
n’ofant d'abord l’attaquer dans fa perfonne, qui
étoit abfolument irréprochable , on l’attaqua dans
les personnes qu’il aimoit, dans Anaxagoras, fon
maître, ( voyeç l’article Anaxagoras. ) dans
Afpafie, fa maîtreffe , ( voye^ l’art. Aspasie.) dans
Phidias, fon protégé, (yoytt l’art. Phidias.) Enfin,
on. arriva par degrés jufqu’à lui. On l’accufa-d’avoir
diffipé ou mal employé les deniers dont il
avoit eu l’adminiftration, & on lui en demanda
compte. Cette adminiftration avoit été non-feulement
pure, mais noble & défintéreffée; il favoit
qu’on n’en doutoit pas, & c’eft ce qui caufoitfon
inquiétude 5 il craignoit que la même perverfité
qui avoit fuggéré l’accufation , n’influât fur le jugement.
Alcibiade étant venu pour le v o ir , on
lui dit que Périclès n’étoit >pas vifible, parce qu’il
étoit trop occupé, qu'il, fongeoit férieufement à
rendre fes comptes. Il devroit bien plutôt longer
à ne les pas rendre, répondit Alcibiade. Ce fut
en effet le parti qu’il prit ; pour fe rendre le peuple
favorable, il féconda le penchant qu’Athènes
paroifloit avoir pour la guerre du Péloponnèfe ,
& il ne fut plus parlé de ces comptes. Plutarque
ne veut pas qu'on croye qu’un homme de probité
, tel que Périclès , ait allumé la guerre' du
Péloponnèfe par des vues intéreffées ; il, s’élève
contre cette manie d’aller chercher dans le coeur
des grands hommes des intentions fecrètes qu’ils
n’ont peut-être jamais eues. Il aime mieux croire
que Périclès fe détermina & détermina le peuple
à la guerre du Péloponnèfe par des raifons d’état
& d’utilité publique ; mais on ne fait guères ce
qu’on fait quand on s'engage dans une guerre.
Quiconque l’entreprend, quand il lui refte feulement
un moyen pofîible de l’éviter, a coup fur,
n’eft point un homme d’état. La première année
de la guerre du Péloponnèfe, qui tombe à l’an
4 3 1 avant Jé fu s -C h r ift, Arphidamus , roi de
Sparte , étant entré dans l’Attique , Périclès déclara
aux Athéniens que fi Archidamus, en- ravageant
leurs terres, épargnoiCles fiennes, foit
à caufe du droit d’hofpitalite qui etoit entr eux ,
foit pour faire foupçonner entr’eux de l’intelligence
, il donnoit dès ce jour-là fes terres & fes
maifons à la ville d’Athènes. Il fauva cette ville
par la prudente-fermeté avec laquelle il y refta
enfermé, méprifant les bravades des Lacédémoniens
, réfiftant aux inftânces de fes amis , aux
reproches & aux menaces de fes envieux , fe
laiffant accufer de foibleffe & de lâcheté, parce
qu’il n’alloit pas étourdiment confier la deftinée
de l’état à une bataille contre des- forces très-
fupérieures, qu’ïl vint à bout de confumer par
fa patience & fon habileté. Ce fut alors, dit Plutarque
, qu’on vit à quel point Pericles étoit le
maître des autres, parce qu’il etoit maître de
lui-même. Il fembla qu’il tînt dans fes mains les
clefs des portes , & qu’il eût appofé fur les armes
des citoyens un fceau facré Ôc inviolable, qui
leur en inferdifoiç l’ufage. Sa grande maxime-,
fa grande pratique à la guerre étoit de ménager
les foldats ; je vcudrois , difoit-il, les rendre immortels.
Les arbres coupés reviennent, quoique lentement.
Les hommes morts font per dits pour toujours.
Il ne faifoit nul cas des viéloires dues à là témérité
& dont le fuccès n’avoit pas été préparé &
affuré par la prudence. Audi fe vantoit il qu’il
n’y avoit pas un feul citoyen auquel il eût fait
prendre le deuil.
Après avoir chaflé les Lacédémoniens de l’A frique
, à fon retour il porta le rayage dans le
Péloponnèfe. A l’infiant de l’embarquement, il y
eut une éclipfe totale de foleil, & les ténèbres
couvrirent la terre. La fuperftition & l’ignorance
des caufes naturelles répandirent l’effroi dans
toute la flotte ; mais Périclès avoit été inftruit
par Anaxagore , il jette Ion manteau fur les yeux
du pilote qu’il voÿoit troublé, & incertain de ce
qu’il devoit faire , il lui demanda s’il le voyoit ?
Le manteau m’en empêche, dit le pilote. Périclèf
lui fit comprendre que la lune, interpofée entre
lé foleil & la terre, étoit le manteau qui lui dé-
roboit en ce moment la vue du foleil. Au retour
de cette campagne , la cérémonie des funérailles
& de l’éloge public des citoyens morts à la guerre
recommença, & elle continua pendant toute la
guerre du Péloponnèfe.
Interea focios inhumataque corpora terra
Mandemus , qui felus honos Açheronte fub imo eft.
Ite, a it, egregias animas quce fanguine nobis
Hanc patriam pepercrefuà , decorate fupremis
Muneribus , mcejiamque Evandri primus ad urbem
Mittatur Pallas t quem non virtutis egentem
Abjhilït atra dies & funere merjit acerbo.
La fécondé année de la guerre du Pêlopon-
nè'fe, l’Attique fut ravagée par cette pefte trop
fameufe, que Thucydide a décrite en hiftorien ,
Hippocrate en médecin , & Lucrèce en poète.
Les Athéniens , rendus injufles par le malheur,
s’en prirent à Périclès ,"qui les avoit, difoient-ils ,
engagés dans une guerre qui avoit amené la
pefte; ils le déposèrent & le condamnèrent à
une amende. Il perdit par la pefte fon fils aîné,
fa foeur, tous fes parens, tous fes amis; enfin,
Paralus,- le dernier de fes fils légitimes. Il avoit
mis mal-à-propos fa- gloire à ne pas verfer une
larme au milieu de tant de pertes qui l’acca-
bloient ; mais quand il voulut, félon l’ufage ,
pofer la couronne de’ fleurs fur la tête de fon
dernier fils mort, fes fanglots le trahirent, & un
torrent de larmes le foulagea ; il apprit qu’on
n’eft pas père impunément.
PERIERS ou PERRIERS , ( Bonavinture
DES ) ( p lp litt. mod. ) valet-de-chambre de la
reine de Navarre, Marguerite de Va lo is, foeur
de François I. Ses contes foutiennent feuls fa
réputation ; car fes poéfies, même fa traduction
de l’Andrienne , font oubliées, & l’on cherche en
vain dans fon Cymbalum mundi, l’impiété qui le
fit profcrire , & le charme qui le faifoit lire. On
y trouve, pour tout charme, des fictions incohérentes
& incompréhenfibles auxquelles l’allégorie
donnoît peut-être quelque prix, & des plaisanteries
fur les chercheurs de la pierre philofo-
phale ; mais toute plaifanterie contre les préjugés
, paffoit alors pour impiété. Les contes du
même auteur ont un mérite indépendant de toute
allégorie ; mais les contes imprimés fous fon nom
ne font pas tous de lu i, car il y .en a quelques-
uns où il eft parlé de François I & même de
Henri I I , comme ne vivant plus , & des Perriers
étoit mort avant l ’année 1544 , du vivant de
François I ; il fe tua lui-même d’un coup d’épée
dans, un accès de folie. Ceux de ces contes , qui
ne font pas de lu i, font attribués à Jacques Pelle
tier, qui donnant, en 15 5 8 , une édition des
contes de des Perriers, a pu en inférer quelques-
uns dé lui ; on croit auffi qu’il y en a plufieurs
de Nicolas Denifot, peintre & poète célèbre de ce
même fiècle. Le modèle de la jolie fable de la
Laitière & du Pot-au L a it, dans la Fontaine , fe
trouve, & même avec la plupart des agrémens
de la copie , dans la quatorzième nouvelle de
Bonaventure des Perriers. ..Le conte des Lunettes
du même poète, eft tiré aufîî de la nouvelle
foixan te-quatrième de des Perriers.
* PÉRIGORD. ( Voyeç T aleyrand. )
PERINGS-KÏOLD, ( Jean) (# //?. litt, mod.) fa vant
Suédois, antiquaire du roi de Suède, auteur d’une
Hifloire des rois du Nord, & d’une des rois particuliers
de Norwège, & de Tables hijloriques ~ &
chronologiques, depuis Adam jufqu'â jèfus-Chrlfl,
en Suédois. Né dans la Sudermanie en 1654.
Mort en 1720.
' PÉRIZONÏUS , ( J acques ) ( Hiß. litt. mod. )
favant, laborieux, très-connu par fes Animad-
rerfio'nes hifloricoe ,. & par fes Origines Babylonïcoi
6* Ægyptiacce , où il réfute le chevalier Marsham.
Il eft auteur encore de differtations fur divers
points de l’hîftoire Romaine , & de plufieurs autres
ouvrages moins importans ou moins connus.
Il étoit né à Dam en 1 6 5 1 , avoit été difciple de
Cuper & de Groevius ; il mourut en iy iç , à
Leyde, où il étoit profeffeur d’hiftoire, d’éloquence
& de la langue Grecque.
P E R K IN , dit W A R BEC K ou W A E R B E E C K ,
{H iß . d’Angl. ) .impofteur ou réputé t e l, qui
difputa la couronne à Henri V I ! , prétendant
être le duc d’Y o rck , fécond fils d’Edouard IV ,
& qu’on croyoit avoir été immolé avec Edouard
V fon frère , par le cruel ufurpateur Richard III.
Perkin étoit réputé fils d’un Ju if, nommé Osbeck.
Edouard IV avoit eu des liaifons avec fa mère
& avoit été parrein de Perkin : ce fut4, dit-on h r e ffem b lan c e d e c e jeu n e h om m e a y e c
Edouard, qui le fit juger propre à repréfenter 'e
duc d’Yorck. La ducheffe douairière de Bourgogne
, foeur d’Edouard IV , retirée dans les P. ys-
Bas , prit la peine d’inftruire elle-même Perkin
en fecret ; elle le £•: enfuite voyager , dirigeant
toujours fa marche , & quand elle jugea la con-
jondure favorable , elle le fit paroître en Irlande,
pays dévoué à la maifon d’Y b r ck , ou plutôt ennemi
de quiconque -régnoit en Angleterre. C ette
princefle.étoit fi'paflionnée pour le fang d’Y o r c k ,
dont elle fortoit, & fi implacable ennemie du nom
de Lancaftre, qu’elle haïffoit jufqu’à la reine
d’Angleterre, Elifabeth d’Y o rc k , fa nièce, pour
avoir époufé un Lancaftre dans la perfonne du
roi Henri V II ; on appelloit la ducheffe de Bourgogne
la Junon perfécutrice de ce prince. Dans le
defir général qu’elle avoit de lui nuire, elle avoit
déjà favorifé un autre impofteur, Lambert Simnel,
fils d’un menuifier ou d’un boulanger; Henri V II
-l’ayant vaincu & fait prifonnier, fe contenta de
le faire fervir dans fa ctiifine comme marmiton.
Charles VUI» roi de France, alors mécontent
de Henri V I I , s’empreffa d’envoyer des ambaf-
fadeurs à Perkin pour l’inviter de fe rendre à fa
cour ; il s’y rendit & y reçut tous les honneurs4’
dus au titre qu’il prenoit. La paix d’Etaples obligea
bientôt Charles V II I de l'abandonner ; mais
toutes les follicitations de Henri ne.purent engager
Charles à le lui livrer. Perkin fe retira en
Flandre, auprès de la ducheffe douairière de Bourgogne
, qui feignit de ne l’avoir jamais connu ;
affeéla des doutes , parut examiner avec d’amant
plus de fcrupule, qu’elle fentoit qu’on pouyoit
lui reprocher d’avoir un peu légèrement reconnu
Lambert Simnel pour è re le même duc d’Yorck *
elle ne.fe rendit enfin, difoit-elle , qu’à la dé-
monftration & à l’évidence ; alors elle reconnut
Perkin pour fon neveu , pour le fils & Th; ritier
d’Edouard IV . L ’archiduc Philippe-!e-Beau, fou-
verain des Pays-Bas , follicité auffi par Henri V II
de lui livrer Perkin , parut d’intelligence avec la
ducheffe de Bourgogne pour foutenir cet avan-
turier ; mais le prince qui appuya le plus ouvertement
les projets de Perkin , fut le roi d’Ecoffe
Jacques IV ; il le prit fous fà proteétion & le
mena lui-même en Angleterre, à la tête d’une
armée il ravagea le Northumherland : Perkin p
foit horreur naturelle pour la deftruélion ,
foit fenfibilité affe&ée pour gagner le coeur des
Anglois, parut s’attendrir fur le fort des malheureux
, qu’on pilloit & qu’on égorgeoit ; il conjura
, les larmes aux y e u x , fon proteâeur d’épargner
fes fujets. Cette humanité parut, déplacée :
« Vps fujets, lui répondit le roi d’Ecoffe avec
» un fouris railleur , rien n’eft encore à vous ;
» vous êtes trop tendre & trop généreux posr
” ce qui ne vous appartient pas. >? L’année fui-
vante, le. roi d’Ecoffe fit fa paix avec l’Angleterre
& abandonna Perkin que Henri V II vouloir
qu’il lui livrât, Perkin demanda à être conduit ep