
Quelqu'un ne veut-il point empêcher cet homme de i
commettre des aidions f i indignes ? "Un de Tes amis
lui demanda s’il n’avoit rien à mander à fon fils ? !
oui fans doute , dit-il ,~c efi de ne Je foavenir jamais !
de l ’injuflice des Athéniens. Après ce dernier mot,
il avala la ciguë, & mourut. C’êtoit le jour d’une
proceflion publique , & elle paffoit devant la pri-
fon ; les uns en pafiant, arrachèrent leurs couronnes
& les jerrèrent par terre ; les autres fondirent
en larmes à la vue de la piifon ; tous les
gens-de bien n’appelloient Pkocion que l ’homme
de bien, Ses ennemis firent ordonner par le peuple
que fon corps feroit porté hors du territoire de
l’Attique, & qu’aucun Athénien ne fourairoit de
feu pour fon bûcher. L'ne femme du pays de
jMégare lui rendit ces derniers honneurs, lui éleva
un cénotaphe , recueillit fes os avec grand foin ,
les porta la nuit dans fa maifon, les enterra fous
fon foyer , en prononçait ces paroles religieufes :
Cher & facré fo ye r , je mets en dépôt dans ton fein
ces précieux refies d ’un homme de bien ; confèrve-les
pour les rendre un jour au tombeau de fes ancêtres
quand les Athéniens feront devenus fâges.
Ce fut une prophétie : les Athéniens devinrent
fages , ils le repentirent d’avoir opprimé un fage ;
fes os furent enterrés avec honneur aux dépens
du public ; les Athéniens érigèrent à Phocion-une
ftatue de bronze , & fes adulateurs fubirent la
peine qu’ils méritoient. « Mais les juges, s’écrie
à ce propos un hiftorien trè s - fen fé , les juges
s> punirent dans les autres leur propre crime &
j> s’en crurent quittes pour une ftatue de bronze. »
On place la mort de Phocion vers l’an 3 18 avant
J . C. Il avoit plus de quatre-vingt ans , lorfque
le fanatifme d’une haine aveugle'hâta fa mort.
PHOT1U S , ( Hifi. du Bas-Empire. ) auteur du
grand fchifme d’Orient, prélat fort décrié, favant
fort refpefclé ; « c’étoit, dit M, l’abbé Fleury , le
» plus grand efprit & le plus favant homme de
» fon Siècle . mais c’étoit un parfait hypocrite ,
v agiflant en fc lérat , & parlant en feint ». Il
étoit d’une des- plus illuftres & des plus riches
jnaifons de Conftantinople , petit-neveu du pa
triarche Taraif ; le Patrice Sergius fon frère ,
avoit époufé une des foeurs de l’empereur. Photius
étoit dans les lettres un homme univerfel ; fa
bibliothèque où on trouve des extraits de deux cents
quatre-vingt auteurs, aujourd’hui perdus pour la
plupart, eft un dés plus précieux monumens littéraires
de l’antiquité ; fes lettres font pleines d’érudition
& d’éloquence. Son Nomocanon , recueil
qui comprend tous les canons reçus dans l’églife
depuis les apôtres ; jufqu’à ceux du feptième concile
oecuménique , & les loix des empereurs fur
les matière^ etcléfiaftiques, eft encore un ouvrage
très-utile dans fon genre. Photius étoit en tout un
homme extraordinaire ; il étoit propre à tout & fut j
toujours employé avec fuccès. La ïc , il fut grand-
écuyer , capitaine des gardes , ambafiadeur en
Perfe, premier fecrétalre d’état de l’empire G r e c ;
brillant & fuplrîeur dans chacun de ces emplois £
ayant emlfraffé l’état eccléfiaftique, il devint le
plus grand théologien de l’empire & le plus intriguant
des prêtres ; it fit dépofer le patriarche
de Conftantinople, Ignace, pour avoir fa place ; il
employa tour-à-tour fhypoerifie , l’adreffe , la
violence. Ignace & Photius fe firent long-temps
une guerre d’intrigue , ils triomphèrent & fuccom-
bèrent tour-à-tour, auprès de divers papes , de
divers empereurs & dans divers conciles. Le pape
Nicolas I l’excommunia, il excommunia le pape
Nicolas; le conciliabule de Conftantinople en 861
fe déclara pour lui ; un autre concile de Conftami-
nople, & c’eft le huitième concile oecuménique, le
dépofa en 869. L’empereur Michel, beau-frère de
fon frère , lui fut toujours favorable ; l’empereur
Bafile, le Macédonien , le chafia du fiège patriar-
chal ; mais gagné par fes flatteries & fes artifices,
il le rétablit en 8 7 7 , & le patriarche Ignace étant
mort, le pape Jean V III admit Photius à fa communion
, ck envoya des légats à un nouveau concile
de Conftantinople , où Photius fut foleinnettement
reconnu pour légitime patriarche ; les
papes Martin I , Adrien III , Etienne V I , fe
déclarèrent abfolument contre lui, & le fchifme
fut confommé, diverfes caufes y contribuèrent. La
caufe théologique apparente fut la procelfion du
Sainr-Efptit ; elle excitoit depuis long-temps des
difputes. Le faint-Efprit procédoit-il du père feulement
, ou du père & du fils à la fois , ou du
père par le fils? l’églife feule pouvoit le favoir,
& les {impies lumières de la raifon ne fournif-
foient rienTur ce point à oppofer à fon autorité
mais l’églife grecque & l’églife latine difieroient
fur ce même point , & de doftrine & d’ufage.
Dès le régné de Pepin-le-Bref, il s’é oit tenu à
Gentilly , près Paris , un concile , dans lequel on
agita cette queftion : l’empereur Conftantin Co-
pronyme envoya des ambafladeurs à ce concile ;
ils eurent de grandes conteftations avec les légats
du pape fur cet article : mais ils fe plaignirent principalement
de l’ufage qui s’étoit introduit dans
l’égl fe de France , d’ajouter le mot filioque au
fymbole.
Cette addition du mot filioque fut encore agitée
, fous Charlemagne , dans le concile d’Aix-
la-Chapelle , tenu en 8©9„ Charlemagne, l’oracle-
des thé -Iogiens, par fa doétrine autant que par
fa puiffance, ne fe jugea pas en état de décider
la queftion ; il eut recours à la foures la plus
naturelle de lumières en pareille matière; il fit
partir pour Rome Bernard, évêque de Vormes ,
& Ad lard, abbé de Corbie, prince du feng-royal;
ils eurent, avec le pape Léon - I l , une longue conférence,
où la matière fut épuifée. Le pape déclaroit
qu’en fon particulier il étoit persuadé que le Saint-
Elprit procédoit du Fils comme du Père; que par
conféquent il approuvoit ce qu’exprime l’addition
filioque y que cependant, il n’étoit pas d’avis qu’on
fît cette addition, parce qu’elle pouvoit fournir aux
Grecs, déjà mal difpofés, le prétexte d’alléguer une
innovation, & de fe féparer de l’églife; on peu fa
en France que s’ils étoient difpofés à faifir un fi foîb'le
prétexte, ils n’en manqueroient jamais, & que le
mal étoit déjà fait, que par conféquent la condef-
cendance feroit en pure perte, que cependant le retranchement
de cette -addition donneroit lieu de
croire qu’elle contenoit une doétrine erronnée.
Le Pape infifta, & dit qu’il ne propofôit point
de faire retrancher avec éclat, cette addition, de
tous les mifleis ; mais il demanda fi on ne pourrôit
pas du moins ceffer de l’employer dans la chapelle
du R o i, fous prétexte de fe conformer 'a la pra-
t :que de l’Eglife Romaine. Nous ignorons ce que
la Cour de France penfa de cet expédient, mais
l ’àdd tion Filioque eft reftée; Rome même l’a depuis
adoptée au onzième fiécle , & le conçue de
Florence, tenu en 1055 , l’a eonfacrée. Il eft vrai
qu’alors le fchifme d’Orient étoit formé; mais les
raifons politiques influèrent plus que les raifons
théologiques dans la formation de ce fchifme. Le
patriarche de Conftantinople étoit moins jaloux
d’ôter un dégré à la proceflion du Saint Efprit que
d’en ajouter plufieurs à-la dignité, à l’autorité de
fon fiége : les patriarches précédens a voient déjà
plufieurs fois tenté d’obtenir la préféance fur Je
fiége de Rome ; cette conteftation avoit été décidée
contre eux dans un concile tenu à Conftantinople
même, fous l’empire de Théodofe; mais les prétentions
& les tentatives renaiffoient de temps en
temps avec plus ou moins de fuccès , fuivant les
circonftances. Photius, pour réuffir plus (urement,
borna les Tiennes ; il fentit bien qu’il ne pourroit
obtenir la préféance, il ne rechercha que l’indépendance
& il l ’obtint, il fe fépara de la communion
de Rome, & ne fut ni le fupérieur ni l’inférieur
des Papes, il fut leur rival.
P a r l à , je me r e n d i s t e r r i b l e à m o n r i v a l ;
J e c e ig n i s l a t i a r e , & m a r c h a i fo n é g a l .
Il fut le pape des Grecs & de l’Orient ; mais,
fii fon fiége devint indépendant de Rome, fa def-
tinée n’étoit pas indépendante des empereurs d’Orient.
Les pontifes romains firent entendre leurs
plaintes ; l’empereur Léon , le philofophe , ayant
fuccédé , en 886 , à Bafile I , les fit examiner ;
elles furent trouvées juftes, & Photius, enleyé de
fon fiége , fut enfermé pour le refte de fes jours
dans un couvent en Arménie,où il mourut en 891.
Sa mort fufpendit le fchifme & ne l’éteignit pas.
P H R
PHR A H A T E , ( Hifi. anc. Hifi. des Parthes. )
petit-fils d’Arface, fondateur des Parthes, ne fit
que paroître fur un trône dont il eût augmenté
la fplendeur, s’il eût eu un règne plus long ; également
propre à la guerre & aux affaires, il fub-
jugua les Mardes, peuples belliqueux, & jufqu’a-
lors indomptés. Il avoit plufieurs fils auxquels il
étoit libre de tranfmettre fon héritage; mais ,
attentif au bonheur de fon peuple, il leur préféra
fon frère Mithridate, dans qui il avoit reconnu
tous les talens & toutes les vertus qui
font les grands rois. Ce prince voulai t être bien-
faifant, même après fa mort, crut devoir plus
à fa patrie qu’à fes enfans. Il oublia qu’il étoit
père, & fe fouvint qu’il étoit ro i, en défignant
Mithridate pour fon fuccçffeur.
Ph r .Ahate I I , après la mort de fon père Mithridate,
qu’il ne faut pas confondre avec le fameux
roi de P ont, fut élevé fur le trône des
Parthes. Dès qu’il fut revêtu du pouvoir fupre me ,
il tourna fes armes contre la Sy rie , pour tirer
vengeance d’Antiochus qui avoit tenté de lui ravir
, ainfi qu’à fon père, l’empire des Parthes.
Son début fut brillant, il auroit pouffé plus loin
fes conquêtes, file s Scythes qu’il avoit appellés
à fon fecours ,■ ne fe fuffent point déclarés fes
ennemis. Cette révolution déconcerta fes projets.
Il fongea moins 'à faire des conquêtes qu’à défendre
fes états. Il co. fia le gouvernement de fon
royaume à un nommé Hymery miniflre fartgiii-
naire qui fit détefter fon adminiftration, & rendit
odieux le monarque qui l’avoir choîfi. Phrahate,
uniquement occupé de la guerre,, marcha contre
les barbares, à qui il livra une bataille où l’attaque
fut aufli vive que la réfiftance fut opiniâtre.
Un corps de dix mille Grecs, en qui il avoit mis
fa confiance, fut l’auteur de fa défaite. Ces Grecs
faits prifonniers dans la guerre contre Antiochus^
avoient été indignement traités pendant leur captivité
; dès qu’ils virent que la viétoire étoit longtemps
indécife, ils pafsèrent dans le camp des
Scythes, & décidèrent du fuccès de cette journée.
Phrahate, accablé par le nombre, perdit la vie
après avoir été témoin du carnage de fon armée.
Phrahate, I I I , fils d’Orode, roi des Parthes
avoit été défigné fon fucceffeur à l’empire ; ce
prince, impatient de régner , tr. uva que fon père
vivoit trop long-temps. Aveuglé par fon ambition
, il fouilla le premier jour de f@n règne par
un parricide , & par le meurtre de vingt-neuf
de fes frères , qu’il crut devoir facrifier à fort ambition
, pour n’avoir plus de concurrent à l’empire.
Tant d’atrocités le rendirent l’exécration
de fes fujets, qu’il fut contenir dans l’obéiffance
par le fpeâacle dés fupplices. Il avoit un fils
dont les vertus lui devinrent fufpeftes, parce
qu’il le voyoit aufii chéri des Parthes qu’il en étoit
abhorré. Il ne vit plus en lui qu’un criminel qui ne
cherchoit à fe concilier les coeurs que pour lui enlever
fa couronne. Ce fut pour diffiper fes foup-
çons , qu’il le fit égorger fous fesÿe.ux. Marc-Antoine
inftruit de la haine qu’infpiroient fes crimes, crut
qu’il lui feroit facile d’en triompher. Il lui déclara
la guerre fous-ftrétexte de le punir d’avoir donné
du fecoufs à fes ennemis. Il pénétra dans fes provinces,
où il trouva l’écueil de fa gloire militaire«
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