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Tirer. Il en méditoit des élémens tout nouveaux.
Il Te fignala, ainfi que M. l’abbé Gallois, par
Ton oppofirion à la géométrie de l’infini, qui
n’en a pas moins triomphé.
Il avoit eu en 1708 , une attaque d’apoplexî~.
D ’x ans après une fécondé attaque entraîna une
paralyfie dont il mourut le* 8 novembre 17 19 .
Il é'oit né le 21 avril 1652 à Ambert, petite ville
de la baffe Auvergne.
M. Rolle a voit le cara&ère 8c le ton de ceux
qui ne font jamais fortis de leur cabinet. Quand
il ouvroit une matière dans l’académie, dit M.
de Fontenelle ; il fembîoit qu?on dût fe préparer
à combattre, u Une légère différence de
» forme eut prévenu cet inconvénient. La géo-
» métrie n’a qu’un ton ; mais peut être fc-roit-
» elle bien elle-même d’en changer quelquefois
» un peu, puifqu’elle parle à des hommes.
RO L L I , ( P a u l ) Hiß. litt.mod.) né à Rome
en i 6<$7 , poète Italien célèbre, fut difciple de
Gravina : le lord Sambuck , feignuir anglais ,
favant& ami des lettres, l’emmena en Angleterre ,
où il fut attaché à la famille royale en qualité
de maître de langue Tofcane. Pendant fon féjour
à Londres , il y donna des éditions de divers
aueurs de fon pays , des fa tires de l’Ariofte ,
des oeuvres du B e rn i, du V a rch i, & c . du Dé-
-caméron de Bocace, du Lucrèce de Marchetti, &c.
Il traduifit en vers italiens le paradis perdu de
Milton , & les odes d’Anacréon. Il publia auffi
à Londres laplûpart de fes oeuvres fugitives, odes,
élégies, chanfons , épigrammes , &c. Il revint en
Italie en 17 4 7 , & mourut en 1767. Il eft au rang
des bons poètes italiens de ce fiècle.
RO L L IN, (Ch a r l e s ) Hiß. litt. moi. ) deux fois
re&eurde l’univerfité , reçu en 17 0 1 à l’académie
des belles-lettres, profeffeur d’éloquence au collège-
roÿal, homme diftingué parmi tous les.autres parie
génie de l’éducation , s il eft permis de s’exprimer
aiiîfi, eft un des plus grands hommes, & c’eft le
plus utile peut-être que Tuniverfité ait produit. Il
n’eft point affez loué par ces vers plus gais que
férié ex du temple du goût :
Non loin de lui R o llin diftoit
Quelques leçons à la jeirneflc,
Et quoiqu’en robe on i’écoutoic,
Chofe affez rare à fon efpèce.
& dans d’autres écrits de M. de V o l t a i r e i l eft
peut être trop vivement critiqué, pour avoir rapporté
, d’après des autorités graves, des faits que
la différence des temps, des pays 8c dés moeurs,
prive aujourd’hui de vraifemblance. Il eft relevé
avec plus de juftice fur certaines expreffions 8c
certaines tournures enfantines , rares d’ailleurs
dans (es écrits, 8c pardonnables à un homme
occupé , 1 oute fa v i e , du foin -tfélever des
.çâ fan s. C’eft lui q u i, en ne voulant, 8c ne
croyant quinftruire l’enfance, ? iôftruit les gens
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du monde, 8c a rendu fenfibles 8c familiers les
principes du vrai goût 8c de la faine littérature;
c’eft lui qui leur a fait connoître à fous le mérite
des anciens , 8c la pureté dù goût antique. Il a été
le précepteur du genre humain , 8c ne s’en eft pas
vanté. Car un autre éloge qui lui eft dû encore,
eft celui d’avoir été l’hotnme le plus modefte 8c
le plus vertueux de fon fiècle. Sa venu étoit aimable
5 douce, refpirant & infpi-am toujours la
modération 8c la paix, pleine d’affabilité, 8c d’aménité.
( V . les articles C o ff in , 8c fur-tout CRÉ-
v ie r . ) Cet excellent homme a été perfécuté , 8c
ne s’en eft pas non plus vanté , car H ne fe van-
toit de rien ; 8c fur - tout il évitoit de donner
de l’éclat à ce qui étoit-mal 8c à ce qui n’étoit
fait que contre lui. 'C ro iro it-o n que fon éloge
à prononcer dans l’académie d s inferiptions 8c
belles-lettres, fut une affaire d’état, 8c qu’il fut
à peine permis de dire que M. Rollin étoit vertueux,
parce qu’il étoit janfénifte ? En général,
M. de Boze eut bien de la peine à obtenir la per-
miflion de remplir, à l’égard de M. Rollin , les
obligations que lui impofoit fa place de fecréraire
de l’académie ; 8c il n’obtint enfin cette permifîîon;
long-tems folliciïée , que fous la condition exprefle
de ne louer en lui que l’homme de lettres. Il fufi-
firoit de ce trait feul pour décrier à jamais le fa-
natifme perfécuteur & il faut toujours en revenir
à rire ou à pleurer de pitié fur l’aveuglement
de ceux qui efpèrent pouvoir par ces aéies de def-
potifme en impofer même à la poftérité. Quo magis
focordiam eorum invidere libet, qui prafentipotentiâ
credunt extingui pojfe etiam fequentis ctvj memoriam.
Tacite ,. annal, lib. 4 , cap. 36.
C’eft à cette uéceffité de borner l’éloge d’un
homme tel que M. Rollin, qu’il faut attribuer en
partie , dans M. de Boze, la mefquinerie de cet
éloge, où M. Rollin ne. paroît'qu’un héros de collège
, 8c ©ù il n’eft prelque queftion que de particularités
collégiales. On a imprimé, en >771, en
2 vol. in-1 2 , les opulèples de M. Rollin ; on a
mis à la tête de ce recueil fon éloge hiftorique
par M. de Boze , 8c on y a joint des notes beaucoup
plus étendues 8c beaucoup plus inftru&ives,
où M. Rollin eft rendu à toute fa gloire.
Charles Rollin, fécond fils de Pierre Rollin, maître
coutelier à Paris , naquit dans cette ville le 30
janvier 1 7 6 1 . 8c fut deftiné, comme fon frère aîné,
à fuivre la profeffion du père, qui leur fit avoir à tous
deux des lettres de maîtrife prefque dès l’enfance.
Un bénédidin des Blancs-Manteaux démêla le
premier, dans Charles Rollin, d’heurejjfes difpc-*'
fitions pour les lettres, il en avertit fa mère ; on
lui procura une bourfe dans un collège , 8c bientôt
fes progrès rapides juftifièrent la fagacité du bénédidin.
M. Herfan , maître de M. Rollin, 8c auquel
■ ce vertueux difciple a fi tendrement 8c ft noblement
témoigné fa recennoiffance , dans fa préface
fur Quintilien,- 8c dans fon traité des étu-
, des x M, Herfan {rouvert clans cet enfant quelque
choie
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chofe de divin ; c’étoit fon expreffiofl J & il lui
renvoyoit tous ceux qui lui demandoient ou des
pièces de v e r s , ou des difeours oratoires : Adreffeqy
vous à lu i , difoit - i l , il fera beaucoup mieux que
moi.
Ses fuccès 8c l’eftime de fes maîtres lui firent
des amis illuftres. Le miniftre Claude le Pe-
letier, contrôleur-général, l’adopta en quelque
forte pour un de fes f ils , 8c en fît pour ceux-
ci un objet continuel d’émulation. Les rangs étoient
réglés entr’eux par celui de la claffe; le vainqueur,
quel qu’il fû t, recevoit de M. le Peletier la gratification
propofée pour prix de la viétoire, 8c ce
vainqueur étoit le plus fouvent Charles Rollin, fans
qu’il en fût moins cher à fes rivaux vaincus. Il
fut toute fa vie l’ami reconnoiffant 8c fidèle de
toute cette illuftre famille. M. le Peletier le miniftre
entretint toute fa vie avec lui un commerce
littéraire ; on trouve dans le recueil des opufcules
de M. Rollin, deux lettres latines adreffées par
ce miniftre à M. Rollin, alors reâeur de l’uni vérifié
: elles contiennent,*l’une, la defeription de fes
jardins de Ville-Neuve-le-Roi ; près de Choify ;
l’autre , celle des jardins de Fleury , près de Fontainebleau,
appartenans à M. d’Argouges, fon gendre,
père de ce fameux lieutenant-civil, qui l’a
été pendant plus de cinquante ans avec tant de
gloire., Les meilleurs maîtres de l’univerfité n’écrivent
pas nûeux en latin que M. le Peletier dans
ces deux descriptions ; & c’eft fans aucune flatterie
que M. Rollin eh loue la polirefle, l’élégance
& les grâces, 8c qu’il lui demande la permiftion
de les communiquer à ceux qui étoient capables
d’en juger, 8c dignes d’en jouir, ltà eft polita &
elegans ; ltà omnibus latines lingucc veneribus & gra~
fP tiis a fflu e n s . . . . vix aufusfum epiftolam tuam ojlen-
dere Herfanio nojlro, quem ilia increàïbili voluptate
& admïra twne p è r fu d it . Dans la defeription de
-Fleury, M. le Peletier peint avec vérité le fol
agrefte & dur dont ce lieu eft entouré ; ce mélange
de bois, de rochers , de fable 8c de bruyère,
qui diftingué les environs de Fontainebleau.
Tu ipfe nojli fitum regionis, temperiem aeris & gra-
tiam villa , qua rure vero barbaroque latatur. Rojîta
quippc in lata planitie , montibus undique , fed remo-
t is , cingitur, qui fummâ fu î parte pluribus fa x is ,
proceris nemoribus fficcis a renis,& trijli myried non
injucundè horrefeunt.
M. Rollin vécut dans une liaifon intime 8c familière
avec M. le premier prèfident le Peletier , fils
du miniftre, 8c dont il avoit été le compagnon
d’études. En 16 9 5 , dans la première année de fon
redorât, il envoya au petit-fils du miniftre, enfant
de cinq à fix ans, fils du premier prèfident
qui ne l’étoit pas encore, un cierge femblable à
celui que l’umverfité eft dans l’ufage de préfenter
tous les ans au premier prèfident, 8c il l’accompagna
de cette épigramme prophétique : (nous prenons
ici le mot d’épigramme dans le fens des anciens
, pour une infcnption , pour des vers faits
Hijioire. Tome IV ,
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fur un fujet quelconque ; le fage Rollin ne s’en
permettoit point dans le fens qu’on attache aujour*.
d’hui à ce mot ; )
T e manet hue fedes : fumtttum T hém is ipfu tribunal ,*
Vera cano * p a tr i d e fiin a t, in d l tibi.
C e fut une véritable prophétie d’homme înf-
piré , de poète, vates. Le père même étoit encore
éloigné de la dignité qu’on lui annon-
çoit. Cependant il fut premier prèfident douze
ans après; 8c M. Rollin a vu le fils, aïeul de
M. le prèfident de Rofambo d’aujourd’h u i, parvenu
auffi à la première préfidence.
M. le Peletier des Forts fut difciple de M.
Rollin ; lorfqu’il fut devenu contrôleur - général,
M. Rollin toujours nourri des anciens, lui envoya
pour tout compliment ce paffage de Sénèque
, qui remplit en effet l’idée d’un exceW
lent adminiftrateur des finances :
Tu quidem orbis terrarum rationes adminijlras £
tàm abflinentcr quàm aliénas , tàm diligenter quant
tuas , tàm religiose quàm publicas.
Il ne fut pas moins attaché à MM. d’Argouges
qu’à M. le Peletier ; il vivoit beaucoup à Fleury,
& on y lit cette, infeription qu’il y avoit faite
pour une très-belle fontaine qui avoit été quelà
quefois intermittente.
D ir e s aquu » m e x pttuper > aqvde fiunc rursîè abànâans j>
Sperare adverfis didici , metuijfe fecundis ,
A tq u e alïum > cunda undl flu u n t, agnofeere fo n tem .
Ses autres amis , tous vertueux * furent M :
Petit-pied , M. l’abbé Duguet ;& fur-tout M. l’abbé
d’Asfeld. Celui-ci a plufieurs fois raconté une
gaîté a fiez plaifante de foh- ami dans fa jeuneffe.
Ils paffoient enfemble dans une place publique,
où un charlatan monté fur des tréteaux, montroit
au peuple une petite flamme qui voltigeoit au-
defliis d’une liqueur contenue dans un verre , &
s’échauffant fur ce miracle, en étal oit avec em-
phafe toute la Angularité :1e peuple ouvroit de
grands yeux Sfadmiroit. M. Rollin, jeune 8c adroit,
lance une petite pierre qui coupe le verre par
la patte: la flamme, la liqueur, le v e rre , tout
difparoît, le peuple murmure, le charlatan eft:
confier n é , les deux amis fe confondent dans la
foule & ne font pas des derniers à demander quel eft
Je coupable; celui-ci avoit fait le coup avec tant de
dextérité que perfonne ne l’avoit remarqué.
Lorfque M. Herfan quitta fa chaire du collège
du Plems pour s’attacher à M. l’abbé de Louvois,
fils du miniftre, M. R ollin, qui 11’avoit que vingt-
deux à yingt-troisans,fut nommé fon fucceffeur ;
& quelques années après, en 1688, le même M.»
Herfan qui avoit la (ùrvivance d’une chaire d’éloquence
au collège - ro y a l, s’en démit encore en
faveur de M. R o l l i n celui-ci quitta fa chaire
du collège du Ple&s au bout de huit ou dix an«
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