
ni le fang du coupable qu’on exigeoît, mais fa
converfion & Ton retour à la vertu.
C’eft ce qui fait que dans l’antiquité on a blâmé
les prifons des monaftères, parce qu’il arrivoit
qu’on y portoit fouvent les châtimens au-delà
des juftes bornes d’une févérité prudente. La
règle de faint Benoît ne parle point de prifon,
elle excommunie feulement les religieux incorrigibles
on fcandaleux, c’eft-à-dire, qu’elle veut
qu’ils demeurent féparés du refte de la communauté,
mais non pas fi abfolument privés de tout
commerce, que les plus anciens & les plus fages
ne doivent les vifiter pour les exhorter à rentrer
dans leur devoir, & enfin que s’il n’y a point
d’efpérance d’amendement, on les chafle hors du
monaftère. Mais on ne garda pas par-tout cette
modération ; des abbés non contens de renfermer
Jeurs religieux dans d’affreufes prifons, les faifoient
nmtiler, ou leur faifoient crever les yeux. Charlemagne
par fes capitulaires, & le concile de Francfort
en 785 , condamnèrent ces/ excès par rapport
à l’abbaye de Fulde. C’eft ce qui fit qu’en 8 17 ,
tous les abbés de l’ordre, atfiemblés à A ix - la -
Chapelle, ftatuèrent que dorénavant dans chaque
monaftère, il y auroit un logis féparé pour les
coupable», confiftant en une chambre à feu &
une antichambre pour le travail, ce qui prouve
que c’étoit moins une prifon qu’une retraite,. Le
concile deVerneuil, en 8 4 4 , ordonna la prifon
pour les moines incorrigibles & fugitifs. On imagina
une efpèce de prifon affreufe , où Ton ne
voyoit point le jour, & comme ceux qu’on y
renfermoit dévoient ordinairement y finir leur
v i e , on l’appella pour ce fujet, vade in p ace.
Pierre le vénérable dit que Matthieu, prieur de
Saint - Martin - des-Champs à Paris, fit conftruire
un fouterrain en forme de fépulcre, où il renferma
de la forte un religieux incorrigible j fon
exemple trouva des imitateurs. Ceux qû’on mettoit
dans ces fortes de prifons y étoient au pain &
2 l’eau, privés de tout commerce avec leurs confrères
& de toute confolation humaine, enforte
qu’ils mouroient prefque tous dans la rage &
le défefpoir. Le roi Jean à qui on en porta des
plaintes, ordonna que les fupérieurs vifiteroient
ces prifonniers deux fois par mois, & donneroient
outre cela permiflion à deux religieux, à leur
choix, de les aller vo ir, & fit expédier à cet
effet des lettres-patentes, dont il commit l’exécu-
* tion au fénéchal dë~Tou1oufe & aux autres féné-
chaux de Languedoc où il étoit alors. Les mineurs
& les frères prêcheurs murmurèrent, réclamèrent
l ’autorité du pape; mais le roi ne leur ayant
laiffé que l’alternative d’obéir ou de fortir du
royaume, ils affectèrent le parti de la foumiftion ;
ce qui n’empêche pas que dans certains ordres
il n’y ait toujours eu des prifons monaftiques
très-rigoureufes, qui ont confervé le nom de
Vade in pace, -
Comme 1*S> évêques ont une jurifdi$ion contentieufe
& une cour de jùftice qiTon nomme
officulité, ils ont auffi des prifons de l’officialité
pour renfermer les eccléfiaftiques coupables, ou
prévenus de crimes. Parmi les pwifons féculières
on peut en diflinguer plufieurs fortes. Celles qui
font deftinées à renfermer les gens arrêtés pour
dettes, comme le Fort-l’Evêque à Paris; celles
où l’on tient les malfaiteurs atteints de crimes de
vol & d’affaffinat, telles que la Conciergerie, la
Tournelle, le grand & le petit Châtelet à Paris,
Newgate à Londres, &c. les prifons d’état, comme
la Baftille, Vincennes, Pierre-Jincife , le château
des fept Tours à Conftantinople, la Tour de.
Londres; les prifons perpétuelles, comme les îles
de Sainte-Marguerite, & enfin les maifons ée
force, comme Bicêtre, Charenton, Saint-Lazare ;
ces dernières ont pour chefs des direâeurs ou
fupérieurs. Les prifons pour les criminels d’état
ont des gouverneurs, & les premières ont des
concierges ou geôliers, auffi les appelle-t-on dans
plufieurs ehdroits, la geôle & la conciergerie. Dans
prefque toutes les prifons, il y a une efpèce de
cour ou efplanade, qu’on nomme préau oupréhau ÿ
dans laquelle on laiffe les prifonniers prendre l’air
fous la conduite de leurs geôliers, guichetiers &
autres gardes. ( A . R . )
P R IS T A F , f. m. {Hiß. inod.) nom que les
Mofcovites donnent à un officier de la cour du
czar, chargé de la part du prince de recevoir
fur la frontière lesambaffadeurs & miniftres étrangers,
de les défrayer & de leur procurer des
voitures à eux & à leur fuite ; c’eft ce que nous
appelions un maréchal-de-logis de la cour, (A . R . }
PRITZ ( J e a n -G eorge ) P ri tins & P ri f ms )
( Hiß. litt. mod. ) un des auteurs des journaux de
Leipfick, depuis 1687 jufqu’en 1698. On a de
lui des fermons, une morale , des travaux fur
l’écriture fainte & d’autres livres de piété ; on
lui doit une bonne édition des oeuvres de faint
Macaire, une édition des lettres de Milton, des
traductions, des compilations , &c . Né à Léipfick
en 1662 , mort à Francfort fur le Mein en 17 3 2 .
PROBUS ( M. A urelius Va l e r iv s )H iß . rom.)
empereur Romain , étoit de Sirmich en Pannonie,
d’une famille peu connue. Il avoit paffé fa première
jeuneffe à cultiver des jardins, foit que ces jardins
fuffent à luis foit que l’état de fa fortune l’oblî -
geât de prendre foin de ceux d’autrui. Il embraf-
fa enfuite la profeffion des armes, s’y diftin-
gua, parvint au tribunat. Il fervit alors avec plus
d’éclat encore fous les régnés de Valérren, de
Gallien, de Claude, d’Aurélien. Ses couronnes
civiques, colliers, bracelets, lances & autres orne-
mens militaires, prix de la valeur & de la victoire
atteftoient fes heureux & nombreux fervices.
Aurélien vouloit le nommer fon fucceffeur à l’em-
pireÿdl le fut un an après de l’empereur Tacite
en 276. Ce furnom de Probus qu’on favoit être
Texpreffion la plus fidèle de fon cara&ère , con-
tribua^ beaucoup à fon cleCtion & la fit univcr*
fellement approuver ; il eut cependant pour concurrent
le frère de l’empereur Ta c ite , Florien , qui
porta deux mois ce titre d’empereur, & qui voyant
l’infériorité de fon parti, finit par fe faire ouvrir
les veines ; il eut encore trois autres concurrens
dans le cours de fon régné qui dura fix ans.
i Q. Saturnin , qui fut proclamé malgré lui, vers
Tan 2 8 0 , par les Egyptiens, & qui après avoir
affez fincèrement refufé, parut fe prêter par crainte
ou par ambition aux voeux des rebelles ; il fut
vaincu, puis affiégé & tué dans le château dA -
pamée, au grand mécontentement de Probus qui
déclara qu’il lui auroit pardonné.
20. Bonofe proclamé par les légions de la Gaule,
dont il avoit'le commandement. Son plus grand
talent étoit de boire beaucoup fans s’enivrer. Ses
affaires prenant un mauvais tour, il fe livra au
défefpoir, & fe pendit. Probus difoit de lui qü’il
étoit né pour boire & non pour v iv r e , & il lui
fit cette épitaphe : ici pend une bouteille & non un
homme.
30. Proculus, proclamé par les légions de la
Germanie, comme Bonofe, par celles de la Gaule.
Proculus fe piquoit d’être en galanterie, ce que
Bonofe étoit en ivrognerie. Il écrivoit un jour
que de cent filles Sarmates qu’il avoit prifes à
la guerre, dix avoient perdu par lui leur virginité
en une feule nuit, fie que toutes Tauroiènt
perdue dans quinze jours. Il étoit François d’origine.
Les Germains le livrèrent eux-mêmes pour
obrenir le pardon de leur révolte.
Probus eut à combattre pendant fon règne plufieurs
peuples barbares qui s’étoient répandus dans
les Gaules, nommément les François auxquels il
tua fur les bords du Rhin , en 2 7 7 , jufqu’à quatre
cent mille hommes dans divers combats, les Bourguignons,
les Vandales, &c . Il en délivra entièrement
les Gaules & une partie de la Germanie,
& les repouffa jufqu’au delà du Necker & de
l’E lbe , après leur avoir repris foixante & dix
grandes ville s, dont ils s’étoient emparés. Quelques
peuplades des barbares auxquelles il avoit donné
la Thrace à repeupler, s’étant révoltées , il les
battit en 280. Il fit auffi la guerre aux Perfes & à
Vararane , leur ro i, avec affez de fuccès.
La France, l’Efpagne , la Hongrie , lui doivent
leurs plus fameux vignobles; dans l’intervalle des
guerres, il en faifoit planter à fes foldats ; il exhor-
toit & enceurageoit fur-tout les habitans des di-
verfes contrées à multiplier ces plantations.
Des foldats qu’il employoit aux environs de
Sirmich, fa patrie, à deffécher des marais, fe révoltèrent
contre lui & le tuèrent en 28 2 , l’accu-
fant d’avoir dit qu’il efpéroit que l’empire pourroit
bien-tôt fe paffer de foldats ; cependant un général
q u i employoit fes foldats, non-feulement comme
guerriers, mais encore comme ouvriers, étoit plu*
éloigné de s’en paffer qu’un autre, mais c’etoi*
fans doute de ce fécond emploi que venoit leur
mécontentement & c’étoit à ce fécond emploi que
Probus déûroit de les réduire.
Aucun de fes predéeeffeurs n’avoit dans un
temps fi court rien fait de fi grand ni de fi utile
à l’empire. Egal en gloire à Aurélien , il le fur-
paffoit en vertus. L’empereur Julien lui reproche
feulement un peu de févérité. L ’armée même qui
s’étoit révoltée contre lui, honorant fa mémoire,
lui érigea un monument avec cette épitaphe : » Cy
gît l'empereur Probus, homme vraiment digne de ce
nom : aujjî vaillant que vertueux, il fut vainqueur
également 6e de toutes les nations barbares & dtj
tous lesufurpateurs, Carus , préfet du prétoire, qui
fut élu empereur à fa place, fut foupçonné d’avoir
été le principal auteur de la révolte des troupes ,
& de la mort de ce grand prince, fous lequel
l’empire avoit repris fa gloire & fa puiffance.
PROCESSION, (Hïfl. du Pagan. & du Chrijîian.)
C ’eft dans le chriftianifme une cérémonie ecclé-
fiaftique qui confifte en une marche que fait le
clergé fuivi du peuple, en chantant des hymnes,
des pfeaumes & des prières.
L ’origine des procédions remonte aux commen-
cemens du paganifme. On repréfentoit dans leurs
procejjions le premier état de la nature. On y portoit
publiquement une efpèce de caffette qui con-
tenoit différentes chofes pour fervir de fymboles.
On portoit, par exemple, des femences de plantes
pour figne de la fécondité perdue. On portoit encore
dans les mêmes principes un enfant emmail-
lotté , un ferpent ; &c. ces fortes de fêtes s’appelr
loient orgies.
Virgile fait mention dans fes Géorgiqyes de la
proceffion ufitée toutes les années en l’honneur de
Cérès ; Ovide ajoute que ceux qui y affiftoient
étoient vêtus de blanc, & portoient des flambeaux
allumés. Il eft encore certain que les payens fai—
foieot des proceffions autour des champs enfemen-
cés , & qu’ils les arrofoient avec de l’eau luftrale.
Les bergers de Virgile en font tous glorieux, &
difent en chorus :
Et càm folemnia vota
Reddemus nymphis, & eàm lujlrabimus agros,
A Lacédémone, dans un jour confacré à Diane »
on faifoit une prociffion folemnelle. Une dame des
plus confidérables de la ville portoit la ftatue de la
déeffe. Elle étoit fuivie de plufieurs jeunes gens
d’élite qui fe frappoient à grands coups. S i leur
ardeur fe ralentiffoit, la ftatue, légère de fa nature,
devenoit fi pefante que celle qui la portoit,
accablée fous le poids, ne pouvoit plus avancer.
Auffi les amis & les parens de cette jeuneffe les
accompagnoient pour animer leur courage.
Dès le temps i e t faint Ambroife, ces pratiques
E e e a