilleure combinaifon de toutes les matières métalliques
les unes avec les autres. Mais il ne paroît
pas qu'aucun chimifte ait fait jufqu’à préfent ce
grand & important travail 3 il eft à fouhaiter qu’on-
l'entreprenne : combien reftera-t-il enfui te de
belles expériences, à faire fur tous ces alliages
pour en bien faire connoître toutes les propriétés, 8c que d’ utilités ne pourra-t-on pas y puifer poulies
arts ?
La fufibilité , par exemple , doit varier con-
lîdérablement dans les differens alliages ; on en
a une preuve bien fenfible dans celui de l’étain ,
du plomb 8c du bifmuth. Ces trois métaux unis
enfemble, forment toujours un mélange ou. un
métal çompofé beaucoup plus fulible qu’aucun
d’eux ne l’eft féparément , ou même qu’ils ne le
font alliés deux à deux. Newton j Nufchembroeck,
Homberg, avoientfait quelques expériences furies
proportions de ces trois métaux pour en com-
pofer un alliage très-fufible; mais M. d’Arcet
qui a lî bien mérité de la chimie par fes travaux
importans, a publié dans le journal de médecine
(juin 177j ) , les recherches qu’il a faites
pour trouver les proportions de ces mêmes métaux
qui donnent l’alliage le plus fulible 5 elles
font de huit parties de bifmuth , cinq' parties
de plomb, & trois parties d’étain. La fulibilité
de cet alliage eft telle, que le métal com-
pofé qui en réfulte, fe fond & devient coulant
comme du mercure, non-feulement dans l’eau
bouillante, mais même au bain-marie. M. d’Arcet
remarque : « Que les alliages de ces trois
métaux en différentes proportions, quoiqu’ils
l'oient aigres , fe lailfent pourtant couper au cou-
teau , [qu’ils font d'un brun noirâtre & terne
dans la calfure 5 que dans quelques-uns le grain
eft aîfez gros, & que dans d’autres, il eft très-
lin , qu’ils font plus ou moins blancs, quand on
les coule dans la lingotière ; que celui de Hom-
berg, par exemple, (partie égale des trois métaux
) a la blancheur de l’argent 5 mais que tous
fe terniffent facilement à l’air, 8c plus promptement
encore lorfqu’on les fait bouillir dans l’eau,
où ils fe couvrent d’une pellicule fenfible , ridée,
& à demi —calcinée, qui s’en détache peu* à-
peu fous la forme d’une poudre noire ».
Quoiqu’il refte , comme on voit, une infinité
de belles expériences à faire fur les alliages
des métaux, ce qu’on a fait julqu’â préfent fur
cette matière, fuffit néanmoins pour établir quelques
vérités'générales. On en a expofé pîufieurs
au commencement de cet article 3 en voici encore
une qui réfulte évidemment des expériences
de Kraft & Gellert, c’eft qu’il en eft des fubftances
métalliques comme de tous les autres corps,
relativement à leurs unions, les unes fe diffolvent
facilement, les autres feulement dans certaines
proportions, d'autres enfin pavoiflert ne pouvoir
s’unir en aucune manière.
Il eft très-important d’obferver fur ces deux
derniers cas > que cette propriété qu’ont certaines
matières métalliques de îven pouvoir diffoudre
d autres qu’en une certaine proportion, eft très-
capable d en impofer, & de faire croire qu’un
.métal ne peut s’unir à un autre, parce qu’on les
voit réparés., formant deux culots diftinéls après
la fonte, tandis qu’il y a réellement une quantité
, . mais fouvent fort petite, d’un des métaux
Unie avec l’autre. C ’eft ainfi que fe comporte
le bifmuth avec le cobalt, fuivant Gellert,
c’eft encore ainfi qu’en faifant fondre du
cuivre allié d’enViron un cinquième d’étain avec
du plomb, celui-ci fe fépare en grande partie 3
mais il en refte une certaine quantité unie au
premier alliage. Il en eft de cela comme de
l’éther : tous les chimiftes .ont cru pendant longtemps,
que l’éther n’étoit- point diffoluble dans
l’eau, parce que l'on confondoit enfemble ces
.leux liqueurs dans un même vafe, on les voyoic
conftamment faire bande à part 3 l’ether, comme
beaucoup plus léger, occupant toujours la par- ! rie iupérieure, 8c nageant à la furface de l’eau;
mais M. de Lauraguais ayant examiné la chofe
plus attentivement, 8c comme on doit le faire
en bonne chimie, a démontré, dans un mémoire
lu à l’académiê des fciences > que l’éther
eft réellement diffoluble dans l’eau, mais feulement
dans une certaine proportion, ce qu’on
pou voit inférer aufïi des différences entre les propriétés
deLéther qui n’a point touché à l’eau,
& celle de celui qui y a touché, dont M. Baume
parle dans fa differtation fur l’éther. Cela pofé,
peut-être que fi l ’on examinoit les mélanges de
toutes les fubftances métalliques les unes avec
les autres, on trouverait auffi que toutes celles
qu’on a regardées jufqu’à préfent comme incapables
de s’unir, en font cependant très-capables ;
mais feulement dans certaines proportions, &
fi l ’on en trouvoit quelques-unes qui refufâffent
abfolument de s’unir par la fonte à l’ordinaire, il
relierait encore à effayer de rompre plus parfaitement
leur aggrégation , 8c de les préfentèr l’une à 1 autre dans cet état, comme M. de Lauraguais
l ’a fait à legard du foufre & de l’alcool.
Non-feulement les arts , comme on l’a dit
dans pîufieurs endroits de' cet article, retireraient
un grand avantage des expériences qui y
font préfentées3 mais l’hiftiore naturelle, la minéralogie
y gagneraient beaucoup 3 on connoîtroit
beaucoup plus d’alliages naturels qu’on n’en a
trouvé encore 5 on aurait des notions beaucoup
plus claires fur les mines, 8c déjà même quelques
unes de ces connoiffances font acquifes. On
fait, depuis quelques années, que le manganèfe
eft très-fréquent dans pîufieurs combinaifons métalliques
naturelles 3 en le recherchant encore dans
des métaux , 8c fur-tout dans les différentes vafiétès
de fer que l’on obtient dans les ufines 8c
dans les forges, ilell: vraifemblabie qu’on trouvera
des combinaifons variées de- ces deux métaux
entr’eux, & peut-être même avec quelques autres
fubftances métalliques. Enfin, une- grande raifon
qui doit engager, à multiplier les recherches chimiques
fur les alliages, c’eft qu’il eft intéreffant
de conftater quels effets feront produits dans les
métaux connus, par l’addition de ceux qui font découverts
depuis quelques années /comme le molybdène,
le tüngftène, l’uranite , 8cc. Il ne faut
pas perdre de vue dans ces belles recherches,
qu’on doit les faire dans un ordre tellement exaêt,
tellement méthodique, que toutes les expériences
foient bien comparables , & que les réfultats
foient faciles à apprécier comparativement. Ainfi
par exemple, il faudrait les tenter dans- cîes
creufets de même volume, fur des poids égaux ,
mefurer la chaleur employée au thermomètre,
de Weedgood , décrire l’inftant de la fufion ,
obferver les phénomènes du réfroidiifement, la
criftallifation, 8cc. déterminer avec foin la couleur,
le tiffu, la du&ilité ou la fragilité , la pe-
fanteur fpécifique, la ténacité, la folidité ou la
réfiftance à la preflion aux efforts en différens
fens, l’altérabilité par l’air , par l’eau, la diffo-
lubilité dans les acides. Quand on aurait l’hif-
toire d’un grand nombre d’allîagès examinés de cette
manière, on en conftruiroit des tableaux, dans
lefquels on verroit d’un feul coup-d’oeii toutes
les propriétés utiles ou nuifibles, & l ’on fe déterminerait
tout-à-coup fur le choix d’un alliage
dont on auroit befoin.
Alliage des cloches. Nous parlerons du
métal mixte ou allié qu’on emploie pour fabriquer
les cloches à ce titre d’alliage, parce qu’il
n’y a pas de mot qui convienne mieux pour
defigner cette fubftance, 8c parce que fon hif-
toire eft devenue aujourd’hui d’un fi grand intérêt
, que nous avons cru devoir la configner
le plus promptement1 poffiNe dans cet ouvrage,
pour en faire plutôt jouir les foufcripteurs de
l’Encyclopédie.
Depuis que l’affembiée nationale a décrété
que les cloches des églifes de France fupprimées
feraient employées pour fabriquer une monnoie,
on a fait beaucoup plus d’attention à ce métal
qu’on n’en avoit fait* depuis long-temps : on
a plus étudié & reconnu fes propriétés en quelques
mois, qu’on ne l’avoit fait pendant les fiècles
précédens ; xon s’eft fur-tout beaucoup occupé
de l’art d’en faire le départ, d’en réparer les
métaux, & d’en obtenir le cuivre pur. Le métal
employé pour la fabrication des cloches eft un alliage
de cuivre & d’étain > les proportions les
plus ordinaires, font de 75 livres de cuivre pur
ou de cuivre rofette, fur 25 livres d’étain. Cependant
il paroît que les fondeurs de cloches n’ont
pas toujours fuivi fti'ivietneiH cette' proportion 5
la quantité d’étain parait en général avoir été plus
grande dans les cloches moins précieufes 8c fur-
tout dans les plus petites; il paroît encore que
quelques cloches contiennent pîufieurs autres
métaux & fur-tout du zinc & de l’antimoine 3
cependant on penfe avec raifon que ces deux
dernieres fubftances métalliques fe trouvent comme
par hafard dans le métal des cloches, &
qu’elles proviennent des cuivres jaunes & blancs 8c en général des cuivres impurs qu’on mêle
fouvent dans les fournaux où l’on fond la matière
des cloches. C e ' qu’il y a de vrai à cet égard
c’eft que lorfqu’on fond, des cloches d’un grand
dianmètre , pour les grandes occafions, on n’em-
ploye que du cuivre & de l’étain purs.
L’alliage qui réfulte de ces deux métaux a une
pefanteur fpécifique plus grande que celle qui devrait
réfui ter de la combinaifon de lenr péfan-
teurs fpécifiques particulières. Macquer obferve
que deux onces d’un métal compofé de quatre
cinquièmes de cuivre rouge très-pu^ 8c d’un
cinquième d’étain également pur, ont fept grains 8c un dixième de plus en pefanteur fpécifique
que ne doit avoir la même quantité de ces deux
métaux non alliés, ayant égard à la moindre
pefanteur fpécifique de l’étain , comparé au cuivre
; ce qui prouve, ajoute-t-il, que dans l’union
de ces deux métaux il y a pénétration ,
c’eft-à-dire, que l’un remplit alors en partie les
pores de l’autre 3 peut-être auffi cet effet eft-il
réciproque. La couleur du cuivré eft prefque
entièrement éteinte dans cet alliage 3 celle de
l’étain domine 89 le métal eft plus ou moins
blanc. Il a un tiffu grenu 8c comme criftallin. Il
eft fi caffant qu’ une percuffion fubite 8c un peu
forte le brife très-promptement. Il eft très-dur 8c difficile à limer. Ces propriétés font d’autant
plus fingulières, que ni le cuivre, ni l’étain
ifolës ne préfentent rien de femblable 3 l’étain
eft mou 8c facile à couper comme à plier 3 le
cuivre jouit auffi d’une grande duétilité. Il n’eft
donc pas douteux qu’il y a entre ces deux métaux
une pénétration intime , un changement de
forme, un arrangement de molécules qui modifient
fingulièrement leurs propriétés. C ’ eft encore
une preuve bien forte que les qualités, les propriétés
dés compofés diffèrent entièrement de
celles de leurs compofans 8c qu elles font prefque
toujours bien loin d’être moyennes. On
n’eft pas étonné, 8c l’on conçoit même facilement,
qu’un alliage dé cuivre 8c d’étain, foie
beaucoup plus fonore que chacun des métaux
qui le conftituent, puifque cette propriété paroît
tenir à la denfité qu’ils acquièrent 8c au rapprochement
des molécules qui s’opère pendant 8c
par la combinaifon 3 mais il femble qu’on ne
peut pas concevoir avec la même facilité comment
un alliage aufli dur, auffi denfe , fe fond à
une moindre chaleur 8c plus promptement que
le cuivre. Ici. l’on pourrait invoquer l’opinion