
OLIVA , ( J e a n ) ( Hiß. litt. mod. ) né en 1689,
à Royigo, dans les états de Venife , fut fecrétaire
du conclave après la mort du pape-Clément X I ,
en 1 7 2 1 . Le cardinal de Rohan , Armand-Gafton,
qui le connut dans ce conclave, fe l’attacha ,
l ’amena en France , & le fit Ton bibliothécaire.
L ’abbé Oliva mourut à Paris le 19 mars 1757.
Ses ceuvres divexfes ont été publiées en 1758.
OLIV ARÈS. (C a s p a r de G u zm a n , coin te d’ )
[Hiß. d'Efpagns) Le comte d'Olivarès étoit duc
de Sanlucar ; on le nommoit en confèquence le
comte-duc. La maifon des Guzman dont il étoit,
eft une des plus grandes 8c des plus confidérables
de l’Efpagnç, Olivarès étoit ie Richelieu de l’Ef-
pagne fous Philippe IV. Son niiniftèie , comme
celui du cardinal de Richelieu, eut de l’éclat & de
la force , il eut aijfiî de la durée; mais il arriva
au comte d'Olivarcs ce qui dut arriver cent fois
au cardinal de Richelieu, d’être difgracié, Richelieu
& Olivarcs déployèrent l’un contre i’autre
tous leurs talens; leurs maîtres éroient en guerre,
mais la rivalité n’étoir point entre les fouversins
ni entre les nations, elle étoit entre les miniftres ;
c’étoient Richelieu & .Olivarcs qui étoient rivaux,
non Louis X III jScPhilippe IV , -
Balzac rapporte que“ Le cardinal de Richelieu
ayant écrit au comte d’Olivarcs : Votre 1res humble
& bien affetliorlriêfervheur; le comte d'Olivarès ne le
lui pardonna jamais, & qud ce mot bien affectionné
coûta la vie à deux cents mille hommes. Voilà donc
à quels grands intérêts les peuples font immolés.
L e comte d1 Oliv ares avoir fupplahté le dut
d’Uzéda j & acquis tomela confiance dé Philippe IV ,
en le fervant dans fes amours. Le cardinal de Richelieu
fe chargëoit de donner à Louis X III des
maîrveffes & des favoris fous la feule condition
qu’on le laiffât feul maître des affaires.
Les rois qui ne gouvernent pas rendent refpon--
fables des événemens les minières qui gouvernent.
Le cardinal de Ri dre lieu ayant joué plus adroitement
ou plus heureufement , mourut- en places,
peut-être parce qu’il fe momoit depuis long-temps,
& parce que fon maître fe mouroit auffi. La
perte de la Catalogne & du Portugal renvetfa
le comte-duc d'Olivarcs; il périr par la guerre,
ayant voulu la guerre. On fait de quelle manière
adroite il s’y prie pour apprendre à Philippe JV
la révolution qui Venoit de fe faire dans le Portugal,
en faveur du duc de Bragancè. Il félicita le
roi fur l’acquifirion que la couronne venoit de
faire des grands biens de la maifon de Bragancè ;
le roi ayant demandé l’explication de ce difeours:
u C’eft, répondit Oliv ans , que cet étourdi de
» duc de Bragancè s’eft laiffé perfuader par une
» poignée de rebelles, de fe faire couronner roi
y> d? Portugal; 8c vojià par fa rébellion , tous fes
v biens confifgués de droit.» Le roi fentit l’importance
de la nouvelle, & ne reçut point le compliment
dp fon minifire. Il le laifià quelque temps
en place , pour voir s’il pourrait réparer fes fautes
ou fes malheurs; mais voyant que les événemens
continuoient d’être contre lu i , il prit enfin le
parti de le renvoyer fix femaines après la mort
du cardinal de Richelieu, au moment, dit M. le
préfident Hénault , où Olivarcs, délivré de fon
plus redoutable rival, aurojt pu rétablir les affairés.
Il alioit être rappellé, ajoute le même préfident
Hénault, « fi le duc n’eût pas précipité fes efpé-
» rances ; c a r , en voulant le juftifier par un écrit
» qu’il publia, il offenfa plufieurs p'erfonnes puif-
» fan tes, dont le reffentiment fut tef, que le roi
» jugea à propos de l’éloigner encore davantage ,
à en ie confinant à Toro , où il mourut de chagrin
» en 1643. »
Il avoir été marié ,t.rois fois, 8c ne laiffa point
d’en fans.
OLIVET, ( J oseph T houllier d’ n; (H i j l .lit t .
mod.) naquit le 1e1 avril 1682. « Il étoit fort ik.ro-
j> bufre d’ame & de corps, »dit M. Batteux, ( e a
recevant à l’académie M. l’abbé de Condillac, lue*
eeffeur de M. l’abbè d 'O liv e t ) & quand on eût
» voulu , ajoute-t-il, lui donner une éducation
» molle, il l’eut repouifée par fon cara&ère. » Il
fut élevé par fon père, depuis confeiller au parlement
de Franche-Comté. Il eut un oncle, jéfuite
célèbre ; il fut jéfuite lui-même jufqu’à trente-
trois ans, il renvoya l’habit affez brufquement,
après avoir foliieité trop long-temps à fon gré la
permifîîon de le quitter.
Occupé ‘de l’enfeignement pnblic~pendant cet
intervalle, il fe donna cette fécondé éducation
don? là premier« n’eft jamais qu’une ébauche. Il
effaya fes talens dans divers genres ; il fut p o è te ,-
il fut prédicateur, il crut dans la fuite devoir iaiffer
la poéfie aux Defpré aux& aux Racines, la prédication
aux Bourdalou es & aux Mafiîllons ; il fe
livra tout entier à ce genre mêlé de littérature
& de philofophie, qui nourritl’ame & qui l’exerce;
il s’attacha particulièrement à Cicéron , parce.qu’il
ne trouvoit nulle part une fourçe ti vive , fi pure,
fi abondante de morale & de goût.
Quelque temps avant fa fortie des je fui tes, on
voulut lui confier l’éducation du prince des Aftu-
ries ; il aima mieux venir à Paris vivre dans le feiri
des lettres; il fë fit en peu d’années une telle réputation
, que, « lorfqu’il étoit occupé à rendre
» les derniers foins à un père mourant, l’aca-
» démie le choifir, abfent, par la feule corifidé-
» ration de fon mérite. Il n’eut befoin que d’un
» ami pour répondre à l’académie de fon defir. »
L’étude de la langue françoife devint alors,
dit M. l’abbé Batteux, fon amour de préférence,
fa penfée habituelle ; il fut toujours ennemi des
innovations dans la langue , parce qu’il croyoit
que la naiffance d’un mot étoit ordinairement la
mort d’un autre. Il fit la guerre à tout ce qui
lui paroiffoit affe&ation ou bel efprit ; connu de
Deijpréaus, ami de l’abbé Fraguier, de Boivin ,
des Daciers, de tous ceux qui avoient époufé la ]
querelle des anciens; il ufoit de temps en temps f
de leurs armes contre MM. de la Motte & de '
Fontenelle . . Loin d’aiguifer aucune de fes
penfées, il en eut brifé la pointe pour la rapprocher
du fimple bon fens. -
M. l’abbé d'Olivet a continué l’hiftoire de l’aca-
déinie françoife depuis 16 5 2 , jufqu’en 1700. Il
a lutté contre Peliffon, en donnant à fon ouvrage
une forme plus difficile; 8c il n’a pas eu moins
de fuccès. Son traité de la profodie françoife ,
fes efiais de grammaire ont été accueillis du public.
On connoît la précifion & la finsfie de fes remarques
fur Racine. « Quel travers, abfurde, dit M. l’abbé
Batteux, « d’aller prendre ces remarques pour
» un aiffe d’hoftilité, & de vouloir venger Racine
» d’un hommage qu’on lui rendoit ! »
• Ce fut le.hafard qui fit l’abbé d'Olivet tradu&eur.
Il s’étoit chargé de revoir quelques tradudions de
M. de Maucroix; fa manière de les revoir , fut
de les refaire d’un bout à l’autre , & il les donna
cependant au public fous le nom de M. de Maucroix.
Lorfque dans la fuite, dit fon panégyrifte, il voulut
revendiquer fon propre bien, il eut à combattre,
& fut obligé de produire fes titres.
Mais pourquoi avoit-il publié ces tradudions
fous le nom de Maucroix , ou pourquoi les réclama
t-il dans la fuite ? Se propofoît-il de les
Iaiffer à Maucroix, fi elles rfeuffent pas reuffi, 8c
ne les réclama-t-il qu’à caufe du fuccès ?
Sa tradudion des entretiens de Cicéron fur la
nature des dieux, & l’édition qu’il donna du fameux
traité de M. Huet, de la foibleffe de V-efprit
humain, lui tittirèrent des démêlés fâcheux, &
l’engagèrent' à brûler une hifioire de l’académie
d’Athènes , qui auroit été le pendant de celle de
l’académie françoife.
Ce fut la cour d’Angleterre qui propofa d’abord
à l’abbé d'Olivet la magnifique 'édition qu’il a
donnée de Cicéron. « Il montra les lettres à M, le
» cardinal de Fleuri ; & oubliant les riches pro-
» meffes de l’étranger, il confacra à l’éducation
» de monfeigneur le dauphin le travail qu’il eût
» offert au duc de Cumberland. Quand cet ouvrage
» long 8c pénible fut achevé , on lui donna une
» penfion de 1500 livres fur la caffette. Il fut plus
» flatté, ajoute M. l’abbé Batteux , de cette dif-
» tin&ion , que d’une récompenfe. »
Le pape Clément X I à Rome , Newton &
Pope à Londres , le traitèrent avec une-diftinâion
qui fuppofoit une haute eflime 8c une réputation 1
peu commune. Il avoit l’accès le plus familier
chez le cardinal de Fleuri, L ’évêque de Mirepoix
l’écoutoit avec confiance. Ces deux prélats furent
plus d’une fois étonnés de fon zèle pour les autres
& de fon indifférence pour lui-même. Une demande
à faire lui eût plus coûté que fes defirs
à modérer.
« Dès que M. l’abbé d’Olivet fe fentit affoiblir ,
n il fit la revue de fes papiers 9 8c fupprima , dit j
toujours M. Batteux, » tout ce qui pouvoir pa-
» roître inutile à un efprit, peut-être trop près
» du terme pour apprécier ces objets. Cette ri-
» gueur nous a privés de quantité de détails fur
» fa vie, & de plufieurs morceaux intéreffans pour
u les lettres. »
Ce fut à l’académie que M. l’abbé d'Olivet fentit
les premières atteintes de la maladie qui l a enlevé.
« Il vit fon danger, 8c en parla fans détour, comme
» d’un événement qui ne l’auroit point regardé :
» ce /air, cette nuit, quand on voudra ; f a i tout prévu.
» Il conferva cette égalité d’ame jufqu’à la fin ;
» fans ennui dans la même fituation pendant deux
v mois; fans plainte dans fes douleurs; parlant
v fouvent de Dieu avec confiance, & des lettres
» par diffra&ion. Il mourut ainfi dans la fécurité
v d’un homme qui a fait un ufage légitime de
» fes talens, 8c qui n’a rien à effacer dans fes
v écrits. Il eft mort le 9 oftobre 1768 , âgé de
» 87 ans. »
y ç ilà ce que l’amitié a dit de M. l’abbé d'Olivet
dans une occafion même où elle étoit obligée de
louer. L’hiftoire réduite à toute fa fincérité, ou
fe permettant même fi l’on veut un peu de malice
, l’a moins bien traité dans les éloges des
académiciens de M. d’Alembert, dernière partie
de l’hiftoire de l’académie, auffi piquante 8c aufii
agréable que les deux premières, malgré leur ancienne
réputation, font fèches 8c froides. On y
parle de; fon extérieur peu attirant, 8c prefque fait
pour repouffer ceux qui n’y étoient pas aguerri?.
On lui attribue des principes de goût peu fûrs ,
d’ailleurs exclufifs 8c fuperiïitieux ; Cicéron feul
étoit fon oracle parmi les anciens , Defpréaux
feul parmi les modernes. « Il fembloit r é p ^ r .
» fans ceffe à tout ce qui L’environnoit, i’eipèce
» de cri "de guerre qu’il a fait retentir dans une
» de fes harangues académiques : Life£ Cicéron,
» lifcx Cicéron. 11 difoit de M. lhomas: I l a trop
» lu Tacite. »
Dans le temps qu’il étoit encore jéfuite, fous
le nom du P. Thoullier, il eut le bonheur de
rendre un fervice d’ami à Defpréaux , qui dès-lors
l’appelloit déjà mon illuflre père, quoiqu’il n’ait pu
avoir que vingt-neuf ans à la mort de Boileau.
L e père le Te Hier , qui n’aimoit pas ce poète à
caufe de fes liaifons avec Port-Royal, affeéîoit
de le croire l’auteur d’une mauvaife fatyre oui
couroit alors contre les jéfuites, parce que c’étoit
un moyen de,le perdre dans l’efprit de Louis X IV ;
le père Thoullier ne négligea rien pour pei fuader
de l’innocence de Boileau, ce père le Tellier ,
Q u i lu i -m êm e c r a i g n o i t d e fe v o i r d é t r o m p é .
^ La réponfe du P. le Tellier a des traits curieux.
«Ce s difeours, tenus en particulier, dir-sl,
en parlant du défaveu de Boileau que le Père
Lhoullier lui atteftoit , n’empêchent point que
j> le public ne continue à lui attribuer ces v e rs .