
Auriculas afini Mida sex habet
& IVbligea de fe_ renfermer dans cette généralité
: *
Auriculas afini quis non+habet ?
dans la crainte que Néron ne s’appliquât oette
allégorie ; précaution Tage, mais qui feroit devenue
inutile, fi P e r fe avoit laiffé fubfifter d’ailleurs
une critique directe de vers connus pour être
^le Néron. « Le moyen , dit M. de Sélis, d’ima-
3> giner qu’un prince qui ne vouloit pas que l’on
3» eût plus d’efprit que l iii, qui défendit à Lucain
î> de faire des vers & le permit à Lakéon , qui bannit
» Cornutus, pour avoir hafardé fur fes poéfies
j> une critique a fiez innocente, eût fouftert tran-
n quillement une fatyre direde ? Si l’on répond que
» ces vers faits par P e rfe lui-même, ne font qu’une
» imitation, une parodie de la manière dont Néron
» verfifioit ; nous répliquerons que c’étoit toujours
» offenfer Néron , que ce détour ne pouvoit échap-
» per à perfonne, & que la demi-prudence de
« P e r fe ne l’eût pas fauvé. Il fafar donc donner
» ces quatre vers à un autre que Néron. Il faut
33 donc fe àéfoudre à faire perdre au fatyrique
» l’honneur d’une audace courageufe, & à cette
33 fatyre ce qui la rendoit la plus piquante; » nous .
craignons que M. Sélis n’ait raifon.
PERSES , empire d e s , ( H iß . anc. & m o i. ) l’ancien
empire des P e r fe s étoit beaucoup plus étendu
que ce que nous appelions aujourd’hui la P e r f e ,
car leurs rojs ont quelquefois fournis prefque toute
l ’Afie à leur domination. Xerxès fubjugua même
toute l’Egypte , vint dans la Grèce , 6c s’empara
d’Athènes ; ce qui montre qu’ils ont porté leurs
armes viftorieufes jufques dans l’Afrique , & dans
l’Europe.
v Perfépolis, Suze & Ecbatane, étoient les trois
villes où les rois de P e rfe faifoient alternativement
leur réfidence ordinaire, En été ils habitaient Ecbatane
, aujourd’hui Tabris ou T am is , que la
montagne couvre vers le fud-oueft contre les
grandes chaleurs. L ’hiver ils féjournoient à Suze
dans le Suziftan, pays délicieux, où la montagne
met les habitans à couvert du nord. Au printems
& en automne , ils fe rendoient à Perfépolis qu
à Babylone. Cyrus qui eft regardé comme le
fondateur de la monarchie des P e r f e s , fit néanmoins
de Perfépolis, la capitale de fon empire,
au rapport de Strabon, liv r e X V .
Cette grande & belle monarchie dura deux,
cent fix ans fous douze rois, dont Cyrus fut le
premier, & Darius le dernier. Cyrus régna neuf
ans depuis la prife de Babylone, c’eft-à-dire,
depuis l\n du monde 3466, jufqu’ea 3475 /avant
J . C. 525. Dar ius, dit Codomanus, fut vaincu
par Alexandre le Grand en 36 74 , après fix ans
de régne ; & de la ruine de la monarchie des
P e r f e s , on vit naître la troifième monarchie du
r monde, qui fut celle de Macédoine dans la perfonne
d’Alexandre.
La Perfe , ayant obéi quelques temps aux
Macédoniens 8c enfuite aux Partîtes., un fimple
foldat perfan, qui prit le nom d’Artaxare, leur
enleva ce royaume vers l’an 225 de J . C ., &
rétablit Yempire des Perfes, dont l’étendue ne dif-
féroit guère alors, de ce qu’il eft aujourd’hui.
Noufchirwan ou Khofroës le grand, qui monta
fur le trône l’an 5 5 1 de l’Ere chrétienne, eft un
des plus grands rois de l’hiftoire. Il étendit fon
empire dans une partie de l’Arabie Pétrée, & de
celle qu’on nommoit heureufe, Il reprit d’abord
c« que les princes voifins avoient enlevé aux rois
fes prédéceffeurs, enfuite il ju t a i t les Arabes,
les Tartares jufqu’aux frontières de la Chine ; les
Indiens voifins du Gange & les empereurs grecs ,
furent contraints de lui payer un tribut confidé-
rable. ' I
* Il gouverna fes peuples, avec beaucoup de fa-
gefle : zélé pour l’ancienne religion de la Perfe,
ne refufant jamais fa prote&ion à ceux qui étoient
opprimés, puniflant le crime avec févérité, 8c
récompenfantla vertu avec une libéralité vraiment
royale; toujours attentif à faire fleurir l’agriçui*
ture & le commerce, favorifant le progrès des
fciences 8c des arts, & ne conférant les charges
de judicature qu’à des perfonne* d’une probité
reconnue , il fe fit aimer dé tous fes fujets qui
le regardoient comme leur père. Il eut un fils
nommé H o rm iç d a s , à qui il fit époufer la fille
de l’empereur des Tartares, & qui l’accompagna
dans fon expédition contre les Grecs.
Noufchirwan, alors âgé de plus de 80 ans,
voulut encore commander fes armées en perfonne;
il conquit la province de Mélitène, mais
bientôt après , la perte d’une bataille où fon armée
fut taillée en pièces, le mit dans la trifte nécef-
fité de fuir pour la première fois devant l’ennemi,
& de repafier l’Euphrate à la nage fur un élér
phant. Cette difgràce précipita fes jours ; il profita
des derniers momens de fa vie pour di&er fon
teftament , & ce teftament, le voici tel que
M. l’abbé Fourmont l’a tiré d’un manuferit turc.
« M o i, Noufchirwan, qui poflede les royaumes
33 de Petje & des Indes, j’adrefte mes dernières
»» paroles à Hormizdas, mon fils aîné, afin qu’elles
33 foient pour lui une lumière dans les ténèbres ,
33 un chemin droit dans les déferts, une étoile
33 fur la mer de ce monde.
33 Lorfqu’il aura fermé mes y e u x q u i déjà
33. ne peuvent plus foutenir la lumière du foleil ,
»3 qîÀl monté? fur mon ‘trône, & que de-là il
» jette fur mes fujets une fplendeur égale à celle
» de cet aftre. Il doit fe reffouvenir que ce n’eft
33 pas pouf eux-mêmes que les rois font revêtus
33 du pouvoir fouverain , 8c qu’ils ne font à l’égard
33 du refte des hommes, que comme le ciel eft
33 à l’égard de la terre. Èa terre produira-t-elle
» des fruits fi le ciel ne î’arrofe ?
» M013
» Mon f ils , répandez vo s bienfaits d’abord fur
» vos p roche s, enfuite fur le s moindres de vos
» fujets. Si j ’o fois, je me propoferois à vous pour
*t e x em p le , mais vous en avez de plus grands.
" V o y e z ce fo le il, il part d’un bout du monde
» pour a lle r à l’autre ; il fe cache 8c fe remontre
w en fuite , 8c s’il change de route tous les jo u r s ,
w ce n’eft que pour faire du bien à tous. N e vous
» montrez donc dans une province que pour lui
» faire fentir v o s g râces, & lorfque vou s la quit-
* f e r e z , q u e c e n e fo it q u e p o u r fa ir e é p r o u v e r
w à u n e a u tr e le s m êm e s b ien s .
»> I l eft des gens qu’il faut p u n ir , le foleil
» s’éclipfe : il en eft d’autres qu’il faut récompen-
w f e r , 8c il fe remontre plus beau qu’il n’étoit
>» auparavant : il eft toujours dans le c ie l, foute-
» nez la majefté roy ale : il marche toujours,
» fôyeZ fans cefte occupé du foin du gouverne-
»> ment. Mon f i l s , pré fentez-vous fou vent à la
* porte du ciel pour en implorer le fecours dans
n v o s b e fo in s, mais purifiez vo t re ame aupara-
» vant. L e s chiens entrent-ils dms le temple f Si
» Vous obfervez exactement cette r è g le , le ciel
* vou s exaucera ; vos ennemis vous craind ront;
» v o s amis ne vous abandonneront jamais; vous
» ferez le bonheur de v o s fujets ; ils feront votre
n félicité.
» F a it e s ju f t i c e , r é p r im e z le s in fo le n s , fo u la -
1» g e z le p a u v r e , a im e z v o s e n f in s , p ro té g e z le s
fciences , fuivez 1e confeil des perfonnes e x-
f» périmentées, éloignez de vous les jeunes g en s ,
» & que tout votre plaifir foit de faire du bien.
» J e vou s laifte un grand ro y a um e , vous le con-
» ferverez fi vous luiv e z mes co n fe ils; vou s le
» perdrez^ fi vous en fuivez d’autres 33.
N o u fc h irw a n m o u ru t l’ an 5 7 8 , 8c H o rm iz d a s
q u i lu i fu c c é d a , ne fu iv i t p o in t fe s c o n fe ils . A p r è s
b ie n d e s c o n c u f t io n s , il fu t ju g é in d ign e d e fa
p l a c e , 8c d é p o fé ju r id iq u em en t p a r le co n ten te m
e n t u n an im e d e to u te la n a t io n a ffem b lé e . S o n
fifcs m is fu r le t r ô n e à fa p la c e , le f it p o ig n a rd e r
d an s fa p r ifo n : c e fils lu i-m êm e fu t co n tra in t d e
ib r t i r d e fo n r o y a u m e , q u i d e v in t la p ro ie d’u n
fu je t d e W a r a n e s , h om m e d e g ran d m é r i t e , m a is
q u i fu t en fin o b lig é d e fe ré fu g ie r ch e z le s T a r -
,t a r e s , q u i l’em p r ito n n è ren t .
Sur la fin du règne de N o u fch irw an , naquit
Mahomet à la M e c q u e , dans l’ Arabie Pétrée en
570. B entôt profitant des guerres civiles des Per-
f a n s ,i l étendit chez eux fa puiffance 8c fa domination.
Omar fon fucceffeur, poufià encore plus
loin fes conquêtes : Jéd a fg ird , que nous appelions
H o rm izd a s I V , perdit contre tes lientenans à
quelques lieues de Madaïn ( l’ ancienne Ctéfiphon
d è s G re c s ) la bataille 8t la v ie . L e s Perfans paf-
fèrent fous la domination d’Omar plus facilement
qn’ils n’avoient fubi le joug d’Alexandre.
C e t t e fe i v i tu d e fo u s le s A r a b e s d u ra ju fq u ’en
1 2 5 8 , q u e la P e r fe com m e n ç a à re n a î t re fo u s fe s
p r o p r e s ro is . H a a lo u re c o u v ra c ç r o y a um e p a r
Hifoire. Tome IV %
le fuccés de fes armes , mais au bout d’un fié c le ,
Tame rlan , kan des T a r ta r e s , fe rendit maître de
la P c r ft l’an 13 6 9 » fubjugua les Par thé s, 8c fit
prifonnier Bajazet I en 14 0 2 . Ses fils partagèrent
entr’eux fes conq uê te s, 8c cette branche régna
jufqu’à ce qu’une autre dynaftie de la faélion du
moutorTblanc s’empara de la P e r fe en 14 7 9 .
Uflùm C a ftan , ch e f de cette fa c lio n , étant
monté fur le tr ô n e , une partie de la P e r fe flattée
d’oppofer un culte nouveau à celui des T u r c s ,
de mettre AH au-deftus d’O m a r , 8c de pouvoir
aller en pèlerinage ailleurs qu’à la M ecque , em-
braffa avidement ce dogme que propofa un perfan
nommé X e q t ie -A id a r , 8c qui n’eft connu de nous
que fous le nom de S o p h i , c’e ft-à -d ire , fa g e . L e s
femences de cette opinion étoient jetrées depuis
long-temps, mais Sophi donna la forme à ce
fchifme politique 8c re ligieux, qui paroît aujour—
d’hui néceflaire entre deux grands empires v o ifin s ,
jaloux l’un de L’autre. N i les T u r c s , ni les Perfans
n’avoient aucune raifon de reconnoître Omar 8c
A l i pour fuccefieurs légitimes de Mahomet. L e s
droits de ces Arabes qu’ils avoient ch a ffé s , dévoient
peu leur importer. Mais il importoit aux
Perfans que le fiège de leur religion ne fût pas
chez les T u r c s ; cependant Uflùm Caftan trouva
bien des contradicteurs, 8c entr’amres Ruftan qui
fit affafliner Sophi en 149 9 . I l en réfulta d’étranges
révolutions que je vais tranferire de l’hiftoire de
M. de V o lt a ire , qui en a frit le tableau curieux.
Ifm a ë l, fils de X é q u e -A id a r , fut allez courageux
8c aftèz puiffant pour foutenir la doCbine
de (on père les armes à la main ; fes difciples
devinrent des foldats. Il convertit 8c conquit l’Arménie
, fubjugua la P e r fe , combattit le fultan des
T u r c s Sélim I a v e c avan tag e, 8c laifta en 1 3 2 4
à fon fils Tahartias , la P e r fe püiffante 8c pai-
fible. C e même Tahamas repoufta Soliman , après
a voir été fur le point de perdre fa couronne. IL
laifta l’empire en 15 7 6 à Ifmaël I I fon fils , qui
eut pour fuccefteur en 15 8 5 S ch a ïA b a s , qu’on
a nommé le g ran d.
C e grand homme étoit cependant cruel ; mais
il y a des exemples que des hommes féroces
ont aimé l’ordre 8c le bien public. Scha-Abas
pour établir fa puiftance, commença par détruire
une milice telle à-peu-près que celle des janif*
faires en T urquie ou des ftrelits en Ruflie ; il conf-
truifit des édifices publics $ il rebâtit des v ille s ; il
fit d’utiles fondations ; il reprit fur les T u r c s tout
ce que Soliman 8c Sélira avoient conquis fur la
P e r fe . I l chafta d’Ormus en 16 2 2 par Je fecours
des A n g lo is , le s Portugais qui s’étoient emparés
de ce port en 15 0 7 . Il mourut en 16 2 9 .
L a P e r fe d evint fous fon règne extrêmement
fio r iffan te , 8c beaucoup plus civ ilifé e que la
T urquie ; le s arts y étoient plus en hon n eu r,
les moeurs plus d ouce s, la police générale bien
mieux ob fervée. IL eft vrai que les Tar tare s fub-
juguèrent deux fois la P e r fe après le règne