
peut facilement rendre raifon de toutes les propriétés
qu'on lui connoît. Je vais prefenter les
idées que je me fuis faites fur fa formation ».
» V. Les expériences des numéros I 8c III
prouvent que l'alcool contient de l’huile, qui fans
doute eft beaucoup plus fluide que je ne 1 ai reti-
' rée , par les raifons qu'on va voir. Cette huile eft
combinée avec du fucre , de l'hydrogène , 8c une
certaine quantité d'eau. Lorfqu'on mêle à l'alcool
un acide dont l’ oxigène peut fe combiner avec
une portion de l'hydrogène & de l'huile , les principes
qui formoient l'alcool fe trouvent defunis ;
la plus grande partie dé l'hydrogène fe volatilife
avec la portion la plus fubtile de l'huile , 8c entraîne
dans cette combinaifon une petite portion
de l’acide qu'on emploie; la portion la moins tenue
de l'huile 8c le lucre relient dans la cornue à moitié
brûlés par l'oxigène enlevé à l'acide ».
■ » L'éther eft donc, d'après cette manière de
voir, une huile qui s'eft féparée de l'alcool,
qui eft combinée avec un excès d'hydrogène &
avec une très-petite quantité de l’acide qui a fervi
à fa formation ».
» Cette théorie me paroir expliquer d'une manière
fatisfaifante, ce qu’on obferve lorfqu’on fait
l'éther par le moyen de différens acides. Il eft
d'abord manifefte que tous perdent une partie
d’oxigène ; que l'acide muriatique doit être dans-
l'état d'acide muriatique oxigéné, 8c le vinaigre
dans celui d’ acide acétique ; état dans lequel il^ a
une plus grande quantité d’oxigène, comme je l'ai
fait voir ( Mém. de l'Acad. iy8j'). Si l’acide ne
cède pas facilement fon oxigène, il faut de la cha- .
leur; c’ell le cas de l’acide fulfurique : alors, fi'
l’on pouffe la diftillation après que l’éther s’eft dégagé,
il paflè une portion d’huile ; mais une partie
de cette huile devenue épaiffe, 8c parce que la
partie la plus fluide s’en eft dégagée, & parce que
l'acide a agi fur elle, refie dans la cornue avec le
fucre, qui eft réduit lui-même dans un état prèfque
«harboneux. C e mélange donne au rélidu une apparence
prefque bitumineufe ».
„ Si l'on fe fert d’acide nitreux, qui contient
beaucoup d'oxigène, 8c qui le cède facilement,
l’opération peut fe faire fans feu. La réparation de'
L’éther eft rapide; & lorfqu’on diftille la liqueur,
après en avoir féparé l'éther qui s'eft formé, l'huile
épaiffe 8c le fucre fe trouvent entièrement dénaturés
; l’un & l'autre probablement font changés
en acide oxalique & en acide carbonique. Si l’on
traite l’éther qu’on vient de former avec de nouvel
acide nitreux , il fe décompofe de nouveau ,
& l’on en ret!îre de l'huile »,
» Dans mes expériences avec l’acide muriatique
oxigèné , il ne s’eft point féparé d’éther ,
parce que, comme la chaleur ne déterminoit pas
la partie la plus fluide.à fe dégager, elle fubirfoit
l’action fuccefftve du gaz qui étoit abforbé; mais
Schéele a fait de l’éther muriatique en mêlant de
l’acide muriatique , dé l’oxide-manganèfe 8c de
l’alcool, & en diftillant ce mélange ».
» En confidérant que l’acide muriatique n’a
point d’afiion fur l’alcool lorfqu’ il n’eft pas combiné
avec l’oxigène, il étoit naturel de penfer
que l’oxigène fe combinoit pour former l’éther.
C ’eft une opinion qu’à eue M. Fourcroy, dans
fes élémens de chimie , 8c qui s’étoit aufft prefentee
à moi, (mém. de Vacad. 1781, pag. éoi .) ; mais
je. penfois alors qu’il entroit réellement] dans la
compofition de l’éther, au lieu qu’il me paroît
prouvé, par les obfervations précédentes, que
c’eft en fe combinant avec une portion du gaz de
l’hydrogène 8c de l’huile, qu’il agit 8c qu’il produit
la réparation de l’éther ». |
» Cette combinaifon, de l’oxigène avec l’hydrogène
de l’alcool 8c avec celui de l’ éther,
n’eft point douteufe ; .car l’on a vu que l’un 8c
l’autre, traités avec l’acide muriatique-oxigèné ,
fe changeoient pour la plus grande partie en eau.
L’oxigène agit donc, dans cette circonftance, de
la même manière que dans l’expérience de M. Là-,
„voilier, fi x e .n’ eft qu’il ne fe produit point de
lumière fenfible ; 8c quoique la chaleur qui fe dégage
foit affez confidérable, comme l’ indique la
fonte de la glace, elle I’gft cependant moins que
fi l’oxigène étoit dans l’état élaftique. Ç ’eft une
véritable „combffftion , dont le principal réfultat
eft de l’ eau, 8c qui fe fait au milieu d'un fluide
qui-, étant bon conduéteur de la chaleur, la dit—
tribue aufli-tôt qu’elle eft dégagée, de forte qu’il
ne lui permet pas de s'accumuler dans quelques
parties, comme il arrive dans la combultion qui
le fait dans l’ait ».
L’aétion des trois acides minéraux les mieux
connus fur l’alcool, renfermeprefquetout ce qu’on
fait d’important fur les combinaifons de. ce produit
avec les acides en général. La plupart des autres
ont ou une aétion très-foible fur l’alcool,
ou au moins, elle n’a encore été que peu examinée,;
nous allons donner ici l’état des connoif-
fances chimiques fur ces combinaifons.
L’acide fluorique ne paroît faire éprouver aucune
efpèce d’altération à l’alcool.
L’acide boracique-s’y diffout bien; cette diffo-
lution brûle avec une flamme verte, très-belle,
8c l’on avoit penfé que cette couleur , communiquée
à la flamme de l’alcool, étoit une preuve
de la préfence du cuivre dans l’acide boracique,
parce que les fels cuivreux .lui donnent la même
propriété; cette apparence ne fuffit point pour
admettre le cuivre dans l’alcool boracique, 8c aucun
chimifte ne croit à l’exiftence de ce métal dans
cet acide.
L’acide carbonique, dans l’état de gaz, eft promp-
tement-8c facilement abforbé par l’alcool, qui en
prend plus que fon volume : il n’y a d’ailleurs aucune
autre aétion intime, aucun changement de
combinaifon 8c de proportion dans les principes
entre ces deux corps.
Les acides métalliques arfénique , tunftique &
molybdique , ne font ni diffolubles , ni fenfible-
ment altérables par F alcool. Il paroît, -cependant ,
qu’en tenant quelque temps en contact ces acides
avec l’alcool 3 celui-ci le,ur enlève pqu-a-peu un,e,
portion de leur oxigène ; qu’ il eft capable de leur
oter leur caractère acide 3 & de les rapprocher
de l’état métallique. I
L’acide iuccinique eft en partie diiioluble clans
l’alcool > mais fa diffolubilité eft très-foible.
", Parmi les acides végétaux , il n’y en a que tres-
peu qui ayent une aétion marquée fur 1 alcool.
L ’acide tartareux ne lui fait éprouver aucune altération,
quoiqu’il y foit entièrement diffqlubje-,
lorfqu’il eft pur. MM. les académiciens de Dijon
ont fait plufieurs expériences fur cette combinaifon
: voici comme il s’expriment eux-mêmes
dans leurs élément de chimie -, tome III , page 3
» Les principes de l’acide tartareux ne font
point unis affez intimement pour pouvoir agir en-
ferable fur l’ alcool , de manière à former l’éther.
M. Berthollet a diftille l’huile de l’acide tartareux
& l’alcool 5 ils n’ont point agi l’un fur l’autre
3 ce qui ne doit point furprendre , vu que 3
dans l’état huileux 3 l’acide du tartre eft dépouillé
de fa partie la plus aétive. Nous y avons fubfti-
tué l’acide obtenu fuivant le procédé de M. Monnet
3 c’eft-à-dire 3 féparé du tartrite de fer , p^r
l’acide fulfurique } il eft plus fort ,..puifqiV’il précipite
la diffolution d’ argent i il s’eft mêlé paifi-
blement avec l’alcool 3 & la diftillation n’a donné
qu’une liqueur qui contenoit l’alcool; & l’acide
tartareux fîmplement mélangés & non combinés.
.Nous avons, feulement obfervé que cette liqueur
ne précipitoit plus la diffolution d’argent, ce qui
femblereit ètred’effet de l’aêliop de, l’alcool fur la
portion d’acide minéral ( ou d’acide fulfureux ) ,.
que nous avons dit exifter dans l’acide tartareux,
obtenu fuivant ce nouveau procédé
• sa Nous avons fait.bouillir quatre onces de zinc
avec une livre de crême:de tartre, la liqueur refroidie,
a laiffé fur le filtre du zinc &£ de. la crème
de tartre, qui ont fait long-temps effervefcence :
après plufieurs jours, nous les avons fait bouillir ,
les produits , des différentes ébullitions ont été
évaporés jufqu’ à confiftance de bouillie} pour
lors nous y avons ajouté cinq onces fept gros
d’alcool} ce mélange étant.refté dans une étuve
pendant douze jours, la liqueur s’eft colorée en
jaune. Nous avons enfuite procédé à la diftillation
: l’alcool s’ eft élevé avec le zinc} l’alcali a
précipité ce métal, & l’alcool, en brûlant, a fait
voir des petites étincelles. En continuant la diftillation,
la liqueur eft devenue laiteufe, ce n’é-
toit plus qu’un alcool foible },iln eft refté dans la cornue
qu’une tache d’un brun rougeâtre, d’environ
quinze lignes de diamètre} nous l’avons enlevée
au moyen de l’eaudiftillée , qui, par l’évaporation,
a donné un fel en aiguilles , avec quelques gouttes
d’une liqueur brune un peu épaiffe & luifante}
cette liqueur mêlée avec la diffolution de. mercure
, a fourni un précipité blanc, qui a bientôt
pris une couleur jaune ». . . ' , . ; ;, ; . .,
„ il eft important de remarquer que, pendant
la diftillation, il s’ eft dégagé une très - grande
quantité d’air qui éteignoit la flamme d’une bou-
r gie ,
"ÏÏ? Ces opérations n’ayant point donné d’éther,
nous avons effayé de difpofer l’acide à cette combinaifon
, de la même manière que l'on rend le
vinaigre, capable d’agir fur l’alcool, c’ eft-à dire,
en le concentrant par la diftillation d’un des fels
métalliques; nous-ayons, en conféquence, dif-
tillé quatre onces 8c demis de tarcre de Vénus ( tartrite
dé cuivre ) ; il s’eft d'abord élevé des vapeurs
invifibles très - élaftiques, qui éteignoient
la. bougie , enfuite il a paffé de l’huile jaune;
peu après une huile brune 8c beaucoup de vapeurs
blanches très-épaiffes qui éteignoient toujours
la flamme. Les, vapeurs ont diminué, elles
étoient moins chargées, le ballon s eft éclairci,
8c l’air qui en fortoit étoit inflammable ; il eft
refté dans la cornue une matière noire affez volu-
mineufe , pefant deux onces cinq gros 8c demi ;
il y avoir dans le ballon cinq gros d’huile em-
pyreumatique, ainfi il y a eu une once lin gros
& demi de perte : l’huile de l’acide tartareux n’a
point agi fur la diffolution d'argent; mais elle a
précipité en blanc le mercure, 8c ce. précipité
a jauni fur-lé-champ ».
1 » Deux onces de tartre de zinc dillillées ont
préfèntë ces mêmes phénomènes, c’ eft-à -d ire ,
qu’ils ont donné de l‘air fixe ( acide carbonique ) ,
de l’air inflammable ,8c de l’huile ; il eft refté
dans la cornue une once douze grains de matière
çh.arboneufe très-bourfpuffléë, l’huile a de même
précipité la diffolution de mercure, & n’a point
troublé la diffolution d’ argent ».
» Le peii de fuccè's' de ces tentatives ne laiffe
guère d'efpérances de parvenir à la combinaifon
de l’éther tartareux ; 8c en fuppofant que le tartre
ne contienne'réellement d’autre, principe acide
que l’ air, on ns doit pas en être étonné, puifque
nous avons reconnu que l’alcool avoit très-peu
d’affinité avec ce fluide ; mais nous avons effayé de
recompôfer le tartre' ,.en favorifant par toute forte
de moyens, dans l’appareil pneumatique, l'union
dé fon hüile avec de nouvel air, foit fixe (acide
i carbonique.) , foit inflammable (hydrogène) ,
même avec l’intermède de l’alcali criftallifé ; toutes
ces expériences ont été infructueufes, ce qui nous
confirme de pl,us en plus dans, l’opinion que l’air
n’ entre dans la compofition du tartre , qu’au moyen
dë quelque modification ou appropriation analogue
à celle du vinaigre,; qu’il n’y a de différence
qn én ce que l’union eft beaucoup plus facile ;
8c'il,ne.faut' pas'.chercher d’autre raifon de la
difficulté, de produire l’ éther, tartareux, que la
promptitude avec laquelle le tartre fe décompofe
par la plus légère aétion du feu ».