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par la diftolution fucceffive de livres de fels dans
Tes quantités d’eau indiquées, il eft toujours un
infiniment fort greffier, puifqu’il n’indique que
des centièmes , tandis qu’un bon aréomètre doit
indiquer exactement jufqu’à des dix millièmes.
Si l’ aréomètre de M. Baumé peut à peine donner
quelques réfultats plus ou moins éloignés de la vérité
, on fent qu’il doit être bien plus éloigné' encore
de pouvoir fervir pour toutes les diffolutions
falines , comme fon auteur le prétend, & comme
l’annonce le nom qu’il lui a donné de pèfe-liqueur
pour les Tels. Il ell vraifemblable que M . Baumé
ignoroit que chaque fel a pour l’ eau une affinité
particulière, que quand ils font fecs, ils folidifient
une quantité plus ou moins grande de ce liquide
en s’y diffolvant, & forment avec lui une com-
polîtion dont les molécules hétérogènes font plus
rapprochés que le réfultat des pefanteurs fpécifi-
ques des deux corps, fuppofés unis fans changement
intérieur.
M. Baumé a auffi propofé fon aréomètre , pour
connoître la pefanteur fpécifique des acides. 11 a
pris pour premier terme l’eau dillilléequ’il nomme o,
& qu’il place au haut du tube ; pour l’autre terme,
c’ellT’acidefulfuriquele plus concentré, & l’efpace
contenu entre ces deux termes éll divifé en 70
parties égales. L’ufage de cet aréomètre appliqué
aux acides , eft fujet aux mêmes inconvéniens que
pour l’alcool & les fels ; mais fes erreurs font
exprimées d’une manière inverfe de celle des
Tels neutres; car ici.il indique toujours plus d’acide
qu’il n’y en a réellement, tandis qu’il annonce
conflamment dans l’autre cas moins de fel
que l’eau n’en contient, puifque l’eau en fe combinant
à l’acide , perd du calorique & diminue de
volume, & que le feT^hforbe ce principe &
augmente de volume. Efè-Là il ne faut pas. croire
qu’un acide qui donnera 3 y à l’aréomètre, con-
t endra la moitié de l’acide de celui qui donne
70 degrés. Quelques effais fur cet objet mettront
cette affertioruhors de doute ; parties égales d’eau
& d’acide fulfurique à 70 degrés qui, s’ils.s’étoient
combinés fans changement intérieur , auroient dû
donner 35 degrés , en ont donné. 41. L’aréomètre
eft donc ici en erreur de fix degrés : erreur très-
grande, puifque chaque, degré exprime environ
onze grains & demi. Il eft vrai que cette inexactitude
diminue à mefure que la proportion d’acide
diminue elle-même.
L’application de cet inftrument à la connoif-
fance du poids des acides eft infiniment plus difficile
que pour les fels & l’alcool : car il eft
impoffible d’obtenir tous ces corps dans l’état de
pureté & entièrement privés d’eau, pour les combiner
à différentes quantités de ce liquide & former
une table, à moins q.ue l’on Te contentât
d’employer pour cela les acides les plus purs &
les plus concentrés; mais l’on ne connoîtroit par-là
que le rapport d'une combinaifon intime d'eau &
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d'acide réel avec l’eau, qu’on autoit ajoutée, &
non pas la véritable quantité d’acide.
Il en feroit d’ailleurs de cet inftrument pour les
acides, comme à l’égard des fels , il ne pourroit
fervir que pour un feu.l acide , car tel acide
ne fe conduit pas avec l’eau comme tel autre,
& le réfultat de leur combinaifon ne garde point
entre fes molécules la même quantité refpe&ive
de calorique.
L’aréomètre de M. Baumé pour les acides, eft
donc abfolument à rejetter de toute opération
qui demande de l’exaélitude dans les réfultats.
Dans ces derniers temps M. Briffon a propofé
un aréomètre, à l’aide duquel on peut fans calcul,
par la feule immerfîon , connoître le rapport de
pefanteur de toutes fortes de liquides à celle de
l’eau diftillée.
Il eft fondé fur ce principe, qu’un corps plongé
dans des liqueurs de différentes denfités, en mefure
des volumes -qui font - en raifon inverfe de
leur pefanteur fpécifique.
Ainfi pour conftruire un aréomètre qui, par la
feule immerfîon, fît connoître le rapport de den-
fité d’un liquide quelconque à celle de l’eau , il a
déterminé exactement le rapport du volume de la
partie plongée dans l’eau , au volume de la partie
plongée dans ce liquide.
, Comme un aréomètre, dont le poids ne change
point, s’enfonce dans une liqueur moins; denfe
plus que dans une liqueur plus denfe, & que l’excédent
eft conflamment en raifon inverfe de la
denfîté de ces liqueurs, un aréomètre qu’on charge
fucceffivement. de différens poids, s’enfonce davantage
dans la même liqueur, à mefure qu’il eft
plus chargé ; & la quantité dont il s’enfonce dans
ce dernier cas, eft toujours proportionnelle au
poids dont il eft chargé.Si donc, dit M. Briffon,
on plonge dans l’eau un aréomètre qui pèfe par
exemple, d’abord^ gros, &, enfuite 10 gros,
le volume de la partie plongée dans le premier cas,
fera au volume de la partie plongée dans le fécond,
comme 9 eft à 10. Si enfuite Taréomètre réduit à
fon premier poids qu’il appelle poids primitif, fa-
voir 9 gros, on le plonge dans une liqueur moins
denfe que l’eau, & qu’il s’y enfonce jufqu’au point
où il étoit dans^eau, lorsqu’il pefoit 10 gros, il
eft clair que le volume de cette liqueur mefuré par
; l’aréomètre, fera au volume de l’eau mêfuré par
le même inftrument, comme 10 eft à 9 ; & puifque
les denfités font en raifon inverfe des volumes,
on peut conclure avec certitude que le poids de
cette liqueur eft à celle de l ’eau, comme 9 eft à 10.
Ce raifonnement inconteftable fert de bafe à Monsieur
Briffon, pour graduer fon aréomètre qui
donne par l’immerfion fimple, & fans exiger de
calcul, le rapport de pefanteur fpécifique des différentes
liqueurs à celle de l’eau dillillée.
En ajoutant donc au poids primitif de l’areo-
mètre, ou en retranchant de.ce poids dans un rapport
convenable pour chaque degré avec ce poids
primitif j
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primitif, & en plongeant l’aréomètre ainfi charge
ou déchargé dans l’eau diftillée, il en détermine
exactement chaque degré. C ’eft de ces quantités
convenables pour chaque degré qu’il a forme des
tables qui peuvent fervir à graduer des aréomètres
de cette nature.- / ^
Voici la règle qu’il fuit pour la confeélton de ces
tables. ' ' '
Le poids de l’aréomètre étant exactement connu.
Soit a le poids primitif de l’aréomètre ou la
denfîté de l’eau.
Soit b 3 le volume d’eau qu’il déplace.
Soit x , le volume qu’il déplâceroit de plus que
le volume b , dans un fluide dont la denfîté feroit
à celle de l’eau : : n : a3 n étant plus petit que a.
Le poids abfoludu nouveau fluide déplacé étant
égal au poids abfolu de l’aréomètre, c’eft-à-dire,
au poids de l’eau qu'il déplace, le volume déplacé
dans le fluide dont la denfîté eft n 3 fera
b -f- a; par la fuppofition. Donc la denfîté étant n ,
fon poids abfolu ell (b x ) \ n.
Par la même raifon , le poids abfolu de l’aréomètre
ou du volume d’eau qu’il déplace, eff £ X a >
il faut donc que (b -+- x ) , X n==xt b X a>ou que ^ n
4- nx ==» ba3 d’où l'on tire x. = ba ~ que l'on
peut changer en x ==■ b X
Cettè règle fait voir que la quantité dont l’aréomètre
doit plonger de plus dans la liqueur , eft
une portion du volume qu’il déplace dans l’eau ,
exprimée par une fraélion qui a pour numérateur
la différence des denfités de l’eau & du fluide dont
il s’agit, & poiy: dénominateur, la denfîté de ce
dernier.
n étant fuppofé plus petit que a3 l’aréomètre
alors y plongeroit plus que dans l’eau. Si étoit
plus grand que a , il eft évident à l’infpeétion de
la valeur de x =s= b X 5 que la valeur de x feroit
négative, ce qui doit être en effet, puifqu’a-
lors l’aréomètre doit moins plonger que dans l’eau.
Toute la différence qu’il y a eft,donc, qu’au lieu
Rajouter au volume déplacé dans l’eau , ou ce
qui eft la même chofe, au poids primitif de l’aréomètre,
il faut au contraire en retrancher ; mais"
la quantité que Ton doit retrancher fe détermine
toujours par la mêipe règle.
Ainfi la quantité qu’il faut ajouter au poids
primitif de l’aréomètre, ou qu’il en faut retrancher,
eft une fra&ion de ce poids, qui a pour
dénominateur la denfîté que doit indiquer l’aréomètre
ou le degré que Ton cherche ; ôc pour
numérateur la différence de cette denfîté à la
denfîté de l’eau.
En fuppofant donc, comme le fait M. Briffon
que la denfîté de Teau-eft égale à 1000,
le dénominateur de cette fraélion eft le degré
que Ton cherche, & le numérateur eft ce qui
manque^ au dénominateur pour faire 1000 , ou
Chimieu T »me I I .
ARE 561
l'excès du dénominateur fur 1000, & quand
le dénominateur eft moindre que 1000, qui eft
le cas où n eft plus petit qùe a , la quantité ex-,
primée par la fraélion eft additive ; mais lorfque
le dénominateur excède 1000, qui eft le cas
où n eft plus grand que <2, cette quantité eft
fouftraétive. On prendra donc un aréomètre de
verre A B , (fig- 7 , cîaf. 2 , ) convenablement
lefté de mercure e n / , & dont la tige fera fuffi-
famment longue pour contenir le nombre de degrés
que Ton veut y tracer. On introduira dans
la tige le petit rouleau de papier qui doit porter
cette graduaation , Tinllrument fera enfuite exactement
pefé , on notera fon poids, qui eft celui
que M. Briffon appelle poids primitif. L’aréamètre
ainfi difppfé doit être plongé dans de l’eau diftillée,
&lepointC , où il s’arrêtera, fera marqué 1000 ;
les autres degrés fe forment en ajoutant ou en
retranchant pour chacun des quantités indiquées
par les tablés..
Bien entendu, qu’ il faut, comme en avertit M.
Briffon, que la température de Teau qui fert d’étalon
à Tinllrument, relie toujours la même pendant
fa conftruétion, feii penfe que c’eft le 14 X o
de l’échelle de Réaumur qui eft le plus convenable
, comme étant celui qu’on peut avoir la
plus grande partie de Tannée.
Il fuffira, dit M. Briffon, de chercher, par
l’expérience, les termes de 10 en 10, & de
divifer enfuite ces efpaces en parties égales,
qui feront autant de degrés. Cette méthode eft ,
comme Tobferve l’auteur lui-même, ün peu dé-
fe&ueufe, mais elle ne peut pas caufer une grande
erreur, & peut être négligée.
Comme il n’eft pas poffible qtse le même aréomètre
puiffe fervir pour toutes les liqueurs, il
faut en conftruire , l’un qui foit deftiné à pefer
les fluides qui font plus denfes que l’eau, & ,
l’autre pour pefer ceux qui font plus légers. I.es.
premiers, (fig. 7 , ) feront affez Jeftés pour s’enfoncer
dans Teau à quelques lignes de l’extrémité
fupérieure de leur tige, & fur cet endroit,
on marquera le nombre iooq. La communication
de la greffe boule à la petite, doit refter
ouverte pour ajouter à fon poids-primitif. Les
féconds (figure 7 bis .), doivent enfoncer dans
Teau à quelques lignes feulement au-deffus de
la ,boule, on marquera là 1000; dans ce cas, u
communication de la greffe boule avec la petite
peut être fermée, car on n’a rien ^.ajouter
au poids primitif, on n’a qu’à en retrancher.
- M. Briffon a donné à fa table beaucoup d’étendue
, afin qu’elle pût fervir pour toutes les
liqueurs, depuis les plus lourdes jufqu’aux plus
légères ; & pour la rendre d'un ufage plus
commode, il a réduit les fra&ioHS à leur plus
fimple expreffion.
Les degrés de l ’échelle de Taréomètre de
M. Briffon ne font point égaux comme ceux des
I aréomètres à échelles ; ils font d’autant étendu*
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