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vembre 16 2.7 , le ciel étant très-ferein, il vit
tomber vers les 10 heures du matin , fur le mont
Vaifien , entre les villes de Guillaumes & de
Peine en Provence , une pierre enflammée qui
paroifloit avoir 4 pieds de diamètre ; elle étoit
entourée d’un cercle lumineux de diverfes couleurs,
à-peu-près comme l'arc-en-ciel : fa chûte
accompagnée d’un bruit femlHàble à celui de plu-
fieurs canons que l’on tireroit à la fois. Cette
pierre pefoit 59 livres ; elle étoit de couleur obf-
cure & métallique, d’une extrême dureté. L a pe-
fanteur étoit à celle du marbre ordinaire, comme
*4 à 1 1 . Si l’on examine ces différens exemples,
on conviendra qu’il n’y a rien que de naturel
dans ces pluies de pierres r apportées dansles anciens.
La pluie de fer qui tomba dans la Lucanie , “
l’année qui précéda la mort. & la défaite de Craf-
fus , fut regardée comme un prodige dans cette
province; & peut-être aux environs du Véfuve
n’y eût-on fait aucune attention, ces peuples étant
accoutumes dans ces cantons à voir fouvent tomber
des Hiarcafiites calcinées, femblables à ce que
l’on nomme mâchefer; car le fer qui tomba en
Lucanie etoit de cette efpèce : fponeiarum fetè
fimilis, dit Pline.
Quelquefois un ouragan a pouffé des corps
pefans du haut d’une montagne dans la plaine.
Telle étoit cette pluie de tudes ou de -briques cuités,
qui tomba l’année de la mort de T . Annius Milo ,
lateribus cotfis pluijfe.
A l’ég:rd de cette pluie de ‘chair dont Pline
parle au même endroit.,-& qu’il dit être tombée
plufieurs fois , il n eft pas facile de déterminer
la nature des corps que l’on prit pour de la chair ,
n’ayant aucune relation 'circonftanciéè : on peut
cependant affurer que ces corps n’étoient pas de
la chair, puifque ce qui refta expofé à l’air ne
fe corrompit pas, comme Pline l’obferve au même
^lieu.
_ Quant aux pluies de fanç, on eft aujourd’hui
bien convaincu qu’il n’y a jamais eu de pluie de
fang, & que ce phémomène ne vient d’ordinaire
que d’une grande quantité de certaines efpèces de
papillons qui ont répandu des gouttes d’un fuc
rouge fur les endroits où ils ont paffé, ; ou que
ce font feulement de petits- pucerons aquatiques
qui fe multiplient pendant l’été dans les canaux
& foffes bourbeux, en fi grande quantité qu’ils
rendent la furface de l’eau toute rouge. On a bien
raifon de penfer qu’il ffen a pas fallu davantage
pour donner lieu au vulgaire ignorant de croire
qu’il a plu du fang ; & pour en tirer toutes fortes
de préfages finiftresl Mais ces généralités quoique
très-yraies, ne fuffifent pas aux h attira liftes ; ils
ont examiné tous ces faits attentivement, & ont
communiqué au public le détail de leurs découvertes.,
dont voici le réfultar.
U eft très-ordinaire aux mouches, & à toutes
fortes de papillons, tant diurnes que noéhimes,
qu’après s’être dégagés de leurs enveloppes de
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nymphes & de chryfalides, & que leurs ailes fe
font déployées & affermies, au moment qu’ils
fe difpofent à voler pour là- première fois, ils
jettent par la partie poftérieure quantité d’humeurs
furabondantes , dont la fecrétion syeft faite lerf*
qu’ils étoient encore en nymphes & en chryfaï-
lides. Ces humeurs ne reffemblent en rien aux
excrémens de ces infe&es ; elles font de différentes
couleurs, & il y en a très-fouvent de rouges
parmi, les papillons diurnes : telles font , par
exemple, celles de là petite chenille épineufe
qui vit en foçiété fur l’ortie. ;
Les chenilles de ces papillons & d’autres, quand
elles doivent fubir leurs changemens, s’écartent
de la plante qu’elles habitent, & fe fufpendent
; volontiers aux murailles lorfqu’it y en a dans le
voifinage.. C’eft ce qui a fait qu’on a trouvé'contre
les murailles ces taches'rouges qu’on a prifes autrefois
poùr des gouttes de pluie de fang.
M.. de Peirefc eft , fi je' ne me trompe , le
premier qui s’eft donné la peine d’examiner ce
phénomène ; & au mois de juillet de l’an 1608,
on affura qu’il étoit tombé, une pluie de fang. Ce
récit le frappa êc l’engagea à ne rien négliger
pour l’éclairciffement d’une ch.ofe aufli fingulière.
Il fe fit montrer ces groffes gouttes de fang à la
muraille du cimetière de la grande é.gïife d’A ix ,
: & à celle des maifons de bourgeois & des pay-
| fans-de tout le diftriél, à un mille à la ronde. Il
| les confidéra attentivement ; & après un mûr
examen , il conclut que toutes les folies qu’on
débitoit de cette pluie dé fang , n’éroient qu’une
fable. Cependant il n?en avoit point encore découvert
la caufe ; un hafard la lui fit trouver. If
avoit renfermé dans une boîte une belle & grande
chryfalide. Un jour il entendit qu’elle rendoit un
fon; il ouvrit la boîte, & il en. fortit incontinent
un beau papillon .qui s’envola, laiffant au fond
de la boîte une affez groffe goutte rou^e.
Il avoit paru dans le, Commencement du mois
de juillet une grande quantité de ces papillons.
D ’oi^ M. de Peirefc concluoit. que ces taches,
rouges qui paroiffoient fur les m u ra le s , n’étoient
autre choie que les excrémens de ces infeéles*
Il fut confirmé dans fa conjecture en examinant
les trous dans lefquels ces fortes d’infeétes fe cachent
ordinairement. D’ailleurs il remarqua que
les murailles des maifons du milieu de la ville
où les papillons ne volent point, n’avoient aucune
de fes taches; on n’en voyoit que fur celles
qui touchoient à la campagne, jufqu’où ces infeCies
pouvoient s’être avancés. Enfin , il n’en remarqua
point fur le font met des maifons, mais feulement,
depuis les étages du milieu en bas; ce qui,
eft la hauteur à laquelle ces papillons s’élèvent
ordinairement. D ’autres curieux .ont fait depuis
les mêmes obfervarions, entr’autres Becman dans
une differtation de prodig. fang.
Pour ce qui eft des pucerons aquatiques qui
multiplient dans l’été en fi grande quantité, qu’ils
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tfougîffent la furface de l’e au , nous renvoyons le
leCteur aux ouvrages de $wam ’ erdam qui eft
entré dans toüs le* détails de ce phénomène, &
qui a obfervâ ces gouttes rouges dan* la plûpart
des infeCtes, quand iis fe changent en nymphes.
( A / . )
■ PLUMIER, (C harles} Hiß. litt. moi. ) mi-
ninîô, favan.. en mathématiques, en phyfique,
en botanique, en hiftoire naturelle ; Louis XIV
l ’envoya trois fois en Amérique pour y chercher
des plantes médicinales* & M. Fagpr» l’avoit engagé
à y faire un quatrième voyage’ pour découvrir,
s;il étoit pofîible-, pourquoi le quinquina ,
tel qu’on i’apportoit- dès-lors en Europe, & tel
qu’on l’y apporte encore aujourd’hui, avoit moins
de vertu què celui qu’on y apportoit dans . les
commencemens ; Plumier partit quoiqu’âgé de
foixante ans, mais il mourut en route, & encore
en Europe, au port de Sainte-Marie, près de
Cadix , 'en 1706. Il étoit né à Marfeille en 1646.
On a de lui Une deferiptidn des plantes de l'Ame-
rique ; un traité des fougères de l'Amérique ; l'art
de tourner; deux dijfenations fu r la cochenille, dans
le journal des favans 16 9 4 , & dans le journal
de Trévoux 17 0 3 , &ç.
PLUTA RQUE ( Hiß, litt. anc. ) Naquit.à.Ché-
ronée , ville de Béotie , fous l’empire de Claude,
l’an de Jéfus-Chrift 48. Il eft un de ceux qui dé-
aièntent la mauvaife'réputation de ce pays
Boeotum in- craffo jurares aere natum.
On ignore le nom dè fon père. Plutarque en fait
l’éloge , il fait aufti celui de Lamprias fon ay eu l,
homme éloquent & d’uneîmagination brillante,mais
qui fur-tout à table avec fes amis devenoit fup'é-
rieur à lui-même ; il difoitque la chaleur du vin
faifoit fur fon efprit le même effet que le feu fur
l ’encens , dont-il fait évaporer ce qu’il'a de plus
fin & de plus exquis. ■
Plutarque étoit fort jeune encore , lorfque fon
mérite le fit députer avec un autre citoyen , vers
le proconful de la Province pour une affaire importante
:fon collègue refta en chemin, fk'Plutarque
remplit feul la commillion ; ç’étoit une belle oc-
cafion de‘ s’attribuer tout l ’honneur du fuccès ;
niais avant qu’il rendît compte de fon voyage
au public, fon père le prit en particulier; « gardez-
j» vous bien lui.dit-il, de dire , je fuis allé, j ai
n parlé , j raifait ; dites toujours :nous‘, affociez atout
» votre collègue, apprenez à pré venirl’envie». Plutarque
vint à Rome vers la fin del’èmpire de Vefpa-
fien , & après y être refté le ternsnéceffaire pour
s’inftruire à fond de la partie de l’Hiftoire Romaine
qu’il vouloir écrire , il retourna dans fa patrie fous
le règne oie Domitien à quarante-quâtre ou quarante
- cinq ans , & s’y fixa; on Yétonnoit qu’un
homme-, que fes talehs fembloient deftiner à
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J remplir un grand théâtre, fe bornât au féjour
î dùine fi petite ville ; défi ma patrie, dit-il, & défi
I pour Vempêcher de devenir plus petite encore , -que
! je m’y fuis fixé. Il fut archonte., c’eft-à dire ,
premier magiitrat de Cheronée, & vécut tres-
heureux dans fa patrie.& dans fa famille. Timo-
xèpe fa femme, étoit un modèle de fageffe, de
modeftie & de vertu. Il en eut quatre garçons &
une fille ; il perdit deux de fes fils, & fa fille mourut
à l’âge de deux ans. Nous avons la lettre de con-
fohtion qu’il écrivit à fa femme fur la mort de
cette petite fille ; il en fait l’éloge en véritable
père , avec toute la tendreffe & les illufions de
la paternité ; il loue en elle un caraftère plein de
bonté & d’ingénuité, fans.aucun levain de colère
ni d’aigreur , une douceur admirable, une amabilité
rare; «e lle vouloir, d it-il, que fa nour-
j> rice donnât la mammelle non-feulement aux
n enfans qu’elle ai m oit , mai3 encore aux jouets
» dont elle s’amufoir. Elle appelloit ainfi , par un
» fentiment d’humanité, à fa table particulière ,
» toutes les chofes qui lui donnoient da piaifir,
» & vouloir leur faire part de ce qu’elle ayoit de
» meilleur. »
Ici on fe rappelle le mot d’Agéfilas à un de fes
amis , qui le ftirprit allant à cheval fur un bâton
avec fes enfans : attende^ pour me condamner, que
vous Joye{ devenu père , & ce fou venir, répand un
grand intérêt fur ce que î’obfervatlon de Plu-
turque parôît d’abord offrir de puéril.
Plutarque aroit tenu école de pliüofophie à Rome
& il raconte lui-même dans fon traité de la. cu-
riofité, qu’un- jèur qu’il parloir en public, Artt-
lenus Ruftictis que Domitien. fit mourir depuis
par l’envie qu’il portoit à fa gloire, étant au nombre
de fes auditeurs , un officier de l'empereur Vef-
pafien , apporta une lettre de ce prince à cet Aru-
lenus ; qu’alors lui Plutarque s’arrêta pour donner
le temps à Arulenùs de lire fa lettre; mais que
celui-ci n’en voulut rien faire s & n’ouvrit fa
lettre qu’âprès que le difeours fut fait'& l’affem-
blée congédiée. On ignore en quel tems mourut
Plutarque ; il sut un neveu nommé Sextus , philo-
fophe d’une grande réputation, qui enfeigna les
lettres grecques à l’empereur Marc-Âurèle & qui
lui donna encore de plus utiles leçons. Sextus^-dit
Marc Aurèle lui-même dans fes réfléxions, m’a
enfeigné « par fon exemple à être doux , à gou-
» verner ma. maifon erî bon père de famille , à
» avoir une gravité fi m pie fans affectation t à
n tâcher de deviner & de prévenir les. fouhaits
» & les befoins de mes amis , à fouffrir*
» les ignorans & les préfomptueiix qui parlent
» fans penfer à ce qu’ils difent, & à me mettre
-,y à la portée de tout le monde ».
Les oeuvres de Plutarque fie divifënt en deux
claffes , les vies des hommes iliuftres , & les traités
de morale.
Nous n’avons pas toutes les vies d’hommes
iliuftres, compofées par Plutarque; il nous en
!