
des mêmes privilèges , finon que lorfqu’un procurateur
par mérite meurt , le grand confeil en
élit un autre , avant que le défunt foit en terre,
& qu’on remplace rarement ceux qui le font par
argent, afin de les réduire avec le tems au nombre
de leur fixation.
Les nobles qui ont accepté la robe de procurateur
, l’ont payée 30 mille ducats ; mais ceux
qui après avoir accepté la nobleffe , veulent
encore monter à ce dègré d’houneur, payent
deux fois davantage.
Tous les procurateurs portent la vefte ducale ,
c’eft-à-dire, à grandes manches jufqu’à terre; &
iuivant le rang de leur ancienneté, ils ont leur
demeure dans les procuraties neuves. Mais comme
la bibliothèque de S. Marc , dont ils font
maîtres, la chambre des archives de la république
, dont ils font les gardiens, & celle où ils
tiennent ordinairement leurs confeils trois fois la
femaine , occupent une partie de ce bâtiment ,
il n’y relie de logement que pour fix procurateurs
■ , & la république donne aux autres une
médiocre penfion , jufqu’à ce qu’ils entrent dans
les procuraties : ils ont l’adminiftration de l’églife
de S.\Marc , celle du bien des. orphelins , & de
ceux qui meurent ab inte (lat , & fans laiffer d’en-
fans. ( D , ƒ. )
PRODICUS ( Hiß. anc, ) un des plus célèbres
fophiftes de la Grèce, contemporain de Dé-
mocrite & de Gorgias, difciple de Protagoras,
eut pour difciples Euripide , Socrate , Théramène ,
ïfocrate, &c . Il étoit de l’ifle de Céos , une des
Cyçlades. Etant à Athènes avec lecaraâère d’am-
bafladeur des habitans de cette ifle , l’amour de
l ’argent, qui paroît avoir été extrême en lu i, le
força d’y tenir é co le; il alloit auffi de ville en
ville étaler fon éloquence * & toujours pour de
l ’argent. On pa le d’une déclamation'à cinquante
dragmes, ainfi nommée , parce que chaque audi- i
teur étoit obligé de payer cette lomme pour être
jidinis. Ce fophifte avoit, dit-on, des difcours à
tout p rix , depuis cinquante dragmes jufqu’à deux
oboles.
Les Athéniens le firent mourir, ou comme corrompant
la jeuneffe, ou comme profeffant l’irréligion
; car ils fe piquoient d’être vengeurs des
Dieux. Prodicus vovoit environ 225 ans avant J . C.
Prodicus eft auffi le nom du chef des hérétiques ,
nommés Adamites, au fécond fiècle de l’églife,
PRONAPIDE , ( Hiß. anc.)Selon Diodore de
Sicile, ce fut un ancien poète grec, maître d’Homère.
Il étoit d’Athènes. On lui attribue un poème
qui avoit pour titre te premier monde. Il fut,
dit-on , auffi le premier grec qui écrivit de gauche
à droite à notre manière. Avant lui les grecs écri-
yoient de droite à gauche félon l’pfage des Orientaux,
PRONOMUS ( Hifl, anc.) Thébain, eft un de
ceux auxquels on attribue l’invention des flûtes
fur lefquelles on pouvoit jouer toute forte d’airs
& fur tous les tons. Les autres auxquels la même
invention eft auffi attribuée par différens auteurs,
font Diodore de Thèbes & Antigénides.
Propagation de l’Evangile , fociétè pour
la * ( Hifl. d'Anglet. ) fociété établie dans la
grande Bretagne pour la propagation de la religion
chrétienne dans la nouvelle Angleterre, &
les pays voifins.
Nous avons dans notre royaume plufieurs éta-
bliffemens de cette nature, des millionnaires en
titre , & d’autres qui font la même fonâion ,
par un beau ôc louable zèle d’étendre une religion
hors du fein de laquelle ils font pei fuadés
qu’il n’y a point de falut. Mais un point important
que ces dignes imitateurs des apôtres dev
a ie n t bien conceyoir, c’eft que leur profeffion
fuppofe dàns les peuples qu’ils vont prêcher, un
efprit de tolérance qui leur permette d’annoncer
des dogmes contraires au culte national , fans
qu’on fe croye en droit de les regarder comme
perturbateurs de la tranquillité publique» &
autorifé à les punir de mort ou de prifon. Sans
quoi ils feroient forcés de convenir de la folie de
leur état, & de la fageffe de leurs perfécuteurs.
Pourquoi donc ont-ils fi rarement eux - mêmes
une vertu dont ils ont fi grand befoin dans les
autres ? ( A . R . )
PROPERCE ( Sextus Aurelius Proper-
Tius ) célèbre poçte érotique latin, fils d’un chevalier
Romain. Augufte qui avoit fait périr le père
pour avoir fuivi le parti d’Antoine , protégea le
fils & fit bien ; ce fut Properce qui eut tort de fe laiffer
protéger par le meurtrier de fon père , s’il fut libre
d’échapper à cette prote&ion. Les quatre livres
d’élégies de Properce, font trop connus pour que
nous nous arrêtions à en parler. Il y célèbre fous
le nom de Cynthie une femme qu’il aimoit, &
ce nom de Cynthie eft refté illuflre par lu i, comme
celui de_Lesbie.par Catulle , & celui de Corinne
par Ovide. M. l’abbé de Long - champs nous a.
donné , en 17 7 2 , une traduction françoife de Properce
, qui n’eft pas fans mérite, & qui ne doit
pourtant décourager perfonne.
Properce mourut dix-neuf ans avant Père chrétienne.
Il étoit né à Moravia, ville de l’Ombrie,
aujourd’hui Bevagna dans le duché de Spolète.
PROSCRIPTION, f, f. ) Hijl. rom, ) publica-*
tion.fare par le gouvernement ou par un chef de
parti, par laquelle on décerne une peine contre
ceux qui y font défignés. Il y en avoit de deux
fortes chez les Romains; l’une interdifoit au proferit
le feu & l’eau jufqu’à une certaine diftançe
de Rome, plus ou moins éloignée, félon la févé*
rité du décret, avec défenfe à qui que ce fût
de lui donner retraire daus l’étendue de la dif-
lance marquée. On affichoit ce décret , afin que
perfonne ne l’ignorât : le mot d’exil n’y étoit pas
même exprimé fous la république ; mais il n’en
étoit pas moins réel , par la néceffité où l’on
étoit de fe tranfporter hors les limites de ces interdirions.
L ’autre profeription étoit celle des têtes , ainfi
nommée , parce qu’elle ordonnoit de tuer la
perfonne proferite , par-tout où on la trouveroit.
Il y avoit toujours une récompenfe attachée à
l’exécution de cette projeription. On affichoit auffi
ce décret , qui étoit écrit fur des tables pour
être lu dans les places publiques ; & l’on trouvait
au bas les noms de ceux qui étoient condamnés
à mourir, avec le prix décerné pour la
tête de chaque proferit.
Marius & Cinna avoient maffacré leurs ennemis
de fang-froid , mais ils ne l’avoient point
fait par profeription. Sylla fut le premier auteur
& inventeur de cette horrible voie de profeription
, qu’il exerça avec la plus indigne barbarie ,
& la plus grande étendue. Il fit afficher dans la
place publique, les noms de quarante fénatetirs,
& de feize cents chevaliers qu’il proferivoir. Deux
jours après, il proferivit encore quarante autres
lénateurs , & un nombre infini des plus riches
citoyens de Rome. Il déclara infâmes & déchus
du droit de bourgeoifie les fils & les petits-fils
des proferits. Il ordonna que ceux qui auroient
fauyé un proferit , ou qui l’auroient retiré dans
leur maifon, feroient proferits en fa place. Il mit
à prix la tête des proferits, & fixa chaque meurtre
à deux talens. Les efclaves qui avoient. afi-
faffiné leurs maîtres , recevoient cette récompenfe
de leur trahifon ; l’on vit des enfans dénaturés,
les mains encore fanglantes, la demander
pour la mort de leurs propres pères qu’ils
avoient maffacrés.
Lucius Catilina , qui pour s’emparer du bien
de fon frère , l’avoit fait mourir depuis long-
tems , pria Sylla , auquel il étoit attaché, de
mettre ce frère au nombre des proferits , afin
de couvrir par cette voie l’énormité de fon crime.
Sylla lui ayant accordé fa demande, Catilina,
pour lui en marquer fa reconnoiffance, alla
tuer au même moment Marcus Marius , & lui
en apporta la tête. -
Le même S y lla , dans fa profeription , permit
à fes créatures & à fes" officiers de fe venger
impunément de leurs ennemis particuliers. Les
grands biens devinrent le plus grand crime.
Quintus Aurelius, citoyen paifible , qui avoit
toujours*- vécu dans une heureufe obfcurité , fans
être connu ni de Marius, ni de Sylla , apper-
cevant fon nom dans les tables fatales , s’écria
avec douleur ; malheureux que je fuis , c’efl ma
belle maifon d’Albe qui me fait mourir; & à deux*
pas de-là, il fut affaffiné par un meurtrier.
Dans cette défolâtion générale, il n’y eut que
C. Metellus , qui fut affez hardi pour ofer demander
à Syiht, eti plein fénat , quel terme il
mettroit à la mifère de fes concitoyens : nous
ne te demandons p a s , lui dit-il, que tu pardonnes
à ceux que tu as réfolu de faire mourir ;
mais délivres-nous d’une incertitude pire que la
mort, & du moins apprens-nous ceux que tu
veux fauver. S y lla , fans paroître s’offenfer de ce
difcours , lui répondit froidement , qu’il ne s’é-
toit pas encore déterminé. Enfin , comme dit
Sallufte, neque prius jugulandi fuit finis quant Sylla
omnes fuos divitiis explevit.
Les triumvirs Lépide , Oélave & Antoine renouvelèrent
les proferiptions. Comme ils avoient
befoin de fommes immenfes pour foutenir la
guerre , & que d’ailleurs ils laiffoient à Rome
& dans le fénat des républicains toujours zélés
pour la liberté ', ils réfolurent, avant que de quitter
l’Italie , d’immoler à leur fureté, & de prof-
crire les plus riches citoyens. Ils en dreffèrent un
rôle. Chaque triumvir y comprit fes ennemis
particuliers , & même les ennemis de fes créatures.
Ils pouffèrent l’inhumanité jufqu’à s’abandonner
l’un à l’autre leurs propres parens, &
même les plus proches. Lépidus facrifia fon frère
Paulus à l’un de fes collègues ; Antoine , de fon
côté , abandonna au jeune Oâave le propre
frère de fa mère ; & celui-ci confentit qu’Antoine
fît mourir Cicéron , quoique ce grand homme
l’eût foutenu de fon crédit contre Antoine
même. La tête du fauveur de l’état fut mife à
prix pour la fomme de huit mille livres fterling.
Il mourut la viétime de fon mérite & de fes talens.
JLargus Gr exundans letho dédit ingénu, fons y
Ingenio manu s eft & cervix ccefà. Juvênal.
Enfin on vit dans ce rôle funefte Thoranitis 3
tuteur du jeune OCtave , celui-là même qui l’a-
voit élevé avec tant de fo in ; Plotius défigné
conful, fi ère de Plancus, un des lieutenans d’Antoine
, & Quintus , fon collègue au confulat ,
eurent le même fort , quoique ce dernier fût
bean - père d’Afinius Polljo , partifan zélé du
triumvirat.
En un mot, les droits les plus facrés de la nature
furent violés. Trois cents fénareurs, & plus
de deux mille chevaliers furent enveloppés dans
cette affreufe profeription. Toutes ces horreurs ,
inconnues dans les fiècles les plus barbares , &.
aux nations les plus féroces, fe font paffées dans
des tems éclairés, & par l’ordre des hommes les
plus polis de leur tems. Elles ont été les fruits
fanglans de ces défordres civils, & de ces vapeurs
inteftines qui étouffent les cris de l'humanité,
C d . J . )
PROSPER ( Saint ) Hifl. ecclèf ) difciple de
faint Auguftin , fut le poète de la grâce comme
fon maître en étoit l’apôtre. Tout le monde con