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a&'.on dont il étoit impoffible de deviner le motif, j
Une telle fmgularité piqua la curiofité du prince, i
qui fufpendit le-fupplice du page pour fa voir de
lui ce qu’il pouvoit avoir eu dans l’efprit, en
faifant une chofe fi contraire à l’ufage & à la
rai l'on. Prince, dit le page, on n eût jamais pour \
ta gloire une attention plus délicate ni plus généré
u f i : ce beau titre de jufie qui te difiingue entre \
tous les rois , tu allois le perdre en proportionnant
f i mal la peine à la faute, f a i voulu te le confirver
en proportionnant moi-même le crime à la peine.
On devine la morale de ce conte. Nouchirvan
lui fit.grâce. Ce prince vivoit au fixième fiècle.
NOUE , ( F rançois de la ) ( Hifi. de Fr. )
gentil-homme breton, un des plus habiles capitaines
des huguenots dans les guerres civiles de
France, au feizième fiècle. Ce fut lui qui furprit
Orléans en 1567. Il commandoit l’arrière garde
à la bataille de Jarnac en 1569. I] fut fur nommé
le Sage ; parce qu’il l’étoit ; il fut auffi furnommé
Bras-de-fer , & ce furnom ne lui avoir pas été
donné par métaphore , comme il Pavoit été, dans
des temps plus anciens, à certains héros moitié
hiftoriques, moitié romanefques , pour exprimer
la vigueur de leur bras & la pefanteur de leurs
coups; il eût pu le mériter dans ce fens , mais
la chofe étoit réelle chez lui. A l’attaque de
Fontenay en Poitou, en 15 7 0 , il avoit reçu au
bras gauche un coup de feu qui lui avoit caffé
l ’os : la gangrène fe mit à la plaie ; les chirurgiens
lui déclarèrent que l’amputation devenok
néceffaire ; il avoit d’autant plus de peine à s’y
réfoudre , que , même après l’opération , la cure
reftoit encore incertaine. Jeanne d’Aîb ret, reine
de Navarre, mère de Henri I V , l’y détermina:
« Vous vous devez , lui dit-elle , au falut de vos
n frères,, & c’eft pour vous un devoir de tenter
» tout ce qui peut vous conferver pour eux.»
E lle lui tint elle-même le bras pendant l’amputation
, & à force de foins elle parvint à lui
rendre la fa nié"J pour comble de bonheur, un
artifte habile lui fit un bras de fer , avec lequel il
pouvoit tenir & gouverner 1^ bride de fön cheval,
tandis que le bras droit lui reftoit pour combattre.
Lorfque, dans la guerre qui fuivit la Saint-
Ba r th 'lem y , & qui en fut l’effet, le duc d’Anjou
faifoit le fiègë de la Rochelle en 15 73 , Catherine
de Médicis , par un rafinement qui étoit toujours
dans fon caractère , imagina de donner la Noue
aux Rochelloîs pour le leur ôter plus furement.
Libre de tout engagement, la Noue eût été fe
renfermer dans la Rochelle ; mais la cour favoit
qu’il étoit efclave de fa parole , elle fit avec lui
traitè'bizarrej elle l’envoya défendre la Rochelle
contre l’armée royale, mais fous la condition
qu’il feroit tout fon poffible pour engager
lçs Rochçllois à fe rendre, 8c qu’il les abandonner
oit s’il ne pouvoit y réuffir. La cour avoit
fans {Joute efpéré que la Noue devifntfroit fufpeét
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au1* proteftans, & qu’il en feroit plus facilement
attiré au parti catholique. Quoi qu’il en fo it, la
Noue, fidèle aux deux emplois dont il étoit chargé ,
épuifa toute fa capacité en faveur de la Rochelle ,
& toute fon éloquence en faveur de la Cour. Le
mimftte la Place, homme auffi emporté que la
Noue étoit modéré , s’indignant de ces propofi-
tions de paix , accabla la Noue de reproches ,
d’injures , &• s’oublia même jufqu’à lui donner un
foufflet. La Noue toujours tranquille, le fait arrêter
& le renvoie à fa femme, en lui écrivant :
prenez foin de la fanté de votre mari , fa tête ne f i
pas en bon état. Enfin, la Noue ayant mieux rèuffi
à défendre les Rochellois qu’à les perfuader , il
les quitta conformément à fon traité : les Rochel-
lois, affligés de fon départ fans en être abattus,
perfévérèrent dans leur réfiftance en fuivant le
plan de défenfe qu’il leur avoit tracé. Il fe trouva,
en dernière analyfe , que le calcul rafiné de la
cour n’étoit pas avantageux, & que la Noue avoit
plus nui à ces vues fubtiles par fes talens militaires
s & fes favantes difpofitions , qu’il ne les
avoit fécondées par fa négociation. En 1 5 7 8 ,
fervant, dans les Pays-Bas, les états-généraux contre
l’Efpagne, il fit prifonjiier, à la prife de Ni-
nov e , le comte d’Egmont. Il fut fait prifonnier
lui-même en 1580 , & ne recouvra fa liberté
qu’au bout de cinq ans : il en fit ufage pour combattre
la Ligue. Les Ligueurs ayant entrepris le
fiége de Senlis en 15 8 9 , la Noue effaya de faire
entrer dans la place des munitions & des vivres,
mais ni les marchands ne vouloient en fournir
fans argent, ni les traitans avancer de l’argent ;
la Noue engagea fes terres. Il fut tué au fiége de
Lamballe en 1 5 9 1 , toujours en fervant Henri IV .
Il étoit né en 15 3 1 . On a de lui des difeours
politiques & militaires plusieurs fois imprimés.
Amiraùlt, miniftré proteftant, a écrit fa vie.
Odet de la Noue, fon fils, fervit Bien Henri IV ,’
8c fut cher à ce bon prince , qui lui dit un mot d’un
grand 8c bon exemple, accompagné d’une a&ion
jufie & louable. Des fergens avoient faifi les
effets de la Noue ; celui-ci s’en plaignit au roi ,
alléguant qu’il s’agiffoit d’engagemens pris par fon
père pour le fervice du roi (peut-être à ce fiége
de Senlis, dont nous avons parle, ) la Noue croyoit
fes plaintes fi jufies qu’il ne balança pas à les
faire en public. La Noue , lui dit le roi , auffi
en public , il faut payer fis dettes , je paie les
miennes; il le prit enfuite en particulier, & lui
donna fes pierreries pour lés engager aux créant
ciers. Odet ,de la Noue mourut vers 16 18 . On a
de lui des poèfies chrétiennes.
La Noue eft auffi le nom d’un fameux financier ,
pilorié & envoyé aux galères en 1705. Son fafte
avoit bleffé les yeux du public ; un palais qu’il
avoit bâti étoit devenu dans Paris un grand objet
de curioficév Quelqu’un qui vouloit tout vo ir ,
appercevant une porte .qu’ on n’ouvroit pas, demanda
ce que ç’étoit, on lui répondit que ç’étoit
un
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#n e f i aller dérobé ; o u i , reprit l’autre ,comtne tohl j
le refie. |
Je an S au v é de la Noue, a&eur froid, mais intelligent
j poète éne rg iq ue , mais quelquefois bour-
foufflé. Sa tragédie de Mahomet I I e ut du fncces
& en mériroit ; fon Retour de Mars a auffi de la
réputa tion ; (a Coquette corrigée en a plus encore.
O n dit dans un bon diélionnaire moderne, dont
il faut re le ve r les fau te s, précifément parce qu’il
efi b o n , que cette pièce re çut quelques applau-
diffemen- fur le théâtre italien oii elle fut jouée ,
& qu’elle devroit paroître fur le premier théâtre
d e la nation, c’eft-à-dtre, à la comédie françoife.
C e lu i qui a fait cet article n’ a jamais vu jou er la
Roquette corrigée ; elle n’a jamais é té jouée qu’à la
comédie françoife ; c’étoit la Noue lu i-m êm e qui
jouoit le principal rôle dans la nouveauté.* cette
pièce vient d’être remife au même théâtre en 17 8 6 ,
& d’y réuffir beaucoup mieux en co re , parce que
le rôle de la Noue a été joué par un a&eur bien
fnpérieur à la Noue, 8c que le rôle de la Coquette
a auffi été joué fupérieurement , dans fes deux
pa rtie s, par une a&rice charmante. C e qui a pu
caufer l’ erreur que nous re le vo n s , c’eft qu’une
pièce à .peu p rè s du même titre , la Coquette fixée,
a été jouée avec un fuccès affez éclatant à la comédie
ita lienne , & que cette pièce eft le chef-
d’oeuvre de fon auteur, l’abbé de V o ifen o n ,c om m e
la Coquette corrigée paroît l’être de la Noue. Un e
autre fau te , mais qui n’eft peut-être que d’imp re f-
fio n , dans le même a r t ic le , c’ eft qu’ on dit que la
Noue débuta le 1 4 mai 1 7 5 a , à Fontainebl au ;
c ’eft en 17 4 a . 11 étoit né à Meaux en 1 7 0 1 ; il
mourut le 1 j Novembre 1 7 6 1 . On a de lui encore
Zèlifca , comédie-ballet, repréfentée à la cour le
3 mars 17 4 6 .
N O U R R Y -, ( Don Nicolas le ) ( Hifi lia.
mod.j bénédi&in de la congrégation de S . M aur ,
a d o n n é , en fociété a v e c don G a re t , l’édition de
Caffiodore , avec don Je an du Chefne , don Ju lien
B e lla ife , puis ave c don Jacques F r ich e s , celle
d e S. Ambroife ; f e u l , l’Apparatus ad bïbliothe-
çam patrum. I l difpute à L aâance , dans une dif-
fertation particulière , le traité de monibus perfi-
cutorum. Les fa vans ri’ont point adopté fon opinion.
N é à Dieppe en 16 4 7 , mort à Paris en 17 2 4 .
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N O Y E R , (A nne-MargueritePetit, femme
DE M D U ) { 'H i f i . litt. m c d . ) ( mme qui n’appartient
à l’hiftoire que parce qu’elle eft l’auteur d ’un
liv re intitulé : Lettres hiftoriques d3une dame de P a r is
à une dame de province. ( e s lettres ne font pas fans
quelque agrément ; des provinciaux les lifent encore
, & fe croient très bien inftruits des anecdotes
de Paris & de la cour , fous le règne de
L o u is X IV . Nous croyons ici qu’ ils fe trompent,
& M . de Volta ire q u i, dit-on , avoit été amoureux
Hifoire. Tome IF ,
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d’une fille de madame du N o y e r , affure qu’il ne
faut point ajouter foi à fes récits. Son mari étoit
un bon gentil-homme; elle étoit de la famille du
P. Cotton : qu’importe ? elle étoit née proteftante ,
avoit abjuré , étoit retournée , dit-on , au protel-
tantifme : qu’importe encore ?
NO Y ER S , ( d e ) Miles ( H fi. de Fri) maréchal
de France fous Philippe le-Bel 8c fes fueceffeurs ,
fut auffi porte-oriflatnme 8c grand-bouteiller ; il
portoit l’oriflamme à la bataille du Mont Caffel,
en 13 28 , fous Ihilippe de Valois; il avoit été
un des exécuteurs du teftament de Louis-Hutin ,
en 13 16 . Il mourut fort â g é, en 13 50 . Il étoit
d’une bonne & ancienne famille de Bourgogne,
dans laquelle ce nom de miles, en latin , foldat ou
chevalier, étoit comme héréditaire ; elle tiroitfou
nom de Noye rs, de la ville de Noyers en Bourgogne.
No y e r s , ( d e s ). Poy^SuBLET.
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NUMA-POMPILLIUS. {H ifi. rom.) Il vivoit
fage 8c tranquille à la campagne , lorfque les
Romains après la mort de Romulus , vinrent
lui offrir leur couronne : un Tefus modefte montra
d’abord combien il étoit digne de cet honneur ;
il l’accepta enfin fur lès remontrances de fon père
& de fes concitoyens. Le règne de Romulus
avoit été un règne de guerre , c’e ft- à - dire , de
brigandage : Romani , dit Eutrope , confuetudine
praiiorumjam latrones ac femi-ba:bariputabantur. celui
de Numa fut le règne de la paix , des loix 8c des
moeurs. Numa fut le fondateur de Rome pour la
religion & la légiflation : il inftitua les pontifes ;
s’il n’rnfiitua point les veftales , il régla leurs fonc.
tions ; il étabüt auffi les féciaux ou hérauts d’armes.’
& d’autres hérauts pour les cérémonies de la religion
; il bâtit des temples; il réforma & adoucit
les moe’irs des Romains ; il leur infpira l'amour
de la paix, de l’ordre, du travail, de la frugalité
, de la pauvreté ; il répandit les femences de
ces grandes vertus qui diftinguèrent Rome dans
les temps heureux de la république ; il diflribua
4e peuple en différentes claffes, félon les arts &
métiers ; il recommanda & encouragea l ’agriculture
; il réforma le calendrier, ou plutôt, il le
forma; car, quetoît-ce qu’une année à laquelle
il fallut d’abord ajouter deux mois entiers? il fallut
enfuite réformer (on calendrier; mais c’étoit beaucoup
alors de favoir compofer , comme il le fit
l’année de 365- jours , & mettre en ufage pour
le refie, des intercalations qui, au bout de vingt-
quatre ans , ramenoient les années à un point
jufie. r
S’il trompa les hommes en fuppofant des entretiens
myftérieux avec la nymphe Egérie, il
paroît du moins que ce dit toujours pour leur
bien, Bellum quidem nullum geffit, dit Eutrope