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voyés aux galères, & le refte fut chaffé; fans doute |
pour avoir attiré à eux, par leur chant mélodieux x
quelques perles ou pierres précieufes 3 comme ils,
diîôréht en avoir la faculté. C e feroit perdre fon
temps que d’infifter fur de pareilles illufions , dont
on auroit honte de parler, fi ce ri’étoit pour faire
voir jufqu’où l’efprit humain porte fes égaremens ,
fa foiblefîe, ou plutôt fa fourberie & fa méchanceté.
11 n’a pas lai fie que de fortir une grande
quantité d’ouvrages des membres de cette fociété ;
mais ils ne font tiflus que de tromperies & dë
pièges : il feroit impofiible d’en tirer quelque précepte
utile pour l’avancement de la fcience.
Le dix-feptième fiècle continue à donner plus
d’amateurs, que de vrais philofophes > cependant
les premiers ne font pas toujours, à rejetter ; ils
font quelquefois , fans y penfer , des découvertes
utiles dont les philofophes peuvent faire un ufage
«avantageux. C ’eft dans ce rang que l’on peut
placer les Michel Mayer , les Crollius, Mylius,
Ôrtélius & Potérius : cependant il ne faut pas
les confondre ; il y a entr’eux des lignes de démarcation
très-fenfibles. Le premier , en employant
toutes fes facultés ., n’a rien dit de plus que çe qu’on
jfavoit avant lu i, & fes livres ne font recherchés
des curieux que par la feule rajfon qu’ils font rares.
Ofwalde C rollius , qui parut dans le même temps,
n’a donné qu’une introduction à la chimie ; il
fuivoit les principes de Paracelfe. On croit qu’il
ji’a point donné dans les égaremens des chimiftes
de fon temps, j il fe contenta d’être bon artifte ,
& c’eft bien afîez quand on peut atteindre à la
perfection. Ses travaux fe font bornés aux com-
binaifons des métaux 3 & peuvent fournir quelques
lumières aux vrais favans.
Jean-Daniel Milius écrivit davantage > malheu-
reufement fes ouvrages font une efpèce de pot-
pourri où tout eft mêlé & confondu 5 mais c’eft
au leCteur doué de difcernement à démêler ce qui
lui convient.
Ortélius eft moins compliqué .& plus ordonné $
il mérite l’ attention des artiftes-intelligens.
Michel Potérius étoit un homme glorieux , qui
fe Vantoit de ce qu’il ne favoit pas : il dit qu’il
poffédoit les plus grandes merveilles de la nature 5
qu’il étoit obligé de fe cacher, que tous les princes
le vouloient avoir. Mais on s’étonne qu’avec
tant de fecrets il n’ait rien fait pour lui, ni pour
fa famille.
Jean Béguin n’a donné qu’un abrégé fùccinCt de la’
chimie, maisquicontientquelquechofed’original. 11
avoir beaucoup voyagé à deflein de yoir les mines,
autant peut-être pour découvrir le principe de la
tnmfmutauonque pour connoître la manière de
les exploiter. C ’éft dans ce fens qu’il dit avoir vu
couler fur les parois de quelques mines, une iiqueur
©nétueufe qui pourroit bien fervir à la coagulation
d’une matière fuifureiife qui forme les métaux.
Jean d’Efpagnet, préfident à Bordeaux, vivoit
en meme temps que Béguin. 11 s’eft expliqué
çrës-clairement fur la fcience hermétique dans
a l c
{un ouvrage qui, quoique très-fuccinêt, annoncé
une main favante. Il eft intitulé : Arcanum philo-
fophU hermctic&. Olaüs Borrichius dit avoir connu
à Bordeaux fon fils-3 qui confervoit encore l’original
du petit ouvrage de .fon père. '
Jean-Baptifte Vanhelmontné à Bruxelles en
1577 , cultiva la fcience hermétique ; mais il
avoue que s’étant fpécialement appliqué à fûivre
les chimères de Paraçelfé, il n’en avoit point eu
le fecret : il prit le parti de la médecine, auquel
fes parens voulurent en vain lui faire fubftituer
celui de la robe. 11 mourut à Vilvorde, près
Bruxelles, le 30 décembre 1644,
Les anglois ont fourni, dans le même fiècle ,
moins d’artiftes que les autres nations 5 mais il
s’en trouve parmi eux dont la folidité récompenfe
le nombre.
Jean de Thornbùrg, évêque de Worchefter,
i s’y appliqua mais, i]r reconnut lui - même qu’il
n’étoic pas arrivé au but de la philofophie. C e pendant
, par amour pour, la fcience , il engagea
S le roi Jacques- à la favorifer , en difant que les
i vrais artiftes qui travailloient fecrètem.ent fe fe- ,
roient un plaifir de fe découvrir à lu i, & de
j rendre férvice à la patrie : le roi Jacques ne l’é-
! coûta point, & l’eût-il écouté, il eft douteux
que les alchimiftes. euffent été afîez imprudens
pour fe confier à un tel homme.
Northon s’y livra peu de temps aprèsThornburg 5
. on ne fait s’il réufut, on fait feulément qu’il a
Iécrit fur cette fcience avec afîez de détail.
Butler, gentilhomme irlandois, fut moins conna
pour philofophe hermétique que pour un voleur
de la poudre avec laquelle il opéroit la tranfmutation
; comme on l’accufa de faire de la faufîe
monnoie, il s’embarqua pour l’Efpagne , mais il
périt en route par un naufrage.
Eyrenée Philalèthe fut un homme très-obfcur
dans fon origine, fes moeurs, &c.,On croit cependant
qu’il naquit en Angleterre en 1612 : quelques
anglois penfent, au contraire y qu’il étoit François ,
parce que la plupart de fes ouvrages font écrits dans
h langue de ce pays. Mais ce .qui peut donner des
renfeignémens plus exaCts fur fa véritable patrie,
c’eftqueGeorges Starkey, apothicaire de l’ Amérique
angloife, de retour en Angleterre, a écrit plus
d’une fois qu’il avoit connu Philalèthe en Amérique
> qu’il venoit fouvent dans fon laboratoire,
où il faifoit quelquefois, la tranfmutation du
plomb en or pur 5 la perfécution qu’il éprouva le
fit changer fouvent de pays. On a cru qu’en paf-
fant en France ce fut lui qui donna la poudre
avec laquelle Helvétius fit la tranfmutation du
plomb en or. Le fameux Boyle a eu un commercé
de Jettres avec lui. 11 vécut toujours dans la médiocrité
, au milieu de richefîes inépuisables.
Mais comme l’art de la tranfmutation n'étoit pas
toléré chez dés particuliers, il ne faifoit d’or que
ce qu’exigeoit fon fimple néceflaire. 11 a fait plu-
fieurs ouvrages afîez connps, .enir’autres, Vin-
troitus aperçus, qüieft très-fameux parmi les alchia
l c a l c 43 .A ~ . ■__a a fini fa carrière, I telle qu’ait produit le dix-feptième fiècle. On y
WC^eft°a%cnrarifqn que les allemands vantent plu- trouvé par-tout les connoiflances les plus; étendues
fieürs faVans qui ont pris nai&ance chez eux , &
qui fe font plus ou moins occupés d’alchimie >
tels font, Glauber , Borrichius , Beccher, Kunclcel
& Stahl. - ; , u
Rodolphe Glauber joignit le talent d un artiite
célèbre a celui d’un écrivain très-fertile .5 on eft
étonné que dit milieu d’une pratique immenfe il
ait pu produire un nombre fi coiifidérabl| de
livres; Il vivoit au milieu du dix-feptième iiecie
à Amfterdam , où il avoit élevé une école publique
de chimie : il paroît qii’il croyoit a la ppfîibi-
lité & même à l’exsftence de la pierre philofophalei
Olaiis Borrichius, né dans fe Dannemarck en
1626 , diocèfe de Repend, fut diftingué par des
talens de tout genre3 cependant il fe livra tout
entier à la médecine , & les connoifîancés ^qu il
y acquit furent très-utilement pii fes en pratique
dans la pefte qui ravagea fon pays. - 11 fut miniftre
du roi de Dannemarck ^précepteur de fes encans,
profefleur dé philofophie, de poefie 3 de chimie
& de botanique, dans T académie de Copenhague.
& les plus profondes. Beccher a deviné une partie
des découvertes faites long-temps après lu i, fur
les gaz, la fermentation, la putréfaction, la com-
buftion , les acides,, les matières animales , &c.
Il connoifîoit fur-tout un grand nombre de préparations
métalliques 5 & quoique les alchimiites
rayent mis au rang dés adeptes à caiife de fes tra
vaux fur lés métaux, .on reeonnoît bientôt, en le
lifant avec attention, qu’il étoit plus fage & plus
inftruit qne la plupart de ces hommes. On peut
encore lire avec fruit la phyfique fouccrraine.
Jean Kunckel, vivant dans le même temps que
Beccher, ne le cède point en fcience & en réputation
aux artiftes précédens. S’il n’a pas eu le
fecret de la pierre philofophale, il a fait des découvertes
utiles qui en approchent j il a vu beaucoup
de phénomènes fur la diflbîution des métaux
, & il lès a bien décrits dans fon laboratoire
chimique 3 un des ouvrages qui contient le plus de
faits intéreflans, & le plus de découvertes, de tous
ceux qui ont paru dans le dix-feptième fiècle.C’eft
Il profitolt des «courtes vacances que tous ces à lui que nous devons la connoiffance du phofphore
emplois lui laiffoient pour voyager., & ajouter
quelques connoiflances nouvelles à celle qu il
•avoit.déjà î il parcourut les Pays-Bas , l’Angles
terre, la France & l’ Italie: fon goût pourJaphilofophie
l’empêcha de fe marier. 11 mourut, le 3
octobre 1690, de la pierre. On croit qu’iil n avoit
pas le fecret de la fcience hermétique ; mais il
avoit quelques opérations particulières qui lui valurent
une fortune plus grande que celle que Ion
peut obtenir par cette fcience : il en fit un bon
ufage j il fonda une bibliothèque & une penfion
pour feize étudians en médecine.
Jean-Joachim Beccher , né à Spire , quoi-
qu’ayant moins écrit que Glauber , eut autant de
réputation j il poffédoit parfaitement les principes
de la fcience hermétique, & étoit bon natura-
lifte. Sans chercher précisément les moyens de
faire de l’o r , il n’auroit pas été fâché de le
trouver. Il croyoit qu’il y avoit de l’or dans les
cailloux, les fables,, & .il en a quelquefois retiré
dans fes nombreux effais. Il propofa à pîufieurs
princes d’ Allemagne dé faire des recherches , fa
fortune ne lui permettant pas de les entreprendre
feulj mais les princes , qui aiment beaucoup
mieux l’or fait que l’or à faire, n^accueillireût
point fa demande. Beccher fut obligé de fe borner
a fon laboratoire , d’où il eft forti quelques expériences
utiles-: c’eft à fes travaux que nous fommes
rédevables de‘ pîufieurs bons ouvrages , & fur-
tout de fa Phyfique foucerr-aîne, dont il n’y a que
Ja première partie d’imprimée j la fécondé , fe
trouve à Prague dans le Cabinet du fouveraift. Le
favant S thaï, très-capable de produire par lui-
même , en à commenté la première partie.
La phyfiqueTouterraine de Beccher eft un des
plus beaux ouvrages de chimie & d’hiftoire natudont
Hellot a donné le premier la pré Darauon en
France.- ■
Quoique Georges Erneft S thaï foit plus près de
nos jours ,ilpaffe, avec raifon, pour le père delà
chimie, qui lui doit une grande partie de fon luftre.
La diffolution de l’or par le foie de foufre , eft
une dés opérations les plus curieufes, & qui peut
influer fur la fcience hermétique. Ses ouvrages ,
qui font très-Connus.,. & qui ont été bien étudiés ,
ont fait -avancer lès progrès de la chimie , à
laquelle fonhiftoire eft intitfiément liée : c’eft mal-
à-propos qu’on lé;rangeroit parmi les alchimiites.
Sa doêtrine du phlogiftique qui n’a pu être produite
que par un beau génie, a réfifté à plus de foixante
ans d’expériences & de découvertes.
Telle eft.l’efquifle de l’hiftoire de l’ alchimie &
des alchimiftes, depuis les peuples les plus anciens
jufqu’au commencement de notre fiècle.
On y voit par-tout des prétentions exagérées ,
un amour-propre intolérable, le jeu des plus vi-
i- les pallions, & nulle part une fuite de faits vrai-
femblables, ni les élemens d’aucune fcience. A
l’époque où cette hiftoire a été conduite ic i , les
alchimiftes ont femblé difparoître de la furface de
la terre ; on n’a plus entendu parler d’eux , à me-
fure que la chimie philosophique a difîipé les pref-
tiges & les erreurs de l’alchimie ; il exifte fans
doute encore, & il exiftera encore long-temps,
des hommes qui rechercheront la pierre philofophale
; mais ils feront toujours cachés dans l’ombre
j comme ils le font depuis plus de quatre-vingt
ans, & on ne pourra plus luivre lès traces de l’alchimie.
Pour préfenter ic i, fous un feul point de
vue , lès principaux traits de cette hiftoire, il a
,paru utile d’en offrir une notice chronologique
extraite de l’ouvrage de Lenglet Dufrenoy.