
provinces de Poitou, Saintonge , & pays d’Aunis.
Après s’être applaudi d’un avantage remporté
fur ies garnifons des villes voifines,qui s’étoient
raffemblées pour venir fecourir Arras , & avoir
remarqué que de fix cents prifonniers faits en cette
occafion , les uns avoient été pendus, les autres
avoient eu la tête coupée , il ajoute :
« Ceux dudit Arras refioient affemblés bien
vingt-deux ou vingt-trois pour aller en ambaf-
37 fade devers mademoifelle de Bourgogne ; ils ont
» été pris , & les inftruâions qi/ils portoient, & |
») ont eu les têtes tranchées, car ils m’avaient fait \
37 une fois le ferment. Il y en avoit un entre les |
» antres, maître Oudard de Bnffy , à qui j’avois |
53 donné une feigneurie en parlement , & afin
53 qu’on connût bien fa tê te , je l’ai fait atourner
53 d’un beau chapperon fourré, & eft fur le mar-
53 ché de Hefdin , là ou il préfide. »
Quand Oudard auroit mérité fon fort , cette
manière légère & badine de parler de l’infulte
qu’il lui faifoit après fa mort, feroit toujours une
grande indécence dans un ro i, qui doit punir à
regret quand la juftice l’exige , mais qui ne doit
jamais fe permettre d’infuher.
Mais quel ferment avoient pu lui prêter les
h&bitans d’Arras , fuiets de Marie de Bourgogne ?
c’eft te qui aurok befotn d’un peu plus d’explication
pour être cru , & ce qui eft fort fufpea fous
la plume de Louis X I ; & les garnifons des villes
voifines , Lille , D ou ay , Orchies, Valenciennes ,
toutes villes fujettes de Marie de Bourgogne ,
avoient-elles aufli prêté ferment à Louis X I , pour
lui donner le droit fi cher à fon coeur, de faire
pendre ou décapiter fix cents prifonniers ?
Cette lettre eft rapportée par Brantôme, qurdef-
cendoit par femmes de ce Brefîiure à qui elle eft
adreffée , & qui l’avoit trouvée avec plufieurs
autres lettres du même r o i , dans fes titres de
famille.
Brantôme, approbateur & admirateur univerfel
du machiaveüifme , qui trouve toujours tant d’ef-
prit dans la fourberie, & tant de force & de
grandeur dans la violence, s’exprime fur cette
aélioii d’une manière équivoque, qui du moins ne
laifte pas connoître s’il l’approuve où s’il la blâme
, on entrevoit feulement qu’il trouve l'atrocité
du chaperon affez plaifante ; voici fes termes:
« Quelle plaifanterie, notez , de faire ainfi en-
53 capuchonnsr ce pauvre diable d’un chaperon
5» fourré à la mode d’un préfident qui préfide ! 33
OUDIN. ( Hiß. litt, mod.') Plufieurs favans ont
feit connoître ce nom :
i° . Cêfar Oudin, élevé à la cour du roi de
Navarre ( Henri IV ) ; nommé par lui , en 16 9 7 ,
• inttrprète des langues étrangères, auteur de grammaires
& de diàionnaires pour les langues italienne
& efpagnole : mort en 1615*.
2°. Antoine , fils de C éfar, &fo n fucceffeur dans
fa place d’interprète des langues étrangères, fut'
choifi pour enfeigner l’italien à Louis X IV. 1' eft
auteur du Tréjor des deux langues efpagnole &
françoife , & de quelques autres livres concernant
ces deux langues & la langue italienne ; mort en
16 53. ,
30. Cafimir Oudin-, d’abord prémontré, enfuite
pro.teftant & fous-bibliothécaire de Puniverfité de
Leyde , où il s’étoit retiré en 1690 , & où il
mourut en 17 17 . Il étoit né à Mézières fur la
M eu fe ,;en 16 3 $ , & étoit entré chez les prémontrés
en 1656. Il étoit à l’abbaye de Bucilly
en Champagne , lorfque Louis X IV y paffa > le
premier mars 1680. Le roi étant entré dans la
falle de cette abbaye , au milieu d’un temps fombre
& couvert, le foleil parut tout-à-coup, & fes
premiers rayons tombèrent fur un portrait du roi
qui étoit dans cette falle , ce qj.fi donna lieu à
Oudin défaire deux vers latins, où il repréfente
l’ancien foleil adorant le nouveau , & le premier
jour de mars contemplant le Mars des François :
Salem vere novum nunc fo l antiquus adorat
E t Martem primuin M ania prima dies :
Vers qui font à peu près dans le goût de ceh$
de Virgile r
Divifum imperium cum Jove Cefar Jiabet.
Cafimir Oudin s’appliqua principalement à l’étudè
de Thiftoire ecclèfiaftique ; on a de lui un fup-
plément des auteurs eccléfiaftiques omis par Bel-
larmin , & quelques autres ouvrages du même
genre.
4 '. François O u d in jéfuite , favant & excellent
littérateur. Il eft du petit- nombre de ceux à qui les
janféniftes mêmes ont pardonné d’être jéfuires. Oit
a de lui des poéfies latines eftimées. Il fe glorifioit
d’être difciple de Santeuil. Il avoit entrepris une traduction
de l’Iliade en vers latins. En voici le début $
lliacas die-, Mufa , acies, iramqueferocis
Æacida , feevos Danois funéjla labores
E t luclus quat mille tulit, multafque Jub oTcut»
Ingentes heroum animas demifit acerbo
Antl diem , Letbo | crudeli | forte peremptt»
Dardaniâ pradam canibus projeçit arenâ
Alitibujque : fevera Jovis fie fata ferebant ;
Prcecipitipoftquam ircejjit difcoidta motu y
E t regem magne Atriden difiraxit Achille•
Quïs Deus hune illis injecit mente furorem ?
Mutuaque infejlis jaclantes jurgiaverbis t
ImpuLi hofiili panier contende e rixâ.?
. Magnanimi Jovis & Latonce filius■ Atram
Ille luem diro per achaïca cajlra tumultu
Sparferat, & fato populos fiernebat Imquo»
Ces vers ne font pas fans beauté, mais ils n’eçja[
pai la verve d’Homère, ni celle de Santeuil,
On en trouvera davantage dans ces vers d’un
difciple du père Oudin, M. Bauyn, depuis évêque
d’Uzès ; ils font tirés d’un poëme fur la paix ,
compofé, en 1 7 1 4 , par ce M. Bauyn , alors écolier
de rhétorique ; il nous fembje .qu’il y peint en
maître les héros du fiècle précédant.
Preecipiti Condaüs equo fublimis in hofles
Fulminât & longo fidens Turennius ufu :
Soevi terror adhuc , tu Luxemburge , Bâta mû, '
Promis infinfas acics. Quot puxlïa mifeet
Vindocinus , viclo tot collocat hofie trophaa.
Egregioque novum capiti decus aggerat ; illis
Proximus , haud famâ ille minor , bcllique fecuudus
X-audihus , hoftdis fati mora gallicus Hedor
Cernitur & multo rutilât fpedandus honore.
■Cui mixtas heredis interit laurus ohvas ,
Æternum famet monument um. lias interaperto
Qiialis übi ccelo radiât fo l altus & afira
JLuce minora premit, Lodoix fix ardu us extat.
Le fécond volume des mémoires hiftoriques &
philologiques de M. Michault.., eft un monument
d ’eftime & de recpnnoiflance que M. Michault
élève à la mémoire du père Oudin, fon ami, l’ami
de tous les gens de lettres , digne par fes travaux
par fes moeurs de leur être propofé pour modèle.
Le père Oudin avoit rendu le même hommage
à la mémoire dé M. le préfident Bouhier,
-ce magiftrat illuftre , dont les taie ns, les lumières
& les vertus méritoienten effet un ami, un pa-
négyriitc tel que le père Oudin. Ces nobles témoignages
d’eftime & de tendreffe portés au-delà du
■ tombeau , s’ils étoient moins rares parmi les
-favans, feroient la gloire de la littérature.
Le père Oudin étoit plus connu encore par fon
.érudition , tant facrée que profane, qu’il ne l’étoit
par fa littérature agréable. Il a beaucoup travaillé
fur l’écriture fainte. On a de ,lu i une hiftoiie |
dogmatique des conciles en latin , des étymologies
celtiques, des vies de plufieurs favans ,
inférées dans les mémoires du père Nicéron. Il
a continué la bibliothèque des écrivains jéfuires,
commencée par Ribadeneira, & déjà continuée
avant lui par quelques autres jéfuires.
Il étoit n é , en 1673 , à Vignory en Champagne,
& étoit entré chez les jéfuites en 16 91.
Il s’étoit fixé à Dijon , ville fi célèbre par les
•gens de lettres qu’elle a ou produits ou nourris. Il
y eft mort en 17 52.
O U D IN E T , ( M a r c - A n t o i n e ) ( Hiß . litt,
mod. ) de l’académie des inferiptions & i.elles-
lettres , naquit à Reims, en 1643. ^ fut avocat
, puis profeffeur en droit dans l’univeifité de
Reims ; il finit par être commis à la garde des
médailles du cabinet du R o i , après M. Rainffant,
&UÜ fe noya le 7 juin 16 8 9 , dans la pièce des
Suiffes à Verfailles. Ce M. Rainffant & M. Oud. net
.étoient parens.,.& la vocation pour les médailles,
dit M. de Bbze , leur étoit venue en même temps
& par le même bafard.
« Un fermier de M. Oudinet le père trouva en
>3 labourant la terre , une grande urne pleine de
33 médailles- de bronze. Ce fut une merveilleufe
33 occupation pour ces deux jeunes gens: c’étoit
>3 à qui en déchiffrerait mieux les légendes , à
33 qui en expliqueroit le mieux les types : tout
» leur étoit nouveau , & tout par conféquent
33 piquoit leur curiofité. »
M.. Oudinet entra dans l’académie en 17 0 1. On
n’a de lui pour tous ouvrages que trois differ-
tations dans le recueil de l’académie j mais il a
été très-utile au cabinet des médailles. Mort le 22
Janvier 17 12 .
O U E
f OUEN , ( S a i n t ) AUDOENUS , ( Hiß. eccl.)
évêque de Rouen, é?oit référendaire de Dagobert
I . «Judicaél, ro i, ou duc, ou comte des Bretons ,
étant venu à Saint Denis , faire des foumiffions
à Dagobert & reconPoître fa fouverainèté , Dagobert
voulut le retenir à dîner, Judicaél le refu-
fa, & fon exeufe , qui fut reçue & même approuvée
, fut qu’il étoit engagé chez le référendaire
Ouen , & que c’étoit pour un feint qu’il man-
quoit à un. roi.
C’eft avec peine qu’on voit fzint Ouen au nombre
des perfécuteurs. dë faint Leger ßc des amis
d’Ebroin (voyan ces deux articles.') Il mo'urut à
Clichy près Paris, le 14 août 683. On a de h;i
une vie de faint Eloy , qui a été traduite en
françois.
O V I
O V ID E , ( P u b l i u s O v i d i u s N a s o , ) ( Hiß,
litt.anc.) un de ces hommes rares à qui dans tons
les temps & dans tous les pays, les gens de peu
d’efprit reprochent d’en avoir trop. 11 n’y a point
de genre de beautés dont on ne trouve de grands
& .d e fréquens exemples dans fes oeuvres. Quoi
de plus riche & dejilus varié que les métamor-
phofes; de plus favabt & de plus agréablement
'orné de récits & d ’épifodè$>.que le poëme des faftes •
de plus galant, de plus ingénieux que les livres
érotiques ? Par-tout où le genre fe refufe à ces
grandes & magnifiques beautés , qui étonnent &
qui entraînent, & qu’on regarde plus particulièrement
comme les fruits de ce qu’on appelle proprement
le génie, on eft toujours confolé, amufé
.piqué, réveillé, foutenti. par ce qu’on appelle ef-
prit : on pourroit dire d’Ovide dans ces endroits :
il efi vrai qu’il nefl que charmant ; comme M*
Dacier difoit des endroits d’Homère qu’il avoit
peine à défendre : il eß vrai qu’ici Homère neß que
fiibiime. Quimilien a dit qu Oïide eft quelquefois
nimium amator ingénu fu i ; cela eft v ra i, niais il
kifpire celentimem à tousfos lefteurs.Quel homme
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