ordres du royaume. Les ordres convoqués refusèrent
de ratifier, & ils Sentirent dès ce moment
qu’il n’étoit pas impoffible d’établir une république
en confervant un roi.
Les fondemens en furent fettés avant la mort
même de Cafîmir ; il n’avoitxpoint de fils pour
lui Succéder; il propofa Son neveu Louis, roi de
Hongrie. Les Polonois y consentirent, mais à des
conditions qui mettoient des entraves au pouvoir
abfolu; ils avoient tenté plus d’une fois de le diminuer
par des révoltes ; ici c’eft avec des traités.
Le nouveau maître 'es déchargeoit preSque de
toute contribution ; il y avoit un uSage établi de
défrayer la cour dans Ses voyages; il y renonçoit.
Il s’engageoit pareillement à rembourser à Ses Sujets
les depenSes qu’il feroit contraint de faire, &
les dommages même qu’ils auroient à fouffrir dans
les guerres qu’il entreprendrait contre les_puiffances
Yoifines ; rien ne coûte pour arriver au trône.
Louis y parvint, & les Sujets obtinrent encore
que les charges & les emplois publics f eroiént déformais
donnés à vie aux citoyens, à l’exclufipn
debout étranger, & que la garde des forts & des
châteaux ne feroit plus confiée à des Seigneurs
Supérieurs au refte de la nobleffe, par une naiffance
qui leur donnoit trop de crédit. Louis, poffeffeur
de deux royaumes, préfèroit le Séjour de laHongrie,
où il commandoit en maître, à celui de la Polar,ne
où l’on travailloit à faire- des loix. Il envoya le
duc d’Oppelien pour y gouverner en Son nom ;
la nation en fut extrêmement choquée, & le roi
fut obligé de lui fubftituer trois Seigneurs polonois
agréables au peuple. Louis mourut fans être
regretté.
Ce n’étoit pas a fiez à l’efprit républicain d’avoir
mitigé la royauté; il frappa un autre grand coup,
en aboliffant la fucceffion, & la couronne fut '
déférée à la fille cadette de Louis, à condition
qu’elle n’accepteroit un époux que de la main de
l’état. Parmi les concnrrens qui Se présentèrent,
Jagellon fit briller la couronne de Lithuanie, qu’il
promit d’incorporer à celle de Pologne. C ’étoît '
beaucoup; mais ce n’étoit rien, s’il n’avoir fouf-
cfit à la forme républicaine. C ’eft à ce prix qu’il
époufa Hedwige, & qu’il fut roi.
Il y eut donc une république compofée de trois
ordres ; le ro i, le Sénat, l’ordre équeftre , qui comprend
tout le refte de la nobleffe, & qui donna
bientôt des tribuns Sous la dénomination de nonces..;
Ces nonces représentent tout l’ordre équeftre dans
les affemblées générales de la nation qu’on nomme -
diètes, & dont ils arrêtent l’a&ivité, quand ils
veulent, par le droit de veto. La république romaine
n’avoit point de roi ; mais dans Ses trois
ordres, ellecomptoitlesplébéiens, qui partageoient ■
la Souveraineté avec le Sénat & l’ordre équeftre ,
& jamais peuple ne fut ni plus vertueux, ni plus
grand. La Pologne, différente dans Ses principes,
a ’a compté Son peuple qu’avec le bétail de Ses
terres«. Lé Sénat <ÿïi tient la balance entre le roi
& la liberté, Volt fans émotion la fervifude de
T • tl!‘ cmmes’ au,iorlquils etoient Sarmates. rcfois Pi“ ® heureux
La république polonoife étant encore dans fon
enfance Jagellon parut oublier à quel prix il ré-
gnoit.. Un affe émané du trône te trouva contraire
a ce quil avoir iuré j. les nouveaux républicains
leurs labres!* memeS’ mireDt M e en Piè« s *vec
Les rois qui avant la révolution, décidoient
de la guerre ou de la paix, faifoient les loix, clian-
I S . s ‘ T ™ “ ’ uhtogeoient les conftitutious,
eabhfloient des impôts, difpofoient du tréfor public,
virent paffer tous ces,refforts de puiffance
dans les mains de la nobleffe, & ils s’accoutumèrent
à être contredits ; mais ce fut fous Siglfmond Au-
gulfe, au feizteme fiécle, que la fierté républicaine
ie monta fur le plus haut tou.
Ce prince étant mort fans enfans en iS 7 â , on
penfa encore à élever de nouveaux remparts à
a 1 cri .O n examina les loix anciennes ; les unes
turent reftraintes, les autres plus étendues., quelques
unes abolies, & après bien des difeuffions,
on t un decret qui portoit que les rois n'bmmés
par la nation', ne tenteroient aucune voie pour fe
donner un fucceffeur, & que conféquemmenr ils
ne prendraient jamais la qualité d'héritiers' du
royaume ; qu’il y auroit toujours auprès de leur
perfonne feize fénateurs pour leur fervir de con-
leil, & que fans leur aveu, ils ne pourraient ni
recevoir des miniftres étrangers, ni en envoyer
chez dautres princes; qu’ils ne lèveraient point;
e nouvelles troupes , & qu’ils n’ordônrieroient
point a la nobleffe dé monter à cheval Sans l’aveù
de tous les ordres de la république ; qu’ils n’ad^
mettroieht aucun étranger an confeil de la nation,
oc qu ils ne leur cônférerôient ni charges, ni di-
gmtés , ni ftirofties, & qu’enfin ils ne pourroièrit
point Se marier, s ils n’én avoient auparavant obtenu
la permiffion du Sénat & de l’ordre équeftre..
T ut 1 interrègne Se paffa à Sé prémunir contre
ce quon appelloit les attentats du'trône. Henri de
Valois Sut révolté a fon arrivée de ce langage républicain
qui dominoit dans toutes les Æ m b lé e sde
etat> ^a religion protêftante étoit entrée dans le
royaume Sous Sigifmond I , & Ses progrès augmen-
toient à proportion dès violences qu’on exerçoit
contr’elle. Lorfque Henri arriva à Cracovie, on
y favoit que Charles IX , Son frère, vendit d’affaf-
finer une partie de Ses Sujets pour en convertir, une
autre. On craignoit qu’un prince élevé dans une.
cour fanatique & violenté, n’en apportât l’efprit;
on voulut l’obliger à jurer une capitulation qu’il
avoit déjà jurée en France en préfence des am-
bafiadeurs de la république , & Sur-tout l’article
de la tolérance, qu’il n’avoit juré que d’une façon’
vague & équivoque. Sans l’éloquent Pibrac, on
ne Sait s’il^ eût été couronné, mais quelques mois
après, le caftellan de Sendomir Offélenslci fut
chargé, lui fixième * de déclarar à Henri fa prechaîne
dépofitiotl, s’il ne rempliffoit plus exactement
les-devoifs du trône. Sa fuite précipitée termina
les plaintes de là nation , & Son règne.
C’eft par tous ces coups de force, fryppés en
différens temps, que la Pologne s’eft conferve des
rois Sans les craindre. Un roi tee Pologne à Son
Sacre même, & en jurant les pafia conventa, dif-
penfe les Sujets du Serment d’obéiffancè, en cas
qu’il viole les loix de la république.
La puiffance (égiflative réfide effentiellement
dans la diète qui fe tient dans l’ancien château de
VarSovie, & que le roi doit convoquer tous les
deux ans. S’il y manquoit, là république a le pouvoir
de s’affembler d’elle-même; les diétines de
chaque palatinat précèdent toujours la diète. On
y prépare les matières qui doivent Se traiter dans
l’affemblée générale , & on y choifit les repré- :
fentans de l’ordre équeftre , c’eft ce qui forme
la chambre des nonces. Ces nonces ou ces tribuns
font fi facrés, que fous le règne d’Augnfte I I ,
un colonel faxon en ayant bleffé un légèrement
pour, venger une infulte qu’il en avoit reçue, fut
condamné à mort & exécuté, malgré toute la
proteéfion du roi ; on lui fit Seulement grâce du
bourreau ; il paffa par les armes.
Pour connoître le Sénat.qui eft l’ame de la diète ,
il Saut jetter les yeux Sur les évêques, les palatins
, & les câ'ftellans. Ces deux dernières dignités
ne font pas auffi connues que l’épifcopat : un
alatin eft le chef de la nobleffe dans fon palatinat.
1 préfide à fes affemblées; il la mène au champ
électoral pour faire fes rois, & à la guerre lorsqu’on
affemble la pofpolite ©u l’arrière-ban. Il a auffi
le droit de fixer le prix des denrées , & de régler les
poids & mefures ; c’eft un gouvernement de province.
Un caftellan jouit des mèmès prérogatives
dans fon diâriâ: , qui fait toujours partie d’un
palatinat, & il repréfente le palatin dans fon ab-
fence, Les caftellahs autrefois étoient gouverneurs
des châteaux-forts , & des villes royales. Cès
gouvernemens ont paffé aux ftaroftes qui exercent
auffi la juftice par eux-mêmes, ou par ceux qu’ils
commettent. Une bonne inftitmion, c’eft un re-
giftre dont ils Sont dépofitaires : tous les biens du
diftriâ libres ou engagés , y font confignés : quiconque
veut acquérir, acheté en toute sûreté.
On ne voit qu’un ftarofte dans le Sénat, celui
de Samogitie ; mais on y compte deux archevêques
, quinze évêques , trente-trois palatins , &
quatre-vingt-cinq caftellan s ; en tout cent trente-
fix Sénateurs.
Les miniftres ont place au Sénat Sans être -Sénateurs;
ils Sont au nombre de d ix , en Se répétant
dans l’union des deux états.
Le grand maréchal de la couronne.
Le grand maréchal de Lithuanie.
Le grand chancelier de la couronner
Le grand chancelier de Lithuanie.
Le vice-chancelier jke la couronne;
Le vice-chancelier de Lithuanie*
Le grand tréforier de la couronne.
Le grand tréforier de Lithuanie.
Le maréchal de la cour de Pologne.
Le maréchal de la cour de Lithuanie.
Le grand maréchal eft le troifième perfonnage
de la Pologne. Il ne voir que le primat & le roi
au-deffus de lui. Maître du palais , c’eft de lui que
Jes ambaffadeurs prennent jour pour les audiences.
Son pouvoir eft prefque illimité à la cour, & a
trois lieues de circonférence. Il y veille à la fureté du
roi & au maintien de l’ordre, il y connoit de tous
les crimes , & il juge Sans appel. La nation Seule
peut réformer Ses jugemens. C’eft lui encore qui
convoque le Sénat, & qui réprime ceux qui voudraient
le troubler. Il a toujours des troupes à
Ses ordres.
Le maréchal de la cour n’a aucun exercice de
jurifdiétion que dans l’abferice du grand maréchal.
Le grand chancelier tient les grands Sceaux ; le
vice-chancelier les petits. L ’un des deux eft évêque
pour connoître des affaires eccléfiaftiques. L ’un
ou l’autre doit répondre au nom du roi en polonois
ou en latin Selon l’occafion. C ’eft une
çhofe Singulière que la langue des romains qui
ne pénétrèrent jamais en Pologne, Se parle aujourd’hui
communément dans cet état. Tout y parle
latin jufqu’aux domeftiques.
Le grand tréforier eft dépofitaire des finances
de la république. Cet argent, que les romains-
appelloient le tréfor du peuple, ctrarium populi ,
la Pologne Se gardé bien de le laiffer à la direction
des rois. C’eft la nation affemblée , ou du
moins un Sénatus-conSulte qui décide de l’emploi;
& le grand tréfontr ne doit compte qu’à la nation.
Tous ces miniftres ne reffemblent point à ceux
dès autres cours. Le roi les crée ; mais la république
Seule peut les détruire. Cependant, comme
Ils tiennent au trône , la Source des grâces , ôc
qu’ils Sont hommes, la république n’a pas voulu
leur accorder voix délibérative dans le Sénat.
On donne aux Sénateurs le titre $ excellence ,
& ils prétendent à celui de monfeigneur , que
les va lets , les Serfs, & la pauvre nobleffe leur
prodiguent.
Le chef du fénat eft l’archevêque de Gnefne,
qu’on nomme plus communément le primat, &
dont nous ferons un article à part : c’eft affez de
dire en paffant qu’il eft auffi chef de l’églife r
dignité éminente qui donne à ce miniftre de l’humble
chriftîanifme tout le fafte du trône , & quelquefois
toute fa puiffance.
Le fénat hors de la diète, remue les refforts
du gouvernement fous les yeux du roi : mais le
roi ne peut violenter les fuffrages. La liberré fe
montre jufque dans les formes extérieures. Les
fénateurs ont le fauteuil, & on les voit fe couvrir
dès que le roi Se couvre. Cependant le Sériât
hors delà diète, ne décide que provifionnellemeut,.