
la mef aux environs des ifles Moluques , de
Madagafcar , de Sumatra , fur les côtes de C o romandel
| du Bréfil ÿ fur celles d'Afrique , de
la Chine ou du Japon. Plufieurs pêcheurs américains
ont afluré à M. .Swediaur * médecin an-
glois * qu'ils trouvoient fouvent cette matière
ou parmi les excrémens de l’efpèce de cachalot *
appellé par Linnéus phyfeter macrocepkalus * ou
dans Tes inteftins , ou dans une poche fituée *
dit-on j aux environs de ces vifcères *, & probablement
dans le cæcum.
Les naturalises diftinguent plufieurs variétés
de l'ambre gris. Wallerius reconnoît les fix ruinantes
variétés.
* A s . . , . . \ Ces deux variétés
1. Ambre gris taché de jaune. Jfont les plus recher-
2. Ambre gris taché de noir, ychées&lespluspré-
Acieufesi
5* Ambre blanc dune feule couleur. 4 - Ambre jaune d’une feule couleur. 5 * Ambre brun d une feule’ couleur,
6 . Ambre noir d’une feule couleur.
II eft vraifemblable que ces variétés ne dépendent
que de 1 état de la matière animale
primitive qui paroit former l’ambre gris 3 ou du
mélange de quelques fubftances étrangères.
Les favans Ont été fort partagés fur l’origine
«e 1 ambre gris. Le plus grand nombre l’ont
regarde comme un bitume > ils penfoient que
cetoit une forte de pétrole forti des rochers,,
epaiffi par le foleil & par faétion de l’eau falée.
1 ) autres ont^cru quec’étoit des excrémens d’oi-
feaux qui vivent d herbes odoriférantes ; il en
elt qui ont attribué fon origine à des écumes
rendues par Jes. veaux marins .* à des excrémens
de crocodiles * & c. Pomet & Lémery
ont cru que c etoit un mélange de cire & de
nuel cuit par le foleil * & altéré par les eaux
de la mer. Formey j qui a adopté cette opinion *
la etayee d’une expérience qui confifte à faire
migerer un mélange de cire & de miel} il allure
qu on peut en tirer un produit d’une odeur fuave
& fort analogue à celle de l’ambre. Quelques
auteurs anglois ont regardé l’ambre gris comme
tin fuc animal dépbfé dans des poches placées
vers la naifiance de l’organe génital de la baleine
male > & quelques'autres ont pertfé qu’il fe for-
jriOit dans la veflie urinaire de ce cétacé. Mais
| une & 1 autre de ces opinibns eft démentie par
les becs de feche que I on trouve dans ce fuc
Concret. Enfin * M. Swediaur * d’après l’examen
d une grande quantité d’échantillons d’ambre
gris & d’après les rapports de plufieurs navigateurs
* 'Croit que cette fubftance eft formée
dans le canal alimentaire du phyfeter macrocépka-
■ sy efpece de baleine d’où on tire le fp erma
cett 3 ou blanc de baleine. Il regarde l’ambre
gris comme un excrément endurci - ou comme
■ unerefpecç de bézoard ' de ce cétacé. Le lieu
<ju il occupe*fait qu il eft fouvent mêlé de quel-1
ques parties de fa nourriture. Il a adopté cette
opinion 3 i*L parce que les pêcheurs trouvent
fouvent de l’ambre dans ce cachalot j i ° . parce
que 1 ambre^ eft commun dans les parages où
vit ce cetace j 30. parce qu’on rencontre toujours,
dans les mêmes parages la fèche à huit pieds *
fepia otfopodza 3 dont fe nourrit cet animal ;
4 . parce qu il a reconnu Jes taches noires dont
ce corps concret eft mêlé pour les becs de ce
polype î 50. enfin* parce que les excrémens de
plufieurs quadrupèdes 3 tels que les vaches 3 les
porcs^ &c. exhalent une odeur analogue à celle
de 1 ambre gris 3 lorfqu’on les garde quelque
tems. Ses recherches ont rendu,,cette opinion des
Japonois 3c de Kempfer 3 la plus raifonnable 3
& c eft pour cela que nous rangeons aujourd’hui'
1 ambre gris parmi les matières réfineufes & odorantes
du règne animal.
M. Dandrada 3 Brafilien * a publié il y a quelque
temps dans mon journal intitulé : la médecine
éclairée par. Les fciences pkyfiques * une opinion differente
de celle de M. Swediaur fur l’origine
de l’ambre gris. B
Après avoir obfervé que c’eft .feulement fur
des renfeignemens &Tur les becs de fèche que
M. Swediaur fonde fon opinons il continue ainfi.
Kempfer penfoit* d’après les Japonois * que
1 ambre étoit un excrément de baleine* & l’opinion.
de M. Swediaur n’en eft qu’une modification.
Les naturels du Bréfil* dans le temps
de fa decouverte, avoient le même fentimentj
mais quand on fe donne la peine d’en examiner les
fondemens* & de recueillir des lumières fur les
lieux* on ne peut raifonnablement convenir d’une
telle origine.
En effet* fi l’ambre gris étoit un excrément
de cachalots malades * on lètrouveroitdansjtoutes
les côtes & parages qu’ils fréquentent j mais au
contraire* on ne le rencontre que dans quelques
cotes dès pays chauds * comme à Madagafcar*
aux ifles du Cap-Vert* au Japon* à la Chine,
aux ifles du Bréfil * &c. Dans ce dernier pays*
on ne le trouve que dans quelques-uns des rivages'^
baies* principalement à l’embouchure
de la rivière Camouci * dans la capitainerie de
Maragnon* & à la baie de tous les Saints. Dès
le vingtième degré de latitude fud jufqu’à la rivière
de la Plata * on ne l’a jamais rencontré,
a ce que^je fâche. Or* c’eft à Santo* ma patrie*
fituée à 24 degrés de latitude méridionale *
& a Sainte-Catherine* encore plus au fud* qu’on
arme tous les ans pour la-pêche des, cachai© ts j
qui fe fait dans ces parages.
L’ambre gris n’eft pas un excrément * puif-
qu au Bréfil* on l’ajètiré plufieurs fois de l’efto*
mac meme des baleines* comme me l’ont affirmé^
fur les lieux des. témoins véridiques* &
oculaires. Màgalhaens - Gandàvo * premier hif-
torièii du Bréfil* qui a mérité* pour fon ouvrage
un prologue en vers ^ de l’immortel chantre
m
de la Loüifiade* dans fon hiftoire imprimée à
Lisbonne* en 1576, affirme qu’on avoit diflequé
exprès quelques baleines, & qu’on avoit rencontré
des morceaux d’ambre dans l’eftomac d’une •
de ces baleines, & d'autres qui commençoient
à fe ramollir davantage dans les inteftins..Tout
cela eft nouvellement confirmé par le Courier de
l’ Europe* du 11 janvier dernier, qui raconte
que le vaille au le lord Hafwkesburi* a rapporté
dernièrement une baleine dépecée, de laquelle
on a tiré* dit-on* quatre cens onces d’ambre
gris* & c’eft dans l’oefophage de la baleine que
cet ambre a été trouvé.
D’ailleurs * fi l’ambre étoit un excrément endurci
contre nature* comme le veut M. Swediaur,
il ne feroit pas en couches prefque toujours
horifontales plus ou moins greffes * & quelquefois
même* de diverfes natures. M, fîomare
obferva que celui de la vente d’Orient, qu’il a
examiné* était compofé de couches* dont la
fécondé étoit inodore* calcaire & falée. S’il f
Z quelques morceaux qui ont des taches & des
becs de feche* il y en à aufli beaucoup d’homogènes
& fans taches* & même* M. Pelletier
a montré* dans une des féànces de la fo-
ciété d’hiftoire naturelle de Paris* un morceau,
dont l’intérieur coritenoit de petites coquilles (1 ) .
11 eft probable que les morceaux qui contiennent
des becs * font ceux qui avoient été avalés par
des baleines : pourquoi ne les rencontre t-on dans
les rivages qu’après les grandes tempêtes ? On dira
peut-être alors qu’il eft rejette par les vagues &
les v e n t s j mais pourquoi les autres excrémens durs
& confiftans du cachalot ne feroient-ils pas jettés
enfemble ? & pourquoi fera-ce feulement l’ambre
mou * & fans confiftance ? il eft bon de remarquer
aufli que l’a'mbre gris des côtes eft moins
Coloré que celui qui eft tiré des baleines * ce qui
paroît devoir être l’inverfe * d’après le fentiment
de M. Swediaur* puifque cet ambre a du être
plus long-temps expofié à la chaleur & à la lumière.
L’auteur d’un ancien manufcrit portugais, fur les
chofes les plus remarquables du Bréfil * de l’année
1680* rapporte* qu’un de fes amis* appellés Antonio
Gil* lui avoit montré une fource marine qui reftoit à
découvert dans la baffe-mer, à l’ifle de Taparica*
-dans la baie de tous les Saints * où il avoit, difoit-
il * vu naître & augmenter peu-à-peü l’ambre entre
les rochers qui Pabordoient. —- oimonéus de V af-
concellos* fupérieur des jéfuites du Bréfil, dans
I introduction de la chronique de cette province*
imprimée à Lisbonneen 1710 * affirme* qu’à Taparica
* on rencontroit de l’ambre gris foffile. —- Or*
toutes les obfervations & autorités ci - defliis
rapportées * font abfolument contraires à l’hypo-
thèfe du doCteur Swediaur.
Les analyfes * quoiqu’imparfaites de Geoffroi,
Newman, Grim & Brown * leur ont donné
j conftamment un même acide liquide & concret,
! de l’huile & du charbon j mais fi l’ambre gris
étoit un excrément du cachalot * il devroit donner
de l’ammoniaque'* & d’ autres produits delà chimie
animale. En vain , M. Swediaur prétend-il
.échapper à cette difficulté. On ne peut nier que
tous les excrémens des animaux mamellifères
la donnent de même, parce qu’ils contiennent
de l’hydrogène & de l’azote. Or * l’ambre gris
n’a pas donné de ce fel aux chimiftes cités j . il
n’eft donc pas l’excrément du cachalot, qui eft
un animal a mamelles. Si M. Swediaur a fait
lui-même * comme il le dit , cette analyfe , pourquoi
ne nous a-t-il pas informé de fon réfultat
& de la nature de l’acide retiré ? Il laiffe donc
échapper,'"•quand les autres chimiftes dépofoient
contre lui, une des meilleures preuves de fon
opinion. Ces chimiftes ont dit * que l’acide obtenu
de l’ambre étoit congénère de celui qu’on
retire des bitumes * c’eft-à-dire* de l’acide fucci-
nique.
Qûelques auteurs s’appuient de l’ odeur de
T ambre * pour affirmer fon origine animale ; mais
il ne faut pas confondre cette oçleur qui fe développe
par î’aêtion de l’air & de la lumière, & qui
augmente même par fon ancienneté* avec l’odeur
de la bile, dont les calculs font roncis &
en couches concentriques criftallifées. On pour-
roit aufli s’appuyer * pour défendre de quelque
manière cette hypothèfe* dé la remarque de M. Rome
de JLifle * (journ. de phyf. 1784* vol. I l )
qui dit que la fèche étoit appeüée par les Grecs
éladone , ou mofchyt/s félon Rondelet* & conclure
de là que l’ambre* ou au moins fa bafe
odorante , provient de la fèche digérée* mais il
eft bon d’obferver* i ° . que cet apperçu* d’après
tout ce qite je viens d’expofer* n’eft pas
vraifemblable $ 2 \ qu’il faut diftinguer l’odeur du
mufc & celle de l’ambre 5 3 e*. que la feche donne
une couleur tres-noire* qui* fans doute* noir-
ciroit tout les morceaux d’ambre gris j 4 ’. qu’au
Bréfil * dans les parages où l’on trouve l’ambre *
les fèches font très-rares * & qu’au contraire *
elles font très-abondantes dans d’autres parages fré-
* v 0 Rome de Lille , dans le catalogue du cabinet de M. Davila, avoit dit: te Que les prétendus becs d’oifeaux n’étoient
^ue des becs de fèche , animaux •qui fervent fouvent de proie à ceux qui produifent l’ambre gris ». Mais il n’a pas dit que
outes les taches fulTent des becs de fèche. --- Peut-être que le do&eur Swediaur, en fuivant M. de Lille, s’eft fait
1 uhon quand il dit que tous les morceaux d’ambre gris de grandeur conlîdérablè, tirés du ventre des baleines, ou trouves
la furface des eaux de la mer qu’il avoit examinés, étoient tachés, Sc dévoient ces taches aux becs de fèche._« U
eroxt bien difficile . 2c même impofllble de favoir à Londres, fî les morceaux étoient tirés du ventre des baleines, ou trouvés
a urrace de la mer* maû il rerteroit encore d décider fî ceux des côtes ÔC rivages l’étoient de même*- d’ailleurs, il va.
morceaux confiderables d’ambre fans taches, 8c d’une feaie ..couleur.
Chimie. Tome IL E t