
I P R I C
d’autres conditions de paix , f i n on que les biens
de la maifon dé Lancaftré'lui fuijent rendus, &
qu’il fut fait grand juge d’Angleterre. Ces con- ?
ditions furent atdép èes. L’évêque de Carliflé c©n-
feilla feulement dentaire jurer Northumberiànd fur
l’évangile & l’éiichariftie; Northumberiànd jura.
Le roi indiqué pour le lieu de fan entrevue '
avec 'e duc dé Lancaftre, le château de Flint,
& prêt à partir pour s’y rendre, il dit au comte
d* Northumberiànd j c’feft fur votre foi que je
rh’y engagé , « fongez à vos lèrmens & au Dieu
» qui les a reçus. Si je lés oublie, dit Morthum-
» bérland, traitez-moi comme lin traître. Il de- <■
manda la permiflion de prendre les derans pour
faire apprêter à fouper au roi & au duc dans' le .
château de Flint, & il ajouta: « Sire, fuivez-moi
» de près, car il eft bientôt deux heures.
Richard monte à cheval, lui vingt-deuxième,
& en delcendant une montagne , & jettant fes
regards fur la vîftlée ; n’apperçevez - vous pas là
bas -, dit-il au comte de Salisburi, dés bannières
& des pennons ? Oui, répondit le comte ; ah î
s’écria l’évêque de Carlifle, je crains que cet
homme ne vous ait trahi. En même-tems, ils
voient venir à eux le comte dé Northumberiànd,
lui douzième. S ire , dit-il, je vieiis au devant
de vous. Le roHui demande qui font ces gens'
qu’il voit là bas-dans -ta vallée ? Je n’ ai rien v u ,
dit Northumberiànd. Regardez donc , dit lé comte
de Salisburi, les voici devant voùs ; ce font vos
gens, dit l’évêque, jè reconnois votre bannière.
« Northumberiànd ! dit le ro i , fi je croyoïs que
» vous vouluffiez me trah ir,.il eft peut-être en-
» cere temps,’ je retournerais à Conwai. Vous
» n’y retournerez point , répondit le traître en
» fe démafquant, & en faififfant la bride du che-
» val du roi ; je vais vous mener au duc de Lan-
» caftfë,comme je le lui ai promis, car je ne
» viole pas toutes mes promenés ».
Il avoit en effet mis en çmbufeade au bas de
la montagne cent lances & deux cents archers,
qui furent à lui dans le moment, en fönnant de
la trompette. Le roi dit au comte : Le Dieu fu r
qui tu as mis la main , te le veuille rendre au
jour du jugement & à # tous tes complices ; & fe
tournant vers les gçris de fa fuite qui pîèuroient,
mes amis, leur- dit i l , nous fo'mrnes trahis, c’e f
le fort de la bonne foi.
On lç mit au château de Flint avec fes compagnons,
dont o n eut bientôt la cruauté de le fe-
parer ; ce fut le ai août 1399, qu’il fut ainfi trahi
& entprifonné;
Le duç de Lancaftre averti par le comte de
Northumberiànd, s’approcha du château de Flint
avec toute fon armée. Richard le voyoit du haut
de la 'terrafiê du château ; à ce fpe&acle il fe troubla
& frémit, des larmes coulèrent de fes y eux ;
il dît à fes compagnons : mes amis, l’heure approche,
ou nôüs allons être, livrés à notre çnnehii mortel.
I^ncaftf e rangea fonarinéè autour dydfi&sau.
R 1 c
Dans l’entrévue, le roi faifant un effort pour
bien traiter lè duc, .le falua & lui dit : » foyez
» 'e'bien ré venu.— -Je fuis revenu plus tôt que
» vous ne m’attendrez fj dît le . duc .; je viens vous
<c aider à gouverner 'ce royaume que, depuis
p vingt-deux ans qu’il eft fous vos Iôix, vous ne
» gouvernez pas au gré de la nation ». Il le traîna
comme en triomphe à fa fuite , & l’enferma dans
la tour de Lpndres. Suis-je votre roi ou votre pri-
fonnier, & pourquoi futs-je gardé ainfi, demanda
Richard au duc de Lancaftre ? — S ire , vous êtes
mon roi, mais 1 z confeil du royaume ordonne que
vous foyez ainfi gardé. Richard demanda la reine
fa femme : vous ne pouvez la vo ir, dit Lancaftre
le confeil l’a défendu. Richard alors réclama les
loix de la chevalerie, & offrit de fe battre feul
contre quatre de fes accufateurs ou de fes oppref-
feurs. Lancaftre ne répondit rien à cette propo-
fition, & pria feulement le roi d’attendre la dé-
cifion du parlement.—*Eh bien ! que j’y comparoiffe
du moins, daris ce parlement, & qu’on y entende mes
raifons. — Lancaftre, fans s’expliquer fur ce point, fe
contenta de répondre : Sire, il vous rendra juflice.
Le parlement s’affembla le 30 feptembre 13 9 ^ ;
Lancaftre accufe Richard, & tout le monde le condamne
fans l’avoir entendu. L’évêque de Carlisle
fut ie feul qui ofa élever la voix en fa faveur.
Eh ! mefîieurs, leur dit-ïl, vous entendriez dans
fes dêfenfes un malfaiteur , un affaflin, & vous
refnfez d’entendre votre roi, & vous ofez le condamner
! Lancaftrepour toute réponfe , fit mettre
l’évêque en prifon. On dépofa Richard, on proclama
Henri de Lancaftre; l’arrêt de.Richard por-,
toit qu’au premier mouvement qui fe feroit pour
le fecourir , il mourroit , ; on juge bien qu’il fe fit
des mouvemens pour le fecourir.
Le malheureux Richard ignoroit tout dans le cbây-
tean de Ponfret ou Pontefraél {pontïs fra fli'), où
il avoit été transféré. Un chevalier, nommé Pierre
d’Exton, ou Exton, envoyé par le roi Henri,
arriverait château de Pontfret avec fept autres
affaflïns ; Riihard éroit à table, Exton appelle
i’écuyer tranchant, & l’avertit de là part de Henri,
de ne plus faire, félon la coutume, l’effai des mets
' férvis fur la table de Richard ; ca r, dit-il, il né
mangera plus guères. Richard s’apperçoit que l’écuyer
manque à ce cérémonial, & lui ordonne de le remp
lir; l’écuyer fe jette à genoux, & lui allègue la
défenfe qu’Exton vient de lui en faire de la part
de Henri. Richard perdit patience , il frappa l’écuyer
d’un couteau de table qu’il avoit fous la main,
en lui difant avec fureur : va-Ren au diable, toi
& ton Lancafire. Exton arrive au bruit avec fes
| fepi hommes' armés aüfli bien que lui; à cette vue ,
, Richard r tpouffe la table, s’élance au milieu des
; huif àjTaflins, arrache à l’un d’eux fa hache d’armes,
s’èn fert avec fuccès contre eux , renverfe quatre
clé fës àffafiins à fes pieds, & commençoit à inti-
imîder beaucoup les autres, lorfqu’Exton l’attaquant
par derrière, lui porta .fur la tête un coup qui le
R I C
fit tomber en criant ; Exton redoubla & l’acheva. ]
Ce fut le jour des Rois 1400 que Richard fut.
afïaffiné.
3®. Richard I I I , monftre fouillé des plus grands I
crimes & le vrai Néron de l ’Angleterre, étoit !
frère puîné du roi Edouard IV , de la maifon
d’Yorck', qui difputoit encore la couronne à la ;
inaifon de Lancaftie. Henri Y I vivoit & avoit le j ;
titre de roi ; Marguerite. d’Anjou combartoit pour f î
lui & pour le jeune prince de ©ailes fon -fils. 1
Après la bataille de- Tevkesburÿ en 14 7 1 , on |
amena devant Edouard vainqueur le prince de )
Galles prifonnier. u Jeune téméraire, lui dit arro- \
gammenr Edouard, qui fa infpiré l’audace d’èn- I
« trer les armes à la main dans mon royaume? J ’at I
»> c ru, répondit le prince de Galles avec une .fer- j
meté mocîefie, pouvoir prendre les armes pour i
j) faire rendre à mon père, lin trône qui n’ap-
» par tient qu’à lui ». I l manque dùrcfceèl . s ’écrie
alors Richard, duc de Gloeeftre , qui - paroi t avoir
dès lors foncjé iur le crime les plus afirçufes efpé-
ranees; il's ’élance, en même temps avec d7autieS
?fiafiins fur le prince de Galles, quijitotnbe percé
de coups. Gloeeftre court enfuite plonger-danSile
feinde Henri V I le poignard encoré fumant du fan g
du prince de Galles; alors voyant la branche de Lancaftre
prefqu’entièremem étdinte, & hors,d’état pour
le moment de lui rien difputer, il Crut qu’il étoit
temps de porter fes coups fur’ les princes de la
maifon d’Yorck, fur fes propres frères, & de ren-
verfer toutes les barrières qui lui fermoientle trône.
Entre Edouard IV & lui étoit le duc de Clarence;
il s’attacha d’abord à aigrir Edouard contre ce
prince ,. & il y réufiit telkmënt, qu’Edouard fit
noyer Clarence dans un tonneau de malvoifie.
Edouard mourut quelques années après; on ne
crut point le duc de Gloeeftre innocent de fa mort ;
mais Edouard laiffoit deux fils & plufieurs filles,
dont il confia même en mourant la tutelle au duc
de Gloeeftre ; il reftoit auffi des' enfàns du duc de
Clarence. Tant d’obftacles n’arrêtèrent point un
tyran auffi téméraire que dénaturé ; Glocèftre fit
périr les deux princes, & enferma leurs foeurs,
après les avoir fait déclarer bâtardes, fur un de j
ces faux prétextes qui ne manquent jamais aux
grands fcélér.its ;■ il écarta plus facilement encore
les enfans du duc^de Clarence ; il fe mit la cou^-
tmine fur la lête & prit le nom de Richard I I I ;
Edouard V , fils aîné d’Edouard IV , ..eut d’abord
le titre de roi. Richard n’eut que celui de pro-
tetteur, & il affeèloit de prodiguer à Edouard V ,
qu il tenoit en fa puiflance, tous les rêfpeéfs dûs
a a majefté royale; mais il ne put faire illufion
a la reine douairière qui, effrayée du danger qui
.la menaçoir,Vétoir retirée dans l’a lyle deWeftminfter
avec le duc d’Y o rck, fon fécond f f s ; ni les protefta-
ons du proteéfeur, ni la garantie des fermens des
plus grands feigneurs, ni les prélats trompés, qui
a«»roient que cette défiance étoit auftï injufte qq’m-
R I C 567
jurteufe h ^Richard; lien ne put la pérfuader, elle
■ ne fe rendit enfin qu’à l.t menace qu’on lui fit de
la tirer par force de fon afjde .avec fon fils; elle
le confia au feul primat : « je le mets, dit-elle
fous votre garde, fous la garde de la religion;
t) vous, en répondrez à fa mère devant Dieu &)
33 devant les hommes ,3?:. Les deux princes!étant
aiiift remis au dup de Qqpcfir.e,,des difeours iuju-
rieux■ tpitt attaqupjeni leur état, fe répandent
dans le piibltÇ'; .ce n.etplt d’abord qu’un bruit lourd
ce furent bientôt des déclamations publiques, répétées
dans des1.fermons & des harangues ; 011
tfappelloit plus les p.tinces que les petits bâtards;
Richard leulj ét.qit légitime, (Sur les divers ftrata-
gémqs qu’il employa pour détruire les partifans
oes princes, voyez Wn ideHàfîing s.)V n dodeur,
ivalph Saw, put ppur texte d’un funton qu’il prêcha
publiquement dans l’eglife de Saint-Paul, les rejetions
bâtards ne profiteront point ; il dit que le feeptre
ne pouvant être porté par In enfant d’une naif-
(anceplus qu’équivoque, napparrenoit qu’au grand
prince qui favoit en iouicjiir l’éclat. Ce prince
devbtt arriver au milieu du fermon, pour recueillir
les. rruifs, de JenthoViftafnie1 qtie l’orâteur auroit
tait rrertre , ce qtti’donna lieu à .tin. incident ridicule.
Richard voulant qu’à fon arrivée le ..peuple
le .proclamai rot', crut devoir laifTer au dofleur
le temps de dtfpofer .les efpfits, mais il lui en
latffa trop : Ralph ayoit compté fur la préfence
de Richard -pour achever l’effet de fon fermon,
™ m S s n d f iB compté fur le fermon pour
préparer 1 effet de fa préfence ; Richard n’ariivoit
point. Ralbh ayant êpiiifé la matière, & fentrmt
qti an Ueu d emhonft,fme, il n’inlpïroit nue le nié-
S S % lep deêcut » craignit que l’auditoire ne fe
diflrpat, & crut neceflajre de changer de fujet.
Quand il entendit arriver Richard , il reprit Ion
éloge avec une chaleur mal-adroite qui glaça de
nouveau l audttotre; il répéta même un! apof-
trophe tjutl avoit adrefiée au ptince pendant fon
ablence n ayant pas voulu la perdre, & ayant
fiandé fur cette figure oratoire l’efpérance du fitc-
çes. Richard, au heu des acclamations qu’il atten-
y“ fuyo p le s vifagesune indignation mêlée
d efirot ; & fut oblige pour ce jour-là de renonser
a fon projet. On efiaya a.Æ fans fuccès de l’éloquence
des orateurs profanes ; enfin on prit le parti
de gagner quelques bourgeois , & de mêler dans
la foule quelques domeftiqties de Richard, déguïés
qui çnerent : vive le roi Richard! ! ce fut là fa nro-
damàtion & fon feul titre. Les amis de Richard
C- »i re ^es complues, coururent lui porter
cequ ys appelloient le' voeu public. Richard parut
étonné , remercia , rifufa , p rote il a de fa fidélité
inviolable envers le roi fon neveu ; il fallut en
venir à lui dire ay/èc une brutalité qu’il trouva
tres-obltgëante , qu’il pouvoit refufer tant qu’il
vofidroit#, maas q>ae fon refus ne pïcrfiteroit joas
i a ïe$ neveux, qiii étoient rejettés par la nation
comme bâtards; il voulut bien fe rendre