
ao© P E t
L'or , même à Péliffon, donne un aiï de beauté ,
a (lit Boileau» C’eft du même Péliffon que
mademoifelle.de Scûdéry qui n’étoit pas jo lie ,
a dit "qu’il abufoit de la permiffion qu’ont les
hommes d’être laids, phrafe qu’on a depuis- appliquée
à tout. Cette difformité ne l’empêcha pas
cependant d’occuper des places a fiez importantes..
Il fut fe.crétair.e.du Roi 8c s'attacha aux affaires du
fceau, dont il acquit une connaiffance particulière.
Il fut premier-commis de M. Fonquet, & on fait
avec quel généra ux, courage il défendit ce malheureux
miniftre qui pouvoit être coupable , mais
fur lequel à force d’acharnement on étoit parvenu
à répandre tout l’intérêt de l’innocence perfécu-
tée. Péliffon refta quatre ans enfermé à la baftille
pour cette affaire, fit fa vie fut en danger. On
a rapporté fur la manière dont il vivoit dans fa
prifon , différentes particularités allez merveilleu-
fe s , arrivées ou à lui ou à d’autres prifonniers,
8t qui prouvent de quelles réffources eft capable
lin efprit toujours fortement occupé d’un même
objet. Il avoit apprivoisé une araignée. Privé
d’encre & de papier (car il faut bien ôter à un’
innocent opprimé tout moyen de fe défendre &
de fe confoler; ) il-écrivoit fur des marges de
livre* avec le plomb de-Jes, vitres , ou félon
quelques-uns , avec uneefpèce d’encre qu’il fit en
délayant de la croûte de pain brûlé dans quelques
gouttes de vin. On >mit auprès de lui un efpion
qui fous un air bête cachoit toute la friponnerie
de ce vil métier. Il feignit d’en être la. dupe, 8t
fit habilement fervir cet homme à fes deffeins.
Ce fut pendant cette détention qu’il cpmpofa pour
la défenfe de M, Fouquet trois mémoires que l’auteur
du fiécle de Louis X IV compare à ces belles
oraifons de Cicéron , où les affaires d’état mêlées
avec les affaires judiciaires, font traitées avec
toute la folidité de la logique fit tout l’éclat de
l’éloquence. C’eft ici la plus belle partie de la vie
de Péliffon ; Péliffon défenfeur de fouquet , eft
un des hommes les plus refpeéfables fit les plus
dignes d’admiration; & Tannegui leFe yre parut
s’aftocier à fa gloire, en dédiant à' Péliffon fon
Lucrèce & le traite de la fuperfiition de Plutarque,
noble hommage rendu à la vertu dans les fers,
Péliffon dans le loifir que lui laiffa fa prifon, lut
beaucoup de livres de controverfe , fit cet examen
ne tourna pas au profit de la religion de fes pè-
r e s , qui étoit le calvinifme ; il abjura en 1670 ,
entra dans l’état eccléfiaftique , obtint plufieurs
bons bénéfices -& les économats de Cluni en 1674 ,
de Saint-Germain-des-Près en 1675 » de S. Denis
en 1679. Les proteftans eurent à lui reprocher
une çonverfion trop utile pour lui, 8t un zele
pour leur ’çonverfion trop peu délicat fur lés
'moyens; il fit acheter au roi à prix, d’argent
beaucoup d’abjurations qui ne peuvent qu’être
hypocrites & infideies , quand elles font vendues.
jLçs proteftans triomphèrent de ce que ce gelé
catholique qui avoit tant écrit & tant agi contré',
eux , emporté par une maladie très-prompte, mourut
fans facremens : ils auroient bien voulu per-
fuadèr qu’il s’en étoit privé volontairement, &
pour obéir à fa conTcience , qui dans ces derniers
mornens k- rappelloit à fa première religion. Mais
il paroît confiant que le 2 février 1693 , jour
de la Purification , il voulut abfolument aller a
l ’églife malgré fon médecin qui le trouvoit trop
foible pour fortir. i ’efi le jour de ma çonverfion ,
dit Péliffon, je me fuis fait une loi d’en célébrer
l’annïverfaire, je. ne veux pat y manquer. 11 alla
en effet à l’églife & y communia ; le 6 le roi
fachant qu’il étoit mal, lui envoya M. Boffuct,
M. de Fén Ion fie le père de la Chaife ; d’après kur
avis, il parut fe difpofer pour le lendemain à une
confeffion générale ; le lendemain il étoit mort
à fept heures du matin : le roi l’a voit attaché à
fa perfôftne d’une manière particulière ; il fuivit
ce prince dans fes campagnes ; 8e chargé d’écrire
fon hiftoire, il écrivit du moins fon panégyrique ;
mais Péliffon , qui étoit maître des requêtes , ayant
fait perdre un procès à madame de Montefpan ,
celle-ci fit nommer hiftoriographes Racine fie Boileau
à la place de Péliffon. Voilà par quels motifs
fe font le plus fouvent à la cour les choix les
plus juftes, fie c’eft ainfi que Crébillon, négligé
fi long-temps, vit honorer les derniers jours de fa
vieillefîê,non par une jufte admiration pour fes
talens, mais par l’injufte envie de mortifier un
homme bien fupérieur à lui. Louis X IV ne fa-
cri fia pas cependant fon flatteur à fà maitreffe ;
il lui ordonna de continuer fon travail de fon
côté , 8e ne lui retira aucun de fes bienfaits,
Péliffon n’étoit point de l’académie Françeife lorsqu’il
compofaThiftoire de cette compagnie, lie n
fut pour cette hiftoire, fie il en fut fans qu’il y
eut de place vacante. C’eft le prix que l’académie
crut devoir à fon hiftorien ; il fut d’abord fur-
numéraire avec droit d’affifter aux affemblées fie
droit d’y opiner, & la première place.qui vint
à vaquer fe trouva remplie par lu i, fie ne fut point
donnée. Outre cette hiftoire, le plus connu de
fes ouvrages , & plus connu même que fon Panégyrique
de Louis X IV , quoique traduit en Latin,
en Efpagnol, en Portugais, en Iralien, en Anglais
fit même en Arabe par un patriarche du
mont-Liban, on a de lui un abrégé de la vie
d’Anne d’Autriche ; une hiftoire de la conquête
de la Franche-Comté , imprimée dans le tome
7 des mémoires du P. Defmolets, des lettres
hiftoriques formant une efpèce- de journal des
voyages Si des campemens de Louis X IV , depuis
1670 jufqu’en 1 638 ; un recueil de pièces galan-»
te s , mêlées avec celles de madame la comteffe
de la Suze ; des poëfies chrétiennes 8c morales ,
• fit quelques écrits de controverfe. Péliffon étoit
affèz dans l’ufage de célébrer Tanniverfaire des
époques principales de fa vie ; nous avons vu qu’il
communion tous les ans le jour de fon abjuration |
il délivroit qufli tons les ans un prifonnier le jour
de fa fortie de la baftille.
PELLEGRIN , ( S i m o n - J o s e p h ) (Mf i . lïtt.
mod. ) Le nom de l’abbé Pellegrin eft placé entre
lé ridicule 8c l’eftime. S’il a fait ces cantiques fp i-
ritûels qui le, font fi peu, 8c dont M. de Voltaire'
a . dit 1
Gaîment dé Pellegrin détonne un vieux cantique.
S’il a mis l’hiftoire de l’ancien & du nouveau tef-
tament, les Pfeaumes de David , TImiration de
J . C. fur des airs d’opéra & de vaudevilles, s’il
a fait un commerce également vil & ridicule de
vers de toute mefure & de toute efpèce, & à tout
prix , comme M. de la Rimaille dans la nouveauté
fi ■ ■
Le matin catholique .& le foir idolâtre ,
Il dîna d e l’autel & t'oupa do t béat rte ;
D ’un autre cô.té, il eft l’auteur de l’opéra de Jephtè,
fie d é , la comédie du nouveau Monde., Il avoir de
la peine à parler, il étoit d’ailleurs fimple
dans -fes difcôurs. & négligé dans fon extérieur,
à ,un degré qui fait toujours un peu méprifer,
qyo iqu’injufteqjeor.
Minùs aptus a cutis
$ îarzbus horum hoininum , rideri.pojjit, eb qubd
Rufiictus tonfo toga définit, fit male laxus
J 11 pede calceus hceret ; at ejl bonus utmeliorvir
Non alius quij'quam.
Il eft vrai qu’on ne peut pas ajouter î, -
At ingenium ingens
Inculto latet hcc jub corpore.
Mais l’auteur du quatrain fuivant lui a rendu
pleine 8c entière jutiiçe,:
Pcëte » prêtre , & provençal »
Avec une plume féconde ,
N’avoir tien fait ni dit de mal,
Tel fut l’auteur du Nouveau Monde.
T. fut pendant quelque temps le poëte favori
dè'la cour, parce qu’il avoit remporté en 17.04
le prix de l’Académie Françoife par une épitre
an roi fur les glorieux fiicces ■ de fes armes ; il com-
mençoit cependant à être temps de ne plus parler
au roi de gloire des armes 8c de fiiccès p/m^s
répoait? de -n.es revers ne commençant qu’à cëtte
apnée , cet art de vaincre 8c de chanter nos con-
qirêtes Sc de flatter le conquérant feinbloir encore
nous appartenir. En même-temps que l’abbé Pel-
legrin envoyoit cùte épjtre au concours , il com-
hartoit contre lui-même par une ode fur le même
fijj.et, qui balança lçs fuffrage.s de l’académie, &
dçnt on fut qp’il étoit l’auteur. On ne pouvojt
UÏfisittf Tome IV»
T guère fe montrer dans un concours avec plus
d’éclajt & de fuccés.
Ne quifquam Ajacem poffit faperare nifi Ajax.
Cette petite aventure le fit connaître à la cour ,
& lui procura la proteélion dé madame de Main-
\ tenon, qui ne lui fut pas ahfolument ftérjle,
pùifqifil obtint un bref de tranftotion dans l’ordre
de C luni, étant religieux Servite, 8c dans Je cas
d’être réclamé par fes confrères qu’ii avoit quittés
pour fe faire aumônier de vaiffeau. On raconte
qu’une femme de fes amies , choquée de fa malpropreté,
8c jugeant qu’il manqnoit de linge,
lui en envoya un trouffeau par fa femme-de-
chambrè : que l’abbé ayant ouvert le paquet &
- y trouvant des chauffons, chofe dont il ignoroit
l’ufaee ôc qu’il prît pour des efpèces de gants ou
- de mitaine* qui ne COnvenoîent point à un homme.,
les offrit.a. la femmerde-chambre pour qu’elle
eût fa part du préfent qu’elle lui avoir apporté».
ïdfbbë Peïtegrin étoit de MarfeiÜe, il mourut en
i i7Af , à quatre vingt-deux ans. Indépehdamment
de ceux de fes ouvrages dont nous avons parlé ,
Sc de beaucoup d’autres productions dramatiques
dont il n’y a ’ rien à di^e , il avoit traduit en vers
Lancois les''cinq livres d’odès d’Horace, &
av<nt mis le -texte à côté de cette- verfiOn qui
n’eft plus; connue aujourd'hui queoar cette ppigramme
de la Monnoiç î _
On ilevroit, foir dit entre nous ,
A deux divinités offrir tes deux Horaces ,
Le latia à Vénus , la d.'efle des Gractf,
E t le fru n çQ is à fo n é p o u x .
P E L L E R IN , ( J o s e p h ) ( Hifi. litt. mod.) ancien
premier commis de la marine , célèbre par
Ion grand âge de quatre-vingt-dix-neuf ans, par
fon cabinet de médailles le plus riche qu’aucun
particulier ait poffédé , & dont le roi a fait l’ac-
quifxrion en 1776 ; 8c par fes recueils fie traités
de médailles, colleâiofi précieufe en nçqf volumes
in,-40. Mort le 30 abt}.t 1782,.
PELLETIER. Il y a plufieurs perfonnes connues
de ce nom, i ° . Ju lie n , curé de S. Jacques de
la Boucherie, un des prédicateurs fanatiques de
la ligue. Il étoit du coafeil des fei^e, fie eut part
à la mort du préfident • Briffon, en 1595 ; il
fut condamné à la roue pour cç crime, fie alfa
chercher un afyle en pays étranger. 20. Il avoit
un frère médecin , nommé Jacques , dont on a
des ouvrages en profe 8c en vers qu’on ne lit
plus, entr’autreç un traité de la quadrature du,
cercle.
30. J Jn autre Pelletier, Je an , né à Rouen en
16 3 3 , étoît très,-(avant dans les langues. Il a
travaillé fur l’écriture fainte 8c fur des matières
eçcléfiaftiques; il y a de fui des diffe.rtations dans
C e