voir de près un empereur, créateur des arts utHes
dans fen pays , & réformateur de fa nation, il
le montra plus phiîolbphe encore en préférant à
tout fa retraite, & en bornant fon ambition à la
gloire littéraire: il continua,d'enrichir le théâtre
de fes pièces. Il avoit été reçu à l’académie fran-
çoife le 25 août 17 2 3 , Il mourut le 4 juillet 1754.
Il a donné au théâtre lyrique Us amours i s Ragondet
Quant à la comédie , M. d’Alembart regarde
Deftouchês comme l'inventeur du mélange des
fcènes touchantes avec les fcènes comiques dans
une même pièce, & comme le précurffur de
M. de la Chauffée à cet égard. Une différence
effèntielle entre ces deux auteurs , erf que c’eft le
comique qui domine dans les pièces de Deffouches,
& le touchant dans celles de ,la Chauffée ; mais
on trouve , dans des auteurs précédens , & même
chez les anciens, quelques traces du moins dé -
ce genre touchant, mêlé au genre comique dans
une' même pièce.
I l y a fur la comédie deJ Vambitieux de Def-
touches une anecdote allez peu connue, & que
l ’auteur a pent-etre ignorée, lui-même. Cette pièce -
fut froidement accueillie. L’auteur, qui, d’après
l’allégorie même dont la pièce étoit fufceptible,
s’en étoit promis un très - grand fuccès, ne put
retenir les premiers mouvemens de fa colère; il
bt imprimer fa pièce , & y mit une de ces préfaces
chagrines, dont l’effet hé plus ordinaire efl
de faire rire aux dépens de l’auteur, Heureufement
il avoit deux amis éclairés & zélés, qui ne dirent
pas:
Cur ego amie um
Ofiendam in nugis i? -■ i ’ •
& qui conclurent comme Horace.,*
Ha nuga feria du cent
Jn mais , dspifum femel çxceptumquc fimfirl.
Deftouches leur avoit envoyé fa préface, & les
avoit chargés de la faire imprimer. Ils fe concertèrent
; 8c jugeant bien que leur ami n’étoit pas
mier, au point de lui perfuader qu’il étôit toujours
tranquille dans fon camp aux environs de Capoue,
& vis-àvis d’Annibal, traverfoit toute l’Italie avec
des forces confidérables, aîloit à l’extrémité op-
pofée de cette contrée, accabler Afdrubaî, reve-
noit vainqueur dans fon camp, faifoit jeter la
tête d’Afdrubal dans le camp d’Annibal, & appre-
noit, de cette manière terrible , à ce terrible An- ■
j Hfbal, déjà deux fois vaincu par lu i, qu’il venoit
1 de lui enlever fa dernière efpérance. Du temps
d’Augufte, Horace difoit encore :
en état d’entendre leurs repréfentations, ils firent
la préface qu’on voit aujourd’hui à la tête de cette
pièce, & où il ne refte pas la moindre trace d’ai- |
greur. Deftouches, calmé par le temps & par ,1a
rai fon , crut avoir fait cette préface, où il retrouvoit
toutes les raifons qu’il avoit dites , & dû dire en
faveur de fa pièce ; tout au plus crut-il que fes
amis ou le cenfeur avoient retranché > quelques
traits d’humeur, il ne les en remercia point, il
ne fe plaignit point à eux, il ne fe plaignit point
<J’eux , il adopta la préface & n’en parla jamais*
NÉR.ON5 , ( Hiß. rom.) le nom des Nérons fut
long-temps cher à Romé.'Ellc confervoit avec ref-
p ea le fou veni r de ce fameux Claudius Héron,
eonful i ’an de Home 54 vainqueur d’Annibal
& d’AiUmbal , cpw , trobipifit la vigilance dupre- I
Quid debeas , 6 Roma ! Neronibus
T^fiis metaurum fiamen % Afdrubaî
Dwictus j & puleher fugatïs
Ille dies Latïo tendais
Qui primus altnâ. rifit adored
Dims per urpes afer ut It altos
- Ceu jlamma per ttedas , vel Eurus
Pgr Jiçul cquitavit undas.
Pofi hoc fecundis ufque labonbus
Romana pubes srévit, & impip
Vafiata anorum tumultu
Pana Deos habucre rc&os.
Dixitque tajidem perfidus Aànibal„\,„
Carthagini jam no* ego nuntios
Mittam fuperbos .* oeciditj oceidit
Spes omnis S- fortuna noftri
Nominis , Afdrubale interempto•
D rufu s , & fur-tout Germanicus fon fils, par
fes talens, fes vertus & fes malheurs, {voyez
l’artide G e r m a n ic u s ) ajoutèrent encore à l’intérêt
& au refpeft qu’infpiroit le nom de Néron, -
car ils étoient de la famille des Tiberius Néron ;
la famenfe X iv ie ,, femme d’Augnfte , & fille de
Livius D rufus, avoit époufé, avant Augufte, Tiberius
Néron , dont elle avoit eu l’empereur Tibère
& Drufus , qu’Augufte leur beau - père éleva
comme fes en fan s :
Videre rhetis bella fub Alpïhus
Drufum gerentem vindelici , & diù
Lateqùe viclrices eatery a g
Confiliis juvenis revicia
Senfere quid mens rite, quid indoles
Nutrïta faufiis fub pcnctralibus ?
Poffet, quid Augujli pat emus
, In puerps animus Nerones.
L ’empereur Tibère , à la vérité, répandit des
ombres fun elles fur ce nom de Néron / mais
Germanicus fon neveu, encore plus aimé que
Tibère n’étoit haï, foutint la gloire de ce même
nom.
Qu’il imite, s’il peut, Qermaniçus mou père,
i dit Agrippine dans Bntannicus.
t a def!inée déplorable des enfans de Germanicus,
iNéron Ôc Drufus, tous deux trahis par leurs ■.
femmes , (yoyeç l’article J u l ie 8c l’article L e p id a
E m il ia ) tous deux immolés, par la perfidie de '
Séjan , aux fombrés défiances de Tibère, conti- ]
jaua de répandre fur ce nom l’intérêt attaché au
malheur.
C’eû par les crimes de l’empereur Néron , que ce
nom, fi intéreffant autrefois , efl devenu
trop criminelle*, peur Convenir à un homme de
moeurS au Itères. Sa mort fie tarda pas à le j unifier
; elle prouva qu’il n’avoit fuivi Tibère à
Caprées, que pour remplir le devoir d’un ami &
celui d’un citoyen , & que fon « o t if avoit été celui
qu’énonce Brutus, dans La mon de Céfar :
Ah. ! ne le quittons point dans fes eraels defleins-î
Et fâuvons , s’il fe peac , Céfar & les Romains.
Aux plus cruels tyrans une cruelle in jure.
Mais ce nom n’étoit pas le fien. Son véritable
nom étoit Domiùits; il étoit de la race des Do-
niitius Ænobarbus; (voy<?{ l’article D o m it iu s )
il étoit Néron par Agrippine fa mère, fille de
Germanicus , & de la .première Agrippine. ( Voyc£
l’article A g r ip p in e ) Elle dit elle-même, dans
jBritannicus , en parlant de Néron :
Il fe déguife en vain , je lis'fur fon vifage '
©es fiers Domirius l’humeur trifte & fauvage ;
Il mêle avec L’orgueil , qu’il a pris dans leur fang,
La fit rté Ses Nérops qu’il puifa.dans mon flanc.
Britannicus dit aufïi à Néron ?
L ’afpeft de ces lieux oh vous la retenez, ( Tunie )
N*a rien dont mes regards doivent être étonnés.......
Ils ne no.us ont pas vus l’un•& l’autre élever,
Moi, pour vous obéir, & vous , pour me braver ;
.Et ne s'attendoient pas, lorfqu’ils nous virent naître,,
Qu'un jour Bomitius me dût parler en maître.
Sur la monârueufehifloire de ce Domitius-Néron,
voye% les articles â n ic e t , A g r ip p in e , B r i t
a n n ic u s , B ü RRHUS , Co.RB.ULON , PoPPEE.,
S o r a n u s , S en eq u e , T e îr a s e a s , &c . IndiqueTces
articles ,, c’efl :donner la lifte de fes principaux
crimes. Renvoyer àrVindex & à Galba, c’eft en indiquer
le châtiment. On (ait comment La longue patience
du genre humain fe lajfa enfin, &ave c quelle lâcheté
mourut ce tyran qui s’étoit baigné dans le fang ;
confinent enfin fe vérifia- de point en point, la
prédi&ion que lui fait Agrippine dans Britannicus:
Mais j’éfpère qu’en fin le cie l, las de tes crimes ,
Ajoutera ta perte à tant d’autres viâimes ;
Qu’âprès t’être couvert de leur, fang &.du>mien
Tu te verras forcé de répaodre le tien.
La mort de Néron tombe à l’an 68 dé l’ère
chrétienne.,
NERVA. (H ifi. rom.)' ( Voye^ CocCEïUS )
1 ° . Coccéius Nerva-y aïeul" de l’empereiir Nerva\
étoit un perfonnage confiilaire , un jurifconfulre
célébré & un homme: de bien, quoiqu’ami d.e
'Tibère. Il accompagna cet empereur dans fa
Extraite, de Caprées , retraite trop vol.uptueufe &.
Quand il eut perds l’efpéfance, il réfolut de
quitter la v ie , Tibère en fut averti & alarmé 5
il courut chez N erva , il le conjura de vivre , il
réclama- les droits de l’amitié : vous me perde*
de réputation, lui dit il; que penfera-t-on de moi,
quand on verra mon ancien & meilleur ami fe
donner la mort fans aucun motif apparent de haïr
la v ie , & n’ayant à fe plaindre ni de la nature,
ni de la fortune? Ces inftances de Tibère fem-
bloient donner à Nerva de grands droits pour
exiger à fon tour que Tibè re, par une conduite
plus conforme à la juftice & à Fimmamté , lia
rendît ; la vie defïrable ; mais fes réflexions
étoient faites & fon parti pris de ne plus voir
les malheurs de fa patrie; il s’enveloppa dans un
profond-filence , 8c fe lai fia mourir de faim, Tibère-
avoit perdu fa confiance,
2 ° . CoccéiuS Nerva, petit-fils du précédentefl:
l’empereur Nerva. ïi -avoit été deux fois conful,
l’an 7 1 de Jéfus-Chrift, avec Vefpafien , 8c l’an po,
avec Domitien. Il eut le bonheur de fuccéder à
un tyran, & le mérite d’appeller Trajan pour lu i
fuccéder ; fon gouvernement, doux & modéré, prépara
le règne heureux & bienfaifant de fon fuc-
cefTeur. Il eut bien dès défordres à réparer il
ne les-répara pas tous, mais il commença l’ouvrage
; il rappella les bannis, il punit les délateurs*,
il jura publiquement de ne faire mourir aucun
fénateur , 8c il tint parole, même à l’égard de
Calpurnius Craflùs, qui avoit confpiré contre lui;
On a dit de lui, comme de Titus, qu’ayant fait affeoir
les conjurés à côté de lui à un fpe&acle, il leur
avoit remis les épées des-gladiateurs, qu’on lui
prefentoit félon Fufage, en leur'difant d’exécuter
leur complot, s’ils le-voüloient, ou s’ils ©foient :
ceux qui-ont quelque ufàge de l’hiftoire, favent.
combien les biftoriens font fujets à reproduire les
mêmes faits fous des noms differens, pour peu
qu’il y ait quelque analogie entre les caractères”'
Nerva efl aflèz voifin du temps de T itu s , pour
; qu’il ait pu y avoir à cet égard confufion de
perfonnes dans la mémoire des biftoriens. La violence
dès foldats diï prétoire ne permit pas à-
Nerva de fe livrer à toute fa bonté; ils regrei-
toient Domitien , eâr la* tyrannie efl toujours^-
favorable à la licence * ils-eiifermèrent Nerva dans
fon palais , & lür demandèrent, à grands- cris,, la:
môrt des meurtriers- de Domitien :. s’ils ne Fob—
fmrèflt- pas y ils n’-ei>. égorgèrent pas moins, leurs